Le Jardin des supplices

Chapitre 6

 

 

Nous laissâmes l’allée circulaire sur laquelles’embranchent d’autres allées sinuant vers le centre, et qui longeun talus, planté d’une quantité d’arbustes rares et précieux, etnous prîmes une petite sente qui, dans une dépression du terrain,aboutissait directement à la cloche. Sentes et allées étaientsablées de brique pulvérisée qui donne au vert des pelouses et desfeuillages une extraordinaire intensité et comme une transparenced’émeraude sous la lumière d’un lustre. À droite, des pelousesfleuries ; à gauche, des arbustes encore. Acers roses, frottésd’argent pâle, d’or vif, de bronze ou de cuivre rouge ;mahonias dont les feuilles de cuir mordoré ont la largeur despalmes du cocotier ; éleagnus qui semblent avoir été enduitsde laques polychromes ; pyrus, poudrés de mica ; laurierssur lesquels miroitent et papillotent les mille facettes d’uncristal irisé ; caladiums dont les nervures de vieil orsertissent des soies brodées et des dentelles roses ; thuyasbleus, mauves, argentés, panachés de jaunes malades, d’orangésvénéneux ; tamarix blonds, tamarix verts, tamarix rouges, dontles branches flottent et ondulent dans l’air, pareilles à de menuesalgues dans la mer ; cotonniers dont les houppes s’envolent etvoyagent sans cesse à travers l’atmosphère ; salix et l’essaimjoyeux de leurs graines ailées ; clérodendrons étalant ainsique des parasols leurs larges ombrelles incarnadines… Entre cesarbustes, dans les parties ensoleillées, des anémones, desrenoncules, des heucheras se mêlaient au gazon ; dans lesparties ombrées se montraient d’étranges cryptogames, des moussescouvertes de minuscules fleurettes blanches, et des lichenssemblables à des agglomérations de polypes, à des massesmadréporiques. C’était un enchantement perpétuel.

Et, de cet enchantement floral, se dressaientdes échafauds, des appareils de crucifixion, des gibets auxenluminures violentes, des potences toutes noires au sommetdesquelles ricanaient d’affreux masques de démons ; hautespotences pour la strangulation simple, gibets plus bas et machinéspour le dépècement des chairs. Sur les fûts de ces colonnes desupplice, par un raffinement diabolique, des calystégiespubescentes, des ipomées de la Daourie, des lophospermes, descoloquintes enroulaient leurs fleurs, parmi celles des clématiteset des atragènes… Des oiseaux y vocalisaient leurs chansonsd’amour…

Au pied d’un de ces gibets, fleuri comme unecolonne de terrasselo, un tourmenteur, assis, sa trousse entre lesjambes, nettoyait de fins instruments d’acier avec des chiffons desoie ; sa robe était couverte d’éclaboussures de sang ;ses mains semblaient gantées de rouge. Autour de lui, comme autourd’une charogne, bourdonnaient et tourbillonnaient des essaims demouches… Mais, dans ce milieu de fleurs et de parfums, cela n’étaitni répugnant, ni terrible. On eût dit, sur sa robe, une pluie depétales tombés d’un cognassier voisin… Il avait, d’ailleurs, unventre pacifique et débonnaire… Son visage, au repos, exprimait dela bonhomie, de la jovialité même ; la jovialité d’unchirurgien qui vient de réussir une opération difficile… Comme nouspassions près de lui, il leva ses yeux vers nous, et nous saluapoliment.

Clara lui adressa la parole en anglais.

– Il est vraiment fâcheux que vous nesoyez pas venus une heure plus tôt, dit ce brave homme… Vous auriezvu quelque chose de très beau… et qu’on ne voit pas tous les jours…Un travail extraordinaire, milady !… J’ai retaillé un homme,des pieds à la tête, après lui avoir enlevé toute la peau… Il étaitsi mal bâti !… Ha !… ha !… ha !…

Son ventre, secoué par le rire, s’enflait etse vidait, tour à tour, avec des bruits sourds de borborygme. Untic nerveux lui faisait remonter la fente de la bouche jusqu’auzygome, en même temps que, par le même mouvement, les paupières,s’abaissant, allaient rejoindre l’extrémité des lèvres, parmi desplis gras de la peau. Et c’était une grimace – une multitude degrimaces qui donnaient à son visage une expression de cruautécomique et macabre. Clara demanda :

– C’est lui, sans doute, que nous avonsrencontré sur une civière, tout à l’heure ?

