Les Veillées du hameau près de Dikanka – Tome II

IV

 

Il faisait grand jour, mais pas desoleil ; le ciel s’était assombri et une bruine s’égouttaitsur les champs, les bois et le large Dniépr. Dame Catherine seréveilla, mais sans allégresse, ses yeux étaient rouges d’avoirpleuré, elle se sentait troublée et inquiète.

– Mon cher mari, mon mari aimé, j’ai faitun rêve étrange…

– Quel rêve, ma chère dameCatherine ?

– Un rêve extraordinaire, en vérité, etaussi net que si je n’avais pas été endormie. J’ai rêvé que monpère est ce monstre que nous avons vu chez le capitaine Gorobietz.Mais je t’en prie, ne va pas ajouter foi à ce songe. Quellesabsurdités ne vous apparaissent-elles point quand on dort ! Jeme figurais debout devant lui, toute tremblante et craintive, etchacune de ses paroles me perçait le cœur. Ah ! si tu avaisentendu ce qu’il disait !

– Et que te disait-il donc, trèsprécieuse Catherine ?

– Il disait : « Regarde-moi, mafille, regarde comme je suis beau ! Les gens ont bien tort deprétendre que je suis laid. Je serais pour toi un excellent mari.Regarde quels yeux je sais faire ! » À ces mots, ildirigea vers moi des prunelles de flamme, je poussai un cri et meréveillai…

– Oui, il y a beaucoup de vrai dans lesrêves… Mais, à part cela, sais-tu que l’on s’agite au delà descollines ? c’est tout juste si les Polonais ne recommencentpas à montrer le nez une fois de plus. Gorobietz m’a envoyéprévenir de ne point m’endormir sur les deux oreilles. Or, ils’inquiétait bien en vain, je me tenais déjà sur mes gardes, sansqu’il fût besoin de l’avertissement. Cette nuit même mes gens ontabattu assez de bois pour dix barricades. Nous réglerons cesmessieurs de Pologne avec des prunes de plomb et leursgentilshommes danseront aussi au branle de nos fouets.

– Et mon père est au courant ?

– Ah ! ton père est pour moi commeune taie sur l’œil. Jusqu’à présent je ne suis pas arrivé à lepercer à jour. Sans doute qu’il a grandement fauté en terreétrangère. Et de fait, explique-moi ceci : voilà à peu prèsdix mois qu’il vit parmi nous, et pas une seule fois nous nel’avons vu se donner du bon temps comme un vrai Cosaque. Il a mêmerefusé de boire l’hydromel, tu entends, Catherine, refusé de cethydromel que j’ai subtilisé chez les Juifs de Brest-Litowsk… Hé,valet ! cria le sire Danilo, fais un saut, l’ami, jusqu’à lacave, et apporte-nous de l’hydromel juif : j’ai dans l’idée,dame Catherine, qu’il ne croit pas au Seigneur Christ. Que t’ensemble ?

– Dieu sait ce que tu vas t’imaginer,sire Danilo !

– Cela t’étonne, chère dame ?poursuivait Danilo en prenant des mains du Cosaque une cruched’argile. Même ces charognes de catholiques ne crachent pas surl’eau-de-vie. Les Turcs seuls s’en abstiennent. Dis donc, Stetzko,as-tu lampé beaucoup d’hydromel dans la cave ?

– J’y ai seulement goûté, sireDanilo !

– Tu mens, fils de chien, voyez comme lesmouches s’attaquent à ses moustaches ! Ah ! ces Cosaques,quelle crâne engeance ! prêts à partager tout ce qu’ilspossèdent, mais pour la boisson, ils tiennent à l’absorber toutseuls et jusqu’à la dernière goutte. Quant à moi, dame Catherine,il me semble que voilà longtemps je ne me suis pas enivré…

– Longtemps !… et la dernièrefois…

– N’aie pas peur, n’aie pas peur, je neviderai pas plus d’une coupe… Tiens, voilà le prieur des Turcs quise glisse chez nous, grogna-t-il entre les dents, en voyant sonbeau-père courber la taille pour franchir le seuil.

