La Grande Ombre

Chapitre 3L’OMBRE SUR LES EAUX

Il ne fallut pas longtemps à la cousine Ediepour régner souverainement à West Inch et pour faire de nous tous,y compris mon père, ses sujets.

Elle avait de l’argent, et tant qu’ellevoulait, bien qu’aucun de nous ne sût combien.

Lorsque ma mère lui dit que quatre shillingspar semaine paieraient toutes ses dépenses, elle porta spontanémentla somme à sept shillings six pence.

La chambre du sud, la plus ensoleillée, etdont la fenêtre était encadrée de chèvrefeuille, lui fut assignée,et c’était merveille de voir les bibelots qu’elle avait apportés deBerwick pour les y ranger.

Elle faisait le voyage deux fois par semaine,et comme la carriole ne lui plaisait pas, elle loua le gigd’Angus Whitehead, qui avait la ferme de l’autre côté de lacôte.

Et il était rare qu’elle revînt sans apporterquelque chose pour l’un de nous ; une pipe de bois pour monpère, un plaid des Shetlands pour ma mère, un livre pour moi, uncollier de cuivre pour Rob, notre collie.

Jamais on ne vit femme plus dépensière.

Mais ce qu’elle nous donna de meilleur, ce futavant tout sa présence.

Pour moi, cela changea entièrement l’aspect dupaysage.

Le soleil était plus brillant, les collinesplus vertes et l’air plus doux depuis le jour de sa venue.

Nos existences perdirent leur banalité,maintenant que nous les passions avec une telle créature, et lavieille et morne maison grise prit un tout autre aspect à mes yeuxdepuis le jour où elle avait posé le pied sur le paillasson de laporte.

Cela ne tenait point à sa figure, qui pourtantétait des plus attrayantes, non plus qu’à sa tournure, bien que jen’aie vu aucune jeune fille qui pût rivaliser en cela avec elle.C’était son entrain, ses façons drôlement moqueuses, sa manièretoute nouvelle pour nous de causer, le geste fier avec lequel ellerejetait sa robe ou portait la tête en arrière.

Nous nous sentions aussi bas que la terre sousses pieds.

C’était enfin ce vif regard de défi, et cettebonne parole qui ramenait chacun de nous à son niveau.

Mais non, pas tout à fait à son niveau.

Pour moi, elle fut toujours une créaturelointaine et supérieure.

J’avais beau me monter la tête et me faire desreproches.

Quoi que je fisse, je n’arrivais pas àreconnaître que le même sang coulait dans nos veines et qu’ellen’était qu’une jeune campagnarde, comme je n’étais qu’un jeunecampagnard.

Plus je l’aimais, plus elle m’inspirait decrainte, et elle s’aperçut de ma crainte longtemps avant de savoirque je l’aimais.

Quand j’étais loin d’elle, j’éprouvais del’agitation, et pourtant lorsque je me trouvais avec elle, j’étaissans cesse à trembler de crainte que quelque faute commise enparlant ne lui causât de l’ennui ou ne la fâcha.

Si j’en avais su plus long sur le caractèredes femmes, je me serais peut-être donné moins de mal.

– Vous êtes bien changé de ce que vous étiezautrefois, disait-elle en me regardant de côté par-dessous ses cilsnoirs.

– Vous ne disiez pas cela lorsque nous noussommes vus pour la première fois, dis-je.

– Ah ! je parlais alors de l’air que vousaviez, et je parle de vos manières d’aujourd’hui. Vous étiez sibrutal avec moi et si impérieux, et vous ne vouliez faire qu’àvotre tête, comme un petit homme que vous étiez. Je vous revoisencore avec votre tignasse emmêlée et vos yeux pleins de malice. Etmaintenant vous êtes si douce, si tranquille. Vous avez le langagesi prévenant !

– On apprend à se conduire, dis-je.

– Oh ! mais Jock, je vous aimais bienmieux comme vous étiez.

Eh bien, quand elle dit cela, je la regardaibien en face, car j’aurais cru qu’elle ne m’avait jamais bienpardonné la façon dont je la traitais d’ordinaire.

Que ces façons là plussent à tout autre qu’àune personne évadée d’une maison de fous, voilà qui dépassait toutà fait mon intelligence.