– Ah ! vous l’avez rencontré ?…cria le bonhomme flatté… Eh bien, qu’en dites-vous ?…

– Quelle horreur !… fit Clara d’unevoix tranquille, qui démentait le dégoût de son exclamation. Alorsle bourreau expliqua :

– C’était un misérable coolie du port…rien du tout, milady… Certes, il ne méritait pas l’honneur d’un sibeau travail… Il avait, paraît-il, volé un sac de riz à desAnglais… nos chers et bons amis les Anglais… Quand je lui eusenlevé la peau et qu’elle ne tenait plus à ses épaules que par deuxpetites boutonnières… je l’obligeai à marcher, milady… Ha !…ha !… ha !… La bonne idée, vraiment !… C’était à setordre les côtes… On eût dit qu’il avait sur le corps, commentappelez-vous cette chose ?… Ah ! oui ma foi !… unmac-farlane ?… Jamais il n’avait été si bien vêtu, le chien,ni par un plus parfait tailleur… Mais il avait les os si durs quej’y ai ébréché ma scie… cette belle scie que voilà.

Un petit morceau blanchâtre et graisseux étaitresté entre les dents de la scie… Il le fit sauter d’un coupd’ongle et l’envoya se perdre dans le gazon, parmi lesfleurettes…

– C’est de la moelle, milady !… fitle joyeux bonhomme… Il n’y en a pas pour cher… Et, hochant la tête,il ajouta :

– Il n’y en a pas souvent pour cher… carnous travaillons, presque toujours, dans le bas peuple… Puis, d’unair de tranquille satisfaction :

– Hier, ma foi… ce fut très curieux… D’unhomme j’ai fait une femme… Hé !… hé !… hé !… C’étaità s’y méprendre… Et je m’y suis mépris, pour voir… Demain, si lesgénies veulent bien m’accorder la grâce que j’aie une femme, à cegibet… j’en ferai un homme… C’est moins facile !… Ha !…ha !…

Sous l’effort d’un nouveau rire, son triplementon, les bourrelets de son cou, et son ventre tremblèrent commede la gélatine… Une seule ligne rouge et arquée reliait alors lecoin gauche de sa bouche à la commissure de ses paupières droites,au milieu des bouffissures et des rigoles par où coulaient deminces filets de sueur et des larmes de rire.

Il introduisit la scie nettoyée et luisantedans la trousse qu’il referma. La boîte en était charmante et d’unlaque admirable : un vol d’oies sauvages, au-dessus d’un étangnocturne où la lune argentait les lotus et les iris.

À ce moment, l’ombre du gibet mit sur le corpsdu tourmenteur une barre transversale et violacée.

– Voyez-vous, milady, continua le bavardbonhomme, notre métier, de même que nos belles potiches, nos bellessoies brodées, nos beaux laques, se perd de plus en plus… Nous nesavons plus, aujourd’hui, ce que c’est réellement que le supplice…Bien que je m’efforce à en conserver les traditions véritables… jesuis débordé… et je ne puis, à moi tout seul, arrêter sa décadence…Que voulez-vous ? Les bourreaux, on les recrute, maintenant,on ne sait où !… Plus d’examens, plus de concours… C’est lafaveur seule, la protection qui décident des choix… Et quels choix,si vous saviez !… C’est honteux !… Autrefois on neconfiait ces importantes fonctions qu’à d’authentiques savants, àdes gens de mérite, qui connaissaient parfaitement l’anatomie ducorps humain, qui avaient des diplômes, de l’expérience, ou dugénie naturel… Aujourd’hui, va te faire fiche ! Le moindrecordonnier peut prétendre à remplir ces places honorables etdifficiles… Plus de hiérarchie, plus de traditions ! Tout s’enva… Nous vivons dans une époque de désorganisation… Il y a enChine, milady, quelque chose de pourri…

Il soupira profondément et, nous montrant sesmains toutes rouges, puis la trousse qui brillait, dans l’herbe àcôté de lui :

– Et pourtant, je m’emploie de mon mieux,comme vous avez pu voir, à relever notre prestige aboli… Car jesuis un vieux conservateur, moi… un nationaliste intransigeant… etje répugne à toutes ces pratiques, à toutes ces modes nouvellesque, sous prétexte de civilisation, nous apportent les Européens,et en particulier les Anglais… Je ne voudrais pas médire desAnglais, milady… Ce sont de braves gens, et fort respectables…Mais, il faut l’avouer, leur influence sur nos mœurs a étédésastreuse… Chaque jour ils enlèvent à notre Chine son caractèreexceptionnel… Au seul point de vue du supplice, milady, ils nousont fait beaucoup de tort… beaucoup de tort… C’est granddommage !…

– Ils s’y connaissent, pourtant !…interrompit Clara, que ce reproche blessa dans son amour-proprenational, car elle voulait bien se montrer sévère envers sescompatriotes qu’elle détestait, mais elle entendait les fairerespecter par les autres.

