Les Mille et une nuits

LIX NUIT.

Dinarzade ne fut pas plus diligente cette nuitque la dernière, et il était presque jour lorsqu’elle dit à lasultane : Ma chère sœur, si vous ne dormez pas, je voussupplie de m’apprendre ce qui se passa dans le beau château où vousnous laissâtes hier. – Je vais vous le dire, répondit Scheherazade,et s’adressant au sultan : Sire, poursuivit-elle, le princecalender reprit sa narration dans ces termes :

« Lorsque j’eus achevé de raconter monhistoire aux quarante dames, quelques-unes de celles qui étaientassises le plus près de moi demeurèrent pour m’entretenir, pendantque d’autres, voyant qu’il était nuit, se levèrent pour allerquérir des bougies. Elles en apportèrent une prodigieuse quantité,qui répara merveilleusement la clarté du jour ; mais elles lesdisposaient avec tant de symétrie qu’il semblait qu’on n’en pouvaitmoins souhaiter.

« D’autres dames servirent une table defruits secs, de confitures et d’autres mets propres à boire, etgarnirent un buffet de plusieurs sortes de vins et de liqueurs, etd’autres enfin parurent avec des instruments de musique. Quand toutfut prêt, elles m’invitèrent à me mettre à table. Les dames s’yassirent avec moi, et nous y demeurâmes assez longtemps :celles qui devaient jouer des instruments et les accompagner deleurs voix se levèrent et firent un concert charmant. Les autrescommencèrent une espèce de bal et dansèrent deux à deux, les unesaprès les autres, de la meilleure grâce du monde.

« Il était plus de minuit lorsque tousces divertissements finirent. Alors une des dames prenant laparole, me dit : « Vous êtes fatigué du chemin que vousavez fait aujourd’hui : il est temps que vous vous reposiez.Votre appartement est préparé, mais avant de vous y retirer,choisissez de nous toutes celle qui vous plaira davantage, et lamenez coucher avec vous. » Je répondis que je me garderaisbien de faire le choix qu’elles me proposaient ; qu’ellesétaient toutes également belles, spirituelles, dignes de mesrespects et de mes services, et que je ne commettrais pasl’incivilité d’en préférer une aux autres.

« La même dame qui m’avait parléreprit : « Nous sommes très-persuadées de votrehonnêteté, et nous voyons bien que la crainte de faire naître de lajalousie entre nous vous retient ; mais que cette discrétionne vous arrête pas : nous vous avertissons que le bonheur decelle que vous choisirez ne fera point de jalouses, car nous sommesconvenues que tous les jours nous aurions l’une après l’autre lemême honneur, et qu’au bout des quarante jours ce sera àrecommencer. Choisissez donc librement, et ne perdez pas un tempsque vous devez donner au repos, dont vous avez besoin. »

« Il fallut céder à leursinstances ; je présentai la main à la dame qui portait laparole pour les autres, elle me donna la sienne, et on nousconduisit à un appartement magnifique. On nous y laissa seuls, etles autres dames se retirèrent dans les leurs…… » Mais il estjour, sire, dit Scheherazade au sultan, et votre majesté voudrabien me permettre de laisser le prince calender avec sa dame.Schahriar ne répondit rien, mais il dit en lui-même en se levant.Il faut avouer que le conte est parfaitement beau : j’auraisle plus grand tort du monde de ne me pas donner le loisir del’entendre jusqu’à la fin.

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