CCII
LE roi Marsile, comme il voit Baligant,appelle deux Sarrasins d’Espagne : « Prenez-moi dans vosbras, et me redressez. » De son poing gauche il a pris un deses gants : « Seigneur roi, émir, dit-il, je vous rends( ?) toutes mes terres, et Saragosse, et le fief qui endépend. Je me suis perdu et j’ai perdu tout mon peuple. » Etl’émir répond : « J’en ai grande douleur ; mais jene puis longtemps converser avec vous : je sais que Charles nem’attend pas. Et toutefois je reçois votre gant. » Plein deson affliction, il s’éloigne en pleurant. Il descend les degrés dupalais, monte à cheval, retourne vers ses troupes à forced’éperons. Il chevauche si vivement qu’il dépasse les autres. Parinstants il s’écrie : « Venez, païens, car déjà ilspressent leur fuite ! »