III
Sans faire la moindre objection, Angéla s’assit, m’entourant de ses bras comme d’une écharpe blanche, cachant sa tête dans mon sein pour se réchauffer un peu, car elle était devenue froide comme un marbre.
Je ne sais pas combien de temps nous restâmes dans cette position, car tous mes sens étaient absorbés dans la contemplation de cette mystérieuse et fantastique créature.
Je n’avais plus aucune idée de l’heure ni du lieu ; le monde réel n’existait plus pour moi, et tous les liens qui m’y attachent étaient rompus ; mon âme, dégagée de sa prison de boue, nageait dans le vague et l’infini ; je comprenais ce que nul homme ne peut comprendre, les pensées d’Angéla se révélant à moi sans qu’elle eût besoin de parler ; car son âme brillait dans son corps comme une lampe d’albâtre, et les rayons partis de sa poitrine perçaient la mienne de part en part.
L’alouette chanta, une lueur pâle se joua sur les rideaux.
Aussitôt qu’Angéla l’aperçut, elle se leva précipitamment, me fit un geste d’adieu, et, après quelques pas, poussa un cri et tomba de sa hauteur.
Saisi d’effroi, je m’élançai pour la relever… Mon sang se fige rien que d’y penser : je ne trouvai rien que la cafetière brisée en mille morceaux.
À cette vue, persuadé que j’avais été le jouet de quelque illusion diabolique, une telle frayeur s’empara de moi, que je m’évanouis.