Contes

La Curiosité

Un jour, un roi, qui était à la chasse, seperdit. Comme il cherchait le chemin, il entendit parler, ets’étant approché de l’endroit d’où sortait la voix, il vit un hommeet une femme qui travaillaient à couper du bois. La femmedisait :

« Il faut avouer que notre mère Ève étaitbien gourmande, d’avoir mangé de la pomme. Si elle avait obéi àDieu, nous n’aurions pas la peine de travailler tous lesjours. » L’homme lui répondit :

« Si Ève était une gourmande, Adam étaitbien sot de faire ce qu’elle lui disait. Si j’avais été en saplace, et que vous m’eussiez voulu faire manger de ces pommes, jevous aurais donné un bon soufflet, et je n’aurais pas vouluseulement vous écouter. »

Le roi s’approcha, et leur dit :

« Vous avez donc bien de la peine, mespauvres gens.

– Oui, monsieur, répondirent-ils (car ils nesavaient pas que c’était le roi), nous travaillons comme deschevaux, depuis le matin jusqu’au soir, et encore nous avons biendu mal à vivre.

– Venez avec moi, leur dit le roi, je vousnourrirai sans travailler. »

Dans le moment les officiers du roi, qui lecherchaient, arrivèrent ; et les pauvres gens furent bienétonnés et bien joyeux. Quand ils furent dans le palais, le roileur fit donner de beaux habits, un carrosse, des laquais ; ettous les jours ils avaient douze plats pour leur dîner. Au boutd’un mois, on leur servit vingt-quatre plats : mais dans lemilieu de la table, on en mit un grand qui était fermé. D’abord, lafemme qui était curieuse, voulut ouvrir ce plat ; mais unofficier du roi, qui était présent, lui dit que le roi leurdéfendait d’y toucher, et qu’il ne voulait pas qu’ils vissent cequi était dedans. Quand les domestiques furent sortis, le maris’aperçut que sa femme ne mangeait pas et qu’elle étaittriste ; il lui demanda ce qu’elle avait, et elle lui réponditqu’elle ne se souciait pas de manger de toutes les bonnes chosesqui étaient sur la table, mais qu’elle avait envie de ce qui étaitdans ce plat couvert :

« Vous êtes folle, lui dit son mari, nevous a-t-on pas dit que le roi nous le défendait ?

– Le roi est un injuste, dit la femme ;s’il ne voulait pas que nous vissions ce qui est dans ce plat, ilne fallait pas le faire servir sur la table. »

En même temps, elle se mit à pleurer, et ditqu’elle se tuerait, si son mari ne voulait pas ouvrir le plat.Quand son mari la vit pleurer, il fut bien fâché, et comme ill’aimait beaucoup, il lui dit qu’il ferait tout ce qu’ellevoudrait, pour qu’elle ne se chagrinât pas. En même temps, ilouvrit le plat, et il en sortit une petite souris, qui se sauvadans la chambre. Ils coururent après elle pour la rattraper ;mais elle se cacha dans un petit trou, et aussitôt le roi entra,qui demanda où était la souris.

« Sire, dit le mari, ma femme m’atourmenté, pour voir ce qui était dans le plat, je l’ai ouvertmalgré moi, et la souris s’est sauvée.

– Ah, ah ! dit le roi, vous disiez que sivous eussiez été à la place d’Adam, vous eussiez donné un souffletà Ève, pour lui apprendre à être curieuse et gourmande : ilfallait vous souvenir de vos promesses. Et vous, méchantefemme : vous aviez toutes sortes de bonnes choses, comme Ève,et cela n’était pas assez ; vous vouliez manger du plat que jevous avais défendu. Allez, malheureux, retournez travailler dans lebois, et ne vous en prenez plus à Adam et à sa femme, du mal quevous aurez, puisque vous avez fait une sottise pareille à celledont vous les accusiez. »

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