LE MEURTRE DE ROGER ACKROYD AGATHA CHRISTIE

Après un instant de silence, le major ajouta :

— C’est curieux comme elle a pu changer, entre-temps.

— Comment cela, changé ?

— Elle semblait avoir dix ans de plus.

Je m’appliquai à paraître le plus naturel possible :

— Séjourniez-vous ici quand son mari est mort ?

— Non. Bon débarras d’ailleurs, pour ce que j’en sais. Pas très charitable de ma part, mais vrai.

J’en convins, et ajoutai prudemment :

— Ashley Ferrars n’était certes pas le modèle des maris.

— Une vraie brute, vous voulez dire.

— Non, seulement un homme pourri par l’argent.

— Ah, l’argent ! Qu’on en ait ou qu’on en manque, c’est toujours lui la cause du mal.

— Quel mal vous a-t-il fait, personnellement ?

— Je n’ai pas à me plaindre. Je fais partie des heureux.

— Ah oui ?

— Oui… et non. Il se trouve qu’en ce moment je suis un peu à court. J’ai fait un héritage, il y a un an, et, comme un idiot, je me suis laissé entraîner dans des spéculations hasardeuses.

Je compatis à ses déboires et lui racontai les miens. Puis le gong annonça le déjeuner, nous rentrâmes, et Poirot m’attira à l’écart.

— Eh bien ? demanda-t-il en français.

— Rien de suspect chez ce garçon, j’en jurerais.

— Pas la moindre… anomalie ?

— Il a bien fait un héritage, il y a un an, et après ? Ce n’est pas défendu. Cet homme est franc comme l’or et n’a rien à se reprocher, j’en mettrais ma main au feu.

— Très bien, très bien, dit Poirot d’un ton conciliant. Ne vous emballez pas comme cela !

On aurait juré qu’il s’adressait à un enfant capricieux.

Nous entrâmes tous ensemble dans la salle à manger. Dire qu’il ne s’était pas écoulé vingt-quatre heures depuis que j’avais pris place à cette même table pour la dernière fois ! Cela paraissait incroyable.

Le repas terminé, Mrs Ackroyd m’invita à m’asseoir à ses côtés sur un canapé.

— Je ne peux m’empêcher de me sentir blessée, murmura-t-elle en exhibant un mouchoir, apparemment peu fait pour éponger les larmes. Oui, blessée par ce manque de confiance de la part de Roger. C’est à moi qu’il aurait dû léguer ces vingt mille livres, et non à Flora. Les intérêts d’un enfant ne sauraient être mieux placés qu’entre les mains de sa mère.

— Vous oubliez les liens du sang, madame. Flora était la nièce d’Ackroyd. Si vous aviez été sa sœur, et non sa belle-sœur, le cas eût été différent.

La belle éplorée se tamponna délicatement les paupières.

— En tant que veuve de ce pauvre Cecil, j’estime qu’on aurait pu tenir compte de mes prérogatives, larmoya-t-elle. Mais Roger a toujours été très regardant, pour ne pas dire pingre, et nous nous trouvions dans une position difficile, toutes les deux. Il aurait dû faire une pension à la pauvre enfant, mais non ! Il se faisait prier pour payer ses factures et lui demandait sans arrêt à quoi lui servaient toutes ces fanfreluches. Quelle question ! C’est bien d’un homme… mais je ne sais plus où j’en suis. Nous n’avions rien qui fût vraiment à nous, pas un centime, et c’était humiliant pour Flora, vous comprenez. Elle en souffrait, et même beaucoup. Oh ! elle était très attachée à son oncle, bien sûr, mais n’importe quelle autre jeune fille eût souffert, dans sa position. Il faut bien avouer qu’en matière d’argent, Roger avait des idées singulières. Jusqu’aux serviettes de toilette qu’il refusait de remplacer, et je lui avais pourtant dit que les vieilles étaient en loques. Et quelle idée… enchaîna Mrs Ackroyd en passant brusquement du coq à l’âne, ce qui lui arrivait souvent. Quelle idée de laisser tout cet argent, mille livres, vous vous rendez compte ! Mille livres à… à cette femme !

— Quelle femme ?

— Cette Russell ! Elle a quelque chose de bizarre, je l’ai toujours dit, mais Roger n’admettait pas qu’on la critique. Il lui trouvait beaucoup de force de caractère et répétait qu’il l’admirait et la respectait. On n’entendait parler que de sa droiture, de son détachement et de ses qualités morales. À mon avis, tout cela cachait quelque chose et elle ne songeait qu’à épouser Roger. Mais j’y ai mis le holà et elle m’a toujours détestée, forcément. Moi, je n’étais pas dupe.

Je commençais à me demander si j’avais la moindre chance d’échapper à ce flot de paroles quand Mr Hammond m’en offrit une en venant prendre congé. Je saisis la balle au bond.

