XLIII
« BEAU sire Ganelon », dit le roiMarsile, « j’ai une armée, jamais vous ne verrez plusbelle ; j’y puis avoir quatre cent mille chevaliers :puis-je combattre Charles et les Français ? » Ganelonrépond : « Pas de sitôt ! Vous y perdriez de vospaïens en masse. Laissez la folie ; tenez-vous à lasagesse ! Donnez à l’empereur tant de vos biens qu’il n’y aitFrançais qui ne s’en émerveille. Pour vingt otages que vous luienverrez, vers douce France le roi repartira. Derrière lui illaissera son arrière-garde. Son neveu en sera, je crois, le comteRoland, et aussi Olivier, le preux et le courtois : ils sontmorts, les deux comtes, si je trouve qui m’écoute. Charles verrason grand orgueil choir ; l’envie lui passera de jamaisguerroyer contre vous. »