– Eh bien ! ma fille, dit le père,ôtant son bonnet et rajustant le ceinturon auquel pendait son sabreorné de pierres étranges, le soleil est déjà haut et il n’est pasencore question chez toi du déjeuner…

– Le déjeuner est prêt, seigneur père, età l’instant il sera servi. Sors du four le pot de beignets,dit-elle à la vieille servante qui essuyait un plat de bois. Ouplutôt non, je m’en occuperai moi-même, va appeler leshommes !

Tous s’assirent en cercle par terre, leseigneur père en face de l’étagère aux saintes images, le sireDanilo à sa gauche et à sa droite dame Catherine et dix gaillardsd’une fidélité à toute épreuve, en surcots bleus ou jaunes.

– Je n’aime pas ces beignets, dit le pèreen reposant sa cuiller après quelques bouchées, ils n’ont aucungoût.

– Je sais bien que tu préférerais desnouilles juives, se dit mentalement Danilo. Pour quelle raison,beau-père, reprit-il à voix haute, dis-tu que ces beignets n’ontaucun goût ? Serait-ce qu’ils sont mal préparés ? MaCatherine les accommode de telle façon que l’hetman en personne ararement la chance d’en manger de pareils et on aurait bien tort deles mépriser. C’est là une nourriture de chrétien. Tous les saintset élus de Dieu mangeaient des beignets…

Le père ne répondit rien, Danilo se tutégalement.

On servit alors du porc rôti aux choux et auxpruneaux.

– Je n’aime pas le porc, dit le beau-pèreen puisant une cuillerée de choux dans le plat.

– Et pourquoi donc ? demanda Danilo.Les Turcs et les Juifs sont les seuls à ne pas manger de porc.

Le père de Catherine se renfrogna encoredavantage. Il ne prit que de la semoule au lait et au lieud’eau-de-vie but à une gourde passée dans son ceinturon une espèced’eau noire.

Après le repas. Danilo s’endormit du sommeildes vaillants et ne se réveilla qu’aux approches du soir. Ils’installa pour écrire certaines missives destinées aux troupescosaques et dame Catherine, assise sur le poêle, se mit à balancerdu pied le berceau. Mais de son siège, le maître de maison, quin’accordait qu’un œil distrait à ses écritures, tournait le plussouvent ses regards du côté de la fenêtre d’où l’on voyait brillerau loin les monts et le Dniépr. Au delà du fleuve, les bois seteignaient de bleu et tout en haut s’apercevait un pan du cielnocturne, maintenant redevenu clair. Mais ce n’était ni lefirmament ni les bois bleutés qu’observait le sire Danilo ; ilconsidérait la langue de terre avancée dans l’eau où se dressait lasombre silhouette de l’antique château fort. Et il lui sembla voirs’éclairer une étroite lucarne de ce château. Cependant tout étaitcalme, ce ne devait être qu’une illusion. L’on n’entendait autrechose que le sourd grondement du fleuve tout là-bas et de troiscôtés les échos successifs des vagues momentanément réveillées. LeDniépr ne se révolte point, il se borne à grommeler et à bougonner,comme le font les vieux bonshommes. Rien ne lui plaît, tout achangé aux alentours et toujours en guerre contre les coteaux, lesforêts, les prairies qui le bordent, il court se plaindre d’eux àla mer Noire.

Mais voici que sur le large Dniépr est apparuela tache noire d’une barque, et de nouveau l’on dirait qu’unelumière s’est brusquement allumée au château. Danilo lance un coupde sifflet et à ce signal accourt son fidèle serviteur.

– Arme-toi au plus vite, Stetzko, dusabre acéré et du fusil, et suis-moi !

– Tu sors ? demande dameCatherine.

– Oui, femme. Il faut que je fasse uneronde pour voir si tout est en ordre.

– J’ai pourtant grand-peur de rester icitoute seule. Mes paupières sont lourdes de sommeil, mais que faire,s’il revient, même en rêve ? Je ne suis pas certained’ailleurs que ce fût un songe, tant chacun de ses épisodes prenaitde vie…

– La vieille reste à tes côtés et enoutre les Cosaques dorment dans l’entrée et dans la cour.

