La Joie

I

M. de Clergerie n’est ni meilleur ni pire qu’un autre, mais toute grandeur l’efface, n’en laisse rien. La méfiance originelle où ses rivaux croient voir la marque de la race, l’empreinte normande, n’est que l’acte de défense d’un être faible qui serait, tour à tour et peut-être tout ensemble, l’esclave de ses admirations ou de ses haines, s’il était jamais capable d’une telle dépense de son être. En bref, il ne souhaite pas l’éclat de la renommée, il n’en veut que les profits. Entre ces mille profits que se disputent les ambitions serviles, ce sont au reste les plus petits qu’il recherche ; et sa patiente industrie sait en user avec tant d’art qu’il fait de ces bagatelles des riens désirables que ses émules enragent d’avoir jadis dédaignés. Par malheur, nul homme n’a jamais cédé impunément à la tentation de tirer parti de sa propre médiocrité, nul n’établit sa vie sur la part la moins noble de son être sans courir, un jour ou l’autre, le risque d’une sorte de déclassement moral qui lui fera connaître l’angoisse de la solitude intérieure et comme l’image contrefaite de cet exil spirituel où le génie trouve la rançon de la gloire. À mesure que l’auteur de l’Histoire du Jansénisme se rapproche du but modestement entrevu depuis l’adolescence – un fauteuil à l’Académie –, il voit se rétrécir peu à peu le cercle où il a lui-même rêvé d’enfermer son destin. La multiplicité, l’enchevêtrement de ses intrigues, atteint maintenant ce point critique, au-delà duquel toute démarche devient dangereuse, toute décision irréparable. Il a épuisé ses amitiés ; il ne pourrait même plus rien tirer d’un ennemi. Serviteur d’une ambition minuscule, en apparence inoffensive, il a fait pour elle le vide dans sa vie, et voilà que ce vide l’aspire : il s’y sent glisser comme au néant.

– Qu’est-ce qu’ils ont ? dit-il à Mgr Espelette, familier des mêmes angoisses, car il n’a pas osé présenter sa candidature à la succession du duc de Listrac et n’attend rien de bon, à la vacance prochaine, de l’inimitié du directeur de la Revue internationale. Oui, qu’est-ce qu’ils ont ? Nous n’avons commis aucune imprudence, nous avons fait pour le mieux, donné à chacun sa juste part. Enfin, nous fûmes laborieux. D’où vient qu’on se retire de nous ? Faut-il qu’un honnête homme fasse, une fois au moins, scandale, pour se ménager une vieillesse ? Hélas ! cher ami, l’ambition discrète, qui se réserve, n’est plus appréciée par personne. Je crains même qu’elle ne demeure incomprise. Aujourd’hui, qui peut se vanter d’être entendu à demi-mot ! Solliciter n’a plus de sens. On doit abattre grossièrement ses cartes, montrer son jeu.

Mais l’évêque de Paumiers le rassure :

– Cher monsieur, toute existence a sa phase critique, son point mort. On retrouve ce trait de la nature jusque dans la sainteté ; la sainteté elle-même a ses passages déserts, arides. Ne vous plaignez pas ! Le bruit fait autour de votre nouvelle union, si parfaitement assortie, va réveiller la sympathie, assurer une position qui n’a jamais été bien compromise… D’ailleurs, madame la marquise de Montanel vous apporte son influence personnelle, et quelque chose de mieux encore, l’expérience d’une femme du monde.

Ces derniers mots retombent dans le silence ; et M. de Clergerie semble ne les avoir pas entendus.

– Quel triste été ! fait-il. Je n’eusse point cru le beau temps si monotone à la longue, si accablant. Que d’orages !

Du matin au soir, en dépit des persiennes closes, on entend le crépitement presque imperceptible du gravier sous le soleil torride, et quand vient la nuit, l’espèce de brise qui monte sent la fièvre ou l’étable. Toutes les puissances du jour s’y retrouvent décomposées, ainsi que les sucs des racines et des feuilles au fond d’une eau dormante. Dans les pâturages, le long des haies encore tièdes, les taureaux normands à l’encolure courte, qui ont somnolé tout le jour, dressent lentement leur tête crépue et, frissonnant de plaisir du garrot à la croupe, aspirent cruellement cet air épais, en retroussant leurs lèvres noires.