Je me rappelai le temps, où la surprenant surle seuil en train de lire, je fixais au bout d’une baguetteélastique de coudrier de petites boules d’argile, que je luilançais, jusqu’à ce qu’elle finît par pleurer.

Je me rappelai aussi qu’ayant pris uneanguille dans le ruisseau de Corriemuir, je la poursuivis, cetteanguille à la main, avec tant d’acharnement qu’elle finit par seréfugier, à moitié folle d’épouvante, sous le tablier de ma mère,et que mon père m’asséna sur le trou de l’oreille un coup de bâtonà bouillie qui m’envoya rouler, avec mon anguille, jusque sous ledressoir de la cuisine.

Voilà donc ce qu’elle regrettait ?

Eh bien, elle se résignerait à s’en passer,car ma main se sécherait avant que je sois capable de recommencermaintenant.

Mais je compris alors pour la première fois,tout ce qu’il y a d’étrange dans la nature féminine, et je reconnusque l’homme ne doit point raisonner à ce propos, mais simplement setenir sur ses gardes et tâcher de s’instruire.

Nous nous trouvâmes enfin au même niveau,quand elle dit qu’elle n’avait qu’à faire ce qui lui plaisait etcomme cela lui plaisait, et que j’étais aussi entièrement à sesordres que le vieux Rob était docile à mon appel.

Vous trouvez que j’étais bien sot de melaisser mettre ainsi la tête à l’envers.

Je l’étais peut-être, mais il faut aussi vousrappeler combien j’avais peu l’habitude des femmes, et que nousnous rencontrions à chaque instant.

En outre, on ne trouve pas une femme commecelle-là sur un million, et je puis vous garantir que celui-làaurait eu la tête solide, qui ne se la serait pas laissé mettre àl’envers par elle.

Tenez, voilà le Major Elliott.

C’était un homme qui avait enterré troisfemmes et qui avait figuré dans douze batailles rangées.

Eh bien ! Edie aurait pu le rouler autourde son doigt comme un chiffon mouillé, elle qui sortait à peine depension.

Peu de temps après qu’elle fut venue, je lerencontrai, comme il quittait West Inch, toujours clopinant, maisle rouge aux joues, et avec une lueur dans l’œil qui lerajeunissait de dix ans.

Il tordait ses moustaches grises des deuxcôtés, de façon à en avoir les pointes presque dans les yeux, et iltendait sa bonne jambe avec autant de fierté qu’un joueur decornemuse.

Que lui avait-elle dit ?

Dieu le sait, mais cela avait fait dans sesveines autant d’effet que du vin vieux.

– Je suis monté pour vous voir, mon garçon,dit-il, mais il faut que je rentre à la maison. Toutefois ma visiten’a pas été perdue, car elle m’a procuré l’occasion de voir labelle cousine, une jeune personne des plus charmantes, desplus attrayantes, mon garçon.

Il avait une façon de parler un peuformaliste, un peu raide, et il se plaisait à intercaler dans sespropos quelques bouts de phrases françaises qu’il avait ramassésdans la Péninsule.

Il aurait continué à me parler d’Edie, mais jevoyais sortir de sa poche le coin d’un journal.

Je compris alors qu’il était venu, selon sonhabitude, pour m’apporter quelques nouvelles.

Il ne nous en arrivait guère à West Inch.

– Qu’y a-t-il de nouveau, major ?demandai je.

Il tira le journal de sa poche et lebrandit.

– Les Alliés ont gagné une grande bataille,mon garçon, dit-il. Je ne crois pas que Nap tienne bien longtempsaprès cela. Les Saxons l’ont jeté par-dessus bord, et il a subi unrude échec à Leipzig. Wellington a franchi les Pyrénées et lessoldats de Graham seront à Bayonne d’ici à peu de temps.

Je lançai mon chapeau en l’air.

– Alors la guerre finira par cesser ?m’écriai je.

– Oui, et il n’est que temps, dit-il enhochant la tête d’un air grave. Ça a fait verser bien du sang. Maisce n’est guère la peine, maintenant, de vous dire ce que j’avaisdans l’esprit à votre sujet.

