Black Coffee d’ AGATHA CHRISTIE

Il se remit sur ses pieds :

— Bon, j’en ai terminé avec cette pièce. Ce qu’il faudrait, c’est que j’aie un petit entretien avec Mr Richard Amory, et que je voie ensuite ce Dr Carelli. Ça m’a tout l’air d’être notre homme. Mais pas d’idées préconçues, comme je me dis toujours, pas d’idées préconçues.

Il se dirigea vers la porte :

— Vous venez, Poirot ?

— Mais bien sûr que je vous accompagne, répondit ce dernier en le rejoignant.

— Le capitaine Hastings aussi, je parie ? fit Japp en partant d’un grand rire. Il vous colle toujours au train comme s’il était votre ombre !

Poirot jeta un regard impérieux à son ami :

— Je pense que Hastings préférera rester ici.

Entrant dans le jeu de façon un peu trop automatique, Hastings s’empressa d’affirmer :

— Oui, oui, je préfère !

— Comme vous voudrez, fit Japp, sans même songer à dissimuler sa surprise.

Poirot et lui sortirent, suivis du jeune agent. Quelques instants plus tard, Barbara Amory, vêtue d’un corsage rose et d’un pantalon clair, rentra du jardin par la porte-fenêtre :

— Ah ! c’est vous, mon gros loup ? Dites donc, qu’est-ce qui vient de nous débarquer comme ça en fanfare ? demanda-t-elle à Hastings en s’asseyant sur le canapé. La police ?

— Oui, répondit-il.

Il s’installa à côté d’elle :

— C’est l’inspecteur Japp, de Scotland Yard. Il est allé voir votre cousin pour lui poser quelques questions.

— Il voudra me poser des questions à moi aussi, vous croyez ?

— Je ne pense pas. Mais même s’il en vient à le faire, lui assura Hastings, il n’y aura pas de quoi vous inquiéter.

— Oh ! je ne m’inquiète pas, déclara Barbara. En fait, je trouverais même ça épatant ! Mais je serais peut-être tentée de broder un peu, histoire de faire sensation. J’adore faire sensation, pas vous ?

Hastings parut embarrassé :

— Je… euh… je ne sais pas. Non, je ne crois pas que j’adore faire sensation.

Barbara Amory lui coula un regard en coin.

— Vous m’intriguez, vous savez, affirma-t-elle. D’où diable sortez-vous ?

— Eh bien j’ai passé plusieurs années en Amérique du Sud, mais avant cela…

— Je l’aurais parié ! s’exclama-t-elle.

Main gauche en visière sur ses yeux, elle affecta de balayer l’horizon d’un geste large :

— Les grands espaces… C’est pour ça que vous êtes si délicieusement vieux jeu et dépassé.

Hastings parut cette fois offensé.

— Vous m’en voyez navré, répliqua-t-il avec raideur.

— Oh ! mais j’adore ça, s’empressa-t-elle d’expliquer. Je vous trouve très chou, vraiment chou comme tout.

— Qu’entendez-vous au juste par vieux jeu ?

— Eh bien, je suis sûre que vous croyez à toutes sortes de vieilles lunes comme les convenances, comme ne pas mentir sauf si on a une très bonne raison de le faire et comme savoir avaler les couleuvres avec le sourire.

— Absolument, acquiesça Hastings un peu surpris. Pas vous ?

— Moi ? Eh bien, est-ce que vous imaginez, par exemple, que je vais entretenir l’illusion selon laquelle la mort de l’oncle Claud serait un drame qui me plonge dans la plus noire des afflictions ?

— Elle ne l’est pas ? s’offusqua-t-il.

— Je vous adore ! s’exclama-t-elle.

Elle se leva et se jucha sur l’accoudoir du canapé :

— Pour ce qui me concerne, c’est l’événement le plus merveilleux qui pouvait survenir. Vous n’avez pas idée des conditions dans lesquelles ce vieux rapiat nous faisait végéter !

Elle se tut, dépassée par la véhémence de ses propres sentiments.

— Je… je ne voudrais pas que vous… commença Hastings, gêné.

— Vous n’aimez pas la franchise ? l’interrompit-elle. C’est bien ce que je pensais. Vous préféreriez que je m’habille en noir plutôt que comme ça, que je fasse d’une voix brisée l’éloge de ce « pauvre oncle Claud, toujours si bon pour toute sa famille » !