– Je crains que la saison n’éprouve terriblement mes nerfs, confie M. de Clergerie à ses hôtes, chaque soir, à l’heure où l’on allume les lampes.

Il désire cette heure et la redoute, car l’âge ne l’a jamais tout à fait guéri de ses anciennes terreurs nocturnes. Dans un appartement désert, à minuit, il redevient l’enfant chétif, qui regarde de biais les portes closes, efface les épaules au moindre bruit. Ou, la joue au creux de l’oreiller, il écoute le battement de l’artère temporale, suppute le durcissement possible des tissus, la fatigue du cœur, une lésion. Parfois il se lève, ouvre la fenêtre, interroge le parc ténébreux, reçoit en plein visage son haleine chaude, animale. Une nuit, il a vu à l’angle d’un mur, sous la lune, la haute silhouette de l’abbé Cénabre, immobile, démesurément prolongée par son ombre. La surprise l’a tenu éveillé jusqu’au jour.

D’ailleurs, sa déception est profonde, menace réellement sa santé. Elle a des causes diverses, dont quelques-unes restent secrètes, incommunicables. Cette année, il a fui Paris dès le mois de juin, recru de fatigue, écœuré par son dernier échec à l’Académie. L’annonce officieuse de son prochain mariage faisait déjà courir à travers les salons bien pensants un petit rire, dont il a perçu l’écho, et qui l’a glacé. Des mois pourtant, à l’insu de tous, il avait calculé ses chances, pesé les avantages, les risques, résigné qu’il était par avance aux humiliations nécessaires, assuré de vaincre l’ironie ou la médisance à force de patience ou d’effacement. Et il s’est avisé tout à coup qu’une épouse est encore quelque chose de plus qu’une amie vigilante, une alliée. À mesure que le terme approche, il découvre aussi la personne de Mme de Montanel, son existence physique, et il ne baise plus qu’avec ennui, satiété, la petite main ronde à fossettes.

Jamais la maison familiale, où l’attachent un respect craintif et des habitudes plus fortes que l’amour, ne lui a paru moins faite pour la véritable sécurité, le repos. Le passé n’y vit plus, mais il semble achever d’y pourrir. L’historien en sent la menace obscure. On le voit raser les murailles, le visage prématurément flétri par une gravité sans cause. « Monsieur n’est plus jaune ici, il est vert », déplore la cuisinière Fernande. Les premiers jours surtout avaient paru intolérables, parmi les malles et les caisses, avec l’odeur des cretonnes moisies, sous le regard des domestiques, perfides et compatissants. Vainement le malheureux faisait-il ouvrir les fenêtres : le vent pouvait ronfler à travers les couloirs, le grenier retentir du grincement de la vieille charpente, l’immense demeure n’en finissait pas de s’éveiller, de redevenir vivante. Ramassée sur elle-même, on eût cru qu’elle défiait l’été précoce, le ciel déjà torride. « Je sors d’une cave pour entrer dans un four », écrivait alors M. de Clergerie à son médecin La Pérouse qui soigne depuis vingt ans ses phobies, et qu’il a d’ailleurs fini par convaincre de venir le rejoindre, dès juillet, à Laigneville, pour y essayer un nouveau traitement de la névrose d’angoisse, dont l’illustre psychiatre entend bientôt entretenir ses confrères.

