Roger-la-Honte

Chapitre 10

 

 

L’instruction se poursuivit pendant quelquesjours et s’acheva sans autres péripéties. Rien ne vintl’entraver.

À toutes les questions deM. de Lignerolles, Laroque répondait :

– Je suis innocent. Je ne me défendraiplus.

Il se laissait aller au désespoir, à lafatalité qui l’entraînait.

Si le moindre doute avait existé dans l’espritde la justice, Roger aurait pu être sauvé ; mais, par malheur,les détails du crime, les indices trouvés par l’enquête, lesincidents relevés contre lui, tout coïncidait à le faire paraîtrecoupable et constituait un ensemble de preuves accablantes quiavaient formé chez M. de Lignerolles une convictioninébranlable.

Le juge transmit donc les pièces à la chambredes mises en accusation, à Paris, et celle-ci ordonna le renvoi deRoger Laroque devant la cour d’assises de Seine-et-Oise, siégeant àVersailles.

Henriette l’apprit par les journaux.

Elle ne sortait plus de la villa ni de sachambre, ensevelie dans une torpeur morale et physique étrange.Elle ne prononçait plus une parole, ne s’occupait même plus deSuzanne, la regardant parfois s’agiter autour d’elle, avec unesorte d’étonnement, comme si elle ne la reconnaissait pas.

Un matin, elle ne se leva pas. Elle étaittoute blanche dans son lit et ne bougeait plus, terrassée par unesyncope.

Les domestiques, en ne la voyant pas, – ellesi matinale d’habitude, – entrèrent dans sa chambre et furentfrappés de son état de faiblesse.

Ils appelèrent le docteur Martinaud.

Celui-ci prescrivit un traitement, mais sansespoir.

Il déclara que Mme Laroqueétait perdue et n’en avait plus que pour quelques jours.

Henriette se réveilla sous les frictions etles sinapismes qu’il lui fit appliquer et le remercia en souriantavec tristesse. Elle ne se faisait pas d’illusions.

Avant de mourir, elle voulut toutefois assurerl’avenir de Suzanne. Elle écrivit quelques mots, d’une écriturebien tremblée, déjà, presque illisible, à un vieil oncle, frère deson père, Adrien Bénardit, qui avait une forge près de Montherme,dans les Ardennes.

Suzanne allait être privée de sa mère, – et,selon toute prévision, Roger allait être condamné, – Henriettevoulait confier l’enfant au forgeron, un brave et honnête hommedont son père l’avait entretenue souvent, mais qu’elle n’avait vuque deux fois dans sa vie.

Puis, ayant écrit cette lettre, elle attenditl’arrivée du vieux prêtre et se prépara à mourir, rassasiant sesyeux de la vue de sa fillette dont elle allait être éternellementséparée et qui, avec cette maturité d’intelligence que donne lemalheur, s’arrangeait pour ne pas quitter la chambre de samère.

Suzanne la soignait, n’ayant pas voulu laisserce soin à une autre. Elle la soignait avec un dévouement absolu,veillant sur son sommeil, afin qu’on ne la troublât pas, luiprésentant à boire les potions prescrites, soulevant et soutenantla tête de la malade pendant qu’elle buvait, lui essuyant leslèvres, arrangeant les oreillers, rebordant le lit. Et la mère,prête à mourir, la remerciait d’un regard d’infinie reconnaissance,tout plein de regrets amers, de désespoirs sans remède.

Et l’enfant, alors, grimpant sur le lit et labouche près de l’oreille d’Henriette murmurait :

– Petite mère, guéris-toi, si tu aimes tafille !

Mme de Noirville avaitrêvé la vengeance et elle allait être vengée plus complètementpeut-être qu’elle n’aurait voulu. Elle l’avait dit à Laroque :elle était d’une race extrême en tout.

– Vengez-moi ! mais vengez-moibien ! avait-elle crié à Luversan, lorsque le pacte eut étéconclu.

Quelques jours après, Luversan la retrouvaitdans un bal campagnard, le dernier de la saison, donné dans lesgrands jardins de l’hôtel Terrenoire, rue de Chanaleilles. Il étaità peu près une heure du matin. – Il y avait une heure et demie,environ, que Larouette était assassiné. Luversan était très pâle,mais froid et correct, dans sa tenue irréprochable.

Quand, dans une allée obscure, il puts’approcher de Julia, il lui tendit silencieusement un paquet debillets de banque.

– Qu’est-ce donc ? fit-elle,surprise.

– Les cent mille francs que vous devez àLaroque. Il faut que demain matin, sans faute, Laroque les ait ensa possession.

– Je le croyais dans une situationgênée ?

– C’est la vérité.

– Alors, je le sauve. Est-ce là mavengeance ?

– Vous le perdez.