– De quoi s’agissait-il ?

– Eh bien, mon garçon, c’est que vous nefaites rien de bon ici, et maintenant que mon genou reprend un peude souplesse, je pensais pouvoir rentrer dans le service actif. Jeme demandais s’il ne vous plairait pas de voir un peu de la vie desoldat sous mes ordres.

À cette pensée mon cœur bondit.

– Ah ! oui, je le voudrais !m’écriai-je.

– Mais il se passera bien six mois avant queje sois en état de me présenter à l’examen médical, et il y a biendes chances pour que Boney soit mis en lieu sûr avant ce délai.

– Puis il y a ma mère, dis-je. Je doutequ’elle me laisse partir.

– Ah ! Eh bien, on ne le lui demanderapas cette fois.

Et il s’éloigna en clopinant.

Je m’assis dans la bruyère, mon menton dans lamain, en tournant et retournant la chose en mon esprit et suivantdes yeux le major en son vieux[1] habit brun,avec un bout de plaid voltigeant par-dessus son épaule, pendantqu’il grimpait la montée de la colline.

C’était une bien chétive existence, que cellede West Inch, où j’attendais mon tour de remplacer mon père, sur lamême lande, au bord du même ruisseau, toujours des moutons, ettoujours cette maison grise devant les yeux.

Et de l’autre côté, il y avait la merbleue.

Ah, en voilà une vie pour un homme !

Et le major, un homme qui n’était plus dans laforce de l’âge, il était blessé, fini, et pourtant il faisait desprojets pour se remettre à la besogne alors que moi, à la fleur del’âge, je dépérissais parmi ces collines !

Une vague brûlante de honte me monta à lafigure, et je me levai soudain, plein d’ardeur de partir, et dejouer dans le monde le rôle d’un homme.

Pendant deux jours, je ne fis que songer àcela.

Le troisième, il survint un événement quicondensa mes résolutions, et aussitôt les dissipa, comme un soufflede vent fait disparaître une fumée.

J’étais allé faire une promenade dansl’après-midi avec la cousina Edie et Rob.

Nous étions arrivé au sommet de la pente quidescend vers la plage.

L’automne tirait à sa fin.

Les herbes, en se flétrissant, avaient prisdes teintes de bronze, mais le soleil était encore clair etchaud.

Une brise venait du sud par bouffées courteset brûlantes et ridait de lignes courbes la vaste surface bleue dela mer.

J’arrachai une brassée de fougère pour qu’Ediepût s’asseoir. Elle s’installa de son air insouciant, heureuse,contente, car de tous les gens que j’ai connus, il n’en fut aucunqui aimait autant la chaleur et la lumière.

Moi, je m’assis sur une touffe d’herbe, avecla tête de Rob sur mon genou.

Comme nous étions seuls dans le silence de cedésert, nous vîmes, même en cet endroit, s’étendre sur les eaux, enface de nous, l’ombre du grand homme de là bas qui avait écrit sonnom en caractères rouges sur toute la carte d’Europe.

Un vaisseau arrivait poussé par le vent.

C’était un vieux navire de commerce à l’aspectpacifique, qui, peut-être avait Leith pour destination.

Il avait les vergues carrées et allait toutesvoiles déployées.

De l’autre côté, du nord est, venaient deuxgrands vilains bateaux, gréés en lougres, chacun avec un grand mâtet une vaste voile carrée de couleur brune.

Il était difficile d’avoir sous les yeux unplus joli coup d’œil que celui de ces trois navires qui marchaienten se balançant, par une aussi belle journée.

Mais tout à coup partit d’un des lougres unelangue de flamme, et un tourbillon de fumée noire.

Il en jaillit autant du second.

Puis le navire riposta : rap, rap,rap !

En un clin d’œil l’enfer avait, d’une pousséedu coude, écarté le ciel, et sur les eaux se déchaînaient la haine,la férocité, la soif de sang.

Au premier coup de feu, nous nous étionsrelevés, et Edie, toute tremblante, avait posé sa main sur monbras.

– Ils se battent, Jock, s’écria-t-elle. Quisont-ils ? Qui sont-ils ?