Car, chose étrange, depuis trois mois, M. de Clergerie, comme éperonné par un pressentiment mystérieux, ne songe plus qu’à remplir sa maison vide. Dans sa hâte à rassembler autour de lui, vaille que vaille, ce qu’il a pu trouver d’amis bénévoles et qu’il accueille avidement pour les délaisser le lendemain, il fait penser au moribond qui tire à soi, contre sa poitrine, une présence invisible, s’en recouvre. Cette insolite marotte a donné d’abord à rire, et puis les rieurs se sont tus. Le monde aime à comprendre, ou du moins veut s’en donner l’illusion. Or, les hôtes qui se sont succédé à Laigneville ont laissé se répandre peu à peu le bruit que tout n’était pas clair là-bas. « Pourquoi ce brusque départ, si peu de temps après la mort de M. Pernichon ? a demandé le vieux Clodius Poupard dans un couloir de l’Académie des Sciences morales. Clergerie est inattaquable… Mais il a tort de prêter le flanc aux calomnies intéressées, il paraît craindre un scandale. Sa fille n’était même pas fiancée… »

Ce qui descend lentement sur le pauvre homme, ainsi qu’un brouillard du glacial novembre, ainsi que l’oubli sur un mort, c’est l’ennui. Il ennuie. Malgré tous ses soins, la grande épargne qu’il a faite de lui-même, une merveilleuse adresse, il n’aura pu prolonger jusqu’à la fin, jusqu’aux obsèques, le laborieux mensonge de sa renommée.

Mais sa vie a un autre secret, un autre principe de mort. Ce vide étrange, où achève de se perdre un labeur de tant d’années, gagne sans cesse, et voilà que le sol même manque sous ses pieds. « Chantal m’a déçu, confie-t-il à Mgr Espelette. J’attendais d’elle autre chose. Je ne comprends plus.

– Cher ami, objecte le sage prélat, je crains que depuis la mort du bon Chevance, vous ne soyez victime d’une sorte d’idée fixe. Qu’attendiez-vous donc de Mlle Chantal ? Qu’avez-vous à reprocher au saint prêtre, dont la simplicité reste, au contraire, une si grande leçon pour nous ? En dépit d’inoffensives manies, que je remarque moi-même assez souvent chez les meilleurs sujets de mon séminaire – ceux-là du moins dont l’origine est modeste –, c’était un homme sensé, qui laissait faire la Providence. Certes, discrétion n’est pas lâcheté. Cependant, que de responsabilités prenons-nous, dont de plus avisés sauraient s’épargner le fardeau ! Pour moi, il n’est ras douteux que Mademoiselle votre fille n’ait déjà donné les signes évidents de la vocation religieuse. Toutefois Dieu n’a sans doute pas dit son dernier mot à ce jeune cœur. »

Mais M. de Clergerie riposte aigrement, avec une inconsciente cruauté :

– Ne nous payons pas de formules ! Votre Grandeur sait si j’étais fier de Chancal ! L’année dernière encore Mme la supérieure de Sainte-Gudule, qui m’a élevée, me parlait d’elle en termes qui eussent rempli de joie le père le plus exigeant. Oui, il y avait chez cette enfant une espèce de force surnaturelle pour le bien : je l’ai vue en imposer à des hommes graves, qui n’ont pas l’habitude de céder à un premier mouvement irréfléchi, n’admirent qu’à coup sûr. Dans le petit cercle de la baronne Mellac, qui a bien voulu l’associer un moment à sa belle œuvre de la « Crèche sociale », elle avait séduit tout le monde : ces dames l’écoutaient comme un oracle ! Évidemment, certains scrupules ne me sont pas aussi étrangers qu’on pense ; je sais qu’une âme délicate craint la louange. J’eusse approuvé que ma fille s’effaçât modestement devant des aînées trop indulgentes, attendît, pour donner sa mesure, des circonstances plus favorables. Mais la vérité est tout autre ! M. l’abbé Chevance paraît avoir soumis la pauvre enfant à la règle de vie la plus étroite, la plus terre à terre, celle que n’importe quel confesseur propose à une pensionnaire. J’aurais cru qu’une personnalité si forte finirait par briser ce cadre. Point du tout. La chère petite y semble à l’aise… Oh ! le regard d’un père ne s’y trompe pas ! Elle y étouffe. Certains signes le prouvent assez. Oui, il y a dans chacun de ses gestes, dans son rire même qui m’est devenu presque intolérable, la marque d’une illusion volontaire, d’une innocente duplicité.

