Chapitre 7COMMENT LAZARE ENTRA AU SERVICE D’UN CHAPELAIN ET CE QUI LUIARRIVA
Ensuite je servis un maître peintre detambourins, pour lui broyer ses couleurs, et, là encore, jesouffris mille maux.
Or, étant en ce temps assez grand garçon, unjour que j’étais entré dans la grande église, l’un de seschapelains me retint à son service et me bailla en charge un bonâne, quatre cruches et un fouet, pour porter de l’eau par la ville.Ce fut le premier échelon que je gravis pour atteindre la bonnevie, car alors je mangeais à ma faim. Chaque jour, je rapportais degain à mon maître trente maravédis, le samedi excepté, où jegagnais pour moi seul, et, outre cela, tous les jours, le surplusdes trente maravédis m’était encore laissé.
Le métier me réussit si bien qu’au bout dequatre ans, avec ce que j’avais épargné, je pus me vêtir forthonorablement à la friperie, où j’achetai un pourpoint de futaine,un saye râpé à manches passementées et à pochette, un manteau quiavait été frisé, et une épée de Cuellar, des vieillespremières.
Dès que je me vis en habit d’honnête homme, jedis à mon maître de reprendre son âne, ne voulant plus continuer cemétier.