Les cahiers de Douai – Premier cahier – Arthur Rimbaud

Il tourne lentement vers elle son œil vague ;
Elle, laisse traîner sa pâle joue en fleur
Au front de Zeus ; ses yeux sont fermés ; elle meurt
Dans un divin baiser, et le flot qui murmure
De son écume d’or fleurit sa chevelure.
– Entre le laurier rose et le lotus jaseur
Glisse amoureusement le grand Cygne rêveur
Embrassant la Léda des blancheurs de son aile ;
– Et tandis que Cypris passe, étrangement belle,
Et, cambrant les rondeurs splendides de ses reins,
Étale fièrement l’or de ses larges seins
Et son ventre neigeux brodé de mousse noire,
– Héraclès, le Dompteur, qui, comme d’une gloire
Fort, ceint son vaste corps de la peau du lion,
S’avance, front terrible et doux, à l’horizon !
Par la lune d’été vaguement éclairée,
Debout, nue, et rêvant dans sa pâleur dorée
Que tache le flot lourd de ses longs cheveux bleus,
Dans la clairière sombre où la mousse s’étoile,
La Dryade regarde au ciel silencieux…
– La blanche Séléné laisse flotter son voile,
Craintive, sur les pieds du bel Endymion,
Et lui jette un baiser dans un pâle rayon…
– La Source pleure au loin dans une longue extase…
C’est la Nymphe qui rêve, un coude sur son vase,
Au beau jeune homme blanc que son onde a pressé.
– Une brise d’amour dans la nuit a passé,
Et, dans les bois sacrés, dans l’horreur des grands arbres,
Majestueusement debout, les sombres Marbres,
Les Dieux, au front desquels le Bouvreuil fait son nid,
– Les Dieux écoutent l’Homme et le Monde infini
Mai 1870.

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