Mes forêts d’Hélène Dorion

Mes forêts d’Hélène Dorion (livre au programme du bac de Français 2025-2026)

Mes forêts sont de longues traînées de temps

elles sont des aiguilles qui percent la terre déchirent le ciel avec des étoiles qui tombent comme une histoire d’orage elles glissent dans l’heure bleue un rayon vif de souvenirs l’humus de chaque vie où se pose légère une aile qui va au cœur

mes forêts sont des greniers peuplés de fantômes

elles sont les mâts de voyages immobiles un jardin de vent où se cognent les fruits d’une saison déjà passée qui s’en retourne vers demain

mes forêts sont mes espoirs debout

un feu de brindilles et de mots que les ombres font craquer dans le reflet figé de la pluie

mes forêts

sont des nuits très hautes

L’écorce incertaine

Dehors, est-ce l’infini ou juste la nuit ? Ann Lauterbach L’horizon une chute de liens avec le ciel qui jette l’ancre un désordre que blessent les vents

de biais

la beauté vient chasser l’obscurité

les forêts

apprennent à vivre avec soi-même L’arbre le mur de bois s’est fissuré

une pluie

de longues tiges inquiète nos pas tombe comme on tombe parfois dans sa propre vie

j’écoute cette partition

        du temps

        je déchiffre enfin

        le désordre des branches

les forêts hurlent

entre racines et nuages Le ruisseau creuse loin dans la terre dénoue la montagne qui pèse de tout l’automne le rideau s’effrite dans un souffle lourd le ruisseau balaie le passé vers demain entraîne dans son courant le froid qui rongeait les heures

comme un petit bruit

au fond de l’âme ce que l’on tait les pierres le portent Le rocher on dirait une histoire couverte de rouille

mousse et cratères

un ciel noirci par l’ombre de nos pas que les années fendillent

les forêts s’embrasent

dans le clair-obscur révèlent des chemins de sève Le tronc tout un champ de colonnes effleure les nuages

lentes cicatrices

dans la bouche de l’hiver un visage d’épines insoumises

les forêts entendent nos rêves

et nos désenchantements L’île si la pointe de l’arbre vacille pour lécher la lumière qui l’aveugle

si l’île flotte

à la surface du jour comme un navire de feuillage

serait-elle une pierre

avec des noms échoués au fond de leur vie La branche et l’horizon craquelle un sentier se referme sur l’écorce des choses

que rongent les vers

et les fourmis

il n’y a que ce qui casse

et repousse autour de nous syllabes informes qu’assemble la lumière

jusqu’à l’autre saison

les forêts vacillent dans le souffle de la terre Les feuilles comme des flammes étreignent le vide puis tombent dans la tempête souterraine l’alchimie de vivre et de mourir

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