Joseph Balsamo – Tome I (Les Mémoires d’un médecin)

II. Celui qui est

Au milieu d’une clairière formée par des bouleaux chauves de
vieillesse, s’élevait le rez-de-chaussée d’un de ces châteaux en ruines que les
seigneurs féodaux semèrent jadis dans l’Europe au retour des croisades.

Les porches sculptés de fins ornements, et dont chaque cavité,
au lieu de la statue, mutilée et précipitée au pied de la muraille,recelait
une touffe de bruyères ou de fleurs sauvages, découpaient sur un ciel blafard
leurs ogives dentelées par les éboulements.

Le voyageur, en ouvrant les yeux, se trouva devant les marches
humides et moussues du portique principal : sur la première de ces marches
se tenait debout le fantôme à la main osseuse qui l’avait amené jusque-là.

Un long suaire l’enveloppait de la tête au pied ; sous
les plis du linceul, ses orbites sans regard étincelaient, sa main décharnée
était étendue vers l’intérieur des ruines, et semblait indiquer au voyageur, comme
terme de sa route, une salle dont l’élévation au-dessus du sol cachait les
parties inférieures, mais aux voûtes effondrées de laquelle on voyait trembler
une lumière sourde et mystérieuse.

Le voyageur inclina sa tête en signe de consentement. Le
fantôme monta lentement un à un et sans bruit les degrés, et s’enfonça dans les
ruines ; l’inconnu le suivit du même pas tranquille et solennel sur lequel
il avait toujours réglé sa marche, franchit un à un à son tour les degrés qu’avait
franchis le fantôme, et entra.

Derrière lui se referma, aussi bruyamment qu’un mur vibrant
d’airain, la porte du porche principal.

À l’entrée d’une salle circulaire vide, tendue de noir et
éclairée par trois lampes aux reflets verdâtres, le fantôme s’était arrêté.

À dix pas de lui le voyageur s’arrêta à son tour.

– Ouvre les yeux, dit le fantôme.

– J’y vois, répondit l’inconnu.

Tirant alors avec un geste rapide et fier une épée à deux
tranchants de son linceul, le fantôme frappa sur une colonne de bronze qui
répondit au coup par un mugissement métallique.

Aussitôt et tout autour de la salle des dalles se
soulevèrent et des fantômes sans nombre, pareils au premier,apparurent armés
chacun d’une épée à double tranchant et prirent place sur des gradins de même
forme que la salle où se reflétait particulièrement la lueur verdâtre des trois
lampes et où ils semblaient, confondus avec la pierre par leur froideur et leur
immobilité, des statues sur leurs piédestaux.

Chacune de ces statues humaines se détachait étrangement sur
la draperie noire qui, comme nous l’avons dit, couvrait les murs.

Sept sièges étaient placés en avant du premier degré ;
sur ces sièges étaient assis six fantômes qui paraissaient des chefs ; un
de ces sièges était vide.

Celui qui était assis sur le siège du milieu se leva.

– Combien sommes-nous ici, mes frères ? demanda-t-il en
se tournant du côté de l’assemblée.

– Trois cents, répondirent les fantômes d’une seule et même
voix qui tonna dans la salle, puis presque aussitôt alla se briser sur la
tenture funéraire des murailles.

– Trois cents, reprit le président, dont chacun représente
dix mille associés ; trois cents épées qui valent trois millions de
poignards.

Puis se retournant vers le voyageur.

– Que désires-tu ? lui demanda-t-il.

– Voir la lumière, répondit celui-ci.

– Les sentiers qui mènent à la montagne de feu sont âpres et
durs ; ne crains-tu pas de t’y engager ?

– Je ne crains rien.

– Une fois que tu auras fait encore un pas en avant, il ne
te sera plus permis de retourner en arrière. Songes-y.

– Je ne m’arrêterai qu’en touchant le but.

– Es-tu prêt à jurer ?

– Dictez-moi le serment et je le répéterai.

