Oblomov

Chapitre 9

 

Où sommes-nous ? Dans quel coin de terrebéni nous a transportés le songe d’Oblomoff ? Quelle admirablecontrée !

Là, il est vrai, point de mer, ni de hautesmontagnes, ni de rochers, ni d’abîmes, ni de sombres forêts :rien de grandiose, de sauvage, d’austère.

Et à quoi bon le sauvage et legrandiose ? La mer, par exemple ? Dieu la bénisse !Elle n’apporte à l’homme que mélancolie : en la contemplant ona envie de pleurer. L’âme reste interdite d’effroi devant la nappeimmense des eaux : l’homme ne trouve rien pour reposer sonregard fatigué par la monotonie, de l’infini tableau.

Le roulement et le mugissement furieux desvagues n’ont rien de caressant pour sa faible oreille ;toujours les vagues répètent, depuis l’origine du monde, leursmêmes strophes, au sens lugubre et mystérieux, et toujours onentend le même gémissement et les mêmes plaintes, semblables auxplaintes d’un monstre voué à d’éternels tourments : on diraitles voix perçantes et sinistres des âmes en peine.

Sur ses bords point d’oiseaux quigazouillent ; seulement des mouettes silencieuses, comme descondamnées, qui voltigent tristement le long du rivage ettournoient au-dessus des ondes.

Le rugissement de la bête féroce est faible,devant ces clameurs de la nature, la voix de l’homme est étouffée,et l’homme lui-même semble si petit, si impuissant ! ils’efface si complètement dans les menus détails de l’immensetableau ! C’est pour cela peut-être que la contemplation de lamer lui est si pénible.

Non, Dieu la bénisse, la mer ! Même dansson calme et dans son immobilité, elle n’inspire aucun douxsentiment à l’âme : dans l’ondulation à peine sensible de lamasse d’eau, l’homme voit toujours la même puissanceextraordinaire, quoique endormie, qui en d’autres instants raillesi amèrement son orgueilleuse volonté et ensevelit si profondément,avec ses audacieux desseins, le fruit de ses labeurs et de sespeines.

Les montagnes et les abîmes n’ont pas été nonplus créés pour l’agrément de l’homme. Ils sont terribles etmenaçants comme les dents et les griffes que la bête féroce sort etdirige contre lui ; ils lui rappellent trop vivement sa naturemortelle et le frappent d’angoisse et de crainte pour sa vie.

Et puis le ciel là-bas, au-dessus des rocherset des abîmes, apparaît si éloigné et si impossible à atteindre,comme s’il s’était retiré des hommes !

Il n’est pas ainsi, le paisible petit coin oùse trouva soudain notre héros. Là, le ciel semble, au contraire,descendre et se serrer davantage contre la terre, non pour lancerplus fort ses tonnerres, mais peut-être pour l’étreindre avec plusd’amour : on dirait qu’il s’étend si bas au-dessus de la tête,– comme le toit le plus sûr, le toit paternel, – pour l’abriter, cepetit coin choisi, contre tout désastre.

Là, le soleil brille clair et chaud pendantprès de six mois, puis il s’éloigne, non tout d’un coup, mais commeà contre-cœur, comme s’il se retournait pour jeter encore un oudeux regards sur la contrée favorite, et lui faire don, pendant lespluies d’automne, d’un jour tiède et serein.

Là, les montagnes ne sont que l’image de cesterribles montagnes qui s’élèvent ailleurs et qui épouvantentl’imagination. C’est une rangée de collines qui vont en pentedouce, du haut desquelles il est agréable, en jouant, de rouler surle dos, et où l’on s’assied pour se perdre dans ses rêveries, enregardant le soleil couchant.

La rivière y court joyeuse et folâtre ;tantôt elle déborde en large étang, tantôt se précipite en filetsrapides, ou s’apaise comme rêveuse, et à peine, à peine rampe surles petits cailloux, envoyant de côté et d’autre des ruisseauxpétulants dont le murmure vous assoupit d’un sommeil sipaisible.