— Et à propos de l’enquête, demandai-je en me levant, où préférez-vous qu’elle ait lieu ? Ici ou aux Trois Marcassins ?

Mrs Ackroyd me dévisagea, bouche bée.

— L’enquête, répéta-t-elle, figée par la consternation. Il ne sera sûrement pas nécessaire d’en arriver là ?

Mr Hammond toussota et laissa tomber, laconique :

— Inévitable, vu les circonstances.

— Mais le Dr Sheppard doit pouvoir s’arranger…

— Je crains que mes pouvoirs n’aillent pas jusque-là, rétorquai-je avec sécheresse.

— Mais si la mort de Roger n’est qu’un accident…

Cette fois, je me montrai brutal.

— Il a été assassiné, Mrs Ackroyd.

Elle laissa échapper un petit cri.

— L’hypothèse de l’accident est absolument indéfendable.

Mrs Ackroyd me jeta un regard de détresse, où je ne crus voir que la crainte stupide des désagréments. Cela ne me rendit pas indulgent.

— Mais s’il y a une enquête, reprit-elle, je n’aurai pas à… à répondre à des questions, et tout ça ?

— Je ne sais pas si cela sera nécessaire. J’imagine que Mr Raymond pourra s’en charger pour vous. Il connaît très bien les circonstances du meurtre et doit être en mesure d’identifier le corps.

L’avoué m’approuva d’un signe de tête et déclara :

— Je ne crois pas qu’il y ait lieu de vous inquiéter, madame. Tous les désagréments vous seront épargnés. Quant à l’argent… avez-vous tout ce qu’il vous faut pour le moment ?

Et, comme elle l’interrogeait du regard, il ajouta :

— En espèces, je veux dire. Ou si vous préférez, en liquide. Sinon, je peux m’arranger pour faire le nécessaire.

— Cela devrait aller, intervint Raymond qui se trouvait à portée de voix. Mr Ackroyd a tiré un chèque de cent livres, hier.

— Cent livres ?

— Oui, pour payer les gages des domestiques et régler quelques factures. Comme il devait le faire aujourd’hui, la somme est toujours intacte.

— Et où est cet argent ? Dans son bureau ?

— Non, il le gardait toujours dans sa chambre, dans une vieille boîte à faux cols, pour être précis. Drôle d’idée, non ?

— Mieux vaudrait nous assurer qu’il y est encore, estima l’avoué. Allons-y avant que je parte.

— Mais certainement, approuva le secrétaire. Je vous précède… Oh, j’oubliais ! La porte est fermée à clé.

Envoyé aux nouvelles, Parker finit par découvrir que l’inspecteur Raglan s’était rendu à l’office pour un supplément d’enquête. Quelques minutes plus tard, l’inspecteur nous rejoignit dans le hall, clé en main, et nous ouvrit la porte. Nous nous engageâmes dans le couloir, puis dans le petit escalier, pour trouver la porte de la chambre d’Ackroyd grande ouverte. Il faisait sombre à l’intérieur de la pièce. Les rideaux étaient tirés et le lit dans le même état que la veille, préparé pour la nuit. L’inspecteur ouvrit les rideaux, laissant pénétrer le soleil, et Geoffrey Raymond se dirigea vers un bureau en bois de rose dont il désigna le tiroir supérieur.

— Et il gardait son argent là, sans prendre la peine de fermer le tiroir à clé ? observa l’inspecteur. Incroyable !

Une légère rougeur monta aux joues du secrétaire.

— Mr Ackroyd avait la plus totale confiance en son personnel ! s’écria-t-il avec indignation.

— Bien sûr ! se hâta de répondre l’inspecteur. Cela va de soi.

Raymond ouvrit le tiroir. Il en sortit une boîte en cuir de forme ronde, qu’il ouvrit à son tour. De là, il tira un portefeuille rebondi.

— Voici l’argent, dit-il en prélevant une épaisse liasse de billets. Je sais que vous trouverez la somme intacte car Mr Ackroyd l’a rangée dans cette boîte en ma présence, hier soir, en s’habillant pour le dîner. Naturellement, personne n’y a touché depuis.

Mr Hammond lui prit la liasse des mains, compta les billets et releva vivement la tête.

— Cent livres, dites-vous ? Mais il n’y en a que soixante !

Raymond ouvrit des yeux ronds.

— Impossible ! s’exclama-t-il en arrachant les billets des mains de l’avoué pour les compter à haute voix.

Mr Hammond ne s’était pas trompé : il n’y avait que soixante livres.

— Mais… je ne comprends pas ! s’écria le secrétaire, abasourdi.

Alors Poirot se décida à intervenir :

— Vous avez bien vu Mr Ackroyd ranger cet argent hier soir pendant qu’il s’habillait ? Vous êtes certain qu’il n’avait pas déjà disposé d’une partie de cette somme ?