Le tortionnaire haussa les épaules et, sousl’empire du tic nerveux, il en arriva à composer sur son visage lagrimace la plus impérieusement comique qui se pût voir sur unvisage humain. Et, pendant que nous avions grand-peine, malgrél’horreur, à retenir nos rires, il déclarapéremptoirement :

– Non, milady, ils ne s’y connaissent pasdu tout… Sous ce rapport, ce sont de vrais sauvages… Voyons, dansles Indes – ne parlons que des Indes – quel travail grossier etsans art !… Et comme ils ont bêtement – oui, bêtement –gaspillé la mort !…

Il joignit ses mains sanglantes, comme pourune prière, leva ses yeux vers le ciel et, d’une voix où semblaientpleurer tant de regrets :

– Quand on songe, milady, s’écria-t-il, àtoutes les choses admirables qu’ils avaient à faire là-bas… etqu’ils n’ont pas faites… et qu’ils ne feront jamais !… C’estimpardonnable…

– Ça, par exemple ! protesta Clara…vous ne savez pas ce que vous dites…

– Que les génies m’emportent, si jemens !… s’exclama le gros bonhomme.

Et, d’une voix plus lente, avec des gestesdidactiques, il professa :

– En supplice, comme en toutes choses,les Anglais ne sont pas des artistes… Toutes les qualités que vousvoudrez, milady, mais pas celle-là… non, non, non.

– Allons donc !… Ils ont faitpleurer toute l’humanité !…

– Mais, milady… très mal… rectifia lebourreau… C’est que l’art ne consiste pas à tuer beaucoup… àégorger, massacrer, exterminer, en bloc, les hommes… C’est tropfacile, vraiment… L’art, milady, consiste à savoir tuer, selon desrites de beauté dont nous autres Chinois connaissons seuls lesecret divin… Savoir tuer !… Rien n’est plus rare, et tout estlà… Savoir tuer !… C’est-à-dire travailler la chair humaine,comme un sculpteur sa glaise ou son morceau d’ivoire… en tirertoute la somme, tous les prodiges de souffrance qu’elle recèle aufond de ses ténèbres et de ses mystères… Voilà !… Il y faut dela science, de la variété, de l’élégance, de l’invention… du génie,enfin… Mais, tout se perd aujourd’hui… Le snobisme occidental quinous envahit, les cuirassés, les canons à tir rapide, les fusils àlongue portée, l’électricité, les explosifs… que sais-je ?…tout ce qui rend la mort collective, administrative etbureaucratique… toutes les saletés de votre progrès, enfin…détruisent peu à peu nos belles traditions du passé… Il n’y aqu’ici, dans ce jardin, où elles soient encore conservées tant bienque mal… où nous essayons du moins de les maintenir tant bien quemal… Que de difficultés !… que d’entraves !… que deluttes continuelles, si vous saviez !… Hélas ! je sensque ça n’est plus pour longtemps… Nous sommes vaincus par lesmédiocres… Et c’est l’esprit bourgeois qui triomphe partout…

Sa physionomie eut alors une singulièreexpression de mélancolie et d’orgueil, tout ensemble, en même tempsque ses gestes révélèrent une profonde lassitude.

– Et pourtant, dit-il, moi qui vousparle, milady… je ne suis pas le premier venu, certes… Je puis mevanter d’avoir, toute ma vie, travaillé avec désintéressement à lagloire de notre grand Empire… J’ai toujours été – et de beaucoup –le premier, dans les concours de tortures… J’ai inventé –croyez-moi – des choses véritablement sublimes, d’admirablessupplices qui, dans un autre temps et sous une autre dynastie,m’eussent valu la fortune et l’immortalité… Eh bien, c’est à peinesi l’on fait attention à moi… Je ne suis pas compris… Disons lemot : on me méprise… Que voulez-vous ?… Aujourd’hui legénie ne compte pour rien… personne n’y accorde plus le moindremérite… C’est décourageant. Je vous assure !… Pauvre Chine,jadis si artiste, si grandement illustre !… Ah ! jecrains bien qu’elle ne soit mûre pour la conquête !…

D’un geste pessimiste et navré, il prit Claraà témoin de cette décadence, et ses grimaces furent quelque chosed’intraduisible…

– Enfin, voyons, milady !… Est-cepas à pleurer ?… C’est moi qui avais inventé le supplice durat. Que les génies me rongent le foie et me tordent lestesticules, si ce n’est pas moi !… Ah ! milady, unsupplice extraordinaire, je vous jure… Originalité, pittoresque,psychologie, science de la douleur, il avait tout pour lui… Et,par-dessus le marché, il était infiniment comique… Il s’inspiraitde cette vieille gaieté chinoise, si fort oubliée, de nos jours…Ah ! comme il eût excité la verve plaisante de tout lemonde !… quelle ressource pour les conversationslanguissantes !… Eh bien, ils y ont renoncé… Pour mieux dire,ils n’en ont pas voulu… Et cependant, les trois essais que nous enfîmes devant les juges avaient eu un succès colossal.