— Allons, voyons ! s’exclama-t-il.

— Pas la peine de me mener en bateau, poursuivit-elle. Je sais bien que vous seriez comme ça au fond, si je vous connaissais mieux. Mais, moi, ce que je prétends, c’est que la vie est trop courte pour qu’on ait le temps de s’embarrasser de tous ces mensonges et tous ces faux-semblants. L’oncle Claud n’était pas bon du tout pour sa famille. Je suis sûre qu’au plus profond de notre cœur nous sommes tous ravis et enchantés de sa mort. Tante Caroline comprise. La pauvre chérie, il lui a fallu le supporter plus longtemps qu’aucun d’entre nous.

Barbara se calma soudain. Quand elle reprit la parole, ce fut sur un ton plus doux :

— Vous savez, j’ai réfléchi. Scientifiquement parlant, tante Caroline peut très bien l’avoir empoisonné. Cette crise cardiaque, hier soir, est vraiment très louche. Je n’y crois pas du tout. Imaginez simplement que ce refoulement de sa personnalité pendant des années ait provoqué chez tante Caroline un fantastique complexe et que…

— Je veux bien croire que ce soit théoriquement possible…, murmura avec précaution Hastings.

— En revanche, ce que je me demande, c’est qui a bien pu chaparder la formule, réfléchit-elle. Tout le monde clame que c’est cet Italien, mais, personnellement, c’est Tredwell que je soupçonne.

— Votre majordome ? Grands dieux ! Pourquoi ?

— Parce qu’il ne s’est à aucun moment approché du cabinet de travail.

— Mais alors… fit Hastings, ahuri.

— J’ai des côtés très conformistes, d’une certaine manière, avoua-t-elle. On m’a toujours appris qu’il fallait soupçonner la personne la plus invraisemblable. C’est elle, dans les meilleures énigmes policières, qui a immanquablement fait le coup. Et Tredwell est, sans doute aucun, la personne la plus invraisemblable.

— À part vous, peut-être, hasarda Hastings en riant.

— Oh ! moi…

Esquissant un vague sourire, Barbara se leva et s’éloigna de lui :

— Comme c’est curieux…

— Qu’est-ce qui est curieux ? demanda Hastings en se levant à son tour.

— Un truc auquel je viens de penser. Mais sortons dans le jardin. J’ai horreur de moisir entre ces quatre murs.

Elle se dirigea vers la porte-fenêtre.

— Je crains bien de ne pas pouvoir vous suivre, déplora Hastings.

— Pourquoi ?

— Parce que je ne suis pas censé quitter cette pièce.

— Vous savez, cette pièce, comme vous dites, j’ai comme l’impression que vous faites dessus une fixation, releva Barbara. Vous vous rappelez hier au soir ? Nous étions tous ici, anéantis par la disparition de la formule, quand vous êtes entré d’un pas martial pour nous faire aussitôt passer du drame planétaire à la comédie de salon en déclarant comme si de rien n’était : « Quelle ravissante bibliothèque, Mr Amory ! » avant, en bon Anglais, d’enchaîner sur des considérations climatologiques. Un grand moment, votre arrivée en compagnie de cet extraordinaire personnage haut comme trois pommes et qui affichait un air d’immense dignité. Et vous, oh ! si courtois…

— Je reconnais que Poirot peut faire assez bizarre impression à première vue, avoua Hastings. Et il a toutes sortes de petites manies. C’est ainsi qu’il manifeste un amour immodéré de l’ordre sous toutes ses formes. La vue d’un bibelot posé de travers, d’un grain de poussière, voire même, sur une tierce personne, d’un vêtement désajusté lui est une véritable torture.

— Vous formez un tel contraste, tous les deux, fit Barbara en riant.

— Poirot a un système d’investigation bien à lui, vous savez, continua Hastings. L’ordre et la méthode sont sa religion. Il professe le plus grand mépris pour les indices matériels tels que traces de pas, cendres de cigarettes, vous voyez ce que je veux dire. Il soutient que, par eux-mêmes, ils ne sauraient jamais permettre à un détective de résoudre un problème. Le véritable travail, proclame-t-il, s’accomplit de l’intérieur. Sur quoi il tapote avec une infinie satisfaction son crâne en forme d’œuf : « Les petites cellules grises. N’oubliez jamais les petites cellules grises, mon bon ami. »

— Oh ! je reconnais qu’il est chou lui aussi, mais pas autant que vous avec votre « Quelle ravissante bibliothèque » !

