Le trappeur La Renardière – Au Canada, la tribu des Bois-Brûlés – Voyages, explorations, aventures

Chapitre 11Les chevaux sauvages.

 

– Monsieur La Feuille !

– Maître La Renardière ?

– Nous voici arrivés sur l’Athabaska etd’ici à l’embouchure du Mackensie, où nous trouveronsM. d’Ussonville, nous n’aurons plus à descendre du bateau.

– Vous en concluez ?

– Que c’est le moment de chasser lecheval sauvage.

Il faut monter notre équipage ; le vapeurne sera ici que dans huit ou dix jours ; nous avons letemps.

– Chassons donc le cheval sauvage, maîtreLa Renardière.

– Nous.

» Pas vous.

– Pourquoi donc ?

– Il faut forcer les chevaux à pied etfaire jusqu’à seize lieues.

– Je suis bon pour vingt.

– Vous, monsieur La Feuille ?

– Moi.

– Vous ne savez donc pas, monsieur LaFeuille, qu’un piqueur qui fait le bois pour trouver un loup et lerembucher doit couvrir de quinze à vingt lieues deterrain ?

– J’ignorais cela.

– Ah ! voilà, vous autres trappeurs,vous vous imaginez que nous autres piqueurs, nous ne peinonspas.

» Erreur.

» Nous faisons un dur métier.

– Je commence à le croire.

– Quand commençons-nous ?

– Demain.

» Vous viendrez avec moi tous les trois,uniquement pour voir.

» Ne sachant pas jeter le lasso, vous nepouvez prendre le cheval.

– Soit !

» Nous nous contenterons de voir.

Le lendemain, tous partaient, les jeunesBois-Brûlés comme les autres et armés du lasso.

Une corde devant servir de bridon, autour desreins.

L’on emportait de l’eau, du rhum et desgalettes de maïs avec de la venaison, chacun ayant sa musette.

On chercha un troupeau et on le trouvafacilement. À la vue des chasseurs, il se mit à détaler.

– Ah ! fit La Renardière.

» Des tourné-à-droite !

» C’est rare.

– Expliquez-nous ça.

– Monsieur La Feuille, presque tous lesanimaux sauvages fuyant détournent à gauche pour décrire leurscercles et, quand ils ont commencé d’un côté, ils n’en changentplus.

» Or, ceux-ci sont droitiers.

– J’ai déjà remarqué qu’un cerf qui atourné une fois d’un côté, persiste à y tourner, à moins d’unincident de chasse qui le force à changer de manière.

– Mais l’homme lui-même, monsieur LaFeuille, quand il s’est égaré dans la nuit, tourne sans s’en douteret presque toujours à gauche.

» Aussi nous en défions-nous.

On marcha.

On revit le troupeau.

Il était aux écoutes et déjà un peu dispersé.Il s’enfuit par sa droite.

Les chasseurs coupèrent le cercle et lemalheureux troupeau, très dispersé cette fois, repartit augalop.

Alors chacun choisit un animal et s’acharnasur lui.

Le cheval, toujours décrivant ses cercles,prend le galop à la vue du chasseur et celui-ci, par sa façon decouper le cercle gagne deux tiers et plus sur le cheval, car ilsuffit que celui-ci aperçoive le chasseur pour détaler.

On croirait que celui-ci est sur un manègeimmense, tient le cheval par une longue corde et le force à galoperen rond.

Enfin le cheval est forcé.

« À l’hallali », comme dit LaFeuille. On était sur le tard.

On put suivre l’animal au pas et l’approcher.La Renardière lui lança son lasso et l’arrêta net.

La pauvre bête n’en pouvait plus ; touten la maintenant d’une main par le lasso, le trappeur lui passa desnœuds coulants aux pieds de derrière et tira dessus, ce qui forçale cheval à s’asseoir, comme on dit d’un chien, sur son cul,posture que le cheval ne prend jamais de lui-même.

Le trappeur prit sa gourde arrosa les narinesdu cheval, le caressa, puis lui souffla longuement dans le nez.

Ceci est assez singulier.

Il y a là-dedans du magnétisme, car, à partirde ce moment, le cheval devient l’esclave du maître.

On le laisse se reposer pendant une heure,puis on le monte.

Il est dompté et docile et obéit aux pressionsdu pied et au bridon.

On retourna au camp.

Tous les Bois-Brûlés y rentrèrent avec uncheval.

L’avant-veille de l’arrivée du vapeur, oncessa de chasser ; l’équipage était complet.

Le bateau fut exact.

Il vint, au jour fixé.

Tout l’équipage de chasse à courre s’embarquaet l’on fit route pour l’embouchure du Mackensie, où l’on devaitrejoindre l’expédition d’Ussonville qui était en train de bâtir lepremier hôtel polaire.

Le lecteur verra que La Feuille et tout sonmonde y arrivèrent sans encombre.

À SUIVRE : « UN MARIAGEPOLAIRE »

Auteurs::

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer