SCENE II.
LE COMPERE, CROQUILLON.
CROQUILLON.
D’où vient ce grand empressement ?
LE COMPERE.
Il regarde sa montre avec empressement.
Il est huit heures justement,
C’est l’heure qu’elle m’a donnée.
CROQUILLON.
Je ne sçay point de haquenée,
Dont l’amble….
LE COMPERE.
Veux-tu m’obliger ?
C’est icy l’heure du Berger,
La manquer !
CROQUILLON.
Mon maistre extravague.
LE COMPERE.
A propos donne moy ma bague.
CROQUILLON.
Mais Lubin ce pauvre Jobet,
Qui va querir comme un Barbet,
Et qui vous rapporte de mesme,
Dont la patience est extrême,
Ce mary plus battu qu’un chien,
Qui voit beaucoup, & ne dit rien,
Enfin ce plus sot que tout autre,
Dont la femme est, je croy, la vostre,
N’est-il pas sur votre journal
Marqué pour un original ?
LE COMPERE.
Donne donc, il est fort commode.
CROQUILLON.
Il n’en amene pas la mode,
On le pratique en toutes parts :
Diable la mode des Cornards
Est une mode d’importance ;
On ne la change point en France,
Les autres durent quinze jours,
Mais celle-là dure toûjours.
LE COMPERE.
C’est l’objet de ta raillerie.
CROQUILLON.
Il revient de la boucherie
Querir une teste de veau ;
Il vient de rentrer.
LE COMPERE.
Mon anneau :
Que ta longueur me desespere !
CROQUILLON.
Vous allez donc voir la Commere ?
LE COMPERE.
Oüy, maudit traitre, en cét instant
Que tu jases, elle m’attend ;
Et c’est pour finir mon martyre….
CROQUILLON.
Il donne la bague.
Courez, je n’ay plus rien à dire ;
Mais je crains pour le diamant.
LE COMPERE.
Il se donne en haste un coup de peigne.
C’est peu pour cét heureux moment.
CROQUILLON.
Monsieur, Ragot est à la porte.
LE COMPERE bas en colere.
Que veut-il ? Le diablel’emporte :
Cours luy dire que d’aujourd’huy
Je ne puis pas parler à luy,
Et qu’une affaire d’importance….
CROQUILLON.
Il n’est plus temps, car il avance.
LE COMPERE bas en colere.
Le diable le puisse emporter ?
Coquin, veux tu pas l’arrester ?
CROQUILLON.
Il vient, songez à luy répondre.
LE COMPERE bas en colere.
Que l’enfer le puisse confondre !
Un Vautour luy mange le cœur !
