Acte I
Scène I
Jocaste,Olympe
Jocaste
Ils sont sortis, Olympe ? Ah !mortelles douleurs !
Qu’un moment de repos me va coûter depleurs !
Mes yeux depuis six mois étaient ouverts auxlarmes
Et le sommeil les ferme en de tellesalarmes ?
Puisse plutôt la mort les fermer pourjamais,
Et m’empêcher de voir le plus noir desforfaits !
Mais en sont-ils aux mains ?
Olympe
Du haut de la muraille
Je les ai vus déjà tous rangés enbataille ;
J’ai vu déjà le fer briller de toutesparts ;
Et pour vous avertir j’ai quitté lesremparts.
J’ai vu, le fer en main, Étéoclelui-même ;
Il marche des premiers, et d’une ardeurextrême
Il montre aux plus hardis à braver ledanger.
Jocaste
N’en doutons plus, Olympe, ils se vontégorger.
Que l’on coure avertir et hâter laprincesse ;
Je l’attends. Juste ciel, soutenez mafaiblesse !
Il faut courir, Olympe, après cesinhumains ;
Il les faut séparer, ou mourir par leursmains.
Nous voici donc, hélas ! à ce jourdétestable
Dont la seule frayeur me rendaitmisérable !
Ni prière ni pleurs ne m’ont de rienservi,
Et le courroux du sort voulait êtreassouvi.
Ô toi, soleil, ô toi qui rends le jour aumonde,
Que ne l’as-tu laissé dans une nuitprofonde !
À de si noirs forfaits prêtes-tu tesrayons ?
Et peux-tu sans horreur voir ce que nousvoyons ?
Mais ces monstres, hélas ! net’épouvantent guères :
La race de Laïus les a rendusvulgaires ;
Tu peux voir sans frayeur les crimes de mesfils,
Après ceux que le père et la mère ontcommis.
Tu ne t’étonnes pas si mes fils sontperfides,
S’ils sont tous deux méchants, et s’ils sontparricides ;
Tu sais qu’ils sont sortis d’un sangincestueux,
Et tu t’étonnerais s’ils étaient vertueux.