— Certain. Il n’avait rien dépensé du tout. Il a même dit : « Je ne veux pas descendre avec ces cent livres en poche. C’est trop encombrant. »

— En ce cas, c’est tout simple, commenta Poirot. Ou bien il a disposé de ces quarante livres hier soir, ou bien on les lui a volées.

— On ne saurait mieux dire, approuva l’inspecteur, qui se tourna vers Mrs Ackroyd. Parmi les domestiques, qui a pu entrer dans cette pièce hier soir ?

— La seconde femme de chambre. Pour préparer le lit.

— Qui est-ce ? Que savez-vous d’elle ?

— Il n’y a pas très longtemps qu’elle est ici, en fait. Mais c’est une brave fille de la campagne, comme tant d’autres.

— Il nous faut tirer cela au clair, déclara l’inspecteur. Si Mr Ackroyd a disposé de cet argent lui-même, l’usage qu’il en a fait a peut-être un rapport avec le crime. Selon vous, rien à reprocher aux autres domestiques ?

— Pas à ma connaissance.

— Vous n’avez jamais constaté de disparitions ?

— Non.

— Pas de départs, ou quoi que ce soit d’inhabituel ?

— Si. La femme de chambre qui sert à table s’en va.

— Quand ?

— Elle a donné son congé hier.

— À vous ?

— Oh, non ! Je n’ai rien à voir avec le personnel. C’est miss Russell qui s’occupe des affaires domestiques.

L’inspecteur s’absorba dans une longue réflexion, puis il hocha la tête et déclara :

— Je crois que je ferais bien d’avoir un entretien avec miss Russell. J’en profiterai pour voir aussi cette Elsie Dale.

Poirot et moi le suivîmes dans le bureau de la gouvernante, où miss Russell nous reçut avec son sang-froid coutumier.

Elsie Dale était à Fernly depuis cinq mois, nous apprit-elle. Une brave fille, travailleuse et des plus comme il faut, avec de bonnes références. En somme, la dernière personne au monde à soupçonner de dérober le bien d’autrui.

— Et l’autre femme de chambre ? Celle qui sert à table ?

— Une fille remarquable, elle aussi. Pondérée, distinguée, et irréprochable dans son travail.

— Alors, pourquoi part-elle ?

Miss Russell pinça les lèvres.

— Ça, je n’y suis pour rien. Mais si j’ai bien compris, Mr Ackroyd l’a accablée de reproches, hier après-midi. C’est elle qui fait le ménage dans le cabinet de travail, et je crois qu’elle a dérangé des papiers posés sur le bureau. Mr Ackroyd était furieux, et elle a donné son congé. En tout cas, c’est ce que j’ai déduit de ses explications, mais peut-être préféreriez-vous lui parler ?

L’inspecteur acquiesça et miss Russell fit appeler Ursula Bourne. J’avais déjà remarqué la femme de chambre qui nous servait à table. Une grande fille à l’opulente chevelure brune tirée sur la nuque et avec des yeux gris au regard tranquille. Elle entra et resta debout devant nous, très droite, fixant sur nous son impassible regard gris.

— Vous êtes Ursula Bourne ? s’enquit l’inspecteur Raglan.

— Oui, monsieur.

— J’apprends que vous partez ?

— Oui, monsieur.

— Et pour quelle raison ?

— J’ai dérangé des papiers sur le bureau de Mr Ackroyd. Il s’est emporté et m’a dit que je ferais mieux de m’en aller, et le plus tôt possible.

— Hier soir, êtes-vous entrée dans la chambre de Mr Ackroyd, pour ranger ou pour toute autre raison ?

— Non, monsieur, c’est le travail d’Elsie. Je ne suis jamais allée dans cette partie de la maison.

— Je dois vous informer, mon petit, qu’une importante somme d’argent a disparu de la chambre de Mr Ackroyd.

Cette fois, la jeune fille sortit de son indifférence. Je vis le rouge lui monter aux joues.

— J’ignorais jusqu’à l’existence de cet argent. Si vous croyez que je l’ai pris et que Mr Ackroyd m’a renvoyée à cause de cela, vous vous trompez.

— Je ne vous accuse pas de l’avoir pris, mon petit. Ne soyez pas si susceptible !

La jeune fille le toisa d’un regard glacial.

— Vous pouvez fouiller mes affaires, lança-t-elle avec dédain, vous n’y trouverez rien.

Poirot se hâta d’intervenir :

— C’est bien hier que Mr Ackroyd vous a donné congé… ou que vous avez pris congé de vous-même, n’est-ce pas ?

La femme de chambre hocha la tête.

— Combien de temps a duré votre entrevue ?

— Notre entrevue ?

— Avec Mr Ackroyd, dans son bureau ?

— Je… je ne sais pas.

— Vingt minutes ? Une demi-heure ?

— Quelque chose comme ça.

— Pas plus ?

— Pas plus d’une demi-heure, en tout cas.