Le président leva la main, et d’une voix lente et solennelle
prononça les paroles suivantes :

– « Au nom du Fils crucifié, jurez de briser les liens
charnels qui vous attachent encore à père, mère, frères, sœurs,femme, parents,
amis, maîtresses, rois, bienfaiteurs, et à tout être quelconque à qui vous
auriez promis foi, obéissance ou service. »

Le voyageur, d’une voix ferme, répéta les paroles qui venaient
de lui être dictées par le président qui, passant au deuxième paragraphe du
serment, reprit avec la même lenteur et la même solennité :

– « De ce moment vous êtes affranchi du prétendu
serment fait à la patrie et aux lois : jurez donc de révéler au nouveau
chef que vous reconnaissez ce que vous avez vu ou fait, lu ou entendu, appris
ou deviné, et même de rechercher et d’épier ce qui ne s’offrirait pas à vos
yeux. »

Le président se tut, et l’inconnu répéta les paroles qu’il venait
d’entendre.

– « Honorez et respectez l’ aqua tofana, reprit
le président sans changer de ton, comme un moyen prompt, sur et nécessaire de
purger le globe par la mort ou l’ hébétation de ceux qui cherchent à avilir la
vérité ou à l’arracher de nos mains. »

Un écho n’eût pas plus fidèlement reproduit ces paroles que
ne le fit l’inconnu ; le président reprit :

– « Fuyez l’Espagne, fuyez Naples, fuyez toute terre maudite,
fuyez la tentation de rien révéler de ce que vous allez voir et entendre, car
le tonnerre n’est pas plus prompt à frapper que ne le sera à vous atteindre, en
quelque lieu que vous soyez, le couteau invisible et inévitable.

« Vivez au nom du Père, du Fils et du
Saint-Esprit. »

Il fut impossible, malgré la menace que contenaient ces
dernières lignes, de surprendre aucune émotion sur le visage de l’inconnu, qui
prononça la fin du serment et l’invocation qui le suivit avec un accent aussi
calme qu’il en avait prononcé le commencement.

– Et maintenant, continua le président, ceignez le front du
récipiendaire avec la bandelette sacrée.

Deux fantômes s’approchèrent de l’inconnu, qui inclina la
tête : l’un d’eux lui appliqua sur le front un ruban aurore chargé de
caractères argentés, entremêlés de la figure de Notre Dame de Lorette, l’autre
en noua derrière lui les deux bouts à la naissance du col.

Puis ils s’écartèrent, en laissant de nouveau l’inconnu
seul.

– Que demandes-tu ? lui dit le président.

– Trois choses, répondit le récipiendaire.

– Lesquelles ?

– La main de fer, le glaive de feu, les balances de diamant.

– Pourquoi désires-tu la main de fer ?

– Pour étouffer la tyrannie.

– Pourquoi désires-tu le glaive de feu ?

– Pour chasser l’impur de la terre.

– Pourquoi désires-tu les balances de diamant ?

– Pour peser les destins de l’humanité.

– Es-tu préparé pour les épreuves ?

– Le fort est préparé à tout.

– Les épreuves ! les épreuves ! s’écrièrent
plusieurs voix.

– Retourne-toi, dit le président.

L’inconnu obéit et se trouva en face d’un homme pâle comme
la mort, garrotté et bâillonné.

– Que vois-tu ? demanda le président.

– Un criminel ou une victime.

– C’est un traître qui, après avoir fait le serment que tu
as fait, a révélé le secret de l’ordre.

– C’est un criminel alors.

– Oui. Quel châtiment a-t-il encouru ?

– La mort.

Les trois cents fantômes répétèrent :

– La mort !

Au même instant le condamné, malgré des efforts surhumains,
fut entraîné dans les profondeurs de la salle : le voyageur le vit se
débattre et se tordre aux mains de ses bourreaux ; il entendit sa voix
sifflant à travers l’obstacle du bâillon. Un poignard étincela,reflétant comme
un éclair la lueur des lampes, puis on entendit frapper un coup mat, et le
bruit d’un corps tombant lourdement sur le sol retentit sourd et funèbre.

– Justice est faite, dit l’inconnu en se retournant vers le
cercle effrayant, dont les regards avides avaient, à travers leurs suaires,
dévoré ce spectacle.

– Ainsi, dit le président, tu approuves l’exécution qui
vient d’avoir lieu ?

– Oui, si celui qui vient d’être frappé fut véritablement
coupable.

– Et tu boirais à la mort de tout homme qui, comme lui,
trahirait les secrets de l’association sainte ?