– Je ne comprends pas, dit-elle, maisvous le dites et je vous crois. Je ne puis refuser, puisque vouspossédez mon secret et que vous me tenez par là. Du reste, voushaïssez. Je hais aussi. Le même intérêt nous lie.

Elle prit les liasses qu’il lui tendait, lescacha.

Luversan la salua, se montra dans le bal, et,de la soirée, ne lui adressa plus la parole.

Le lendemain, dès le matin, elle sortait sousle premier prétexte venu, montait dans un fiacre et se faisaitconduire chez Laroque, boulevard Malesherbes, Roger venaitjustement d’arriver.

Deux ou trois jours se passèrent.

Ce fut Noirville qui apprit, par des amiscommuns, l’arrestation de Roger et son envoi à Versailles, sousl’inculpation de vol et d’assassinat.

– C’est une folie, s’écria-t-il. C’estmême plus que cela, c’est une bêtise !… Roger voleur etassassin ! la bonne histoire !

Et, sans perdre de temps, il se rendit auparquet, d’où il fut renvoyé au commissaire aux délégationsjudiciaires.

M. Liénard était dans son cabinet.

Il renseigna Lucien complètement.

L’avocat rentra chez lui inquiet etdéconcerté, – inquiet de l’issue de l’affaire, déconcerté par tantde preuves contre Laroque… Mais sa foi en son ami, en son frère,restait inébranlable.

Julia ne savait rien encore.

Il lui dit tout en un flot de parolesrageuses, méprisantes pour la police qui s’était fourvoyée.

– Les agents devraient être prudents,disait-il. L’an dernier, ils ont eu un terrible exemple d’erreurjudiciaire, dans cette condamnation à mort de Lauriot, dit leBoucher de Meudon[3], qui étaitinnocent et faillit être guillotiné.

Mme de Noirville, blême,écoutait sans mot dire. À cette heure, elle comprenait. L’assassinde Larouette, c’était Luversan. Le voleur, c’était Luversan.

L’argent volé, dont Roger n’expliquait pas lasource, c’étaient les cent mille francs qu’elle avait portéselle-même boulevard Malesherbes ! Ah ! tout cela avaitété combiné avec une infernale adresse.

Roger était perdu si elle ne parlait pas. Elleavait voulu goûter au fruit de la vengeance, elle allait êtreterriblement vengée. Elle ne fut point touchée du sublimedévouement de Laroque, préférant la honte à une condamnationpresque certaine plutôt que de déshonorer Lucien, en révélantl’adultère de Julia.

Sa haine était apaisée. Elle avait tantsupplié, sans être écoutée. Elle voulait que toutes ses larmesfussent noyées dans les larmes de Roger.

Quelques jours après l’arrestation, qui avaitfait beaucoup de bruit dans Paris, Lucien de Noirville dit à safemme :

– Je ne plaide plus. Ma santé chancelanteet mon infirmité me le défendent. Je n’ai pas plaidé depuis laguerre, mais on m’entendra, du moins, encore une fois avant que jeprenne décidément ma retraite.

Vaguement inquiète, elle demanda :

– Et quel procès acceptez-vous donc deplaider ?

– Pardieu, si tu ne devines pas !Crois-tu que je vais laisser ce pauvre Roger aux prises avec leprésident des assises et le jury sans avoir auprès de lui un amiqui le soutienne ? Je le défendrai et je l’arracherai de leursmains, à moins que Dieu ne m’en retire la force. Et ce serapeut-être la première fois qu’on aura vu un mutilé, qui ne peutplus marcher sans un aide, se faire transporter devant un tribunalpour y protester, par sa présence d’abord, et ensuite par tout cequ’il peut avoir de chaleur et de talent, de l’innocence de sonfrère d’armes.

Elle avait tressailli et elle se troublaitmalgré sa puissance sur elle-même.

– Tu ne trouves pas que j’airaison ? Est-ce que tu doutes de moi ? Eh ! tu astort, va ! Je prouverai que je n’ai pas cessé d’être l’avocatqui faisait avant la guerre courir tout Paris.

« C’est vrai, je suis faible. Cesmaudites blessures ont fait de moi un pauvre diable sans souffle,qui n’a pas l’air d’avoir quatre jours à vivre… mais le cœur estresté jeune… tu verras… J’aime Roger… à coup sûr mieux que jen’aurais aimé un frère…

« Tu ne sais pas, toi, Julia, comme ilest loyal et bon, brave et gai… et combien il a d’abandon dansl’esprit… un esprit grave et réfléchi avec, souvent, des naïvetésd’enfant… un homme, enfin, qu’on est fier de connaître et del’amitié duquel on s’honore. Et c’est lui qu’on accuse !