— Merci, mademoiselle.

J’observai Poirot avec curiosité. À petits gestes méticuleux, il redisposait en les alignant quelques bibelots sur la table. Son regard brillait.

— Ce sera tout, dit l’inspecteur.

Ursula Bourne s’éclipsa, et il se tourna vers miss Russell.

— Depuis combien de temps travaille-t-elle ici ? Pourrais-je voir ses certificats ?

Ignorant la première question, miss Russell s’approcha d’un bureau, ouvrit l’un des tiroirs et en tira une liasse de lettres attachées par un trombone. Elle en choisit une et la tendit à l’inspecteur.

— Hum ! tout cela me semble parfait, observa-t-il. Mrs. Richard Folliott, Marby Grange, Marby. Qui est cette personne ?

— Une dame très distinguée. Grande bourgeoisie terrienne, répondit brièvement miss Russell.

L’inspecteur lui rendit la lettre.

— Bien ! Voyons l’autre, maintenant. Cette Elsie Dale.

Elsie était une belle fille bien plantée, au visage agréable bien qu’un peu stupide. Elle répondit à nos questions sans se faire prier et s’émut beaucoup de la disparition de l’argent.

— Je ne vois pas ce qu’on pourrait lui reprocher, commenta l’inspecteur après l’avoir congédiée. Et sur Parker, quelle est votre opinion ?

Miss Russell pinça les lèvres, sans répondre.

— Je flaire quelque chose de louche chez cet homme, reprit l’inspecteur d’un ton pensif. Le problème c’est que je ne vois pas quand il aurait bien pu commettre le crime. Juste après le dîner, il a été accaparé par son service et il a un alibi solide pour le reste de la soirée. Je le sais, j’ai vérifié avec un soin tout particulier… Eh bien, miss Russell, je vous remercie. Nous en resterons là pour l’instant. Il est on ne peut plus probable que Mr Ackroyd ait lui-même disposé de cet argent.

La gouvernante nous gratifia d’un « bon après-midi » des plus secs, et nous nous retirâmes. Je quittai la maison en compagnie de Poirot.

— Je me demande ce que pouvaient bien être ces papiers pour qu’Ackroyd se soit mis dans une colère pareille, dis-je après un silence. Ne pourraient-ils nous fournir un indice ?

— D’après le secrétaire, il n’y avait aucun papier important sur le bureau, observa tranquillement Poirot.

— Sans doute, mais…

— Mais vous trouvez bizarre qu’Ackroyd soit monté sur ses grands chevaux pour un détail aussi insignifiant ?

— Euh… oui, en quelque sorte.

— Mais s’agissait-il vraiment d’un détail insignifiant ?

— Il est vrai que nous ne savons rien de ces papiers, dus-je admettre. Mais Raymond n’a-t-il pas…

— Oublions un instant Mr Raymond. Que pensez-vous de cette fille ?

— Laquelle ? Celle qui servait à table ?

— Oui, la seconde femme de chambre. Ursula Bourne.

— Elle m’a semblé être une fille très bien, hasardai-je en appuyant sur les deux derniers mots.

Poirot, lui, accentua le premier verbe.

— Oui, dit-il en reprenant mes paroles, elle vous a semblé être une fille très bien.

Puis, après un instant de silence, il tira quelque chose de sa poche et me le tendit :

— Tenez, mon ami, je voulais vous montrer ce papier.

Le papier en question n’était autre que la liste établie par l’inspecteur, et que ce dernier lui avait remise le matin même. Du bout du doigt, il me désigna une petite croix au crayon, en face d’un nom. Celui d’Ursula Bourne.

— Vous ne l’avez peut-être pas remarqué sur le moment, mon bon ami, mais il y a une personne sur cette liste dont l’alibi n’a pas été confirmé. Ursula Bourne.

— Vous ne supposez pas…

— Dr Sheppard, je dois tout supposer. Ursula Bourne peut très bien avoir tué Mr Ackroyd, mais j’avoue ne pas comprendre ce qui aurait pu l’y pousser. Et vous ?

Il m’observait avec une attention aiguë, si aiguë que j’en fus mal à l’aise.

— Et vous ? répéta-t-il.

— Moi non plus, déclarai-je avec assurance.

Son attention se relâcha, il fronça les sourcils et murmura, comme pour lui-même :

— Le maître chanteur était un homme, ce qui la met hors de cause. Donc…

Je toussotai.

— Sur ce point… commençai-je d’un ton dubitatif.

Il pivota sur ses talons et me regarda bien en face.

— Quoi donc ? Que voulez-vous dire ?

— Rien. Rien si ce n’est que… pour être exact, Mrs Ferrars a fait allusion à une personne, sans plus. Elle n’a pas précisé s’il s’agissait d’un homme, c’est Ackroyd et moi qui l’avons supposé. Cela nous a paru évident.