Comme nous n’avions pas l’air de le plaindre,que ses récriminations de vieil employé nous agaçaient plutôt, lebourreau répéta, en appuyant sur le mot :

– Colossal… co-los-sal !…

– Qu’est-ce que c’est que ce supplice durat ?… demanda mon amie… Et comment se fait-il que je ne leconnaisse point ?

– Un chef-d’œuvre, milady… un purchef-d’œuvre !… affirma d’une voix retentissante le gros hommedont le corps flasque se tassa davantage dans l’herbe.

– J’entends bien… mais encore ?

– Un chef-d’œuvre, en vérité !… Etvous voyez… vous ne le connaissez point… personne ne le connaît…Quelle pitié !… Comment voulez-vous que je ne sois pashumilié ?…

– Pouvez-vous nous le décrire ?…

– Si je le puis ?… Mais parfaitementoui, je le puis… Je vais vous l’expliquer, et vous jugerez…Suivez-moi bien…

Et le gros homme, avec des gestes précis quidessinaient, dans l’air, des formes, parla ainsi :

– Vous prenez un condamné, charmantemilady, un condamné, ou tout autre personnage – car il n’est pasnécessaire, pour la réussite de mon supplice, que le patient soitcondamné à n’importe quoi – vous prenez un homme, autant quepossible, jeune, fort, et dont les muscles soient bien résistants…en vertu de ce principe que plus il y a force, plus il y a lutte,plus il y a lutte, plus il y a douleur !… Bon… Vous ledéshabillez… Bon… Et, quand il est tout nu – n’est-ce pas,milady ?

– vous le faites s’agenouiller, le doscourbé, sur la terre, où vous le maintenez par des chaînes, rivéesà des colliers de fer qui lui serrent la nuque, les poignets, lesjarrets et les chevilles… Bon ! je ne sais si je me fais biencomprendre ?… Vous mettez alors, dans un grand pot percé, aufond, d’un petit trou – un pot de fleurs, milady ! – vousmettez un très gros rat, qu’il convient d’avoir privé denourriture, pendant deux jours, afin d’exciter sa férocité… Et cepot, habité par ce rat, vous l’appliquez hermétiquement, comme uneénorme ventouse, sur les fesses du condamné, au moyen de solidescourroies, attachées à une ceinture de cuir, qui lui entoure lesreins… Ah ! ah ! ça se dessine !…

Il nous regarda, malicieusement, du coin deses paupières rabattues, afin de juger de l’effet que ses parolesproduisaient sur nous…

– Et alors ?… fit Clara,simplement.

– Alors, milady, vous introduisez, dansle petit trou du pot – devinez quoi ?

– Est-ce que je sais, moi ?…

Le bonhomme se frotta les mains, souritaffreusement, et il reprit :

– Vous introduisez une tige de fer,rougie au feu d’une forge… d’une forge portative qui est là, prèsde vous… Et, quand la tige de fer est introduite, que sepasse-t-il ?… Ah ! ah ! ah !… Imaginezvous-même ce qui doit se passer, milady ?…

– Mais allez donc, vieux bavard !…ordonna mon amie dont les petits pieds colères trépignaient lesable de l’allée…

– Là !… là !… calma le prolixetourmenteur… Un peu de patience, milady… Et procédons avec méthode,s’il vous plaît… Donc, vous introduisez, dans le trou du pot, unetige de fer, rougie au feu d’une forge… Le rat veut fuir la brûlurede la tige et son éclaboussante lumière… Il s’affole, cabriole,saute et bondit, tourne sur les parois du pot, rampe et galope surles fesses de l’homme, qu’il chatouille d’abord et qu’ensuite ildéchire de ses pattes, et mord de ses dents aiguës… cherchant uneissue, à travers les chairs fouillées et sanglantes… Mais, il n’y apas d’issue… ou, du moins, dans les premières minutes del’affolement, le rat ne trouve pas d’issue… Et la tige de fer,manœuvrée avec habileté et lenteur, se rapproche toujours du rat…le menace… lui roussit le poil… Que dites-vous de ceprélude ?

Il respira, quelques secondes, et, posément,avec autorité, il enseigna : – Le grand mérite, en ceci, estqu’il faut savoir prolonger cette opération initiale le plus qu’onpeut, car les lois de la physiologie nous apprennent qu’il n’estrien de plus horrible que la combinaison sur une chair humaine deschatouillements et des morsures… Il peut même arriver que lepatient en devienne fou… Il hurle et se démène… son corps, restélibre dans l’intervalle des colliers de fer, palpite, se soulève,se tord, secoué par de douloureux frissons… Mais les membres sontmaintenus solidement par les chaînes… le pot, par les courroies… Etles mouvements du condamné ne font qu’augmenter la fureur du rat, àlaquelle, bientôt, vient s’ajouter la griserie du sang… C’estsublime, milady !…

– Et enfin ?… fit, d’une voix brèveet tremblée, Clara qui avait légèrement pâli. Le bourreau claqua dela langue et il poursuivit :

– Enfin – car je vois que vous êtespressée de connaître le dénouement de cette admirable et jovialehistoire – enfin… sous la menace de la tige rougie et grâce àl’excitation de quelques brûlures opportunes, le rat finit partrouver une issue… une issue naturelle, milady… et combienignoble !… Ah !… ah !… ah !…

– Quelle horreur !… cria Clara.