– J’y boirais.

– Quelle que fût la boisson ?

– Quelle qu’elle fût.

– Apportez la coupe, dit le président.

L’un des deux bourreaux s’approcha alors du récipiendaire et
lui présenta une liqueur rouge et tiède dans un crâne humain monté sur un pied
de bronze.

L’inconnu prit la coupe des mains du bourreau, et la levant
au-dessus de sa tête :

– Je bois, dit-il, à la mort de tout homme qui trahira les secrets
de l’association sainte.

Puis abaissant la coupe à la hauteur de ses lèvres, il la
vida jusqu’à la dernière goutte et la rendit froidement à celui qui la lui
avait présentée.

Un murmure d’étonnement courut par l’assemblée, et les fantômes
semblèrent se regarder entre eux à travers leurs linceuls.

– C’est bien, dit le président. Le pistolet !

Un fantôme s’approcha du président, tenant d’une main un
pistolet et de l’autre une balle de plomb et une charge de poudre.

À peine le récipiendaire daigna-t-il tourner les yeux de son
côté.

– Tu promets donc obéissance passive à l’association
sainte ? demanda le président.

– Oui.

– Même si cette obéissance devait s’exercer sur
toi-même ?

– Celui qui entre ici n’est pas à lui, il est à tous.

– Ainsi, quelque ordre qu’il te soit donné par moi, tu obéiras ?

– J’obéirai.

– À l’instant même ?

– À l’instant même.

– Sans hésitation ?

– Sans hésitation.

– Prends ce pistolet et charge-le.

L’inconnu prit le pistolet, fit glisser la poudre dans le canon,
l’assujettit avec une bourre, puis laissa tomber la balle, qu’il assura avec
une seconde bourre, après quoi il amorça l’arme.

Tous les sombres habitants de l’étrange demeure le regardaient
avec un morne silence, qui n’était interrompu que par le bruit du vent se brisant
aux angles des arceaux rompus.

– Le pistolet est chargé, dit froidement l’inconnu.

– En es-tu sûr ? demanda le président.

Un sourire passa sur les lèvres du récipiendaire qui tira la
baguette et la laissa couler dans le canon de l’arme qu’elle dépassa de deux
pouces.

Le président s’inclina en signe qu’il était convaincu.

– Oui, dit-il, il est en effet chargé et bien chargé.

– Que dois-je en faire ? demanda l’inconnu.

– Arme-le.

L’inconnu arma le pistolet, et l’on entendit au milieu du
profond silence qui accompagnait les intervalles du dialogue le craquement du
chien.

– Maintenant, reprit le président, appuie la bouche du pistolet
contre ton front.

Le récipiendaire obéit sans hésiter.

Le silence s’étendit sur l’assemblée, plus profond que jamais ;
les lampes semblèrent pâlir, ces fantômes étaient bien véritablement des
fantômes, car pas un n’avait d’haleine.

– Feu, dit le président.

La détente partit, la pierre étincela sur la batterie ;
mais la poudre du bassinet seule prit feu, et aucun bruit n’accompagna sa
flamme éphémère.

Un cri d’admiration s’échappa de presque toutes les poitrines,
et le président, par un mouvement instinctif, étendit la main vers l’inconnu.

Mais deux épreuves ne suffisaient point aux plus difficiles,
et quelques voix crièrent :

– Le poignard ! le poignard !

– Vous l’exigez ? demanda le président.

– Oui, le poignard ! le poignard ! reprirent les
mêmes voix.

– Apportez donc le poignard, dit le président.

– C’est inutile, fit l’inconnu, en secouant la tête d’un air
de dédain.

– Comment, inutile ? s’écria l’assemblée.

– Oui, inutile, reprit le récipiendaire d’une voix qui couvrait
toutes les voix ; inutile, je vous le répète, car vous perdez un temps
précieux.

– Que dites-vous là ? s’écria le président.