Poirot ne semblait pas m’entendre : il s’était remis à marmonner entre ses dents.

— Mais alors, c’est possible après tout… oui, bien sûr que c’est possible… mais alors… ah ! il faut que je remette mes idées en ordre. Oui, de l’ordre et de la méthode, je n’en ai jamais eu autant besoin. Tout doit concorder… chaque élément trouver sa place, sinon… sinon je suis sur une fausse piste.

Il s’interrompit et, une fois de plus, se tourna vers moi :

— Où se trouve Marby ?

— De l’autre côté de Cranchester.

— À combien d’ici ?

— Une vingtaine de kilomètres.

— Vous serait-il possible d’y aller ? Demain, par exemple.

— Demain ? Voyons…, nous serons dimanche… oui, je devrais pouvoir m’arranger. Mais que voulez-vous que j’aille y faire ?

— Rendre visite à cette Mrs Folliott. Et recueillir le plus de renseignements possible sur Ursula Bourne.

— Très bien. Mais j’avoue que l’idée ne m’enchante guère.

— Ce n’est pas le moment de faire des difficultés : la vie d’un homme est en jeu.

— Pauvre Ralph ! soupirai-je. Vous le croyez innocent, malgré tout ?

Poirot me dévisagea, très grave.

— Vous voulez savoir la vérité ?

— Bien entendu.

— Alors vous la saurez, mon ami. Toutes les pistes convergent sur lui.

— Quoi !

— Eh oui. Ce stupide inspecteur – car il est stupide – a rassemblé des indices accablants pour lui. Moi, je cherche la vérité, et elle me ramène toujours à Ralph Paton. Mobile, occasion, moyens employés, tout le désigne. Mais je vérifierai toutes les hypothèses, absolument toutes, je l’ai promis à miss Flora. Et elle semblait vraiment très sûre de ce qu’elle avançait, cette enfant. Oui, vraiment très sûre.

11

Poirot en visite

Ce ne fut pas sans une certaine nervosité que je sonnai à la porte de Marby Grange, le lendemain après-midi. J’aurais bien voulu savoir ce que Poirot espérait découvrir et pourquoi il m’avait chargé de cette démarche. Était-ce pour rester discrètement à l’écart, comme lorsqu’il m’avait prié d’interroger le major Blunt ? Mais ici, le cas était différent et ce scrupule ne me paraissait pas justifié. L’entrée d’une sémillante femme de chambre mit fin à mes réflexions. J’appris que Mrs Folliott était chez elle.

Introduit dans un salon spacieux pour y attendre la maîtresse de maison, je promenai autour de moi un regard curieux. La grande pièce était assez nue, les tentures et les sièges, plutôt râpés. Çà et là, quelques très belles porcelaines et des gravures de maîtres. Aucun doute, j’étais bien chez une grande dame.

Je m’arrachai à l’examen d’un Bortoluzzi au moment où Mrs Folliott fit son entrée. C’était une grande femme à la chevelure brune un peu en désordre et au sourire engageant.

— Dr Sheppard… énonça-t-elle avec un rien d’hésitation.

— C’est bien mon nom, madame. Je vous prie d’excuser mon intrusion, mais je désirais des renseignements sur une femme de chambre qui a été à votre service : Ursula Bourne.

Ce nom produisit un effet instantané. Le sourire de Mrs Folliott s’évanouit et sa cordialité de même. Elle parut soudain très mal à l’aise.

— Ursula Bourne ? répéta-t-elle d’une voix incertaine.

— Oui. Ce nom ne vous dit sans doute plus rien ?

— Oh si ! je me souviens très bien d’elle.

— Elle vous a quittée il y a un an, si j’ai bien compris ?

— Oui. Oui, c’est exact.

— Vous avait-elle donné satisfaction ? Combien de temps est-elle restée à votre service, au fait ?

— Un an ou deux, je ne me rappelle pas au juste. Elle est extrêmement capable et je suis certaine qu’elle vous donnera toute satisfaction, à vous aussi. Ainsi, elle quitte Fernly… je n’étais pas au courant.

— Pouvez-vous m’apprendre quelque chose de plus à son sujet ?

— Quoi, par exemple ?

— D’où elle vient, de quel milieu… ce genre de détails.

La froideur de Mrs Folliott s’accentua sensiblement.

— Je n’en ai pas la moindre idée.

— Où travaillait-elle avant d’entrer à votre service ?

— Je crains de l’avoir oublié.

Sous la nervosité de mon hôtesse perçait une note de colère. Elle redressa la tête en un geste qui me parut vaguement familier.

— Toutes ces questions sont-elles vraiment indispensables ?

Un peu étonné, je me récriai poliment :

— Mais pas du tout, et je n’avais pas l’intention de vous mettre dans l’embarras. Vous m’en voyez navré.

Mrs Folliott se radoucit et je vis reparaître sa gêne.