– Ah ! vous voyez… Je ne vous lefais pas dire… Et je suis fier de l’intérêt que vous prenez à monsupplice… Mais attendez… Le rat pénètre, par où vous savez… dans lecorps de l’homme… en élargissant de ses pattes et de ses dents… leterrier… Ah !… ah !… ah !… le terrier qu’il creusefrénétiquement, comme de la terre… Et il crève étouffé, en mêmetemps que le patient, lequel, après une demi-heure d’indicibles,d’incomparables tortures, finit, lui aussi, par succomber à unehémorragie… quand ce n’est pas à l’excès de la souffrance… ouencore à la congestion d’une folie épouvantable… Dans tous les cas,milady… et quelle que soit la cause finale à cette mort, croyez quec’est extrêmement beau !…

Satisfait, avec des airs d’orgueil triomphant,il conclut :

– Est-ce pas extrêmement beau,milady ? N’est-ce pas là, véritablement, une inventionprodigieuse… un admirable chef-d’œuvre, en quelque sorte classique,et dont vous chercheriez, vainement, l’équivalent, dans lepassé ?… Je ne voudrais pas manquer de modestie, maisconvenez, milady, que les démons qui, jadis, hantèrent les forêtsdu Yunnan, n’imaginèrent jamais un pareil miracle… Eh bien, lesjuges n’en ont pas voulu !… Je leur apportais là, vous lesentez, quelque chose d’infiniment glorieux… quelque chosed’unique, en son genre, et capable d’enflammer l’inspiration de nosplus grands artistes… Ils n’en ont pas voulu… Ils ne veulent plusrien… plus rien !… Le retour à la tradition classique leseffraie… Sans compter aussi toutes sortes d’interventions morales,bien pénibles à constater… l’intrigue, la concussion, la vénalitéconcurrente… le mépris du juste… l’horreur du beau… est-ce que jesais ?… Vous pensez du moins, je suis sûr, que, pour un telservice, ils m’ont élevé au mandarinat ? Ah bien oui !…Rien, milady… je n’ai rien eu… Ce sont là des symptômescaractéristiques de notre déchéance… Ah ! nous sommes unpeuple fini, un peuple mort !… Les Japonais peuvent venir…nous ne sommes plus capables de leur résister… Adieu laChine !…

Il se tut.

Le soleil gagnait l’ouest, et l’ombre dugibet, se déplaçant avec le soleil, s’allongeait maintenant, surl’herbe. Les pelouses devenaient d’un vert plus vif ; unesorte de buée rose et or montait de massifs arrosés, et les fleurss’irradiaient, plus lumineuses, semblables à de petits astresmulticolores, dans le firmament de verdure… Un oiseau, tout jaune,portant dans son bec une longue brindille de coton, réintégra sonnid, caché au fond des feuillages qui garnissaient le fût de lacolonne de supplice, au pied de laquelle était assis letourmenteur.

Celui-ci, maintenant, rêvait, avec un visageplus placide et des grimaces apaisées, où la mélancolie remplaçaitla cruauté…

– C’est comme les fleurs !…murmura-t-il, après un silence…

Un chat noir qui sortait des massifs vint,l’échine arquée et la queue battante, se frotter en ronronnantcontre lui… Il le caressa doucement. Puis le chat, ayant aperçu unscarabée, s’allongea derrière une touffe d’herbe et, l’oreille auxécoutes, les prunelles ardentes, il se mit à suivre, dans l’air, levol capricieux de l’insecte. Le bourreau, dont cette arrivée avaitinterrompu les plaintes patriotiques, hocha la tête etreprit :

– C’est comme les fleurs !… Nousavons aussi perdu le sens des fleurs, car tout se tient… Nous nesavons plus ce que c’est que les fleurs… Croiriez-vous qu’on nousen envoie d’Europe, à nous qui possédons la flore la plusextraordinaire et la plus variée du globe… Qu’est-ce qu’on ne nousenvoie pas aujourd’hui ?… Des casquettes, des bicyclettes, desmeubles, des moulins à café, du vin et des fleurs !… Et sivous saviez les mornes sottises, les pauvretés sentimentales, lesfolies décadentes que nos poètes débitent sur les fleurs !…C’est effrayant !… Il y en a qui prétendent qu’elles sontperverses !… Perverses, les fleurs !… En vérité, on nesait plus quoi inventer… Avez-vous idée d’un pareil non-sens,milady, et si monstrueux ?… Mais les fleurs sont violentes,cruelles, terribles et splendides… comme l’amour !…

