Le Docteur Omega (Aventures fantastiques de trois Français dans la Planète Mars)

Chapitre 8LA VILLE DE FEU

– Qu’y a-t-il ?… demanda le docteuren se frottant les yeux…

Et, comme il s’apprêtait à faire jouer lecommutateur, je lui retins le bras et lui glissai ces mots àl’oreille :

– Là !… là !… regardez…

Il colla son visage à la vitre de répulsite etdemeura aussi impassible qu’un fakir…

– C’est curieux, fit-il enfin.

Puis après un instant :

– À n’en pas douter, cher ami, nous avonsaffaire à des fauves… Ces points lumineux, ce sont des yeux… jedistingue même des formes noires qui rasent le sol…

À peine avait-il achevé ces mots qu’il s’élevaun chœur de sourds grognements…

Puis ce fut un furieux tapage…

Peut-être les monstres avaient-ils entendu lebruit de nos voix…

Maintenant nous devinions qu’ils glissaientvers nous…

– Je vais tâcher de les éloigner, dit ledocteur Oméga, très calme comme toujours…

Et il tourna la manette d’ébène qui commandaitla grosse ampoule de notre phare d’avant…

Un flot de lumière inonda la plaine…

Affolées, les bêtes qui nous entouraient,d’énormes panthères noires aux têtes plates et aux crocs luisants,se mirent à bondir furieusement en décrivant des courbesfantastiques, fonçant, plongeant, virant désespérément… puis ellesdisparurent dans les herbes, en proie à une terreur folle…

Bientôt un grand silence régna sur la plaine…les fauves avaient regagné leurs tanières.

J’étais d’avis de faire mettre le moteur enmarche et de continuer notre route, mais le docteur s’yopposa :

– Est-il donc utile de courir au devantde nouveaux dangers, fit-il… Vous avez vu avec quelle facilité nousavons éloigné ces fauves… nous n’avons plus à redouter leur visite…d’ailleurs, s’ils revenaient, nous les recevrions avec quelques-unsde nos pétards…

Et le savant me frappa familièrement surl’épaule en disant :

– Allez dormir un peu, monsieur Borel, jevais prendre le quart…

Je vous prie de croire que je ne me fis pasrépéter cette invitation…

En moins de temps qu’il n’en faut pourl’écrire, je m’étais jeté sur la couche que venait de quitter ledocteur et je ne tardais pas à m’endormir d’un sommeil de plomb…car les émotions m’avaient brisé… anéanti…

Quand je rouvris les yeux, il faisait grandjour et nous roulions à toute allure au milieu d’une immenseplaine, unie comme une table de billard…

La végétation polaire avait fait place à uneautre beaucoup plus résistante, plus vivace quoique moinsénorme…

Ici, plus d’arbres géants, plus d’eucalyptusfantastiques.

C’étaient maintenant des prairies d’un jauned’or, émaillées de fleurs rouges, vertes et bleues… De petitesrivières couraient çà et là, formant par endroits de grandsmarécages, bordés d’arbres bizarres, presque dépourvus de brancheset dont les troncs unis ressemblaient assez à des colonnes demarbre.

Un murmure confus… des bruits profonds etmélancoliques montaient de la vallée.

On eût dit des plaintes… des gémissements etnous ne tardâmes pas à être convaincus que c’était le vent quiproduisait ce bruit…

Autour de nous, des nuages roulaient très basen énormes masses blanches comme la neige et, à travers le finbrouillard qu’ils formaient, nous aperçûmes au loin une multitudede collines et de vallons mauves sur lesquels, par endroits, seposaient des teintes roses et pourprées, vertes ou orangées…

J’étais absolument séduit par le spectacle decette nature inconnue…

Fred lui-même, qui n’était guèreimpressionnable en ce qui touchait à l’esthétique, ne cessait des’extasier sur toutes les merveilles qu’il découvrait.