— Mais vos questions ne m’embarrassent pas, je vous assure. Pas le moins du monde… et d’ailleurs, en quoi le pourraient-elles ? Elles m’ont simplement paru un peu… surprenantes. Oui, c’est bien le mot : surprenantes.

L’un des avantages de la pratique médicale, c’est que vous savez presque toujours quand les gens vous mentent. Rien qu’à son attitude, j’aurais pu deviner que Mrs Folliott répugnait à me répondre. Et même énormément. Sa confusion et son désarroi parlaient d’eux-mêmes : elle avait quelque chose à cacher. Mais quoi ?… Mystère. Il était clair pour moi qu’elle n’avait pas l’habitude des faux-fuyants. Et comme tous les novices en la matière, elle était aussi maladroite que mal à l’aise. Un enfant l’aurait percée à jour.

Mais ce qui était tout aussi clair, c’est qu’elle n’avait pas l’intention de m’en dire plus. Et ce n’était certainement pas elle qui m’aiderait à éclaircir le mystère entourant Ursula Bourne, quel qu’il fût. Frustré dans mes espoirs, je m’excusai une fois de plus de l’avoir importunée, pris mon chapeau et me retirai.

J’allai voir deux patients à domicile et rentrai chez moi vers 6 heures. La cérémonie du thé venait de s’achever, à en juger par l’état de la table où trônait Caroline. Je lus sur son visage une exaltation contenue, que je ne connaissais que trop bien. Il y avait des nouvelles dans l’air. Venait-elle de les répandre ou au contraire d’en recevoir, c’est ce qu’il me restait à apprendre. Je n’eus que le temps de me laisser tomber dans mon fauteuil et d’allonger les jambes en direction du bon feu qui flambait dans la cheminée : Caroline passa à l’attaque.

— J’ai passé un après-midi passionnant.

— Ah oui ? Miss Gannett est venue prendre le thé ?

Miss Gannett est un des piliers de notre service de renseignements.

— Cherche encore, jubila Caroline.

J’offris plusieurs autres noms, passant lentement en revue tous les informateurs de Caroline. À chaque tentative, ma sœur secouait la tête d’un air triomphant. Finalement, ce fut elle qui m’annonça :

— M. Poirot est venu me voir… Eh bien, que penses-tu de cela ?

J’en pensais quantité de choses, mais me gardai bien d’en faire part à Caroline.

— Que voulait-il ?

— Me voir, bien sûr ! Il m’a dit que, puisqu’il connaissait si bien mon frère, il se croyait autorisé à se présenter à sa charmante sœur… enfin, à ta charmante sœur, je veux dire.

— Et de quoi a-t-il parlé ?

— Il m’a raconté des tas de choses sur lui et sur ses enquêtes. Tu vois qui est le prince Paul de Maurétanie, celui qui vient d’épouser une danseuse ?

— Oui, et alors ?

— J’ai lu un article très intrigant au sujet de cette femme l’autre jour, dans Les Potins mondains. On laissait entendre qu’elle serait en réalité une grande duchesse russe, une des filles du tsar qui aurait réussi à échapper aux bolcheviques. Il paraît que M. Poirot a résolu une sombre affaire de meurtre dans laquelle ils ont failli être impliqués, elle et son mari. Le prince Paul lui en a été on ne peut plus reconnaissant.

— Lui a-t-il offert une épingle de cravate ornée d’une émeraude grosse comme un œuf ? ironisai-je.

— Il n’en a pas parlé, pourquoi ?

— Pour rien, je croyais que c’était la coutume. En tout cas, c’est ainsi que cela se passe dans les romans policiers. La chambre de l’insurpassable détective est toujours jonchée de rubis, de perles et d’émeraudes, témoignages de la gratitude royale de ses clients.

— En tout cas, dit ma sœur d’un ton satisfait, c’est très intéressant d’entendre parler de ces choses par ceux qui les ont vues de près.

Ce l’était certainement, du moins pour Caroline, et je ne pus m’empêcher d’admirer la subtilité de M. Hercule Poirot. Il avait su choisir entre toutes l’histoire la plus propre à séduire une vieille demoiselle de village.

— T’a-t-il révélé si la danseuse était vraiment une grande duchesse ?

— Il n’en avait pas le droit, cela va de soi, dit Caroline, pleine d’importance.

Dans quelle mesure Poirot avait-il altéré la vérité en bavardant avec ma sœur ? Pas du tout, sans doute. Il avait dû procéder par mimiques et haussements d’épaules, et suggérer sans se compromettre.

— Et j’imagine qu’après ça, tu étais prête à lui manger dans la main ? m’écriai-je.

— Ne sois pas si grossier, James. Je me demande où tu vas chercher ces tournures triviales !

— Probablement chez mes malades, mon seul lien avec le monde extérieur. Malheureusement, ma clientèle ne se compose pas d’altesses royales, ni de fascinants émigrés russes.