« Mais je leur montrerai, moi, qu’il estinnocent… Et ce ne sera pas difficile… Je n’aurai pas besoin delonguement étudier son dossier pour cela… Je n’aurai qu’à laisserparler mon cœur.

« Et j’embrasserai Roger devant letribunal… devant le jury… devant tout le monde, pour montrer que jesuis convaincu de son innocence. Tu verras… tu verras la belleplaidoirie… Je veux que ceux qui seront là pleurent !…

Elle se taisait, toute saisie par l’étrangetédramatique de cette situation. Le mari, ignorant l’adultère de safemme, défendant l’amant ! Et c’est qu’il était capable de lesauver ! Depuis qu’il ne plaidait plus, le barreau avait perduson éclat. Si quelqu’un avait assez de talent pour sauver Roger, cene pouvait être que Noirville.

Elle hocha la tête, disant :

– Lorsque vous connaîtrez le dossier del’affaire, peut-être ne serez-vous plus aussi sûr de vous-même…

Il eut un sourire d’orgueil… l’orgueil de sonamitié pour Roger.

– Il est innocent, te dis-je ; endouterais-tu ? Certes, il y a des choses singulières, dans soncas, des billets volés, retrouvés dans la caisse de ses ateliers dela rue Saint-Maur. Roger prétend que ces billets proviennent d’unremboursement, mais refuse de nommer le débiteur. Il est incapablede mentir. Le débiteur existe. Il y a là un mystère qu’ilm’expliquera. Ce qu’il n’a pas voulu dire à la justice, il me leconfiera à moi, il a confiance dans mon amitié. Et un avocat est unconfesseur. Quand je saurai son secret, je n’en serai que plus fortpour le défendre… Et son secret… il me le faut !

Elle toussa, la gorge contractée et, par unmouvement machinal, elle fit craquer ses doigts enlacés l’un dansl’autre. Ses lèvres étaient blanches. Le regard, un moment, parutmort…

Il ajouta en souriant – et Julia faillits’évanouir :

– Cette obstination de Roger à ne riendire me fait soupçonner qu’il doit y avoir en tout cela uneaventure de femme.

– Vous le voyez donc bien, dit-elle aveceffort, il se cache de vous !

Il resta un instant pensif.

– C’est vrai. Si j’ai deviné juste, ils’est défié de moi. Cela me surprend, car, depuis longtemps, sa viela plus intime m’était connue.

Le jour même, Lucien se rendit au parquet deParis, et là prit toutes ses dispositions pour pouvoir pénétrerauprès de Laroque, à la prison de Versailles.

Deux jours après, les employés de la gareSaint-Lazare, voyaient, montant le grand escalier qui conduit à lasalle des Pas-Perdus, un homme jeune encore, au visage distinguémais fatigué et trahissant de secrètes souffrances.

Cet homme avait deux jambes de bois, marchaitavec peine en s’appuyant sur des béquilles, et une jeune femme,d’une admirable beauté, grande, souple, aux yeux noirs, marchaitauprès de lui, veillant sur lui, prête à le secourir, s’il venait àtrébucher.

Ces deux voyageurs qui attiraient ainsi tousles regards étaient Lucien de Noirville, qui allait à la prison deVersailles, et sa femme, qui, pour être près du danger et leconjurer plus facilement, fiévreuse et inquiète, n’avait pas voulule laisser seul.

Mme de Noirville, quittason mari au moment où celui-ci entrait dans la prison.

Avec la voiture qu’ils avaient prise à lagare, elle fit des courses dans Versailles, où elle avait desamies.

Roger Laroque, depuis le dernierinterrogatoire que nous avons rapporté, était dans une prostrationcomplète.

« On découvrira l’assassin, se disait-il.On le découvrira un jour ou l’autre. »

Mais les jours s’étaient passés ; chacund’eux avait apporté contre Roger son contingent de preuves, etl’assassin restait inconnu.

Et, dans l’effroyable bouleversement de savie, sa dernière consolation, – la dernière joie à laquelle il serattachait, – lui était enlevée : il ne pouvait même pluscompter sur l’affection de sa femme et de sa fille, puisque toutesles deux semblaient l’accuser et le croyaient coupable.

Ce fut le dernier coup ; sa raisonchancela un moment sous le choc.

Toute la matinée du lendemain, il avaitdivagué, en proie au délire. Puis son tempérament, sa vigoureuseconstitution, avaient encore eu le dessus.

Il aurait bien voulu devenir fou, pour ne pluspenser, et par conséquent pour ne plus souffrir, mais Dieu luigarda la raison, parce que, sans doute, il n’avait pas fini desouffrir encore.

Il était tout habillé, couché sur son litétroit, lorsqu’un gardien ouvrit la porte, le secoua avec rudesseen criant :

– Hé ! Laroque ! Levez-vous…Voici monsieur l’avocat de Noirville.

