Les Mille et une nuits

LXXXIV NUIT.

Sire, le grand vizir Giafar poursuivant sonhistoire : « Schemseddin Mohammed, continua-t-il, crutque le bossu extravaguait quand il l’entendit parler de cettesorte, et il lui dit : « Ôtez-vous de là, mettez-vous survos pieds. – Je m’en garderai bien, repartit le bossu, à moins quele soleil ne soit levé. Sachez qu’étant venu ici hier au soir, ilparut tout à coup devant moi un chat noir, qui devintinsensiblement gros comme un buffle ; je n’ai pas oublié cequ’il m’a dit ; c’est pourquoi allez à vos affaires et melaissez ici. » Le vizir, au lieu de se retirer, prit le bossupar les pieds et l’obligea de se relever. Cela étant fait, le bossusortit en courant de toute sa force sans regarder derrière lui. Ilse rendit au palais, se fit présenter au sultan d’Égypte, et ledivertit fort en lui racontant le traitement que lui avait fait legénie.

« Schemseddin Mohammed retourna dans lachambre de sa fille, plus étonné et plus incertain qu’auparavant dece qu’il voulait savoir. « Hé bien, fille abusée, lui dit-il,ne pouvez-vous m’éclaircir davantage sur une aventure qui me rendinterdit et confus ? – Seigneur, lui répondit-elle, je ne puisvous apprendre autre chose que ce que j’ai déjà eu l’honneur devous dire. Mais voici, ajouta-t-elle, l’habillement de mon époux,qu’il a laissé sur cette chaise ; il vous donnera peut-êtreles éclaircissements que vous cherchez. » En disant cesparoles elle présenta le turban de Bedreddin au vizir qui le pritet qui, après l’avoir bien examiné de tous côtés : « Jele prendrais, dit-il, pour un turban de vizir s’il n’était à lamode de Moussoul. » Mais s’apercevant qu’il y avait quelquechose de cousu entre l’étoffe et la doublure, il demanda desciseaux, et ayant décousu, il trouva un papier plié. C’était lecahier que Noureddin Ali avait donné en mourant à Bedreddin sonfils, qui l’avait caché en cet endroit pour mieux le conserver.Schemseddin Mohammed ayant ouvert le cahier, reconnut le caractèrede son frère Noureddin Ali, et lut ce titre : Pour monfils BedreddinHassan. Avant qu’il pût faire sesréflexions, sa fille lui mit entre les mains la bourse qu’elleavait trouvée sous l’habit. Il l’ouvrit aussi, et elle étaitremplie de sequins, comme je l’ai déjà dit : car, malgré leslargesses que Bedreddin Hassan avait faites, elle était toujoursdemeurée pleine par les soins du génie et de la fée. Il lut cesmots sur l’étiquette de la bourse : Mille sequinsappartenant au juif Isaac ; et ceux-ci au-dessous, que lejuif avait écrits avant que de se séparer de BedreddinHassan : Livrés à Bedreddin Hassan pour le chargementqu’il m’a vendu du premier des vaisseaux qui ont ci-devantappartenu à Noureddin Ali, son père, d’heureuse mémoire, lorsqu’ilaura abordé en ce port. Il n’eut pas achevé celle lecture,qu’il fit un grand cri et s’évanouit. »

Scheherazade voulait continuer, mais le jourparut, et le sultan des Indes se leva, résolu d’entendre la fin decette histoire.

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