— Mais ravissante, elle l’est ! insista Hastings, quelque peu agacé.

— Personnellement, je ne trouve pas, dit Barbara.

Elle le prit par la main et essaya de l’entraîner vers la porte-fenêtre ouverte :

— De toute façon, vous y êtes maintenant resté assez longtemps. Venez.

— Vous ne comprenez pas, fit Hastings en lui retirant sa main. J’ai promis à Poirot.

— Vous avez promis à M. Poirot de ne pas quitter cette pièce ? articula-t-elle lentement. Mais pourquoi ?

— Ça, je ne peux pas vous le dire.

— Ah ! fit Barbara qui resta un instant silencieuse.

Puis elle changea d’attitude. Passant derrière Hastings, elle entreprit de déclamer d’une voix exagérément théâtrale :

— « Le garçon restait planté sur le pont du navire en flammes… »

— Je vous demande pardon ?

— «… Que tous, sauf lui, avaient déserté. » C’est de notre brave Felicia Hemans. Quelle poétesse ! Alors, mon petit chou ?

— Je n’arrive décidément pas à vous comprendre, déclara Hastings, exaspéré.

— Pourquoi vous croyez-vous obligé de le faire ? Vous êtes un amour, fit Barbara en glissant son bras sous le sien. Venez, laissez-vous ensorceler. Je vous trouve irrésistible.

— Vous me faites marcher.

— Pas du tout, insista Barbara. Je suis folle de vous. Vous êtes une perle rare. Une relique du passé.

Elle le tira vers la porte-fenêtre, et cette fois, Hastings céda à la pression de son bras.

— Vous êtes décidément une personne peu ordinaire, balbutia-t-il. Totalement différente des femmes que j’ai jusqu’à présent connues.

— Je suis ravie de l’entendre. C’est très bon signe, estima-t-elle tandis qu’ils se faisaient à présent face dans l’encadrement de la porte-fenêtre.

— Bon signe ?

— Bien sûr ! Après une telle déclaration, une fille est en droit de tout espérer !

Hastings rougit jusqu’aux oreilles. Et Barbara, avec un rire léger, l’entraîna dans le jardin.

16

Après qu’ils eurent disparu sous les frondaisons, la bibliothèque ne demeura pas longtemps inoccupée. La porte du hall s’ouvrit en effet bientôt et miss Amory entra, portant un petit sac à ouvrage. Elle se dirigea vers le canapé, posa son sac, s’agenouilla et se mit à tâtonner entre les coussins. Tandis qu’elle était ainsi affairée, le Dr Carelli entra par l’autre porte, avec à la main son chapeau et une petite valise. Apercevant miss Amory, il s’arrêta et marmonna un mot pour se faire pardonner son intrusion.

Retrouvant soudain son aiguille à tricoter, l’auguste demoiselle se releva, le visage un rien empourpré.

— J’avais perdu une aiguille, expliqua-t-elle de façon superflue car elle la brandissait en parlant. Elle avait glissé derrière le coussin. Vous nous quittez, docteur Carelli ? fit-elle en remarquant son bagage.

Il posa chapeau et valise sur une chaise.

— Je craindrais d’abuser de votre hospitalité en restant plus longtemps, fit-il, mondain.

Manifestement ravie, miss Amory parvint néanmoins à faire montre de courtoisie :

— Bien sûr, si tel est votre sentiment…

Puis elle se rappela les circonstances un tantinet spéciales dans lesquelles se trouvaient actuellement les occupants de la maison :

— Mais je croyais qu’il restait quelques fastidieuses formalités à…

La voix indécise, elle laissa sa phrase inachevée.

— Oh ! tout cela est réglé, lui assura-t-il.

— Alors si vous pensez devoir partir…

— Absolument.

— Je vais faire avancer la voiture, s’empressa d’offrir miss Amory en se dirigeant vers la sonnette, à côté de la cheminée.

— Non, non, protesta Carelli, tout cela est réglé aussi.