À ce nom, Roger se dressa brusquement.

Lucien entrait, et comme son émotion étaittrop forte pour sa faiblesse, il s’appuya contre le mur de lacellule et ses béquilles, qu’il lâcha, roulèrent sur le plancheravec bruit. Il tendit les bras à Roger. Des larmes montaient à sesyeux.

– Roger ! dit-il. Mon pauvreRoger ! mon frère !…

– Lucien ici !… quel bonheur !…Mon ami, mon seul ami !…

Le gardien s’était retiré, Noirville devantrester seul avec le prisonnier.

Les mains serrées, les yeux dans les yeux, ilsse regardèrent longuement. Et, tout à coup, Roger demande à son amiavec angoisse :

– Au moins, toi, tu me croisinnocent ?

– Parbleu ! dit Lucien en riant… etj’espère bien le leur prouver à tous !…

Et comme Roger, interdit, le regarde sans osercomprendre :

– T’imagines-tu, par hasard, que je vaislaisser à un autre avocat le soin de te défendre ! Ce seraitune injure à notre amitié.

Roger recule, comme assommé, les mains sur lefront… Il balbutie :

– Toi ! Toi !… Tu veux medéfendre !… Tu me défendras, toi !

– Eh bien, qu’y a-t-il là de siextraordinaire ? Ne suis-je pas avocat ? Et pas mauvaisavocat, dit-on, – je m’en applaudis, aujourd’hui. – Qu’est-ce quetu as, voyons ?… Tu n’as pas l’air d’accepter ma propositionavec beaucoup d’enthousiasme ! Pourquoi ?… Qu’est-ce queje t’ai fait ?…

– Mais rien, Lucien, rien… C’est que…

– N’as-tu pas confiance en moi ?

– Oh ! si… Je n’espère pas qu’onpuisse me sauver… mais pourtant, si le miracle est possible, cen’est que par toi.

– À la bonne heure… je te retrouve…

– Non, non…, répétait Roger, fou dedouleur et d’horreur. Je ne veux pas… Tu m’entends ?… Je neveux pas !…

Il s’était reculé jusqu’à son lit, où il étaitretombé.

Péniblement, chancelant, car il n’avait pasramassé ses béquilles, Lucien alla jusqu’à lui et s’assit à soncôté.

– Veux-tu m’expliquer cetenfantillage ? dit-il avec un regard de reproche. Comment, turefuses que moi, ton meillleur ami, ton frère d’armes – del’affection duquel tu n’as pas le droit de douter – je sois tonavocat dans cette affaire ?… Je comprends que la douleurt’égare… On a beau être un honnête homme et un homme fort, uneaccusation comme celle qui pèse sur toi est tellement inouïe – etgrave, je ne le dissimule pas – qu’elle peut briser l’énergie lamieux trempée. Mais je suis là, te dis-je, et, puisque je suis là,rien n’est perdu !…

Et comme Roger gardait le visage dans sesmains :

– Voyons, Roger, dit Noirville, aveccette bonté un peu brusque qu’on emploie quelquefois vis-à-vis desenfants indociles, fais-moi donc le plaisir de me regarder enface.

Laroque releva la tête, sous la pression desdoigts de son ami. Ses larmes coulaient, larmes de rage, dedouleur, de honte surtout !

– Tu pleures ? dit Lucienattendri.

– Je pleure parce que ton dévouement metouche, Lucien.

– Laisse là mon dévouement et ne pensonsqu’à toi. Nous n’en sommes plus, je suppose, à nous faire descompliments…

– Je ne puis accepter ton offregénéreuse… Merci, mon ami… Aussi longtemps que je vivrai – et quisait si ce sera longtemps – je n’oublierai pas.

– Comme tu me parles !… Est-ce qu’ildoit être question de reconnaissance entre nous ?… Je tetrouve changé à mon égard, Roger…

– Rien n’est changé à mon affection, monami.

– Pourquoi ne veux-tu pas de moi, dèslors, comme ton avocat ?…

– Je ne le peux… je ne le peux…, disaitle pauvre homme, se tordant les mains et, pour la seconde fois,pensant au suicide.

– Tu me fais injure… et tu me causesbeaucoup de chagrin…

– Pardon, frère, pardon !

– Mais enfin, la raison… la raison d’unpareil refus… car tu as des raisons…

– Oui, dit-il, au hasard, parce qu’ilfallait répondre.

– Au moins me les feras-tuconnaître ?

– À quoi bon ?

– Je t’en prie… au besoin je tel’ordonne… j’en ai le droit… Mais j’ai beau y réfléchir… je ne voispas, vraiment, ce qu’elles peuvent être…

Roger se taisait, il cherchait une explicationet ne trouvait rien.

– Roger, dit Lucien, si tu ne parles pas,je vais douter de ton amitié.

