L’ermite
A Félix Fénéon
Un ermite déchaux près d’un crâne blanchi
Cria Je vous maudis martyres et détresses
Trop de tentations malgré moi me caressent
Tentations de lune et de logomachies
Trop d’étoiles s’enfuient quand je dis mesprières
Ô chef de morte Ô vieil ivoire OrbitesTrous
Des narines rongées J’ai faim Mes criss’enrouent
Voici donc pour mon jeûne un morceau degruyère
Ô Seigneur flagellez les nuées du coucher
Qui vous tendent au ciel de si jolis culsroses
Et c’est le soir les fleurs de jour déjà seclosent
Et les souris dans l’ombre incantent leplancher
Les humains savent tant de jeux l’amour lamourre
L’amour jeu des nombrils ou jeu de la grandeoie
La mourre jeu du nombre illusoire desdoigts
Saigneur faites Seigneur qu’un jour jem’énamoure
J’attends celle qui me tendra ses doigtsmenus
Combien de signes blancs aux ongles lesparesses
Les mensonges pourtant j’attends qu’elle lesdresse
Ses mains énamourées devant moi l’Inconnue
Seigneur que t’ai-je fait Vois Je suisunicorne
Pourtant malgré son bel effroiconcupiscent
Comme un poupon chéri mon sexe estinnocent
D’être anxieux seul et debout comme uneborne
Seigneur le Christ est nu jetez jetez surlui
La robe sans couture éteignez les ardeurs
Au puits vont se noyer tant de tintementsd’heures
Quand isochrones choient des gouttes d’eau depluie
J’ai veillé trente nuits sous leslauriers-roses
As-tu sué du sang Christ dans Gethsémani
Crucifié réponds Dis non Moi je le nie
Car j’ai trop espéré en vain l’hématidrose
J’écoutais à genoux toquer les battements
Du cœur le sang roulait toujours en sesartères
Qui sont de vieux coraux ou qui sont desclavaines
Et mon aorte était avare éperdument
Une goutte tomba Sueur Et sa couleur
Lueur Le sang si rouge et j’ai ri desdamnés
Puis enfin j’ai compris que je saignais dunez
A cause des parfums violents de mes fleurs
Et j’ai ri du vieil ange qui n’est pointvenu
De vol très indolent me tendre un beaucalice
J’ai ri de l’aile grise et j’ôte moncilice
Tissé de crins soyeux par de cruels canuts
Vertuchou Riotant des vulves des papesses
De saintes sans tétons j’irai vers lescités
Et peut-être y mourir pour ma virginité
Parmi les mains les peaux les mots et lespromesses
Malgré les autans bleus je me dresse divin
Comme un rayon de lune adoré par la mer
En vain j’ai supplié tous les saintsaémères
Aucun n’a consacré mes doux pains sanslevain
Et je marche Je fuis ô nuit Lilith ulule
Et clame vainement et je vois de grandsyeux
S’ouvrir tragiquement Ô nuit je vois tescieux
S’étoiler calmement de splendides pilules
Un squelette de reine innocente est pendu
A un long fil d’étoile en désespoir sévère
La nuit les bois sont noirs et se meurtl’espoir vert
Quand meurt les jour avec un râleinattendu
Et je marche je fuis ô jour l’émoi del’aube
Ferma le regard fixe et doux de vieuxrubis
Des hiboux et voici le regard des brebis
Et des truies aux tétins roses comme deslobes
Des corbeaux éployés comme des tildes font
Une ombre vaine aux pauvres champs de seiglemûr
Non loin des bourgs où des chaumières sontimpures
D’avoir des hiboux morts cloués à leurplafond
Mes kilomètres longs Mes tristessesplénières
Les squelettes de doigts terminant lessapins
Ont égaré ma route et mes rêves poupins
Souvent et j’ai dormi au sol dessapinières
Enfin Ô soir pâmé Au bout de mes chemins
La ville m’apparut très grave au son descloches
Et ma luxure meurt à présent quej’approche
En entrant j’ai béni les foules des deuxmains
Cité j’ai ri de tes palais tels que destruffes
Blanches au sol fouillé de clairièresbleues
Or mes désirs s’en vont tous à la queue leuleu
Ma migraine pieuse a coiffé sa cucuphe
Car toutes sont venues m’avouer leurspéchés
Et Seigneur je suis saint par le vœu desamantes
Zélotide et Lorie Louise et Diamante
Ont dit Tu peux savoir ô toi l’effarouché
Ermite absous nos fautes jamais vénielles
Ô toi le pur et le contrit que nous aimons
Sache nos cœurs sache les jeux que nousaimons
Et nos baisers quintessenciés comme dumiel
Et j’absous les aveux pourpres comme leursang
Des poétesses nues des fées des formarines
Aucun pauvre désir ne gonfle ma poitrine
Lorsque je vois le soir les coupless’enlaçant
Car je ne veux plus rien sinon laisser seclore
Mes yeux couple lassé au verger pantelant
Plein du râle pompeux des groseillerssanglants
Et de la sainte cruauté des passiflores