Caroline remonta ses lunettes et me dévisagea :

— Tu m’as l’air bien acariâtre, James, ce doit être ton foie. Tu me feras le plaisir de prendre une pilule, ce soir.

À me voir vivre chez moi, personne ne se douterait que je suis médecin. C’est Caroline qui prescrit les traitements de la famille, aussi bien les miens que les siens.

— Au diable mon foie ! maugréai-je. Avez-vous parlé du meurtre ?

— Enfin, James… naturellement ! De quoi pourrait-on bien parler dans tout le pays en ce moment, sinon de cela ? J’ai pu préciser certains détails à M. Poirot, qui m’en a été très reconnaissant. Il m’a dit que j’avais un véritable flair de détective et un sens inné de la psychologie humaine.

Caroline se pourléchait comme une chatte devant un bol de crème. Pour un peu, elle aurait ronronné.

— Il m’a beaucoup parlé des petites cellules grises du cerveau. Les siennes sont de toute première qualité, paraît-il.

— Mais comment donc ! ricanai-je. M. Hercule Modeste Poirot. Tu ne trouves pas que cela lui irait bien ? Il devrait faire refaire ses cartes de visite !

— Je n’aime pas du tout ce ton, James. Tu parles comme un Américain. M. Poirot pense qu’il faut à tout prix retrouver Ralph et lui conseiller de se montrer. D’après lui, son absence produirait une impression désastreuse à l’enquête.

— Et qu’as-tu répondu à cela ?

— Que c’était aussi mon avis, dit Caroline d’un ton suffisant. Et je lui ai répété tout ce qu’on raconte déjà sur Ralph.

— Caroline, m’informai-je avidement, as-tu rapporté à M. Poirot la conversation que tu as surprise dans le bois, l’autre jour ?

— Mais oui, fit béatement Caroline.

Je me levai et me mis à arpenter la pièce.

— J’espère que tu te rends compte de ce que tu as fait ! Tu as passé la corde au cou de Ralph, ni plus ni moins !

— Pas du tout, rétorqua ma sœur, imperturbable. Et je m’étonne que tu n’en aies pas parlé toi-même.

— Je m’en suis bien gardé ! J’aime beaucoup ce garçon.

— Moi aussi, c’est pourquoi je trouve ta remarque stupide. Je ne crois pas que Ralph soit coupable. Donc la vérité ne peut pas lui nuire et nous devrions aider M. Poirot du mieux que nous pouvons. Réfléchis. Il est on ne peut plus probable que Ralph soit sorti avec cette jeune fille le soir du meurtre. Si c’est le cas, il a un excellent alibi.

— Mais s’il a un si bon alibi, pourquoi ne pas venir le dire ?

— Sans doute pour ne pas causer d’ennuis à la jeune fille, observa Caroline d’un ton sagace. Mais si M. Poirot la retrouve et lui fait comprendre où est son devoir, elle viendra de son propre chef disculper Ralph.

— Quelle imagination… un vrai conte de fées. Tu lis trop de mauvais romans, Caroline. Je te l’ai toujours dit.

Sur ce, je m’affalai à nouveau dans mon fauteuil.

— Et… Poirot t’a-t-il posé d’autres questions ? demandai-je.

— Seulement sur les patients que tu as vus ce matin.

— Les patients ? répétai-je, incrédule.

— Oui, ceux de ta consultation. Il voulait savoir combien ils étaient, et aussi leurs noms.

— Dois-je comprendre que tu as pu le renseigner ?

Caroline me surprendra toujours.

— Et pourquoi pas ? triompha-t-elle. De cette fenêtre, je vois très bien le chemin qui mène à ton cabinet, et j’ai une excellente mémoire, James. Bien meilleure que la tienne, permets-moi de te le dire.

— Je n’en doute pas, murmurai-je distraitement.

Ma sœur enchaîna en comptant sur ses doigts :

— Il y a d’abord eu la vieille Mrs Bennett, puis ce garçon de ferme qui s’est fait mal à la main, Dolly Grace qui s’est planté une aiguille dans le doigt, et ce garçon de cabine américain. Ce qui nous fait, voyons… quatre. Et aussi le vieux George Evans, avec son ulcère. Et pour finir…

Caroline observa un silence lourd de sens.

— Eh bien ?

Le moment triomphal était arrivé, et ma sœur ne manqua pas son effet. En prenant grand soin de faire sonner les « l », elle annonça d’un ton théâtral :

— Miss Russell !

Sur quoi, elle se renversa en arrière et me lança un regard significatif. Et quand ma sœur vous regarde d’un air significatif, il est difficile de faire celui qui ne comprend pas. C’est pourtant ce que je fis.

— Je ne vois pas ce que tu veux dire. Pourquoi miss Russell ne serait-elle pas venue me voir ? Elle a mal au genou.

