Les Liaisons dangereuses

Lettre CXXXVI

La Présidente de Tourvel au Vicomte de Valmont

Sans doute, monsieur, après ce qui s’est passé hier, vous ne vous attendez plus à être reçu chez moi, et sans doute aussi vous le désirez fort peu ! Ce billet a donc moins pour objet de vous prier de n’y plus venir, que de vous redemander des lettres qui n’auraient jamais dû exister et qui, si elles ont pu vous intéresser un moment, comme des preuves de l’aveuglement que vous aviez fait naître, ne peuvent que vous être indifférentes à présent qu’il est dissipé, et qu’elles n’expriment plus qu’un sentiment que vous avez détruit.

Je reconnais et j’avoue que j’ai eu tort de prendre en vous une confiance dont tant d’autres avant moi avaient été les victimes ; en cela je n’accuse que moi seule : mais je croyais au moins n’avoir pas mérité d’être livrée par vous, au mépris et à l’insulte. Je croyais qu’en vous sacrifiant tout, et perdant pour vous seul mes droits à l’estime des autres et à la mienne, je pouvais m’attendre cependant à ne pas être jugée par vous plus sévèrement que par le public, dont l’opinion sépare encore par un immense intervalle, la femme faible de la femme dépravée. Ces torts, qui seraient ceux de tout le monde, sont les seuls dont je vous parle. Je me tais sur ceux de l’amour ; votre cœur n’entendrait pas le mien. Adieu, monsieur.

Paris, ce 15 novembre 17**.

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer