Mes forêts d’Hélène Dorion

l’écoulement du temps –

choses muettes et nues

Mes forêts sont des bêtes qui attendent la nuit

pour lécher le sang de leurs rêves gratter la terre gratter l’écorce boire l’offrande et se glisser dans un lit rempli de lucioles

mes forêts sont une planète silencieuse

une éclipse qui fléchit

le bois de barques à la dérive alors qu’on croirait tout immobile

elles sont un dessin de nature morte

ignorant les écrans sur lesquels on les regarde sans jamais les voir mes forêts

sont chemin de chair et marées de l’esprit

un verbe qui se conjugue lentement loin de facebookinstagramtwitter

mes forêts sont des rivages

accordés à mes pas la demeure où respire ma vie

L’onde du chaos

Aux aguets, nous faisons écho Aux rumeurs de l’abîme Kathleen Raine Il souffle mille voix de vent sur la montagne que traversent des marées tant d’aubes un silence de fin de jour quand s’amorce la descente vers soi

au-dessus du vide

flotte un ciel qui n’ignore pas sa fragilité

murs d’incertitude et miroir

déformé de nos rêves

on entend que revient

un désir d’orage dans le jardin chargé de remous le désordre d’existences où l’on piétine la vie

le temps ne va plus ni ne vient

dans le mystère obstiné d’étoiles il n’y a que des saisons décousues

où aller

quand il n’y a pas de commencement

quand la terre et nos corps

plus chancelants que la terre ne reconnaissent plus la mémoire d’un arbre

on appelle des catastrophes

pour les couvrir du tissu de nos indifférences nos regards étouffent sous les poignées de cris jetées dans les fosses

il se fait tard

pour la nuit humaine

on ne pourra pas toujours

ne pas recommencer on ne pourra pas toujours fuir au bout des hivers Rêve-t-elle d’autres saisons la forêt qui promène ses ombres au-dessus de nous

des bêtes aveugles

engouffrent nos vies embrouillées

quand tanguent les arbres

rêve-t-elle d’oiseaux venus chasser les vestiges glisser l’aile fragile d’un espoir

la chute ne fait aucun bruit

dans la forêt ne laisse aucune trace l’agneau déserte le troupeau Le jeune érable frémit sous les coups du tonnerre la foule autour de lui hurle contre le vent

quand j’ai ouvert les yeux

ce n’était plus à l’intérieur de moi que la pluie s’immisçait

le bois racontait une histoire

d’air rouillé de pas égarés dans le brouillard de l’aube

grandir disait-il

ne suffit pas à remplir le cœur Les arbres mordent le sol corps séchés dans le froid des racines ombres maigres corps serrés contre d’autres on entend le chant de fêlure et de désir corps comme va la marée barque blême perdue dans sa nuit

corps d’amour et d’orage

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