– Je dis que je sais tous vos secrets, que ces épreuves que
vous me faites subir sont des jeux d’enfant, indignes d’occuper un instant des
être sérieux. Je dis que cet homme assassiné n’est point mort ; je dis que
ce sang que j’ai bu était du vin renfermé dans une outre aplatie sur sa poitrine
et caché sous ses vêtements ; je dis que la poudre et les balles de ce
pistolet sont tombées dans la crosse au moment où, en armant le chien, j’ai
fait jouer la bascule qui les engloutit. Reprenez donc votre arme impuissante,
bonne à effrayer les lâches. Relève-toi donc, cadavre menteur : tu n’épouvanteras
pas les forts.

Un cri terrible fit retentir les voûtes.

– Tu connais nos mystères ! s’écria le président ;
tu es donc un voyant ou un traître ?

– Qui es-tu ? demandèrent ensemble trois cents voix, en
même temps que vingt épées étincelaient aux mains des fantômes les plus
proches, et par un mouvement régulier, comme eût été celui d’une phalange
exercée, venaient s’abaisser et se réunir sur la poitrine de l’inconnu.

Mais lui, souriant, calme, relevant la tête en secouant sa
chevelure sans poudre, et retenue par le seul ruban qu’on avait noué autour de
son front :

– Ego sum qui sum, dit-il, je suis celui qui est.

Puis il promena ses regards sur la muraille humaine qui l’entourait
étroitement. À son regard dominateur les épées s’abaissèrent par mouvements
inégaux, selon que ceux que l’inconnu écrasait de ce regard cédaient
instantanément à son influence ou essayaient de la combattre.

– Tu viens de prononcer une imprudente parole, dit le président,
et sans doute tu ne l’as prononcée que parce que tu n’en connais point la
portée.

L’étranger secoua la tête en souriant.

– J’ai répondu ce que je dois répondre, dit-il.

– D’où viens-tu donc alors ? demanda le président.

– Je viens du pays d’où vient la lumière.

– Nos instructions annoncent cependant que tu viens de
Suède.

– Qui vient de Suède peut venir d’orient, reprit l’étranger.

– Une seconde fois, nous ne te connaissons pas. Qui
es-tu ?

– Qui je suis !… Soit, reprit l’inconnu ; je vous
le dirai tout à l’heure, puisque vous feignez de ne me point comprendre ;
mais auparavant je veux vous dire qui vous êtes vous-mêmes.

Les fantômes tressaillirent, et leurs glaives s’entrechoquèrent
en passant de leur main gauche dans leur main droite et en se relevant à la hauteur
de la poitrine de l’inconnu.

– D’abord, reprit l’étranger en étendant la main vers le président,
toi qui te crois un dieu et qui n’es qu’un précurseur, toi le représentant des
cercles suédois, je te dirai ton nom, pour n’avoir point besoin de te dire
celui des autres. Swedenborg, les anges qui causent familièrement avec toi ne t’ont-ils
pas révélé que celui que tu attendais s’était mis en chemin ?

– C’est vrai, répondit le président en relevant son linceul
pour mieux voir celui qui lui parlait ; ils me l’ont dit.

Et celui qui relevait son linceul, contre toutes les
habitudes des rites de la société, montrait en le relevant le visage vénérable
et la barbe blanchie d’un vieillard de quatre-vingts ans.

– Bien, reprit l’étranger, maintenant à ta gauche est le représentant
du cercle anglais, qui préside la loge de la Calédonie. Salut,milord. Si le
sang de votre aïeule revit en vous, l’Angleterre peut espérer que la lumière
éteinte se rallumera.

Les épées s’abaissèrent, la colère commençait à faire place
à l’étonnement.

– Ah ! c’est vous, capitaine ? continua l’inconnu
en s’adressant au dernier chef placé à la gauche du président ; dans quel
port avez-vous laissé votre beau bâtiment, que vous aimez comme une
maîtresse ? C’est une brave frégate, n’est-ce pas, que la Providence, et
un nom qui portera bonheur à l’Amérique ?

Puis se retournant vers celui qui se tenait à la droite du
président :

– À ton tour, dit-il, prophète de Zurich, voyons regarde-moi
en face, toi qui as poussé jusqu’à là divination la science physionomique, et
dis tout haut si dans les lignes de mon visage tu ne reconnais pas le témoignage
de ma mission.

Celui auquel il s’adressait recula d’un pas.

– Allons, continua l’étranger en s’adressant à son voisin,allons,
descendant de Pélage, il s’agit de chasser une seconde fois les Maures de l’Espagne.
Ce sera chose facile si les Castillans n’ont point à tout jamais perdu l’épée
du Cid.