Les battements de mon cœur répondaient auxcoups de canon, et tout ce que je pus dire, avec ma respirationentrecoupée, ce fut :

– Ce sont deux corsaires français, deschasse-marée, comme ils les appellent là-bas, c’est un de nosnavires de commerce, et aussi sûr que nous sommes mortels, ils s’enempareront, car le major dit qu’ils sont toujours pourvus de grosseartillerie et qu’ils sont aussi bourrés d’hommes qu’il y a denourriture dans un boeuf. Pourquoi cet imbécile ne bat-il pas enretraite vers la barre à l’embouchure de la Tweed ?

Mais il ne diminua pas un pouce de toile.

Il se balançait toujours de son air entêté,pendant qu’une petite boule noire était hissée à la pointe de songrand mât, et que le magnifique vieux drapeau apparaissait tout àcoup et ondulait à ses drisses.

Puis se fit entendre de nouveau le rap, rap,rap ! de ses petits canons, suivi du boum ! boum !des grosses caronades qui armaient les baux du lougre.

Un instant plus tard, les trois naviresformaient un groupe.

Le navire-marchand oscilla comme un cerf avecdeux loups accrochés à ses hanches.

Tous trois ne formaient plus qu’une confusemasse noire enveloppée dans la fumée, d’où pointaient çà et là lesvergues. D’en haut et du centre de ce nuage partaient, commel’éclair, de rouges langues de flammes.

C’était un tapage si infernal de gros et depetits canons, de cris de joie, de hurlements, que pendant bien dessemaines mes oreilles en tintèrent encore.

Pendant une heure d’horloge, le nuage poussépar l’enfer se déplaça lentement sur les flots, et nous restâmeslà, le cœur saisi, à regarder le battement du pavillon, nousécarquillant les yeux pour voir s’il était toujours à sa place.

Puis, tout à coup, le vaisseau, plus fier,plus noir, plus ferme que jamais, se remit en marche.

Quand la fumée se fut un peu dissipée, nousvîmes un des lougres vacillant comme un canard qui tombe à l’eau,avec une aile cassée, tandis que sur l’autre, on se hâtaitd’embarquer l’équipage avant qu’il ne coulât à pic.

Pendant toute cette heure, toute ma vie avaitété concentrée dans la bataille.

Le vent avait emporté ma casquette, mais jen’y avais pas pris garde.

Alors, le cœur débordant, je me tournai versma cousine Edie, et rien qu’en la voyant je me retrouvai en arrièrede six ans.

Son regard avait repris sa fixité, ses lèvresétaient entrouvertes, comme quand elle était toute petite, et sesmains menues étaient jointes si fort que la peau luisait auxpoignets comme de l’ivoire.

– Ah ! ce capitaine ! dit-elle, enparlant à la bruyère et aux buissons de genêts, quel homme fort,quelle résolution ! Quelle est la femme qui ne serait pasfière d’un tel mari ?

– Ah ! oui, il s’est bien conduit !m’écriai-je avec enthousiasme.

Elle me regarda. On eût dit qu’elle avaitoublié mon existence.

– Je donnerais un an de ma vie pour rencontrerun pareil homme dit-elle, mais voilà où on en est quand on habitela campagne. On n’y voit jamais d’autres gens que ceux qui ne sontbons à rien faire de mieux.

Je ne sais si elle avait l’intention de mefaire de la peine, bien qu’elle ne se fit jamais beaucoup prierpour cela, mais quelle que fût son intention, ses paroles medonnèrent la même sensation que si elles avaient traversé toutdroit un nerf mis à nu.

– C’est très bien, cousine Edie, dis-je enm’efforçant de parler avec calme, voilà qui achève de me décider.J’irai ce soir m’enrôler à Berwick.

– Quoi ! Jock, vous voulez vous fairesoldat ?

– Oui, si vous croyez que tout homme qui resteà la campagne est nécessairement un lâche.

– Oh ! Jock, comme vous seriez beau enhabit rouge, comme vous avez meilleur air quand vous êtes oncolère. Je voudrais voir toujours vos yeux étinceler ainsi. Commecela vous va bien, comme cela vous donne l’air d’un homme !Mais j’en suis sûre, c’est pour plaisanter, que vous parlez de vousfaire soldat.