– La vieille ronfle déjà et les Cosaquesne me rassurent guère. Écoute, sire Danilo, enferme-moi plutôt àdouble tour dans la chambre et emporte la clef avec toi. Dans cesconditions, je n’aurai pas peur, et tes gens s’étendront en traversde ma porte.

– Qu’il en soit ainsi, dit le sireDanilo, tout en époussetant son fusil et en versant de la poudresur une planchette.

Le fidèle Stetzko attendait déjà, revêtu depied en cap du harnois complet des Cosaques. Danilo se coiffa dubonnet d’astrakan, ferma la fenêtre, tira les verrous de la porte,donna un tour de clef, et enjambant les Cosaques endormis parterre, il franchit sans bruit le seuil et marcha vers lescoteaux.

Presque toute l’étendue de la voûte célesteétait redevenue limpide. Une molle brise montait du Dniépr, enhaleine presque imperceptible. Si du lointain n’étaient venus lescris plaintifs de la mouette, on aurait pu croire que la natureentière gisait sans voix. Mais soudain l’on entendit unbruissement… Bouroulbache et son serviteur fidèle se blottirent ensilence derrière des épines masquant un abatis. Quelqu’un enjustaucorps rouge, avec deux pistolets et un sabre au côté,descendait la colline.

– C’est le beau-père, dit à mi-voixDanilo, aux aguets derrière un buisson. Qu’a-t-il à errer dehors àpareille heure, et où va-t-il ? Attention, Stetzko, ouvre unœil vigilant et vois quel chemin prendra le seigneur père…

L’homme au justaucorps rouge descendit jusqu’àla grève et tourna du côté de la langue de terre.

– Ah ! c’est donc là ? dit lesire Danilo, car il s’est bien dirigé, n’est-ce pas, Stetzko, toutdroit vers l’antre du sorcier ?

– Certainement, et pas ailleurs, sireDanilo, sinon nous l’aurions revu de l’autre côté, or, il a disparudans les parages du château.

– Attends ! nous allons d’abord nousdégager d’ici, puis nous le suivrons à la piste. Quelque chose secache là-dessous. Non, non, dame Catherine, j’avais bien dit queton père était un méchant homme ; en aucune occasion il ne secomporte comme un orthodoxe.

Voici déjà le sire Danilo et son fidèle valetqui surgissent en silhouettes furtives sur la pointe deterre ; ils ont tout de suite disparu, l’impénétrable forêtqui cerne le château les a engloutis. Tout en haut, une lucarnevient de s’éclairer d’une faible lueur. Les Cosaques se tiennent aupied des murs, se demandant par quel moyen les escalader ; onn’aperçoit ni porche, ni poterne. Il y aurait bien un accès par lacour, mais comment y pénétrer ? De loin, on entend là-bas deschaînes grincer et des molosses qui courent.

« Qu’ai-je à m’interroger silongtemps ? se dit le sire Danilo, à la vue d’un chêne altierpoussé droit devant la fenêtre. Reste ici, mon gars, je vaisgrimper sur cet arbre, de là on peut voir en plein à travers lalucarne… »

Il se défait de son ceinturon, abandonne sonsabre sur le sol, de peur qu’il ne tinte pendant l’escalade, puiss’agrippant aux rameaux, il monte jusqu’au faîte du chêne. Assissur une grosse branche, juste au niveau de l’étroite ouverture, ets’accrochant d’une main au tronc, il regarde de tous ses yeux.

Il n’y a pas un flambeau dans la chambre, maisil y fait pourtant clair. Aux murs, sont dessinés des signesbizarres, des armes y pendent aussi, mais toutes paraissentétranges ; ni les Turcs, ni les gens de Crimée, ni lesPolonais, ni les orthodoxes, ni même le glorieux peuple suédoisn’en portent de pareilles. Au ras du plafond, passe le vol enzigzag des chauves-souris dont les ombres intermittentes frôlenttantôt les parois, tantôt les portes, ou le plancher. Voici que laporte vient de tourner sans rumeur sur ses gonds ; unpersonnage en pourpoint rouge entre et marche droit à la tablerecouverte d’une nappe blanche.

– C’est lui, c’est lebeau-père !

Le sire Danilo descend un peu plus bas et sepresse plus fortement contre le chêne.

