La Thébaïde ou Les Frères ennemis

Scène II

 

Antigone,Olympe

 

Antigone

Eh bien ! ma chère Olympe, as-tu vu ceforfait ?

 

Olympe

J’y suis courue en vain, c’en était déjàfait.

Du haut de nos remparts j’ai vu descendre enlarmes

Le peuple qui courait et qui criait auxarmes ;

Et pour vous dire enfin d’où venait saterreur,

Le roi n’est plus, Madame, et son frère estvainqueur.

On parle aussi d’Hémon : l’on dit que soncourage

S’est efforcé longtemps de suspendre leurrage,

Mais que tous ses efforts ont étésuperflus.

C’est ce que j’ai compris de mille bruitsconfus.

 

Antigone

Ah ! je n’en doute pas, Hémon estmagnanime ;

Son grand cœur eut toujours trop d’horreurpour le crime.

Je l’avais conjuré d’empêcher ce forfait,

Et s’il l’avait pu faire, Olympe, il l’auraitfait.

Mais, hélas ! leur fureur ne pouvait secontraindre :

Dans des ruisseaux de sang elle voulaits’éteindre.

Princes dénaturés, vous voilàsatisfaits :

La mort seule entre vous pouvait mettre lapaix.

Le trône pour vous deux avait trop peu deplace ;

Il fallait entre vous mettre un plus grandespace,

Et que le ciel vous mît, pour finir vosdiscords,

L’un parmi les vivants, l’autre parmi lesmorts.

Infortunés tous deux, dignes qu’on vousdéplore !

Moins malheureux pourtant que je ne suisencore,

Puisque de tous les maux qui sont tombés surnous,

Vous n’en sentez aucun, et que je les senstous !

 

Olympe

Mais pour vous ce malheur est un moindresupplice

Que si la mort vous eût enlevé Polynice.

Ce prince était l’objet qui faisait tous vossoins ;

Les intérêts du roi vous touchaient beaucoupmoins.

 

Antigone

Il est vrai, je l’aimais d’une amitiésincère ;

Je l’aimais beaucoup plus que je n’aimais sonfrère,

Et, ce qui lui donnait tant de part dans mesvœux,

Il était vertueux, Olympe, et malheureux.

Mais, hélas ! ce n’est plus ce cœur simagnanime,

Et c’est un criminel qu’a couronné soncrime.

Son frère plus que lui commence à metoucher :

Devenant malheureux, il m’est devenu cher.

 

Olympe

Créon vient.

 

Antigone

Il est triste ; et j’en connais lacause :

Au courroux du vainqueur la mort du roil’expose.

C’est de tous nos malheurs l’auteurpernicieux.

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