Il cueillit une renoncule qui, près de lui,au-dessus du gazon, balançait mollement son capitule d’or, et, avecdes délicatesses infinies, lentement, amoureusement, il la fittourner entre ses gros doigts rouges où le sang séché s’écaillaitpar places :

– Est-ce pas adorable ?…répétait-il, en la contemplant… C’est tout petit, tout fragile… etc’est toute la nature, pourtant… toute la beauté et toute la forcede la nature… Cela renferme le monde… Organisme chétif etimpitoyable et qui va jusqu’au bout de son désir !… Ah !les fleurs ne font pas de sentiment, milady… Elles font l’amour…rien que l’amour… Et elles le font tout le temps et par tous lesbouts… Elles ne pensent qu’à ça… Et comme elles ont raison !…Perverses ?… Parce qu’elles obéissent à la loi unique de laVie, parce qu’elles satisfont à l’unique besoin de la vie, qui estl’amour ?… Mais regardez donc !… La fleur n’est qu’unsexe, milady… Y a-t-il rien de plus sain, de plus fort, de plusbeau qu’un sexe ?… Ces pétales merveilleux… ces soies, cesvelours… Ces douces, souples et caressantes étoffes… ce sont lesrideaux de l’alcôve… les draperies de la chambre nuptiale… le litparfumé où les sexes se joignent… où ils passent leur vie éphémèreet immortelle à se pâmer d’amour. Quel exemple admirable pournous !

Il écarta les pétales de la fleur, compta lesétamines chargées de pollen, et il dit, encore, les yeux noyésd’une extase burlesque :

– Voyez, milady !… Un… deux… cinq…dix… vingt… Voyez comme elles sont frémissantes !…Voyez !… Ils se mettent, quelquefois, à vingt mâles pour lespasme d’une seule femelle !… Hé !… hé !… hé !…Quelquefois, c’est le contraire !…

Un à un, il arracha les pétales de lafleur :

– Et quand elles sont gorgées d’amour,voilà que les rideaux du lit se déchirent… que se dissolvent ettombent les draperies de la chambre… Et les fleurs meurent… parcequ’elles savent bien qu’elles n’ont plus rien à faire… Ellesmeurent, pour renaître plus tard, et encore, à l’amour !…

Jetant loin de lui le pédoncule dénudé, ilclama :

– Faites l’amour, milady… faites l’amour…comme les fleurs !…

Puis, brusquement, il reprit sa trousse, seleva, sa natte de travers, et, nous ayant salués, il s’en alla, parles pelouses, foulant, de son corps pesant et balancé, le gazontout fleuri de scilles, de doronies et de narcisses.

Clara le suivit du regard quelques instants,et, comme nous nous remettions à marcher vers la cloche :

– Est-il drôle, le gros patapouf !dit-elle… Il a l’air bon enfant… Je m’écriai stupidement :

– Comment pouvez-vous supposer une tellechose, ma chère Clara ?… Mais c’est un monstre !… Il estmême effrayant de penser qu’il existe, quelque part, parmi deshommes, un tel monstre !… Je sens que, dorénavant, j’auraitoujours le cauchemar de cette face horrible… et l’effroi de cesparoles… Vous me faites beaucoup de peine, je vous assure…

Clara répliqua vivement :

– Et toi aussi, tu me fais de la peine…Pourquoi prétends-tu que le gros patapouf est un monstre ?… Tun’en sais rien !… Il aime son art, voilà tout !… Comme lesculpteur aime la sculpture, et le musicien la musique… Et il enparle merveilleusement !… Est-ce curieux et agaçant que tu neveuilles pas te mettre dans l’esprit que nous sommes en Chine etnon, Dieu merci, à Hyde-Park ou à la Bodinière, au milieu de tousles sales bourgeois que tu adores ?… Pour toi, les mœursdevraient être les mêmes dans tous les pays… Et quellesmœurs !… Belle conception !… Tu ne sens donc pas que ceserait à mourir de monotonie, à ne jamais plus voyager, moncher !…

Et, tout d’un coup, d’un ton de reproche plusaccentué : – Ah ! tu n’es pas gentil, vraiment… Pas uneminute ton égoïsme ne désarme, même devant un tout petit plaisirque je te demande… Il n’y a pas moyen de s’amuser un peu avec toi…Tu n’es jamais content de rien… Tu me contraries en tout ce quej’aime… Sans compter que, grâce à toi, nous avons manqué le plusbeau, peut-être !…

Elle soupira tristement :

– Voilà encore une journée perdue !…Je n’ai pas de chance !… J’essayai de me défendre et de lacalmer.