Alors, le malheureux se décida, parce qu’ilvoyait déjà je ne sais quel vague soupçon, quelle inquiétude sur levisage de Noirville.

– Connais-tu toutes les preuves quipèsent sur moi ?

– La chambre de Paris m’a communiqué tondossier… J’ai tout lu.

– Tu as dû voir que les preuves sont dela plus extrême gravité ?

– Oui. Je le reconnais.

– Ne te fais donc point d’illusions,Lucien. Je sais que l’on me condamnera. Il ne peut en êtreautrement. Dans ces conditions, et comme ma défense n’est paspossible, je ne veux pas que tu t’en charges, car tu échoueras. Jene prendrai point d’avocat. On m’en constituera un d’office, voilàtout.

– C’est là une de tes raisons ?

– Oui.

– En d’autres termes, tu sembles craindrepour ma réputation étant données les difficultés presqueinsurmontables de la défense ?

– Justement.

– Rassure-toi. Cela ne m’effraye pas.D’abord cette raison est puérile, et n’en est pas une. Un avocat negagne pas toutes ses causes. Les plus délicates et les plusembrouillées sont celles où il brille le plus, quel qu’en doiveêtre le dénouement. Lachaud a plaidé pour Troppmann, mon cher ami,et si une affaire s’est jamais présentée dont le dénouement futcertain d’avance, c’est bien celle-là ! Or, si je ne suis pasLachaud, tu n’es pas Troppmann. Est-ce que tu n’as que de pareilsarguments à m’opposer ? En ce cas, parlons d’autrechose !

Roger secoua la tête…

Des arguments, il n’en trouverait pas… Chacund’eux se heurterait à l’amitié de Lucien, qui les repousserait. Quedire ? Une seule chose était claire et très nette dans letrouble de son esprit ; sa ferme résolution de ne pas êtredéfendu par Lucien ! Mais comment le décourager ?

L’avocat avait pris dans une des siennes lamain du prisonnier. Il lisait bien, dans cette âme, des combatsintérieurs, mais il n’en devinait pas la cause.

Roger, tout à coup, lui parla à voix basse,très vite :

– Tu ne comprends donc pas, Lucien ?Je suis donc obligé de t’avouer.

– Quoi ?

– Mon crime !

– Quel crime ?

– L’assassinat de Larouette…

– Tu es fou. Qu’est-ce que tu veux mefaire croire là ?…

– Cela est vrai, pourtant. C’est moi quisuis le coupable. J’avais restitué à cet homme plus de centquarante mille francs. Ce remboursement, c’était ma ruine. Je l’aitué, pour lui voler cet argent, pour échapper à la faillite… Je neveux pas que tu me défendes, Lucien, parce que je ne veux pas êtresauvé, parce que je ne suis pas digne que tu prennes ma défense, etque je ne veux pas échapper au châtiment qui va m’atteindre…

Et, poursuivant son idée fixe – l’idée del’adultère à expier – pendant que Lucien, étonné, ne trouvait rienà répondre, Roger répétait :

– Non, je ne mérite pas que tu essayes deme sauver… Je n’en suis pas digne ! Je n’en suis pasdigne !

Lucien semblait le fouiller jusqu’au fond del’âme et Roger baissait la tête sous son regard.

– Ainsi, tu l’avoues, fit le mutilé,c’est toi l’assassin ?

– C’est moi.

– Et tu as tué pour voler, comme lepremier venu des repris de justice ?

– Oui.

– Alors, c’est bien toi que ta femme etta fille ont vu ?

Roger se dressa, ne retenant pas une sourdeexclamation. Avouer cela, était-ce possible ?… Non, mille foisnon… Vouer son nom, sa mémoire, à jamais, à l’exécration de cesdeux créatures si aimées ? Non, mille fois non !…

Elles le croyaient coupable, mais s’ilprotestait de son innocence jusqu’à l’échafaud ou jusqu’au bagne…elles finiraient par douter d’elles-mêmes, peut-être !… Il seretourna vers Lucien…

Il allait lui dire : « Ne m’écoutepoint… je suis fou !… Oublie tout ce que tu viens d’entendre…Suis-je capable d’un pareil crime ? »

Mais ses lèvres restèrent closes ! Julia…Julia se dressait devant lui. Laisser son mari le défendre… Iltrouvait cela plus horrible, en un sens, que ce crime d’assassinatqu’on lui reprochait !…

Il voulut boire sa honte, la boire jusqu’à ladernière goutte. Et, presque mourant, à force d’émotion et dedouleur :

– C’est bien moi qu’elles ont vu,dit-il.

– Alors, ces reproches, ces larmes, cessupplications, devant monsieur de Lignerolles ?…

– Comédie ! comédie ! pourfaire croire à mon innocence.