Tout ce petit coin, à quinze ou vingt verstesà l’entour, offre au peintre une série d’études pittoresques, degais et riants paysages. Le coteau à pente douce et sablonneuse,d’où les broussailles tentent de gagner jusqu’à l’eau ; leravin tortueux avec son ruisseau au fond, et le bouquet de bouleauxsemblent assortis exprès et dessinés de main de maître.

Un cœur vierge ou épuisé par les émotionsvoudrait se cacher dans ce petit coin, oublié du monde entier, et yvivre d’un bonheur ignoré du reste des hommes. Tout y promet unevie longue et paisible jusqu’à ce que les cheveuxjaunissent[48], et une mort insensible et semblable ausommeil.

L’année y accomplit son cours régulièrement etsans perturbations. D’après l’indication du calendrier, en marsarrive le printemps : alors, des coteaux accourent desruisseaux bourbeux ; la terre se dégèle et exhale une tiède etépaisse vapeur ; le paysan ôte la courte pelisse, sort à l’airen bras de chemise, et, voilant ses yeux de la main, se complaîtlongtemps à admirer le soleil, en se dilatant d’aise ; ensuiteil tire tantôt par un brancard, tantôt par l’autre, la charretterenversée, ou passe en revue et pousse du pied la charrueoisivement couchée sous l’auvent : c’est ainsi qu’il seprépare au travail accoutumé.

Là, les giboulées ne reviennent pas tout àcoup, la neige n’y comble pas les champs et n’y brise pas lesarbres. L’hiver, comme une belle inabordable, soutient soncaractère jusqu’au moment légal de la chaleur : la froidesaison ne vous fait point d’agaceries par des dégels inattendus, etne vous tord pas ensuite comme une corne par des geléesinouïes ; tout y marche suivant l’ordre général et habituel dela nature. En novembre arrivent la neige et le froid, quiaugmentent vers les Rois au point que le villageois mettant le pieddehors, rentre infailliblement la barbe blanche de givre ; enfévrier, le nez subtil flaire déjà par les airs le doux souffle desbrises printanières.

Mais l’été, l’été surtout est enivrant danscette contrée. C’est là qu’il faut chercher l’air frais, sec, nonpas embaumé par le citronnier ou le laurier, mais imprégné dessenteurs de l’absinthe, du pin et du cerisier à grappes ;c’est là qu’il faut chercher des jours sereins et tièdes, que lesoleil ne brûle point de ses feux, et que n’éclaire point, pendantprès de trois mois, un ciel sans nuage.

Quand viennent les beaux jours, ils durenttrois à quatre semaines ; la soirée est chaude et la nuitvaporeuse. Les étoiles clignotent aux cieux d’un air si affable, siamical !

Si la pluie tombe, quelle généreuse pluied’été ! Elle jaillit avec impétuosité, en abondance ;elle saute avec vigueur, tout comme les grosses larmes d’un hommesaisi d’une joie subite. Dès qu’elle a cessé, le soleil vient denouveau regarder avec un sourire d’amour et sécher les champs etles collines, et de nouveau toute la contrée répond au soleil parun sourire de bonheur.

Le villageois salue joyeusement la pluie.« La chère pluie mouillera, le cher soleilséchera ! » dit-il, en exposant avec volupté la face, lesépaules et le dos à la tiède averse. Là-bas les orages ne sont pasterribles, mais bienfaisants : ils arrivent toujours à la mêmeépoque, n’oubliant presque jamais la Saint-Élie, pour ne pas fairementir la tradition populaire[49].

Il paraît même que, chaque année, les coups detonnerre sont égaux en nombre et en force, tout à fait comme si legouvernement céleste dispensait pour la saison à toute la contréesa mesure habituelle d’électricité. Là, on n’entend parler nid’ouragans ni de désastres.

Jamais personne n’a eu occasion de lire dansles gazettes quelque chose de pareil sur ce petit coin béni deDieu. Et jamais on n’aurait rien imprimé ni rien entendu dire, siau village la veuve Marina Koulkova, âgée de vingt-huit ans,n’avait accouché de quatre enfants d’un coup, ce dont il fut detoute manière impossible de se taire.

Le seigneur n’avait jamais châtié cettecontrée ni de plaies d’Égypte ni de plaies ordinaires. Pas unhabitant ne se rappelle avoir vu dans le ciel aucun phénomèneeffrayant, ni globes de feu, ni ténèbres subites.