Un mot, toujours le même, revenait à chaqueinstant sur ses lèvres :

– C’est féerique !…

Et de fait, c’était réellement féerique…

Rien ne pourrait égaler, je crois, labrillante splendeur de ces lieux sauvages… la troublante majesté deces solitudes infinies…

Le Cosmos filait toujours au milieude ces régions enchanteresses, quand, tout à coup, le docteurs’écria en se tournant vers nous :

– Monsieur Borel… Fred… vous qui avez uneexcellente vue… pouvez-vous me dire ce que l’on aperçoit là-bas… Ondirait une troupe en marche… Sont-ce des animaux ou deshommes ?…

– Oh ! des hommes… répondis-je aprèsavoir jeté les yeux dans la direction indiquée par le docteur… deshommes !… non, je ne le crois pas… Ils seraient énormes etvous savez que, dans ces régions, les représentants de l’espècehumaine sont plutôt des miniatures que des géants.

– Mais pardieu !… s’écria Fred quiavait pris une jumelle marine… ce sont des bêtes qui ressemblentjoliment à des éléphants…

Le docteur continua crânement d’avancer etbientôt notre curiosité fut satisfaite, car une troupe depachydermes se dessina nettement à quelques centaines demètres…

Quand nous ne fûmes plus qu’à une faibledistance d’eux, les géants martiens s’arrêtèrent, surpris, et ledocteur, par un brusque virage, fit décrire au Cosmos undemi-cercle…

Ces éléphants étaient monstrueux… On eût ditdes mammouths colossaux… Mais ce qui nous étonna surtout, ce futleur couleur.

Ils étaient roses, d’un rose tendre ;seules, leurs oreilles et leur queue étaient noires.

Ils portaient des défenses recourbées en formede crochet… et leurs pattes de devant paraissaient sensiblementplus longues que celles de derrière…

Ils prirent sans doute le Cosmos pourun animal, car ils se précipitèrent sur lui en faisant entendre uncri lugubre qui n’était pas un barrissement, mais plutôt une sortede ronflement sonore assez semblable à celui que poussent lesphoques lorsqu’ils remontent à la surface de l’eau après une longueplongée…

– Ces animaux-là ne doivent pas être bienterribles dit Fred.

– Peut-être, répondit le docteur… mais ilest plus prudent de les éviter… Entrer en collision avec eux pours’assurer de leur résistance, ce serait courir le risqued’endommager notre véhicule, et une « panne » n’auraitrien d’agréable dans ces régions, bien qu’elles soientmerveilleuses…

Bientôt les pachydermes ne furent plus à nosyeux qu’une petite ligne rosée qui, rapidement, s’atténua et sefondit sur l’horizon.

*

**

La chaleur commençait à se faire sentir. Nousrelevâmes sur le thermomètre 12 degrés au-dessus et, après le froidsibérien que nous avions éprouvé, cette température nous parutplutôt élevée… La plaine s’incurvait maintenant et une chaîne demontagnes apparaissait à notre droite… L’herbe de la jungle avaitchangé de couleur ; elle tirait sur le rouge et les plantesqui y croissaient avaient des formes nouvelles… Bientôt nousentendîmes comme un bruit de cataractes et nous aperçûmes sur notredroite des torrents écumeux qui descendaient des rochers pour sejeter dans un lac immense sur lequel flottaient des bêtes étranges.De loin, on eût dit des cygnes, mais de près, l’illusion n’étaitplus possible.

Figurez-vous des oiseaux ayant des têtes derequin, des ailes dentelées, en forme de croissant, des cousridiculement longs et flexibles, et vous aurez une idée desvolatiles aquatiques des terres martiennes.

– Décidément… tout est laid ici, remarquaFred, les hommes et les bêtes…

« Et tenez, ajouta-t-il en nous indiquantdu doigt un arbre énorme… voyez encore les vilains oiseaux quigrouillent par ici.

– Çà des oiseaux… jamais ! dit ledocteur. Tu ne remarques donc pas qu’ils ont des mains et despieds ?…

– C’est vrai… fis-je en écarquillant lesyeux… Ils ont même une tête humaine…

– Ce sont des hommes chauves-souris…d’énormes vampires, dit le docteur.

– Des vampires ! s’exclama Fred, enreculant effrayé…

– Oui, poursuivit le savant… après avoirarrêté le véhicule pour examiner ces animaux bizarres…

Leur corps rougeâtre, parsemé de poils blancs,avait une forme ramassée, ovoïde… Leur thorax large et bombédonnait attache à des muscles puissants et les mains de ceshorribles bêtes étaient garnies de membranes violettes qui,déployées, formaient des ailes très longues et triangulaires.