– Non… non… insista Clara… c’est trèsmal !… Tu n’es pas un homme… Même du temps d’Annie, c’était lamême chose… Tu nous gâtais tout notre plaisir avec tesévanouissements de petite pensionnaire et de femme enceinte… Quandon est comme toi, on reste chez soi… Est-ce bête, vraiment ?…On part, gais, heureux… pour s’amuser gentiment, voir desspectacles sublimes, s’exalter à des sensations extraordinaires… etpuis, tout d’un coup, on devient triste… et c’est fini !… Non,non !… C’est bête, bête… c’est trop bête !…

Elle se pendit à mon bras, plus fort, et elleeut une moue – une moue de fâcherie et de tendresse – si exquise,que je sentis courir, dans mes veines, un frisson de désir.

– Et moi, qui fais tout ce que tu veux…comme un pauvre chien !… gémit-elle. Puis :

– Je suis sûre que tu me crois méchante…parce que je m’amuse à des choses qui te font pâlir ettrembler ?… Tu me crois méchante et sans cœur, pas ?…

Sans attendre ma réponse, elleaffirma :

– Mais moi aussi, je pâlis… moi aussi jetremble… Sans ça, je ne m’amuserais pas… Alors, tu me croisméchante ?…

– Non, chère Clara, tu n’es pas méchante…Tu es… Elle m’interrompit vivement, me tendit ses lèvres :

– Je ne suis pas méchante… Je ne veux pasque tu me croies méchante… Je suis une petite femme gentille etcurieuse… comme toutes les femmes… Et vous, vous n’êtes qu’unevieille poule !… Et je ne vous aime plus… Et baisez votremaman, cher amour… baisez fort… plus fort… bien fort… Non, je nevous aime plus, petite chiffe… Oui, tenez… c’est cela… vous n’êtesqu’un amour de petite chiffe de rien du tout.

Gaie et sérieuse, souriante et le front barréde plis d’ombre qu’elle avait, dans la colère comme dans lavolupté, elle ajouta :

– Dire que je ne suis qu’une femme… unetoute petite femme… une femme aussi fragile qu’une fleur… aussidélicate et frêle qu’une tige de bambou… et que, de nous deux,c’est moi l’homme… et que je vaux dix hommes comme toi !…

Et le désir que provoquait en moi sa chair secompliquait d’une immense pitié pour son âme éperdue et folle. Elledit encore, avec un léger sifflement de mépris, cette phrase qui,souvent, lui revenait aux lèvres :

– Les hommes !… ça ne sait pas ceque c’est que l’amour, ni ce que c’est que la mort, qui est bienplus belle que l’amour… ça ne sait rien… et c’est toujours triste,…et ça pleure !… Et ça s’évanouit, sans raison, pour desnunus !… Puutt !… Puutt !… Puutt !…

Changeant d’idées, comme un scarabée defleurs, soudain, elle demanda :

– Est-ce vrai ce que racontait, tout àl’heure, le gros patapouf ?

– Quoi donc, chère Clara ?… Et quevous importe le gros patapouf !

– Tout à l’heure, le gros patapoufracontait que, chez les fleurs, ils se mettent quelquefois à vingtmâles pour le spasme d’une seule femelle ?… C’est vrai,ça ?

– Mais, oui !…

– Bien vrai ?… Bien… bienvrai ?

– Mais, sans doute !

– Il ne se moquait pas de nous, le grospatapouf ?… Tu es sûr ?…

– Es-tu drôle ?… Pourquoi medemandes-tu cela ?… Pourquoi me regardes-tu avec des yeux siétranges ?… Puisque c’est vrai !…

– Ah !…

Elle resta songeuse… les paupières closes, uneseconde… Son haleine s’enflait, sa gorge haletait presque… Et, trèsbas, elle murmura en appuyant sa tête contre ma poitrine : –Je voudrais être fleur… Je voudrais… Je voudrais être…tout !…

– Clara !… suppliai-je… ma petiteClara…

Je la tins serrée, dans mes bras… Je la tinsbercée, dans mes bras :

– Pas toi ?… Toi, tu ne voudraispas ?… Oh ! toi, tu aimes mieux rester, toute ta vie, unepetite chiffe molle !… Hou, le vilain !

Après un court silence, durant lequel nousentendions davantage, sous nos pas plus pesants, crier le sablerouge de l’allée, elle reprit, d’une voix chantante :

– Et je voudrais aussi… quand je seraimorte… je voudrais que l’on mît dans mon cercueil des parfums trèsforts… des fleurs de thalictre… et des images de péché… de bellesimages, ardentes et nues, comme celles qui ornent les nattes de machambre… Ou bien… je voudrais… être ensevelie… sans robes et sanssuaire, dans les cryptes du temple d’Élephanta… avec toutes cesétranges bacchantes de pierre… qui se caressent et se déchirent… desi furieuses luxures… Ah ! mon chéri… Je voudrais… je voudraisêtre morte, déjà !