Là ne rampent point de reptilesvenimeux ; jamais n’y passent des nuées de sauterelles ;on n’y voit ni lions rugissants, ni tigres rauquants ; on n’yvoit même ni ours ni loups, parce qu’on n’y voit point deforêts.

Seulement, par les champs et le long duvillage, vaguent, grassement nourris, des moutons bêlants, desvaches ruminantes et des poules caquetantes.

Dieu sait si un poëte ou un amant de la naturese contenterait de ce petit coin paisible. Ces messieurs, nul nel’ignore, se plaisent à s’oublier en regardant la lune, et enécoutant les claquements de voix des rossignols. Ils aiment la lunecoquette, qui sait s’habiller de nuages paille et qui passemystérieusement à travers les branches des arbres, ou qui verse desgerbes de rayons argentés dans les yeux de ses adorateurs.

Mais dans cette contrée, personne ne sedoutait qu’il y eût une lune comme celle-là ; ils neconnaissaient que l’astre du mois[50]. L’astrecontemplait bénignement, de tous ses yeux, les villages et leschamps, et ressemblait à un beau clair bassin de cuivre.

En pure perte, un poëte serait resté en extasedevant leur lune : elle eût regardé le poëte aussi naïvementqu’une beauté villageoise, à la face ronde, regarde un mirliflorede la ville qui la poursuit de ses yeux éloquents etpassionnés.

Des rossignols non plus, on n’en entendaitchanter dans cette région ; peut-être parce qu’ils n’ytrouvaient ni roses ni asiles ombreux ; mais en compensation,mon Dieu ! quelle abondance de cailles !

En été, pendant la récolte, les jeunes garsles attrapent tout bonnement à la main. Qu’on ne pense pascependant que les cailles soient là-bas un objet de luxegastronomique, – non, une pareille dépravation n’a pas encoreatteint les mœurs des habitants de cette contrée.

La chair de la caille est défendue par lesrèglements de l’Église. Son chant fait là-bas les délices desoreilles humaines : voilà pourquoi, presque en chaque maison,sous le toit, dans une cage de filet, pend une caille.

L’aspect général de ce pays modeste et simplen’eut même point satisfait le poëte et le rêveur. Ils n’auraientpas réussi à y trouver une soirée quelconque dans le goût suisse ouécossais, quand toute la nature – et la forêt, et l’eau, et lesmurs des cabanes, et les collines de sable, – tout s’embrase desfeux du soleil couchant ; quand sur ce fond pourpré, trancheet s’estompe, par les détours de la route sablonneuse, unecavalcade de gentlemen qui viennent d’accompagner une lady dans sapromenade à travers les ruines mélancoliques, et qui pressent lepas vers un château fort, où les attendent un épisode de la guerredes deux Roses, raconté par l’aïeul, une biche pour le souper, etune ballade chantée sur le luth par une jeune miss, – charmantstableaux dont la plume de Walter Scott a si richement peuplé notreimagination. Non, on ne voit rien de tout cela dans notrecontrée.

Comme tout est paisible, comme tout sembledormir dans les trois ou quatre hameaux dont se compose ce petitcoin ! Ils étaient situés assez près les uns des autres, commesi, lancés par la main d’un géant, ils s’étaient éparpillés de touscôtés, et depuis avaient gardé leur position respective.

C’est ainsi qu’une cabane tomba surl’escarpement d’un ravin. Elle pend là de temps immémorial,s’avançant dans le vide et s’appuyant sur trois perches. Trois ouquatre générations y ont vécu paisibles et tranquilles.

Vous croiriez qu’une poule craindrait de s’yaventurer, et pourtant là habite, avec sa femme, Onissime Sousloff,homme solide, qui ne pourrait se tenir debout de toute sa tailledans la maison. Le premier venu ne saurait entrer dans la chaumièred’Onissime ; il faut que le visiteur obtienne d’elle par sesprières qu’elle tourne vers la forêt ses murs de derrière etlui présente sa porte[51].

