SCÈNE 3
Les mêmes, La Tour.
La Tour, à lamarquise.
Madame, voilà une lettre pour vous, de madamela maréchale : celui de ses gens qui l’a apportée en attend laréponse.
La Marquise.
De ma mère ! Voyons. après avoir lu.c’est une de ses femmes qui m’écrit, de sa part, qu’elle se trouveplus mal, et qu’elle me demande. Cela change furieusement mamarche. La Tour, je vous prie, dites que je pars, et faites avertirmes porteurs.
La Tour sort.
Le Duc.
Cela arrive bien mal à propos ! Il y amille ans que je ne vous ai vuë.
La Marquise.
Je ne sens pas moins vivement que vous-mêmecette contradiction ; mais vous seriez, avec justice, lepremier à me blâmer, si je manquois à un devoir aussi sacré quel’est le devoir qui m’appelle ; et quand je serois, par moninclination, moins portée à le remplir, je le ferois, ne fût-ce quepour me conserver votre estime. Adieu, ma chére Célie ; jevous laisse ; c’est à regret que je vous quitte : maisvous voyez bien vous-même que je ne puis faire autrement.
Le Duc.
Quand vous verrai-je donc ? La Marquise.Ce soir, peut-être. Ma mère, comme vous sçavez, est accoutumée à secroire plus malade qu’elle ne l’est. Il se peut donc que ce qui meparoît lui causer les plus vives alarmes, soit assez peu de chose.Si je suis assez heureuse pour ne m’y pas tromper, je pourrairentrer chez moi de bonne heure ; mais, je m’arrête ici troplong-tems. Adieu ; à tantôt ; je m’en flatte, dumoins.
Célie.
Adieu, marquise. Je vous verrai demain,n’est-ce pas ?
La Marquise.
Oui, si cela m’est possible.
Le Duc.
Avec la permission de Célie, madame, je vaisvous conduire à votre chaise.
Célie.
Je ne doute pas qu’après avoir été silong-tems sans la voir, vous n’ayez plus d’une chose à lui dire.J’en ai, de mon côté, quelqu’une à faire, et vous m’obligerez, duc,de ne pas vous gêner. ils passent dans une autre pièce.