– Permettez-moi de voir en cette excessive sollicitude, un peu de complaisance paternelle, dit Mgr Espelette.

– C’est ce que vous pensez tous ! proteste amèrement Clergerie. D’où vient donc que vous partagez avec moi ce malaise, cette inquiétude ? Mais si ! Pourquoi le nier ? Avouez plutôt la singulière place que peut tenir ici, dans cette solitude, au milieu d’hommes instruits par la vie, une jeune fille en apparence aussi simple. Que nous cache-t-elle ? Que cache-t-elle à ses meilleurs, ses seuls amis ?… Quelles heures étranges sommes-nous en train de vivre ?

Mais l’évêque de Paumiers assure qu’il n’en est rien, que M. La Pérouse, sans doute, est cause de tout le mal :

– Je crains qu’il ne compromette gravement votre santé par trop de complaisance à de menus incidents nerveux, rançon de toute vie intellectuelle. On le dit lui-même fort souffrant. Dieu me garde de prendre à mon compte ce qui n’est peut-être qu’une médisance intéressée. Cependant j’ai entendu rapporter de lui des… des excentricités déconcertantes…

Il rougit, efface d’un revers de sa belle main, dans le vide, ces paroles imprudentes. Qu’importe ? La soirée prochaine sera pareille à celle qui l’a précédée, aussi morne, les fenêtres ouvertes sur la nuit d’août qui ne dort jamais. La table de bridge délaissée reste couverte de livres et de journaux ; l’unique ampoule électrique ne tire entièrement de l’ombre qu’un cercle étroit, où danse un papillon de nuit qui s’éloigne en titubant, de ses grandes ailes lasses. Depuis deux semaines le professeur Abramovitch est parti pour Prague, et on ne l’entendra plus désormais, avant l’hiver, nasiller le sanscrit, l’index rivé à son menton gras de Levantin. L’évêque de Paumiers a retenu sa place à l’hôtel du Sagittaire, à Vichy, et s’apprête à faire bientôt sa cure annuelle. La Pérouse lui-même ira présider la séance de clôture au Congrès international de psychanalyse, à Brême. Et M. de Clergerie pense, avec une secrète terreur, qu’il risque de rester seul, en compagnie de M. l’abbé Cénabre.

Le célèbre auteur de la Vie de Tauler, dont le prestige n’a cessé de grandir auprès des lecteurs, achève, en effet, de dérouter ses meilleurs amis. Lui aussi s’enfonce lentement sous les ombres. Autour de certains êtres exceptionnels, faits pour les grandes passions solitaires, l’ambition, l’avarice, les formes les plus secrètes du mensonge, l’air devient vite irrespirable, pourvu que viennent à se corrompre les puissantes réserves d’être que chacun d’eux porte en soi, et qu’ils ne peuvent épuiser que lentement, au hasard des circonstances, ou selon un plan rigoureux. Or, depuis qu’il a cessé de feindre envers lui-même, qu’il n’a plus à redresser chaque jour, à chaque moment, sa propre image, ainsi qu’en un miroir déformant, depuis que la stricte discipline de sa vie n’impose sa contrainte qu’à l’homme extérieur, le malheureux a senti se creuser un vide que le labeur acharné, presque dément de ces derniers mois, n’a pas réussi à combler : il n’a plus à nourrir son imposture, elle est en lui comme un fruit mort. Sans doute, le dernier tome de ses Mystiques florentins a surpris par une construction rigoureuse, une vigueur accrue, un certain accent volontaire qui atteint parfois à une sorte de pathétique dont on interroge en vain le mystère. Et pourtant le travail n’a pas, cette fois, comme jadis, même pour un moment, délivré Cénabre. Au contraire, l’effort a mis sa plaie à nu. Quoi qu’il feigne désormais, il s’est fait à lui-même l’aveu décisif : il ne saurait plus jouer ce jeu terrible de fuir ou de poursuivre tour à tour sa vérité, sa propre vérité, dans les ténèbres de son âme.