Lucien resta silencieux. Il n’avait pas lâchéla main de son ami.

– Et – dit-il enfin – tu m’autorises,n’est-ce pas, puisque tu reconnais ton crime, à en faire part àmonsieur de Lignerolles, afin qu’au jour des assises le jury semontre indulgent, en te tenant compte de tes aveux ?…

– Si je t’autorise ?… Si jet’autorise ?… bégaya Roger, atterré.

Et, tout à coup, sans répondre, il roula surson lit, sanglotant bruyamment.

Lucien le laissa pleurer, parce que ces larmesallaient le soulager.

Quand le prisonnier fut un peu calmé,doucement, en souriant, et son visage reflétait une noble etsublime confiance, il dit :

– Tu sais, Roger, que je ne te croispas ?

C’était la preuve d’une amitié si grande,d’une affection si vraie, que Roger en fut comme écrasé. Il étaitvaincu, il n’essaya plus de résister.

Seulement, son étrange obstination avait misun premier soupçon dans l’esprit de Noirville, une inquiétudeplutôt qu’un soupçon, comme la crainte irraisonnée et instinctived’un malheur. Il ne voulut même pas y réfléchir tout de suite.

Ce fut plus tard que cette scène lui revint àla mémoire.

– Maintenant, dit-il, que tu en as finiavec tes enfantillages, car un enfant ou une femme n’eût pointparlé autrement, je suppose que c’est une affaire entendue entrenous et que je puis te considérer comme mon client ?

– Cher, cher ami ! dit Roger,suffoqué par les larmes.

– Et ne te décourage pas. Tu vas voir, situ veux bien écouter mes conseils, et répondre à mes questions,avec quelle facilité nous allons débrouiller la chose.

Laroque fit un geste désespéré. Il n’avaitplus confiance.

– Et d’abord, réponds-moi franchement,hein ?

– En doutes-tu ? M’as-tu jamais vumentir ?

– Non, mais tu pourrais avoir quelquesscrupules… Et, si tu en as, c’est que tu oublies que tu parles à unami ; et à un ami, on peut, on doit tout dire, même ce qu’onne dit pas au juge, même ce qu’on ne dirait pas à unconfesseur…

– Interroge ! dit Laroque d’une voixsourde, car ces mots de Lucien lui faisaient prévoir de nouvellestortures.

– Tout ce que tu as raconté tant enpremier lieu à monsieur Lacroix qu’ensuite à monsieur de Liénard etenfin à monsieur de Lignerolles est l’exacte vérité, n’est-cepas ? Tu n’as rien omis, rien ajouté ?

– Rien. Je te le jure.

– Ta simple parole me suffit. Ainsi donc– fit Lucien en consultant quelques notes qu’il avait prises surles pièces du dossier – le soir du jour où tu as rembourséLarouette, tu as vagué au hasard dans Paris, la tête en feu, parceque tu voyais ta faillite prochaine et inévitable. À Ville-d’Avray,même fièvre, même accès de désespoir, même course vagabonde dans lebois où tu tombes et déchires tes vêtements. Tout cela est possibleet, connaissant ton caractère, pour moi ne fait aucun doute.

– Tout cela est vrai.

– Bien. Passons à autre chose. Ont’accuse, mieux que cela, on prouve que tu as été vu par ta femmeet ta fille.

– C’est impossible, c’est faux, c’estodieux.

– D’accord ; mais enfin, commentexpliques-tu cela ?

– Ma femme n’a rien avoué.

– Soit, par affection ; mais elle avu, certainement. Qui ?

– Que sais-je ?

– C’est ce qu’il faut chercher. MonsieurLacroix, et deux agents très fins, Tristot et Pivolot, ontreconstitué la scène du meurtre. Ils se sont assurés que du balconde la villa on pouvait voir admirablement ce qui se passait chezLarouette.

– Alors, elles ont été abusées par uneressemblance.

– Nous nous informerons. Parlons ducercle, maintenant. As-tu des doutes sur quelqu’un de ceux qui ontjoué contre toi ?

– Non. Du reste, monsieur Liénard s’estinformé avec prudence, tu dois le savoir, et n’a rien puapprendre.

– J’arrive donc tout de suite à la preuveprincipale relevée contre toi : la découverte dans ta caissedes billets volés à Larouette. Il y a là un fait matérielindiscutable. Que ta femme ait cru te voir, ou ne t’ait point vu,cela est, sans contredit, très intéressant pour l’instruction, maisce qui t’accable, bien plus que ne pourrait t’accabler letémoignage même de ta femme si elle avait parlé, ce sont cesmaudits billets. Voyons, prends ton courage à deux mains… D’oùviennent-ils ?

– Eh ! le sais-je ?