Quant à leur tête, c’était bien ce que l’onpouvait imaginer de plus hideux, de plus effrayant… Elle étaitronde et luisante comme du vieil ivoire… Leur masque, d’un bleud’acier, était orné de deux yeux glauques qu’on eût dit recouvertsd’une taie tant ils étaient vitreux et leur bouche ressemblaitabsolument à une blessure sanguinolente…

Ils agitaient continuellement une sorte dedard fourchu qui était leur langue et, par instants, des crocspointus apparaissaient entre la plaie vive de leur mâchoire.

Bien que je fusse à l’abri de leurs attaques,je ne pouvais regarder ces chauves-souris humaines sansfrissonner.

Elles avaient quelque chose de répugnant et deféroce et aujourd’hui, il m’arrive encore fréquemment de revoir cesmonstres pendant mon sommeil…

À un moment, deux de ces chéiroptères vinrentse poser sur le Cosmos et nous les entendîmes ramper surla coque du véhicule…

Le docteur qui regardait toujours par lehublot d’avant s’écria tout à coup :

– Oh ! voyez donc ces huttes…Sont-elles assez curieuses… quel joli travail !…

En effet, le long des arbres, à quelquesmètres de terre, s’élevaient des sortes de ruches couleur d’ocre,suspendues au moyen de lianes enchevêtrées… C’étaient les demeuresdes chauves-souris… On eût dit des nacelles que l’on auraitrecouvertes d’un dôme… Leurs parois étaient enduites d’une sorte degomme jaunâtre et l’orifice qui servait de porte affectait la formed’une fenêtre ogivale, joliment ouvragée. Les chéiroptères martiensétaient, à n’en pas douter, des êtres intelligents, artistesjusqu’au bout de leurs membranes.

– Nous approchons des centresintellectuels, dit le docteur Oméga. Les gnomes que nous avonsrencontrés sur le rivage dès notre arrivée, n’étaient que des êtresimparfaits, incultes, ceux-ci sont remarquables à tous les pointsde vue…

– Même comme laideur, m’exclamai-je…

– Ceci… je vous l’accorde, mais il estimpossible de ne pas éprouver pour ces monstres une véritableadmiration ; et tenez… il y a une chose que vous n’avezcertainement pas remarquée, monsieur Borel…

– Laquelle ?…

– C’est que les membranes qui nous ontfait prendre ces Martiens pour des chauves-souris sont toutsimplement artificielles…

Pour le coup, je ne pus retenir un bruyantéclat de rire…

Le docteur eut un imperceptible mouvementd’épaules et continua :

– Oui… parfaitement… artificielles… jedis bien… Voyez là-bas, près de cette ruche.

Et du doigt il m’indiqua une habitation dechéiroptère.

Il disait vrai…

Je vis deux Martiens ajuster à leurs mainsmaigres les membranes qui leur servaient d’ailes… Ainsi ces êtresimmondes, à la tête osseuse et repoussante, avaient résolu leproblème de l’aviation…

Ils avaient trouvé le moyen de voler comme desoiseaux !…

Plus loin, j’aperçus des monstres plusdélicats – des femmes chauves-souris sans doute – en train deconfectionner à l’aide de lianes très plates qui ressemblaient à duvarech, de longues bandes d’un tissu bizarre… qu’elles découpaientensuite en triangles égaux…

Évidemment ces laborieuses femellespréparaient des ailes pour leurs Icares !

– Nous sommes déjà dans les régionscivilisées, dis-je au docteur.