Et, brusquement :

– Quand on est morte… est-ce que lespieds touchent le bois du cercueil ?…

– Clara !… implorai-je… Pourquoitoujours parler de la mort ?… Et tu veux que je ne sois pastriste ? Je t’en prie… ne me rends pas fou tout à fait…Abandonne ces vilaines idées qui me torturent… et rentrons… Parpitié, ma chère Clara, rentrons.

Elle n’écoutait pas ma prière et ellecontinuait sur un ton de mélopée dont je ne savais pas… non, envérité, je ne savais pas si c’était de l’émotion ou de l’ironie,des larmes nerveuses ou du rire grimaçant.

– Si tu es près de moi… quand je mourrai…cher petit cœur… écoute bien !… Tu mettras… c’est cela… tumettras un joli coussin de soie jaune entre mes pauvres petitspieds et le bois du cercueil… Et puis… tu tueras mon beau chien duLaos… et tu l’allongeras, tout sanglant, contre moi… comme il acoutume de s’allonger lui-même, tu sais, avec une patte sur macuisse et une autre patte sur mon sein… Et puis… longtemps…longtemps… tu m’embrasseras, cher amour, sur les dents… et dans lescheveux… Et tu me diras des choses… des choses si jolies… et quibercent et qui brûlent… des choses comme quand tu m’aimes… Pas, tuveux, mon chéri ?… Tu me promets ?… Voyons, ne fais pascette figure d’enterrement… Ce n’est pas de mourir, qui est triste…c’est de vivre quand on n’est pas heureux… Jure ! jure que tume promets !…

– Clara ! Clara !… je t’ensupplie !… Tais-toi…

J’étais, sans doute, à bout de nerfs… Un flotde larmes jaillit de mes yeux… Je n’aurais pas pu dire la raison deces larmes qui n’étaient pas très douloureuses, où j’éprouvais, aucontraire, comme un soulagement, une détente… Et Clara s’y trompa,en se les attribuant. Ce n’était pas sur elle que je pleurais, nisur son péché, ni sur la pitié que m’inspirait sa pauvre âmemalade, ni sur l’évocation qu’elle venait de faire de sa mort…C’était, peut-être, sur moi seul que je pleurais, sur ma présencedans ce jardin, sur cet amour maudit où je sentais que tout cequ’il y avait en moi, maintenant, d’élans généreux, de désirshautains, d’ambitions nobles, se profanait au souffle impur de cesbaisers dont j’avais honte, dont j’avais soif aussi ?… Ehbien, non !… Et pourquoi me mentir à moi-même ?… Larmestoutes physiques… larmes de faiblesse, de fatigue et de fièvre,larmes d’énervement devant des spectacles trop durs pour masensibilité déprimée, devant des odeurs trop fortes pour monodorat, devant les continuelles sautes, de l’impuissance àl’exaspération, de mes désirs charnels… larmes de femme… larmes derien !… Certaine que c’était d’elle, d’elle morte… d’elleallongée dans le cercueil que je pleurais, et heureuse de sonpouvoir sur moi, Clara se fit délicieusement câline.

– Pauvre mignon !… soupira-t-elle…Tu pleures !… Eh bien, alors, dis tout de suite que le grospatapouf avait l’air bon enfant… Dis-le, pour me faire plaisir… etje me tairai… et plus jamais je ne parlerai de la mort… plusjamais… Allons !… tout de suite… dites-le… petit cochon…

Lâchement, mais aussi pour en finir une bonnefois avec toutes ces idées macabres, je fis ce qu’elle medemandait. Avec une joie bruyante, elle me sauta au cou, me baisaaux lèvres, et, m’essuyant les yeux, elle s’écria :

– Oh ! tu es gentil !… tu es ungentil bébé… un amour de bébé, cher petit cœur !… Et moi, jesuis une vilaine femme… une méchante petite femme… qui te taquine,tout le temps, et qui te fait pleurer… Et puis, le gros patapoufest un monstre… je le déteste… et puis, je ne veux pas que tu tuesmon beau chien du Laos… et puis, je ne veux pas mourir… Et puis jet’adore, ah !… Et puis… et puis… tout cela, c’était pour rire,tu comprends… Ne pleure plus… ah ! ne pleure plus !…Souris, maintenant… souris, avec tes yeux si bons… et ta bouche quisait des choses si tendres… ta bouche, ta bouche !… Etmarchons plus vite… J’aime tant marcher très vite, à tonbras !…

Et son ombrelle, au-dessus de nos têtes qui setouchaient, voletait, légère, brillante et folle, ainsi qu’un grandpapillon.

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