Les rares intimes dont il se laisse approcher l’ont plaint d’abord, et ils finissent par être tentés de le haïr, tant est dur, compact, intolérable, le silence qui tombe autour d’un tel homme. D’ailleurs, il a prolongé trois mois son séjour en Allemagne, puis a quitté son appartement de la rue de Seine, vendu une partie de ses livres. À son retour de Carlsbad, tout le monde a pu noter l’amaigrissement du visage, auquel la saillie des os et des muscles donne un singulier caractère de force brutale, presque aveugle. La voix surtout a changé ; elle est rauque, courte, s’altère vite. On chuchote que la fatigue a fini par avoir raison de cette puissante nature, qu’il est atteint de laryngite grave, probablement tuberculeuse. Et comme pour donner raison à ces augures, il a quitté Paris, fait l’achat, près de Draguignan, d’une bicoque aux tuiles vernies, cachée dans les palmes, à l’entrée d’un hameau de six feux. Par les premiers beaux jours du printemps, il allait s’asseoir sur le talus poussiéreux, en plein soleil, et revenait au soir tombant. Une vieille femme faisait son ménage, et couchait dans un appentis. « Lui malade ? s’écriait-elle, allons donc ! Pauvre cher homme, j’en suis encore à l’entendre tousser ! » L’église la plus proche est à une lieue et demie, par un chemin peu praticable. On ne l’y a jamais vu.

C’est de ce pays lointain que plusieurs lettres pressantes de M. de Clergerie avaient ramené l’abbé Cénabre en Normandie. L’historien s’y ouvrait à lui de son prochain mariage, et déjà incapable de dissimuler tout à fait sa blessure chaque jour plus vive, il s’y plaignait de la solitude morale où le laissaient, en un moment si grave, sa mère tombée en enfance, et une fille que la mort de l’abbé Chevance semblait avoir frappée d’une espèce de stupeur. Il ajoutait fort habilement que la longue absence de Cénabre laissait le champ libre aux malveillants, qu’il devenait utile, sinon de rentrer à Paris, du moins de s’en rapprocher. D’ailleurs, l’été s’annonçait torride, et personne ne comprendrait qu’il prolongeât son séjour dans le Midi.

Huit jours après, à l’étonnement de Clergerie lui-même qui ne s’attendait pas à un triomphe aussi facile, l’abbé Cénabre annonçait sa prochaine arrivée à Laigneville.

Hélas ! Au premier regard échangé, M, de Clergerie sentit avec angoisse que l’entreprise serait vaine : il faillit regretter son imprudence. En quelques heures, l’auteur de la Vie de Tauler eut achevé de décourager jusqu’à l’inlassable bienveillance de Mgr Espelette. Il ne quittait guère sa chambre, restait muet aux repas (il suivait un régime sévère) et, se plaignant d’insomnies, faisait chaque nuit les cent pas autour de la pelouse, à la grande fureur du psychiatre que le grincement du gravier empêchait de dormir. Il n’était sorti de cette humeur que pour interroger avidement Chantal sur les derniers moments de l’abbé Chevance, puis, après un bref débat, était rentré dans le silence, comme déçu.

Depuis, c’est à peine si M. de Clergerie osait prononcer devant lui le nom de sa fille, par une pudeur étrange, qu’il eût été bien incapable de définir. Dans cette maison solitaire, par cet été trop éclatant, trop lourd, au milieu de ces hommes attentifs, la douce voix de Chantal, si simple, si nette, son rire, entendu par hasard, résonnaient presque cruellement, semblaient factices. D’ailleurs les scrupules de l’historien, les confidences ingénues qu’il avait faites successivement à chacun de ses hôtes, n’étaient point pour dissiper ce malaise. Il s’aggravait au contraire à leur insu, prenait peu à peu la force d’un pressentiment, un sens augural. L’invisible filet se refermait sur la belle proie.

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