– Il y a longtemps déjà que je m’en suisaperçu, s’écria Fred…

– Toi…

– Oui… Qu’y a-t-il làd’extraordinaire ? Tout bête que je suis, j’ai bien remarquéque ces vilaines chauves-souris avaient des manières… commentdirai-je… des manières humaines… Ces particuliers-là ont une façonde vous regarder qui n’est pas ordinaire… L’homme sous-marin avaitl’air d’un idiot… les petits Martiens de la côte étaient descrétins… ceux-là… sont des roublards… et la preuve… tenez… ilsfument la pipe comme vous et moi…

C’était vrai…

Nous remarquâmes que deux ou troischauves-souris assises sur le devant de leurs cases tiraient desbouffées de fumée d’une sorte de tuyau recourbé qu’elles portaientà leurs lèvres avec une évidente satisfaction…

– Je serais curieux de connaître le tabacque fument ces cocos-là, dit Fred…

Mais bientôt une nuée de ces montres voletaautour de nous en poussant des cris que je ne puis mieux comparerqu’à ceux du paon…

– Allons… en route, dit le docteur. Iln’est pas prudent de rester au milieu de ces sauvages…

Fred mit le moteur en marche et l’automobiles’ébranla…

Cependant elle avançait à peine… On eût ditque, sur le sol quelque chose d’invisible la retenait…

Je jetai un coup d’œil par le hublotd’arrière, et ne pus retenir un cri d’horreur…

Le sol que nous foulions était tapissé de grosserpents noirs qui se roulaient, se tordaient en d’affreusesconvulsions… Il y en avait des centaines… que dis-je… des millierset le docteur fut obligé de mettre l’auto à la quatrième vitessepour franchir au plus vite ce tapis de reptiles.

Quand, enfin, nous eûmes retrouvé un terrainmoins dangereux, le savant ralentit l’allure et, se tournant versnous :

– Eh bien ! comprenez-vousmaintenant pourquoi les Martiens que nous venons de voir ont étéobligés de se fabriquer des ailes ?…

– Pour éviter les serpents, parbleu…répondis-je en riant…

– Oui et cela n’est déjà pas si bête… Larégion que nous venons de traverser est peuplée de boas terriens,de reptiles qui ne peuvent, à cause de leur conformation, monteraux arbres comme nos serpents terrestres… Ce sont plutôt d’énormesvers, dont l’étreinte doit être des moins agréables… Pour éviterles caresses meurtrières de ces hideux ennemis, les Martiens sesont confectionné des ailes et ont construit leurs maisons dansleurs arbres… Nous approchons du foyer de la civilisationmartienne, conclut sentencieusement le docteur.

Cette remarque, qui n’avait rien que de trèslogique, me plongea dans un abîme de réflexions… Jusqu’alors, nousavions pu triompher des habitants de la planète inconnue, mais quenous réservait l’avenir ?… Par une naturelle associationd’idées, j’en vins à conclure que puisque certains Martiens avaienteu l’ingéniosité de se fabriquer des ailes, nous arriverions sansdoute en des régions encore plus civilisées, plus instruites, oùces ailes seraient peut-être remplacées par des engins meurtrierset puissants… Il était évident, d’après ce que nous venions devoir, que ces terres inconnues recelaient des êtres très bien douéssous le rapport de l’intelligence…

Et je ne pouvais me défendre d’un légerfrisson en songeant que, bientôt peut-être, toute cette science,toute cette force que nous apportions de la Terre, ne nousservirait à rien.

*

**

Le Cosmos filait toujours…

Maintenant, nous avions la sensation trèsnette que nous approchions d’une ville…

En effet, la plaine n’était plus inculte commecelles que nous avions traversées jusqu’alors… Par-ci par-là, onvoyait des quartiers de terre symétriquement alignés et de couleurdifférente… Ici, c’étaient des bandes jaunâtres, là, des rectanglesrouges, plus loin, des carrés mauves et bleus, orangés ou rouxardent…

Il était certain que ce n’était pas le seulcaprice de la nature qui avait ainsi distribué ces teintes, disposéces divisions géométriques… Il n’y a que la main des hommes pourfaire un semblable travail…

Cependant, ce qui nous étonnait, c’était den’apercevoir aucun être vivant.

Et, chose curieuse, il nous semblait que parinstants, on voyait au loin la terre s’agiter, se soulever etretomber comme si une charrue énorme, l’eût bouleversée avec uneforce prodigieuse.

En regardant bien, nous nous aperçûmes qu’il yavait dans la plaine des sortes de chariots très bas qui marchaientparallèlement à une cinquantaine de brasses l’un de l’autre… On nevoyait aucun être humain sur ces véhicules, mais ils devaientcependant être actionnés par des Martiens… à en juger par lescourbes qu’ils décrivaient… À n’en pas douter c’étaient bien descharrues, mais par quel ingénieux mécanisme étaient-ellesmues ?