— Mal au genou, répéta Caroline. À d’autres ! Elle n’a pas plus mal au genou que toi ou moi. C’est autre chose qu’elle voulait.

— Ah oui, et quoi ?

Là, ma sœur dut reconnaître son ignorance.

— Mais sois tranquille, ajouta-t-elle, c’est ce qu’il cherchait à savoir… M. Poirot, je veux dire. Il y a quelque chose de louche chez cette femme. Et il s’en est aperçu.

— Tiens ! c’est justement ce que me disait Mrs Ackroyd hier. Qu’il y avait quelque chose de louche chez miss Russell.

Caroline se rembrunit.

— Ah, Mrs Ackroyd ! En voilà une qui…

— Qui quoi ?

Mais ma sœur se refusa à tout commentaire. Elle se contenta de hocher plusieurs fois la tête, roula son tricot et monta dans sa chambre pour revêtir sa blouse de soie mauve, sur laquelle elle porte un médaillon en or. C’est ce qu’elle appelle « s’habiller pour dîner ».

Je m’attardai en bas à contempler les flammes, tout en réfléchissant aux paroles de ma sœur. Poirot était-il réellement venu pour se renseigner sur miss Russell, ou l’esprit alambiqué de ma sœur avait-il tout interprété selon ses vues personnelles ? Rien, dans l’attitude de miss Russell, ne m’avait paru suspect, sinon…

Je me rappelai son insistance à ramener la conversation sur les drogués, le poison et les empoisonneurs. Mais cela ne voulait rien dire. Ackroyd n’avait pas été empoisonné. Tout de même, c’était curieux…

De l’étage me parvint la voix de Caroline, plutôt acide, me sembla-t-il.

— James, tu vas être en retard pour le dîner.

Je mis du charbon sur la grille et montai docilement me préparer. Chaque chose a son prix, et rien ne vaut la paix chez soi.

12

Tour de table

Une confrontation officielle eut lieu le lundi.

Je n’en rapporterai pas tous les détails, ce qui donnerait lieu à des répétitions fastidieuses. Avec l’accord de la police, nous nous arrangeâmes pour éviter toute publicité. Ma déposition porta sur la cause et l’heure probable de la mort d’Ackroyd. Le coroner nota l’absence de Ralph Paton, mais évita de s’appesantir sur le sujet. Après quoi, Poirot et moi échangeâmes quelques mots avec l’inspecteur Raglan. Ce dernier se montra très soucieux.

— Tout cela ne me dit rien qui vaille, monsieur Poirot, et j’essaie de juger ce cas sans parti pris. Je suis du pays et j’ai rencontré souvent le capitaine Paton à Cranchester. Je ne tiens pas à le déclarer coupable, mais que voulez-vous ? Tout l’accable. S’il est innocent, pourquoi ne se manifeste-t-il pas ? Nous possédons des charges contre lui, mais il pourrait très bien se disculper. Alors pourquoi ne le fait-il pas ?

J’ignorais encore, à ce moment-là, tout ce qu’impliquaient les paroles de l’inspecteur. Le signalement de Ralph avait été diffusé dans tous les ports et toutes les gares du royaume. La police était sur le pied de guerre. On surveillait l’appartement de Ralph et tous les endroits où il avait l’habitude de se montrer.

Avec un tel déploiement de forces, il semble impossible que Ralph pût s’échapper. Il n’avait pas de bagages, et vraisemblablement pas d’argent non plus.

— Je n’ai pu trouver personne qui l’ait vu à la gare ce soir-là, reprit l’inspecteur, et pourtant il est très connu, par ici. On pouvait s’attendre à ce que quelqu’un l’ait remarqué. Aucune nouvelle de Liverpool non plus.

— Vous pensez qu’il est allé à Liverpool ? demanda Poirot.

— Ce n’est pas impossible. Cet appel téléphonique de la gare, juste avant le départ de l’express de Liverpool… c’est peut-être une piste.

— Ou une fausse piste, dans l’intention de vous égarer, précisément. Ce qui expliquerait ce coup de téléphone.

— C’est une idée ! s’exclama vivement l’inspecteur. Croyez-vous réellement que ce soit l’explication de ce message ?

— Je ne sais pas, mon ami, dit gravement Poirot. Mais laissez-moi vous dire ceci : à mon avis, quand nous aurons l’explication de ce coup de téléphone, nous aurons aussi celle du meurtre.

Je le regardai avec curiosité.

— Je me souviens de vous l’avoir déjà entendu dire.

Il fit un signe affirmatif et déclara d’un ton sérieux :

— J’en reviens toujours à ça.

— Cela me semble tout à fait arbitraire, observai-je.

— Je n’irai pas jusque-là, rétorqua l’inspecteur, mais je dois avouer que M. Poirot attache un peu trop d’importance à ce détail. Nous avons de meilleurs indices : les empreintes digitales, par exemple. Celles qu’on a trouvées sur le poignard.

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