Le perron pendait au-dessus du ravin, et, pourparvenir à y poser un pied, il fallait d’une main s’accrocher àl’herbe, de l’autre au toit de la chaumière, et ensuite faire unsaut. Une autre chaumière s’était attachée à la colline comme unnid d’hirondelle ; là par hasard se trouvaient de front troiscabanes, et deux au fond même du ravin.

Tout est paisible, tout semble dormir dans levillage ; les demeures silencieuses sont grandesouvertes ; on ne voit âme qui vive ; les mouches seulesvolent en nuées et bourdonnent dans l’air lourd de lamaisonnette.

C’est en vain que l’étranger, en y entrant,appellerait à haute voix : un silence de mort serait la seuleréponse ; dans quelque rare habitation, il entendrait ungémissement maladif ou la toux sourde d’une vieille achevant sa viesur le poêle ; il verrait sortir de derrière une cloison unenfant de trois ans, nu-pieds, à longs cheveux, en chemise ;l’enfant regarderait sans mot dire celui qui vient d’entrer et secacherait de nouveau tout effaré.

Le même profond silence, la même paixs’étendent sur les champs ; seulement, çà et là, pareil à unefourmi, travaille dans le sillon noir, sous le chaud soleil, lecultivateur, la main à la charrue et le front trempé de sueur.

La paix et la quiétude inaltérable règnentaussi dans les mœurs des gens de ce pays. Là on n’entendit jamaisparler ni de vol, ni d’assassinat, ni de brigandage : niviolentes passions, ni entreprises téméraires n’ont troublé lesâmes. Et quelles passions et quelles entreprises auraient pu lestroubler ? Chacun ne connaissait que soi-même.

Les habitants de cette contrée demeuraientassez loin des autres hommes. Les villages les plus rapprochés etla ville de district étaient à vingt-cinq et trente verstes dedistance.

À une époque déterminée, les villageoistransportaient le blé au port le plus voisin, sur le Volga, quiétait leur Colchide et leurs colonnes d’Hercule, et, une fois paran, quelques-uns allaient à la foire ; après cela, ilsn’avaient plus de relations avec personne. Leurs intérêts étaientconcentrés sur eux-mêmes, sans se mêler ni se heurter aux intérêtsdes autres.

Ils n’ignoraient pas qu’à quatre-vingtsverstes siégeait le Gouvernement, c’est-à-dire le chef-lieu de laprovince, mais peu y allaient et rarement ; ensuite, ilssavaient qu’un peu plus loin par là, il y avait Saratoff ouNijny ; ils avaient entendu parler de Moscou et dePétersbourg ; on leur avait dit que de l’autre côté dePétersbourg habitaient les Français ou les Allemands, et plus loincommençait pour eux, comme pour les anciens, un monde obscur, desrégions inconnues, peuplées de monstres, d’hommes à deux têtes, degéants ; puis venaient les ténèbres, – et enfin tout seterminait par le poisson qui porte la terre.

Et, comme leur petit coin est loin de toutpassage, ils ne pouvaient avoir des nouvelles plus fraîches de cequi se faisait dans le monde blanc[52]. Lescharretiers qui transportent la vaisselle de bois, ne demeuraientqu’a vingt verstes, et n’en savaient pas davantage.

Les habitants de ce pays ne pouvaient mêmecomparer leur existence avec celle des autres : Vivaient-ilsbien ou mal ? Étaient-ils riches ou pauvres ? Avaient-ilsquelque chose à envier aux autres ? etc.

Les heureuses gens vivaient persuadées que lemonde entier vivait absolument comme eux, et que vivre autrementétait un péché. Et ils ne l’auraient pas cru, si on leur avait ditque les autres labourent, sèment, récoltent, vendent d’une autrefaçon.

Quelles passions et quels troubles pouvait-ily avoir pour eux ? Chez eux, comme ailleurs, il y avait aussides soucis et des faiblesses : le payement des contributionset des redevances seigneuriales, la paresse et le sommeil ;mais ces charges leur étaient légères et ne leur remuaient point lesang.

Dans les dernières cinq années, des quelquescentaines d’âmes, personne n’était mort ni de mort violente, ni demort naturelle. Et si, par suite de la vieillesse ou de quelque malinvétéré, l’un d’eux s’endormait du sommeil éternel, longtempsaprès on ne pouvait trop s’étonner d’un événement aussiextraordinaire.