— Mais vous avez déjà été contraint de descendre votre valise vous-même ! Vraiment, ces domestiques ! Où est passée leur servilité, leur sens des responsabilités ?

Elle revint au canapé, s’assit et sortit un tricot de son sac :

— Ils ne sont plus à ce qu’ils font, docteur Carelli. Il n’y en a pas un pour racheter l’autre et garder la tête froide. C’est un monde, non ?

— Ce n’est que trop vrai, répondit-il à tout hasard, bouillant manifestement d’impatience et jetant des regards éloquents en direction du téléphone.

Miss Amory se mit à tricoter en continuant de déverser un flot de paroles sans véritable objet :

— Vous prenez le 12 h 15, j’imagine. Ne partez pas trop juste. Non pas que je veuille vous bousculer, loin de là. À trop presser les gens, comme j’aime à le répéter…

— Cela va de soi, coupa net le Dr Carelli. Mais j’ai tout mon temps, je crois. Euh… je me demandais si je pourrais utiliser votre téléphone ?

Miss Amory leva un instant les yeux.

— Oh ! mais bien évidemment, acquiesça-t-elle sans pour autant s’arrêter de tricoter ni paraître réaliser qu’il voulait peut-être appeler en privé.

— Merci, maugréa-t-il.

Il se dirigea vers la table-bureau, fit ostensiblement mine de relever un numéro dans l’annuaire, puis jeta un regard impatient en direction de miss Amory :

— Je crois que votre nièce vous cherchait, lança-t-il.

Confrontée à ce renseignement, miss Amory eut pour seule réaction de se mettre à parler de Barbara tout en continuant imperturbablement son ouvrage.

— La chère petite ! s’exclama-t-elle. Une enfant tellement adorable ! Vous savez, la vie qu’elle mène ici n’est pas rose tous les jours, et beaucoup trop monotone pour une jeune personne de son âge. Enfin, entre nous soit dit, il n’est pas impossible que la situation change du tout au tout désormais.

Elle s’arrêta quelques instants sur cette agréable pensée avant de poursuivre :

— Non pas que je n’aie pas fait tout ce que je pouvais, mais ce dont une jeune fille a besoin, c’est d’un peu de gaieté. Tout l’Ultrabrille du monde ne remplacera jamais ça.

Le visage du Dr Carelli se fit l’image même de la perplexité. Perplexité doublée d’une dose croissante d’irritation.

— L’Ultrabrille ? ne put-il s’empêcher de demander.

— Oui, Ultrabrille… ou Ultravit, plutôt. Seigneur ! je sais pourtant bien que l’Ultrabrille est une encaustique. Ul-tra-vit, il faut que je me mette cela dans la tête. Des vitamines, vous savez – c’est du moins ce qui est écrit sur la boîte. La A, la B, la C, la D, elles y sont toutes, sauf celle qui vous empêche d’avoir le béribéri. Mais je ne crois pas qu’on risque grand-chose de ce côté-là en Angleterre. C’est une maladie qui n’existe pas dans nos contrées. Elle vient, je crois, du décorticage du riz dans les pays arriérés. Tout cela est tellement intéressant. J’en ai fait prendre à Mr Raynor – de l’Ultrabrille, j’entends – chaque jour après le petit déjeuner. Il était pâlichon, le pauvre petit. J’ai essayé d’en faire prendre aussi à Lucia, mais elle n’a pas voulu.

Miss Amory secoua la tête d’un air réprobateur :

— Et dire que quand j’étais enfant, on m’interdisait les caramels de peur qu’ils ne contiennent des vitamines. Les temps changent, voyez-vous, les temps changent vraiment.

Bien qu’il essayât de le cacher, le Dr Carelli en arrivait à présent au comble de l’exaspération.

— Certes, certes, miss Amory, commenta-t-il le plus poliment qu’il put.

Il la rejoignit près du canapé et tenta une approche plus directe :

— Je crois que votre nièce vous appelle.

— Elle m’appelle, moi ?

— Oui. Vous ne l’entendez pas ?

Elle tendit l’oreille.

— Non… non, confessa-t-elle. Comme c’est curieux.

Elle roula son tricot :

— Vous avez l’ouïe fine, docteur Carelli. La mienne n’est pourtant pas mauvaise. On m’a même souvent dit que…

Sa pelote de laine lui échappa. Carelli la lui ramassa.