Le cinquième chef resta muet et immobile ; on eût dit
que la voix de l’inconnu l’avait changé en pierre.

– Et à moi, reprit le sixième chef, allant au-devant des paroles
de l’inconnu, qui semblait l’oublier, à moi, n’as-tu rien à me dire ?

– Si fait, répondit le voyageur en fixant sur divination un de
ces regards perçants qui fouillaient les cœurs ; si fait, j’ai à te dire
ce que Jésus dit à Judas : je te le dirai tout à l’heure.

Celui auquel il s’adressait devint plus pâle que son
linceul, tandis qu’un murmure courant par toute l’assemblée semblait demander
compte au récipiendaire de cette étrange accusation.

– Tu oublies le représentant de la France, dit le président.

– Celui-là n’est point parmi nous, répondit l’étranger avec
hauteur, et tu le sais bien, toi qui parles, puisque voilà son siège vide.
Maintenant rappelle-toi que les pièges font sourire celui qui voit dans les
ténèbres, qui agit malgré les éléments et qui vit malgré la mort.

– Tu es jeune, reprit le président, et tu parles avec l’autorité
d’un dieu… Réfléchis bien, à ton tour : l’audace n’étourdit que les hommes
irrésolus ou ignorants.

Un sourire de suprême dédain se dessina sur les lèvres de l’étranger.

– Vous êtes tous irrésolus, dit-il, puisque vous ne pouvez
agir sur moi ; vous êtes tous ignorants, puisque vous ne savez pas qui je
suis, tandis qu’au contraire je sais, moi, qui vous êtes :donc je
réussirais près de vous rien qu’avec de l’audace ; mais à quoi sert l’audace
à celui qui est tout-puissant ?

– La preuve de cette puissance, dit le président, la preuve,
donnez-nous-la.

– Qui vous a convoqués ? demanda l’inconnu, passant du
rôle d’interrogé à celui d’interrogateur.

– Le cercle suprême.

– Ce n’est pas sans but, dit l’étranger en se retournant
vers le président et vers les cinq chefs, que vous êtes venus, vous de Suède,
vous de Londres, vous de New-York, vous de Zurich, vous de Madrid,vous de
Varsovie, vous tous enfin, continua-t-il en s’adressant à la foule,des quatre
parties du monde, pour vous réunir dans le sanctuaire de la foi terrible.

– Non, sans doute, répondit le président, nous venons
au-devant de celui qui a fondé un empire mystérieux en orient, quia réuni les
deux hémisphères dans une communauté de croyances, qui a enlacé les mains
fraternelles du genre humain.

– Y a-t-il un signe certain auquel vous puissiez le reconnaître ?

– Oui, dit le président, et Dieu a daigné me le dévoiler par
l’intermédiaire de ses anges.

– Vous seul connaissez ce signe, alors ?

– Moi seul le connais.

– Vous n’avez révélé ce signe à personne ?

– À personne au monde.

– Dites-le tout haut.

Le président hésita.

– Dites, répéta l’étranger avec le ton du commandement,
dites, car le moment de la révélation est venu !

– Il portera sur la poitrine, dit le chef suprême, une
plaque de diamant, et sur cette plaque étincelleront les trois premières
lettres d’une devise connue de lui seul.

– Quelles sont ces trois lettres ?

– L. P. D.

L’étranger écarta d’un mouvement rapide sa redingote et son
gilet, et sur sa chemise de fine batiste apparut, resplendissante comme une
étoile de flamme, la plaque de diamant sur laquelle flamboyaient les trois
lettres de rubis.

– LUI ! s’écria le président épouvanté ; serait-ce
lui ?

– Celui que le monde attend ! dirent avec anxiété les
chefs.

– Le Grand Cophte ! murmurèrent trois cents voix.

– Eh bien ! s’écria l’étranger avec l’accent du
triomphe, me croirez-vous maintenant quand je vous répéterai pour la seconde
fois : Je suis celui qui est ?

– Oui, dirent les fantômes en se prosternant.

– Parlez, maître, dirent le président et les cinq chefs, le
front incliné vers la terre ; parlez, et nous obéirons.

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