Et cependant, il ne leur parut nullementsurprenant que, par exemple, le maréchal-ferrant Tarasse se futpresque asphyxié en se fustigeant lui-même aux bains de vapeur, aupoint qu’il fallut employer l’eau pour le faire revenir.

Des crimes, un seul, le vol des pois, descarottes et des navets dans les potagers, était assezfréquent ; et puis une fois, tout à coup, disparurent deuxcochons de lait et une poule, accident qui mit en émoi loin lesalentours et qu’on attribua unanimement à une caravane chargée devaisselle de bois pour la foire, qui, la veille, avait passé par lepays. Hors de là les événements de toute espèce étaienttrès-rares.

Au reste, un jour, on trouva, couché dans lefossé d’un pacage, près du pont, un traînard d’une brigaded’ouvriers se rendant à la ville. Les petits gars le remarquèrentles premiers et, avec frayeur, accoururent au village, apportant lanouvelle qu’un terrible serpent inconnu, ou un loup-garou, gisaitdans le fossé, ajoutant qu’il les avait poursuivis et avait presqueavalé Kouzka[53].

Les paysans les plus hardis s’armèrent defourches et de haches, et en foule se dirigèrent vers le fossé.

– Où vous pousse-t-il[54] ?disaient les vieux pour les retenir, est-ce que vous avez le cou sisolide ? Que cherchez-vous ? N’y touchez point : onne vous y force pas !

Mais les paysans allèrent, et, à unecinquantaine de toises de l’endroit, commencèrent à crier surdifférents tons après le monstre : pas de réponse ; ilss’arrêtèrent, puis ils s’avancèrent encore.

Dans le fossé un mougik était étendu, la têteappuyée contre le bord. Auprès de lui traînaient un sac et unbâton, au bout duquel étaient attachées deux paires delaptis[55].

Les paysans n’osaient ni s’approcher ni letoucher.

– Hé ! là-bas ! toi, frère !criaient-ils chacun à son tour, se grattant l’un la nuque, l’autrele dos : Comment qu’on te nomme là-bas ? Qui es-tu ?hé ! là-bas, toi ! Qu’est-ce qu’il te faut ici ?

L’inconnu fit un mouvement pour lever la tête,mais il ne put ; il était visiblement ou malade ou fatigué. Undes paysans se hasarda presque à le toucher de sa fourche.

– N’y touche pas, n’y touche pas !crièrent quelques-uns. Comment savoir ce que c’est ? Vois, ilne dit rien ; peut-être est-ce quelque chose comme le… Ne letouchez pas, les amis !

– Allons-nous-en, disaient les autres :en vérité, allons-nous-en ! Qu’est-ce qu’il est pournous ? un parent, par hasard ? Il n’y a que du mal àgagner avec lui !

Et tous s’en retournèrent au village,racontant aux vieux qu’il y avait, couché par là, un homme quin’était pas du pays, qui ne parlait pas, et Dieu sait ce qu’il yfaisait…

– Il n’est pas du pays, alors ne le touchezpas ! disaient les vieux, assis sur le banc de terre autourdes cabanes et mettant les coudes sur leurs genoux. Qu’on le laisselà ! Il ne fallait pas y aller !…

Tel était le petit coin où, tout à coup,Oblomoff fut transporté par son rêve. Des trois ou quatre villagesqui s’y éparpillaient l’un était Sossnofka, l’autre Vavilofka, àune verste de distance.

Sossnofka et Vavilofka étaient un bienpatrimonial de la famille des Oblomoff et, pour cette raison,connus sous le nom générique d’Oblomofka. À Sossnofka se trouvaientla ferme et la maison seigneuriale.

À cinq verstes était le village paroissial deVerkliovo, avec quelques petits hameaux dépendant de la mêmepropriété, jadis appartenant à la famille, et depuis longtempspassés en d’autres mains.

Ce village avait été acheté par un richeseigneur qui ne paraissait jamais dans ses terres. Il étaitadministré par un intendant d’origine allemande. Et voilà toute lagéographie de ce petit coin.

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