Du Chat et des Rats.
Un Chat, la terreur des Rats, en avait presquedétruit l’engeance. Il eut bien voulu croquer le peu qui enrestait ; mais le malheur des premiers avait rendu lesderniers plus sages. Ceux-ci se tenaient si bien sur leurs gardesqu’il n’était pas aisé de les avoir. – Je les auraipourtant, dit le Chat, et bon gré mal gré qu’ils enaient. – Cela dit, il s’enfarine et se blottit au fondd’une huche. Un Rat qui l’aperçut le prit pour quelque pièce dechair, et s’en approcha ; le Chat se retourne aussitôt sur sesdeux pattes, et lui fait sentir sa griffe. Un second vint après,puis un troisième, qui fut suivi de plusieurs autres, et de ceux-cipas un ne s’en retourna. Cependant un dernier, vieux et ratatinémit la tête hors de son trou, et d’abord regarda de touscôtés ; puis de là, sans vouloir s’avancer plus loin, se mit àcontempler le bloc enfariné ; enfin secouant latête, – À d’autres, mon ami s’écria-t-il ; il ne tesert de rien à mon égard de t’être ainsi blanchi ; quand tuserais farine, sac, huche, ou tout ce qu’il te plaira, je n’enapprocherais pas en mille ans une fois. –
Des Dragons.
Deux Dragons voulurent passer au travers d’unehaie vive, fort touffue, qui leur barrait le chemin ; l’unavait une tête et plusieurs queues, l’autre une queue et plusieurstêtes. Ce dernier, quelques efforts qu’il fît, n’en put jamaisvenir à bout. Comme toutes ces têtes se nuisaient les unes auxautres, elles ne purent se faire dans la haie une ouverture assezlarge pour y faire passer le corps de la bête. L’autre eut moins depeine à se faire un passage ; la tête s’ouvrit seule le cheminfort aisément, tira ensuite les queues, et fit si bien, que tête,corps et queues, tout passa.