Enfin, elle put parler :
— … Ils ne peuvent être vrais…
— Ils le sont, je vous l’assure.
— Alors, tout cela doit valoir… valoir…
Elle ne savait que dire.
— Si vous désirez les vendre, vous en tirerez probablement un demi-million de livres, au moins, assura M. Robinson.
— Ciel !
Soudain, elle les rassembla et se prit à refaire le paquet :
— Ils m’épouvantent, reprenez-les ! s’écria-t-elle.
La porte s’ouvrit brusquement. Un petit, garçon aux yeux noirs, au teint fortement bronzé, bondit dans la pièce :
— Maman, Bill m’a prêté un joli jouet…
Il se tut, dévisageant M. Robinson.
— Va dans la cuisine, Allen, dit sa mère, ton thé est prêt.
Il s’empressa. Rougissante, la jeune femme se tourna vers M. Robinson :
— Allen, c’est le prénom anglais qui ressemble le plus à Ali ! Mais, monsieur Robinson, conseillez-moi !
— En premier lieu, avez-vous votre certificat de mariage ? Je sais que vous avez épousé Ali alors qu’il était étudiant à Londres, mais…
Un bref examen.
— Eh bien ! reprit M. Robinson, supposons que vous vous en remettiez complètement à moi. Je me chargerai de la vente des pierres, et un notaire de confiance pourra vous conseiller sur l’emploi de la somme ainsi réalisée. Vous allez être très riche, et tous les escrocs de ce pays ne manqueront pas de vous talonner. La vie des gens fortunés n’est pas toujours une sinécure, mais je crois que vous êtes assez forte, assez sensée pour éviter les pièges. Et votre petit garçon sera sans doute plus heureux que son père ne l’a jamais été. D’accord, pour les bijoux ?
Elle les poussa dans sa direction. Soudain, elle reprit la parole :
— Cette écolière – celle qui les a trouvés – je désirerais lui donner… De quelle couleur sont ses yeux ?
M. Robinson réfléchit :
— Donnez-lui une émeraude, le vert évoque le mystère, et cela lui conviendra parfaitement. Excellente, votre idée : cette jeune fille sera terriblement ravie !
Il se leva.
— À propos, dit-il, je prélève des honoraires pour mes services ; ils sont élevés, mais soyez rassurée : je n’exagère pas.
Un rapide coup d’œil, et elle répondit :
— J’en suis certaine. Et il me faut quelqu’un de compétent, car je suis nulle en affaires.
— Alors, j’emporte le tout… mais, peut-être, désirez-vous conserver l’une de ces pierres précieuses ?
Il la regarda avec curiosité : un tremblement nerveux, un éclair de convoitise dans les yeux… Puis l’émotion s’effaça totalement :
— Non, dit-elle. Il peut vous paraître insensé de refuser un souvenir de valeur. Mais, bien que musulman, Ali me permettait de lui lire de temps à autre un passage de la Bible. Et je me souviens de celui dans lequel il est question de cette femme qui valait mieux que des rubis… Non, je ne veux conserver aucun bijou venant de lui !
« Une femme plus qu’étrange », se dit M. Robinson, alors qu’il regagnait sa Rolls.
FIN
* * *
[1] District londonien.
[2] Foreign Office.
[3] Paradis.
[4] Bonhomme.
[5] La rue de la Paix de Londres.
[6] L’opéra londonien.
[7] Fenêtre à l’anglaise.
[8] En français dans le texte.
[9] En français dans le texte.
[10] Rue londonienne où demeurent la plupart des grands médecins.
[11] Corps diplomatique.