– Je vous ferai voir si je plaisante.

Puis, je traversai la lande en courant, etj’arrivai ainsi à la cuisine, ou ma mère et mon père étaient assisde chaque côté de la cheminée.

– Mère, m’écriai-je, je pars me fairesoldat.

Si je leur avais dit que je partais pour mefaire cambrioleur, ils n’auraient pas été plus atterrés, car en cetemps-là, les campagnards méfiants et aisés estimaient que letroupeau du sergent se composait principalement des moutonsnoirs.

Mais, sur ma parole, ces bêtes noires ontrendu un fameux service à leur pays.

Ma mère porta ses mitaines à ses yeux, et monpère prit un air aussi sombre qu’un trou à tourbe.

– Non ! Jock, vous êtes fou, dit-il.

– Fou ou non, je pars.

– Alors vous n’aurez pas ma bénédiction.

– En ce cas je m’en passerai.

À ces mots ma mère jette un cri et me met sesbras autour du cou.

Je vis sa main calleuse, déformée, pleine denœuds qu’y avait produits la peine qu’elle s’était donnés pourm’élevez, et cela me parla plus éloquemment que n’eût pu faireaucune parole.

Je l’aimais tendrement mais j’avais la volontéaussi dure que le tranchant d’un silex.

Je la forçai d’un baiser à se rasseoir ;puis je courus dans ma chambre pour préparer mon paquet.

Il faisait déjà sombre, et j’avais à parcourirun long trajet à pied.

Aussi me contentai-je de ramasser quelqueseffets. Puis je me hâtai de partir. Au moment où j’allais mettre lepied dehors par une porte de côté, quelqu’un me touchal’épaule.

C’était Edie, debout à la lueur ducouchant.

– Sot enfant, dit-elle, vous n’allez vraimentpoint partir ?

– Je ne partirai pas ? Vous allez levoir.

– Mais votre père ne le veut pas, votre mèrenon plus.

– Je le sais.

– Alors pourquoi partir ?

– Vous devez bien le savoir.

– Pourquoi, enfin.

– Parce que vous me faites partir.

– Je ne tiens pas à ce que vous partiez,Jock.

– Vous l’avez dit ; vous avez dit que lesgens de la campagne ne sont bons qu’à y rester. Vous tenez toujoursce langage. Vous ne faites pas plus cas de moi que de ces pigeonsdans leur nid. Vous trouvez que je ne suis rien du tout. Je vousferai changer d’idée.

Tous mes griefs partaient en petits jets quime brûlaient les lèvres.

Pendant que je parlais, elle rougit, et meregarda de son air à la fois railleur et caressant.

– Ah ! je fais si peu cas de vous ?dit-elle, et c’est pour cette raison là que vous partez ? Ehbien, Jock, est-ce que vous resterez si… si je suis bonne pourvous ?

Nous étions face à face et fort près.

En un instant la chose fut faite.

Mes bras l’entourèrent.

Je lui donnai baisers sur baisers, sur labouche, sur les joues, sur les yeux.

Je la pressai contre mon cœur.

Je lui dis bien bas quelle était tout pourmoi, tout, et que je ne pouvais pas vivre sans elle.

Edie ne répondit rien, mais elle fut longtempsavant de tourner la tête, et quand elle me repoussa en arrière,elle n’y mit pas beaucoup d’effort.

– Oh ! vous êtes bien rude, vieux petiteffronté, dit-elle en tenant sa chevelure de ses deux mains. Commevous m’avez secouée, Jock, je ne me figurais pas que vous seriezaussi hardi.

Mais j’avais tout à fait cessé de la craindre,et un amour, dix fois plus ardent que jamais, bouillait dans mesveines.

Je la ressaisis et l’embrassai comme si j’enavais eu le droit.

– Vous êtes à moi, bien à moi, m’écriai-je. Jen’irai pas à Berwick, je resterai ici et nous nous marierons.

Mais à ce mot de mariage, elle éclata derire.

– Petit nigaud ! petit nigaud !dit-elle en levant l’index.

Puis, comme j’essayais de mettre de nouveau lamain sur elle, Edie me fit une jolie petite révérence et rentra àla maison.

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