Naufrage des isles flottantes – Basiliade du célèbre Pilpai
d’ Etienne-Gabriel Morelly
ÉPÎTRE DÉDICATOIRE À LA SULTANEREINE.
TA HAUTESSE, Magnifique Sultane, Incomparable Houri du Monarque des Musulmans, m’a fait commander de traduire les Ouvrages inestimables du Philosophe la Lumière de l’Inde, le plus sage de tous les Visirs.
Je me suis incliné avec respect devant ses ordres ; j’en ai porté le seau sur mon front & sur ma poitrine. Tu as voulu voir les beautés ravissantes de ce Poëmedivin, travesties à la Françoise. Quelle gloire pour ma Nation& pour ma Langue, de servir d’interprète aux nobles amusemens auxquels ta grande ame se livre dans ces jardins délicieux, où tu brilles au milieu d’une foule de Graces, comme l’Astre, emblême de cet Empire, entre les célestes flambeaux !
Je ne sais, Souveraine de tant de Nations, si j’aurai dignement retracé les charmantes peintures de cet excellent Original.
Mais que TA HAUTESSE daigne agréer l’encens que les foibles étincelles de mon génie te brûlent sur cet autel,puisque tu veux & permets que les prémices de ce trésor précieux, ignoré depuis tant de siécles, te soient offerts par celui qui a eu le bonheur d’en faire la découverte.
Ici, suprême Aseki [2], meprosternant humblement, je baise le seuil de la sublime Porte quidérobe à nos foibles regards la lumiére trop vive de teséblouissans appas.