Mais le beau-père a autre chose en tête que deregarder si on l’épie par la fenêtre. Il est arrivé la mine sombre,l’air de méchante humeur ; le voilà maintenant qui arrache lanappe, et tout à coup, sans le moindre bruit, la pièce entières’inonde d’une clarté bleue et transparente. Sans se confondre avecelle, les ondes d’or pâle de la lumière précédente s’y sontdiluées, y ont plongé comme dans un océan d’azur, et s’étirentdésormais en longues traînées rappelant les jaspures du marbre. Ilpose alors sur la table un vase où il jette on ne sait quellesherbes.

Le sire Danilo le considère plusattentivement, car jusqu’à présent il n’avait pas remarqué que levieillard n’était plus revêtu de son pourpoint rouge. Il amaintenant des culottes bouffantes comme celles que portent lesTurcs et un ceinturon avec des pistolets ; sur la tête, unecoiffure extraordinaire, de haut en bas couverte de caractères quine sont ni russes ni polonais. Les yeux du guetteur s’attachent àce visage qui change par degrés ; le nez s’allonge jusqu’àpendre au-dessus des lèvres ; en l’espace d’une minute, labouche s’est fendue jusqu’aux oreilles, un croc sort de cettebouche et devant Danilo se dresse à présent ce même sorcier, apparupendant la noce chez le capitaine.

– Ton rêve ne mentait pas, Catherine,songe Bouroulbache.

Maintenant le nécromant fait les cents pas àtravers la chambre ; depuis quelque temps, les signes auxmurailles changent en une succession plus rapide ; de haut enbas, et d’avant en arrière, s’accélère le vol des chauves-souris.La lumière bleue baisse, diminue progressivement et l’on diraitqu’elle va s’éteindre. Puis, le réduit s’éclaire d’une subtilelueur rose. Il semble alors que cette étrange aura s’est répandueavec un faible son jusqu’aux angles mêmes de la pièce, et puisqu’elle a été soufflée tout à coup cédant la place aux ténèbres.L’on ne perçoit plus qu’un bruissement, à croire qu’une brise, àl’heure douce du soir, folâtre en tournoyant sur un miroir d’eau,en ployant de plus en plus vers les ondes les saules argentés. Etle sire Danilo a l’impression que la lune brille dans cettechambre, que les étoiles y circulent, qu’un ciel bleu foncé s’ylaisse entrevoir ; déjà même l’haleine du vent nocturne luisouffle de cette fenêtre en plein visage. Puis, il s’imagine (maisalors il tire sur ses moustaches, pour se rendre compte qu’il estbien réveillé) qu’il n’y a plus de lune dans cette chambre, sapropre chambre à coucher ; aux parois pendent ses armes àlui, sabres turcs et tartares ; le long des murs, voici lesétagères et sur leurs rayons la vaisselle et les ustensiles decuisine ; sur la table, on découvre le pain et le sel ;le berceau pend du plafond, mais à la place des saintes images semontrent d’affreuses trognes ; sur le poêle… Mais alors, unbrouillard opaque a recouvert toutes choses et il fait noir commedans un four. Puis la chambrette s’est de nouveau éclairée de cettemême lueur rose, accompagnée du son étrange d’auparavant et l’onréaperçoit le sorcier immobile, coiffé de son bizarre turban. Lessons augmentent d’intensité, et leur timbre se fait plus grave, lasubtile lueur rose devient plus vive, et quelque chose de blanc, ondirait un nuage, s’agite doucement au milieu de la pièce. Et lesire Danilo croit distinguer que ce n’est point là un nuage, maisbien une femme ; seulement, de quoi peut-elle bien êtrefaite ? ne serait-elle pas pétrie d’air ? Et d’où vientdonc qu’elle se dresse là, debout de toute sa taille, sans que sespieds effleurent le sol, sans le moindre appui, et que la lueur lapénètre de part en part, si bien qu’on discerne au travers lessignes écrits sur la muraille ? Mais voici qu’elle a remué satête transparente, ses yeux d’un bleu pâle se sont doucementilluminés, ses cheveux se bouclent et viennent se dérouler sur sesépaules, comme un brouillard d’un gris léger ; un peu de rougeavive ses lèvres, de même qu’au travers de la transparence blafardedu ciel matinal s’étale, presque invisible, l’incarnat del’aube ; ses sourcils ont pris une nuance plus foncée.

