Les Mille et une nuits

LXXVII MUT.

« Quand le génie, reprit le grand vizirGiafar, eut attentivement considéré Bedreddin Hassan, il dit enlui-même : « À juger de cette créature par sa bonne mine,ce ne peut être qu’un ange du paradis terrestre que Dieu envoiepour mettre le monde en combustion par sa beauté. » Enfin,après l’avoir bien regardé, il s’éleva fort haut dans l’air, où ilrencontra par hasard une fée. Ils se saluèrent l’un l’autre,ensuite il lui dit : « Je vous prie de descendre avec moijusqu’au cimetière où je demeure, et je vous ferai voir un prodigede beauté qui n’est pas moins digne de votre admiration que de lamienne. » La fée y consentit. Ils descendirent tous deux en uninstant, et lorsqu’ils furent dans le tombeau : « Hébien ! dit le génie à la fée en lui montrant Bedreddin Hassan,avez-vous jamais vu un jeune homme mieux fait et plus beau quecelui-ci ? »

« La fée examina Bedreddin avecattention, puis se tournant vers le génie : « Je vousavoue, lui répondit-elle, qu’il est très-bien fait ; mais jeviens de voir au Caire, tout à l’heure, un objet encore plusmerveilleux, dont je vais vous entretenir si vous voulez m’écouter.– Vous me ferez un très-grand plaisir, répliqua le génie. – Il fautdonc que vous sachiez, reprit la fée, car je vais prendre la chosede loin, que le sultan d’Égypte a un vizir qui se nomme SchemseddinMohammed, et qui a une fille âgé d’environ vingt ans. C’est la plusbelle et la plus parfaite personne dont on ait jamais ouï parler.Le sultan, informé par la voie publique de la beauté de cette jeunedemoiselle, fit appeler le vizir son père un de ces derniers jours,et lui dit : « J’ai appris que vous avez une fille àmarier ; j’ai envie de l’épouser ; ne voulez-vous pasbien me l’accorder ? » Le vizir, qui ne s’attendait pas àcette proposition, en fut un peu troublé, mais il n’en fut pasébloui ; et au lieu de l’accepter avec joie, ce que d’autres àsa place n’auraient pas manqué de faire, il répondit ausultan : « Sire, je ne suis pas digne de l’honneur quevotre majesté me veut faire, et je la supplie très-humblement de nepas trouver mauvais que je m’oppose à son dessein. Vous savez quej’avais un frère nommé Noureddin Ali, qui avait, comme moi,l’honneur d’être un de vos vizirs. Nous eûmes ensemble une querellequi fut cause qu’il disparut tout à coup, et je n’ai point eu deses nouvelles depuis ce temps-là, si ce n’est que j’appris, il y aquatre jours, qu’il est mort à Balsora, dans la dignité de grandvizir du sultan de ce royaume. Il a laissé un fils, et comme nousnous engageâmes autrefois tous deux à marier nos enfants ensemble,supposé que nous en eussions, je suis persuadé qu’il est mort dansl’intention de faire ce mariage. C’est pourquoi, de mon côté, jevoudrais accomplir ma promesse, et je conjure votre majesté de mele permettre. Il y a dans cette cour beaucoup d’autres seigneursqui ont des filles comme moi, et que vous pouvez honorer de votrealliance. »

« Le sultan d’Égypte fut irrité audernier point contre Schemseddin Mohammed…… » Scheherazade setut en cet endroit, parce qu’elle vit paraître le jour. La nuitsuivante, elle reprit le fil de sa narration, et dit au sultan desIndes, en faisant toujours parler le vizir Giafar au calife HarounAlraschid :

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