– Ce que je prévoyais se trouve en partievérifié, dit le docteur Oméga… sur cette planète où la forcephysique des habitants est insignifiante, c’est la mécanique quiremplace les bras…

« Tout ici se fait automatiquement… C’estvraiment très curieux et je suis impatient de voir dans un centred’activité ce peuple inconnu…

Pendant que le savant parlait, j’étais demeuréla figure collée à la vitre du Cosmos et j’observais avecune curiosité où se mêlait beaucoup d’anxiété, les horizonsmulticolores qui s’étendaient devant nous.

Le jour baissait lentement.

Soudain, je poussai une exclamation desurprise…

Dans le lointain, le ciel était zébré de raiesde feu… Cela montait, descendait comme des lanternes qu’une maininvisible aurait promenées dans l’espace…

Tantôt, ces petites lueurs prenaient unecouleur verdâtre, tantôt elles avaient l’éclat subit deséclairs…

Je crus d’abord que nous étions arrivés àquelques milles d’une montagne sur laquelle des êtres humainsagitaient des falots… Mais en regardant très attentivement je netardai pas à me rendre compte que nous n’avions aucun obstacledevant nous. D’ailleurs j’apercevais d’autres lueurs très loin dansla plaine.

– Vous vous demandez d’où proviennent ceslumières, me dit le docteur en souriant…

– Ma foi oui…

– Regardez bien… elles s’élèvent,s’abaissent, filent tout droit, puis soudain décrivent descourbes.

– C’est vrai.

– Cela ne vous indique rien ?

– Ma foi… J’avoue…

– Mais, ce sont des êtres animés quiilluminent ainsi le ciel !

– Des hommes chauves-souris, sans doute,s’écria Fred en faisant un bond.

– Non… répondit le docteur… Tenez… levezles yeux…

Nous regardâmes à travers le hublotsupérieur…

Une ligne de feu le traversa, puis une autre,et enfin nous distinguâmes deux grandes ailes flamboyantes…

– Ce sont des oiseaux lumineux, dit ledocteur…

– Quel drôle de pays, murmura Fred… Icice sont les volatiles qui remplacent les becs de gaz…Qu’allons-nous voir encore ! Ah ! crédié ! c’estvraiment merveilleux tout cela… et c’est moi qui ne regrette pasmon voyage…

Mais mon attention était maintenant attiréepar un autre spectacle. Dans le lointain, je venais d’apercevoir degrandes flammes bleuâtres qui montaient droit vers le ciel etretombaient brusquement pour s’élever de nouveau. On eût dit desjets de fontaines lumineuses.

Un bruit sourd, indéfini, lugubre, nousparvenait à travers l’enveloppe du Cosmos. J’ouvris unhublot et je crus parfaitement distinguer le choc de marteaux surdes enclumes…

– Que pensez-vous de cela, docteur ?demandai-je…

– Mon cher ami, c’est très simple. Noussommes probablement aux portes d’une grande ville, une villeindustrielle…

– Ne croyez-vous pas qu’il serait prudentde nous arrêter ici ?

– Peut-être, fit le savant…

Nous étions environ à un mille des flammesbleues, qui continuaient toujours à monter et à descendre avec unerégularité surprenante.

Le bruit des marteaux – ou de ce que nousprenions pour des marteaux – était assourdissant… Dieu ! quelvacarme ! Les Cyclopes ne devaient pas frapper plusvigoureusement sur l’enclume…

La nuit était maintenant complète et lesbattements continuaient toujours…

– Mais ils sont enragés, ces individus,remarqua le docteur… ils n’ont pas l’air de vouloir cesser leurtravail…

– En effet, dit Fred, ils ne sont paspour la journée de huit heures, ceux-là…

Nous nous apprêtions à prendre quelquenourriture et déjà la table était servie le long de la cloison duCosmos, quand soudain une violente secousse nous renversatous les trois les uns sur les autres…

En même temps le sol se mit à trembler et deslangues de feu jaillirent à quelques mètres de nous.

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