Le Songe d’une nuit d’été

Le Songe d’une nuit d’été

de William Shakespeare

Notice sur le Songe d’une nuit d’été

Le Songe d’une nuit d’été peut être regardé comme le pendant de la Tempête. C’est encore ici une pièce de féerie, où l’imagination semble avoir été le seul guide de Shakspeare. Aussi, pour la juger, faut-il ne pas oublier son titre et se livrer au caprice du poëte, qui a dû sentir lui-même tout ce qu’aurait de choquant pour un esprit méthodique et froid le mélange bizarre de la mythologie ancienne et de la mythologie moderne, le transport rapide du spectateur d’un monde réel dans un monde fantastique, et de celui-ci dans l’autre. La Vie de Thésée, dans Plutarque, et deux contes de Chaucer,ont peut-être fourni à Shakspeare quelques traits de son ouvrage,mais l’imitation y est très-difficile à reconnaître.

On préfère généralement la Tempête au Songe d’une nuit d’été. Le seul Schlegel semble pencher pour cette dernière pièce ; Hazzlitt n’est point de son avis,mais il ajoute que si la Tempête est une meilleure pièce,le Songe est un poëme supérieur à la Tempête. On trouve, en effet, dans le Songe, une foule de détails et de descriptions remarquables par le charme des vers, la richesse et la fraîcheur des images : « La lecture de cette pièce,dit Hazzlitt, ressemble à une promenade dans un bosquet, à la clarté de la lune. »

Mais est-il rien de plus poétique que le caractère de Miranda et la pureté de ses amours avec Ferdinand ? Ariel aussi l’emporte de beaucoup sur Puck, qui est l’Ariel du Songe d’une nuit d’été, mais qui en diffère essentiellement par son caractère, quoique ces deux personnages aériens aient entre eux tant de ressemblance par leurs fonctions et les situations où ils se trouvent. Ariel, dit encore le critique que nous avons cité tout à l’heure, Ariel est un ministre de vengeance qui est touché de pitié pour ceux qu’il punit ; Puck est un esprit étourdi, plein de légèreté et de malice, qui rit de ceux qu’il égare : « Que ces mortels sont fous ! » Ariel fend l’air et exécute sa mission avec le zèle d’un messager ailé ; Puck est porté par la brise comme le duvet brillant des plantes.

Prospéro et tous ses esprits sont des moralistes ; mais avec Obéron et ses fées nous sommes lancés dans le royaume des papillons.

Il est étonnant que Shakspeare soit considérénon-seulement par les étrangers, mais par plusieurs des critiquesde sa nation, comme un écrivain sombre et terrible qui ne peignitque des gorgones, des hydres et d’effrayantes chimères. Il surpassetous les écrivains dramatiques par la finesse et la subtilité deson esprit ; tellement qu’un célèbre personnage de nos joursdisait qu’il le regardait plutôt comme un métaphysicien que commeun poëte.

Il paraît que, dans cette pièce, Shakspeareavait pour but de faire la caricature d’une troupe de comédiensrivale de la sienne, et peut-être de tous ces artistes amateurschez qui le goût du théâtre est une passion souvent ridicule.

Le caractère de Bottom est un des pluscomiques de Shakspeare ; Hazzlitt l’appelle le plus romanesquedes artisans, et observe à son sujet ce qu’on a dit plusieurs fois,c’est que les caractères de Shakspeare sont toujours fondés sur lesprincipes d’une physiologie profonde. Bottom, qui exerce un étatsédentaire, est représenté comme suffisant, sérieux et fantasque.Il est prêt à tout entreprendre, comme si tout lui était aussifacile que le maniement de sa navette. Il jouera, si on veut, letyran, l’amant, la dame, le lion, etc., etc.

Snug, le menuisier, est le philosophe de lapièce ; il procède en toute chose avec mesure et prudence.Vous croyez le voir, son équerre et son compas à la main :« Avez-vous par écrit le rôle du lion ? si vous l’avez,donnez-le moi, je vous prie, car j’ai la mémoire paresseuse. – Vouspouvez l’improviser, dit Quince, car il ne s’agit que derugir. »

Starveling, le tailleur, est pour la paix, etne veut pas de lion ni de glaive hors du fourreau : « Jecrois que nous ferons bien de laisser la tuerie quand tout serafini. »

Starveling cependant ne propose pas sesobjections lui-même, mais il appuie celles des autres, comme s’iln’avait pas le courage d’exprimer ses craintes sans être soutenu etexcité à le faire. Ce serait aller trop loin que de supposer quetoutes ces différences caractéristiques sont faites avec intention,mais heureusement elles existent dans les créations de Shakspearecomme dans la nature.

Les caractères dramatiques et les caractèresgrotesques sont placés par lui dans le même tableau avec d’autantplus d’art que l’art ne s’aperçoit nullement. Oberon, Titania,Puck, et tous les êtres impalpables de Shakspeare, sont aussi vraisdans leur nature fantastique que les personnages dont la vie réellea fourni le modèle au poëte.

Suivant Malone, le Songe d’une nuitd’été aurait été composé en 1592 : c’est une des piècesde la jeunesse de Shakspeare ; aussi a-t-elle toute lafraîcheur et le coloris d’un tableau de cet âge des rêvespoétiques.

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