– Entendons-nous. Il est possible que tune saches pas de qui ton débiteur les avait reçus. Ce mystérieuxdébiteur, que tu caches à l’enquête, n’est peut-être pasl’assassin. Donc, rien à craindre pour lui, si tu le nommes. Maisil est nécessaire que, coupable ou non, nous le connaissions parcequ’il y a là une filière, – comme on dit en langage de police, –une piste, si tu aimes mieux, et, en suivant cette piste, enremontant cette filière, il faudrait être maladroit si nousn’arrivions pas à la vérité.

– Il est inutile de chercher de ce côté,Lucien. Ce serait t’égarer.

– Qu’en sais-tu ?

– J’en suis sûr.

– Oh ! Oh ! Eh bien, pour mefaire partager ta certitude, éclaire-moi. De qui tenais-tu cesbillets ?

Laroque ne répondit pas. Le supplicerecommençait pour lui !

L’avocat se mit à rire.

– Je compte bien, dit-il, que tu ne vaspas faire le mystérieux avec moi comme tu l’as fait avec tes jugeset je te prie, avant tout, de voir en moi un ami, plutôt qu’unhomme chargé de te défendre. J’ai besoin de former ma conviction etil faut me dire.

– N’insiste pas, Lucien, dit Rogertremblant.

– Comment, tu refuses ?

– Je refuse.

– Voilà qui est singulier, parexemple ! murmura Noirville.

– Je t’avais prévenu, mon ami, mieux vautne pas me défendre !

– Mais si, je te défendrai,morbleu ! malgré toi, si tu m’y contrains !…

– Je t’en prie, Lucien, je ne puis riendire…

– Pourquoi ?

– L’honneur me le défend.

– Tu me fais beaucoup de peine, Roger,beaucoup. Ton manque de confiance me surprend péniblement. Tu meconnais assez, – outre que ma profession me commande la plusabsolue discrétion, – pour être sûr que le secret que tu meconfieras me sera sacré, comme à toi. L’honneur te défend deparler, à ce que tu prétends… Mais il y a un autre honneur qui tedéfend de te taire, c’est celui de ta femme et de ta fille,auxquelles ta condamnation léguerait une honte éternelle, –l’opprobe d’une flétrissure ineffaçable. Ces deux honneurs sont enbalance. Auquel des deux obéiras-tu ?

Roger baissait la tête.

Lucien garda un moment le silence, – ses yeuxne quittaient pas son ami.

– Je parie que je devine !dit-il.

Roger tressaillit… Ah ! s’il avait pu sedouter, le pauvre garçon !

– Et si je devine, me diras-tu que j’airencontré juste ?

– Lucien, ta gaieté me fait mal.

– Fais-moi partager ton secret, et jepleurerai avec toi, s’il le faut.

Chacune de ces paroles pénétrait en Laroqueavec la sensation froide d’un coup de poignard en plein cœur.

Noirville continuait :

– Hier, je parlais de toi à Julia et jelui disais que ton entêtement me faisait croire qu’il y a dans tavie quelque secret de femme.

Tout le sang de Laroque reflua vers son cœur.Ce fut si violent, si brutal, qu’il étouffa, renversé sur le lit,la gorge serrée.

Lucien eut peur. Il brisa le col de la chemisepour que le prisonnier respirât plus librement.

– J’avais deviné juste !murmura-t-il.

Et quand Laroque fut remis, Lucien, toujoursriant :

– Une fredaine, hein ? Avoue donc,enfant, avoue donc !

– Laisse-moi, Lucien, tu me faissouffrir, ami.

– C’est pour ton bien, comme disent lesmédecins aux malades. Alors, nous disons qu’il s’agit d’unefredaine… une fredaine qui tourne au tragique ! Eh !eh ! comme tu cachais ton jeu !… Je ne te savais pas sicoureur !

– Mon Dieu ! mon Dieu !murmurait Roger, en proie à la plus inexprimable angoisse,n’aurez-vous pas pitié de moi et auriez-vous le droit de mecondamner, si je recourais au suicide ?

– Une femme mariée, sans doute,interrogeait Lucien, pareil, en cette scène, à un chirurgien quiarracherait lambeaux par lambeaux la chair pour arriver jusqu’àl’âme. Ne m’as-tu pas dit cent fois – et ne l’ai-je pas vu aussi –que tu adorais ta femme et ta fille ?… Et cependant… un momentd’oubli, de faiblesse !… Enfin, si c’est vrai, ce n’est pas lamort d’un homme !…

– Tu te trompes, ami, il ne s’agit pasd’une femme !

– De qui donc ?

Roger ne répondit pas.

Alors Lucien :

– Puisque tu ne veux pas me renseigner,permets que je continue mes suppositions, lesquelles – jusqu’àpreuve du contraire – me semblent se rapprocher d’assez près de lavérité…

– Par grâce, Lucien !