– Ah ! c’est Catherine !

Dès lors, Danilo se sent les membres commechargés de fers, il fait effort pour parler, mais ses lèvresremuent sans émettre aucun son.

Le sorcier se tient immobile à la mêmeplace.

– Où étais-tu ? demande-t-il et laforme debout devant lui se met à frissonner.

– Oh ! pourquoi m’avoirévoquée ? gémit-elle d’une voix douce. Je me trouvais si bien.J’étais en ce lieu où je naquis, et où j’ai vécu quinze ans.Ah ! comme je m’y plaisais ! Comme il est vert et commeil sent bon ce pré où je jouais dans mon enfance ; il y pousseles mêmes fleurs des champs et rien n’a changé à notre maison, pasplus qu’à notre verger. Oh ! ces baisers dont me comblait mabonne mère ! quel amour ne lisait-on pas dans ses yeux !Elle me dorlotait, me baisait les lèvres et les joues, peignait aupeigne fin ma chevelure blonde. Père ! dit-elle en dardant sesprunelles pâles sur le nécromant, pour quelle raison as-tu égorgéma mère ?

Le sorcier la menace du doigt.

– T’ai-je priée de parler decela ?

À cette question, la belle fille éthérée estsaisie d’un tremblement.

– Où se trouve en ce moment ta maîtresseCatherine ?

– Ma maîtresse Catherine s’est endormie,et ravie de cette occasion, j’en ai profité pour prendre l’essor etm’envoler à tire-d’aile. Il y avait longtemps que je désirais voirma mère, et brusquement il m’a semblé que je n’avais que quinze anset je suis devenue légère comme un oiseau. Pourquoi m’as-tuévoquée ?

– Te rappelles-tu tout ce que je t’ai dithier soir ? demanda le sorcier d’une voix si sourde qu’on apeine à l’entendre.

– Je me le rappelle, oui, et combien nedonnerais-je point pour l’oublier ! Pauvre Catherine, elleignore bien des choses que connaît son âme.

« C’est, l’âme de Catherine, se ditDanilo qui n’ose encore faire un mouvement. »

– Repens-toi, père ! N’est-il pasépouvantable qu’à la suite de chacun des crimes commis de ta main,les morts surgissent de leur tombe ?

– Tu rabâches encore ces vieilleshistoires ? interrompt le sorcier d’un ton saccadé. Jemaintiens mes exigences, je te forcerai à agir selon ma volonté.Catherine m’aimera !

– Oh ! tu es un monstre, et non pasmon père, gémit l’ombre. Non, il n’en sera pas selon tes désirs. Ilest vrai que grâce à tes enchantements diaboliques tu as usurpé lepouvoir d’évoquer une âme et de la torturer. Mais Dieu seul estcapable de l’amener à faire ce qu’il lui plaît. Non, jamais, tantque j’habiterai son corps, Catherine ne se résoudra à commettre uneaction contraire à la loi divine. Père, le jour du Jugement dernierest proche. Ne serais-tu pas mon père, tu ne m’amènerais pas pourautant à tromper l’époux que je chéris et qui m’est fidèle ;ne me garderait-il pas sa foi, je ne le trahirais point malgrétout, parce que Dieu n’aime pas les âmes parjures et déloyales…

À ce moment, ses yeux pâles fixent la lucarnesous laquelle le sire Danilo se trouve perché, et immobile, ellecesse de parler.

– Où regardes-tu ? que vois-tulà-bas ? s’écrie le sorcier.

La Catherine aérienne se met à trembler. Maisdéjà le sire Danilo s’est laissé glisser à terre et, suivi dufidèle Stetzko, il se fraie un chemin vers les collines où ilhabite.

« C’est affreux !affreux ! » se dit-il à part soi, cependant que son cœurde Cosaque est envahi d’une vague crainte.

Bientôt, il traverse sa propre cour où lesCosaques continuent à dormir aussi profondément que lors de sondépart, à l’exception d’un seul, assis à l’écart et qui fume lapipe.

Toute la nue est parsemée d’étoiles.

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