– Point de grâce, ami. Je disais qu’ilest possible que ce soit une femme mariée… Je ne te cache pas quej’eusse préféré une aventure dans le demi-monde… L’adultère,vois-tu, Roger, amène toujours avec lui – quelle que soit lapassion qui lui serve d’excuse – tout un cortège de hontes etd’hypocrisies pour la loyauté d’un homme…

– Assez, Lucien, dit Roger d’un tonferme. De deux choses l’une : ou tes suppositions sont vraies,et ce que tu diras ne peut que me renouveler ma peine et aviver mesregrets ; ou elles sont fausses, et alors blessantes pour moi.N’en parlons plus, mon ami, veux-tu ?

Ce fut au tour de Lucien de se taire. Un vaguesoupçon avait pénétré dans son esprit, avec une douleur aiguë. Celadura une seconde, pas même.

Le trouble de Roger, sa persistance à ne riendire aux juges, au mépris des dangers qu’il courait, sacrifiant savie à son secret, c’est bien étrange. Quelle grave raison lepoussait donc à un pareil dévouement ? L’honneur d’unefemme ?… Mais, en avouant la vérité à Lucien, il n’eût pointtouché à l’honneur de cette femme…

Et, au fond du cœur, quelque chose lui disait,à Lucien : « C’est à toi surtout qu’il a voulu celer lavérité ! »

L’avocat avait beau se défendre contre cesoupçon. Son amitié était impuissante à l’écarter. Il revoyait safemme libre et coquette. Il revoyait Roger, troublé devant lui,pâle et tremblant, ayant vraiment l’aspect d’un coupable !Pourquoi ces deux êtres lui apparaissaient-ils ainsirapprochés ?

Ah ! qu’il souffrit en cetteseconde ! Mais il était fort et son amitié pour Roger étaitgrande ! Cette lutte si courte, et si cruelle pourtant, ne setraduisit que par un mot, proféré par le pauvre homme presque avechonte :

– Tu étais donc lié avec le mari ?…Il y a donc une trahison à l’amitié ?… Et tu crains, pour lafemme, que le mari ne se venge ?

Roger comprit-il le soupçon deNoirville ?

Les deux hommes se regardèrent… droit dans lesyeux…

Et les yeux de Roger se mouillèrent de larmes…Et il mentit – ou plutôt non, ce fut la vérité – car, lorsqu’ilavait aimé Julia, connaissait-il Lucien ? Était-il sonami ? Y avait-il eu trahison à l’amitié ? Non !…

Et c’est pourquoi, ayant deviné le vague doutequi, de son aile noire, venait d’effleurer l’âme de son frère, del’homme qu’il aimait entre tous, pour la paix et l’honneur duquelil laissait planer sur lui une accusation capitale, c’est pourquoiil dit :

– Oh ! Lucien… oh ! monami ! qu’as-tu pensé là ?…

Et sa gorge se serra, sa voix fut étouffée. Ilne put en dire plus.

Lucien l’entoura de ses bras et le serracontre lui… Dans cette étreinte, il faisait passer toute sonamitié.

– Vois, dit-il, ce que ton silence peutcauser de mal, non seulement à toi-même, mais encore aux autres…Pardon, ami… Une dernière fois, laisse-moi te supplier, au nom deta femme et de ta fille… Si tu ne dis pas d’où proviennent lesbillets, tu es perdu…

– Je le sais bien !

– Coupable, je te défendrais encore, carje ne pourrais oublier ce qui s’est passé entre nous et l’affectionqui nous a fait vivre de la même vie !…

– Comme tu es bon !

– Pas si bon que tu crois, Roger, car jete garde rancune, et je n’aurai de cesse que je n’aie pénétré lemystère que tu me caches.

Roger secoua la tête.

– Tu crois que c’est impossible ?dit Lucien. Baste ! qui sait ?

Il se leva, tendit les deux mains auprisonnier.

– Adieu, ami. Je reviendrai te voir avantla cour d’assises. Reste sur tes gardes et attends-toi à d’autresassauts de ma part. Puisque c’est malgré toi qu’il faut qu’on tesauve, eh bien, je te sauverai malgré toi !

Roger alla ramasser les béquilles et lestendit à son ami.

Lucien sortit et Laroque, penché, l’oreillecontre la porte de sa cellule, que le gardien venait de refermer,écouta longtemps le bruit sourd des jambes de bois sur les dallesde la prison.

Le bruit alla s’affaiblissant, puis s’évanouittout à fait.

Alors, sans plus de forces – accoté contre lemur – la tête tombée sur la poitrine et les bras ballants, Laroquemurmura :

« C’est trop souffrir !… Lasouffrance dépasse la faute !… »

Et, ainsi, dans cette posture, il rêvalongtemps, repassant sa vie, triste à mourir…

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