— … Merci beaucoup, docteur. Tous les Amory entendent très bien, vous savez.

Elle se leva du canapé :

— Mon père avait remarquablement conservé toutes ses facultés. À quatre-vingts ans, il lisait sans lunettes.

Elle laissa de nouveau tomber sa pelote, et de nouveau Carelli se baissa pour la lui ramasser.

— Mille mercis… Un homme remarquable, docteur Carelli. Mon père, veux-je dire. Un homme tellement remarquable. Il dormait toujours dans un lit de plumes, à baldaquin bien évidemment, et les fenêtres de sa chambre ne devaient être ouvertes sous aucun prétexte. L’air de la nuit, affirmait-il, est on ne peut plus nocif et délétère. Hélas, lors d’une attaque de goutte, il a été soigné par une jeune femme qui insistait pour que le haut de la fenêtre à guillotine demeure entrebâillé. Mon pauvre père en est mort.

Elle laissa de nouveau tomber la pelote de laine. Cette fois, après l’avoir ramassée, le Dr Carelli la lui plaça fermement dans la main et la pilota vers la porte. Elle n’avança que lentement, sans cesser de parler.

— Ces infirmières d’hôpital, je ne les aime pas du tout, tint-elle à lui signaler. Elles cancanent sur le compte de leurs patients, boivent beaucoup trop de thé et sèment toujours la zizanie parmi les domestiques.

— Ce n’est que trop vrai, chère mademoiselle, ce n’est que trop vrai, se hâta-t-il de renchérir en lui ouvrant la porte.

— Merci beaucoup, fit miss Amory tandis qu’il la propulsait hors de la pièce.

Refermant la porte derrière elle, Carelli se précipita vers la table-bureau et décrocha le combiné du téléphone. Après un silence, il commença à parler à mi-voix et de façon précipitée :

— Ici Market Cleve, un, cinq, trois. Je voudrais un numéro à Londres : Soho, huit, huit, cinq, trois… Non, cinq, trois. C’est ça. Hein ? Vous me rappelez ? Très bien.

Il raccrocha et se tint à côté du téléphone en se rongeant impatiemment les ongles. Au bout de quelques minutes, il traversa la pièce en direction du cabinet de travail de sir Claud, ouvrit la porte et entra. À peine l’avait-il fait qu’Edward Raynor pénétra dans la bibliothèque en venant du hall. Après avoir jeté un coup d’œil circulaire dans la pièce, il se dirigea nonchalamment vers l’âtre. Au moment où il touchait le vase aux allume-feu sur le manteau de la cheminée, Carelli ressortit du cabinet de travail. Quand il referma la porte, Raynor se retourna et le vit.

— Je ne vous savais pas ici ! sursauta le secrétaire.

— J’attends un coup de téléphone, expliqua Carelli.

— Ah !

Il y eut un silence. Puis Carelli s’enquit :

— Quand l’inspecteur de police est-il arrivé ?

— Il y a une vingtaine de minutes, je crois. Vous ne l’avez pas vu ?

— Aperçu, seulement. Et de loin.

— C’est un homme de Scotland Yard, expliqua Raynor. Il élucidait paraît-il une autre affaire dans les environs, aussi la police locale en a-t-elle profité pour faire appel à lui.

— C’est ce qu’il est convenu d’appeler un coup de chance, non ? commenta Carelli.

— Je ne vous le fais pas dire.

Le téléphone sonna et Raynor se dirigea vers l’appareil. Carelli se hâta de le précéder :

— Ce doit être l’appel que j’attends.

Il regarda Raynor :

— Je me demandais si vous voudriez bien…

— Mais certainement, mon cher, assura le secrétaire. Je m’en vais de ce pas.

Raynor quitta la pièce et Carelli décrocha le combiné.

— Allô ? fit-il à mi-voix. C’est Miguel ?… Oui ?… Non, sacré bon sang ! je n’ai pas pu. Ç’a été impossible… Non, vous ne comprenez pas, le vieux est mort hier soir… Je pars tout de suite… Japp est ici… Japp, vous savez, l’inspecteur de Scotland Yard… Non, je ne l’ai pas encore rencontré… J’espère aussi… Ce soir, 9 heures et demie, à l’endroit habituel… D’accord.

Après avoir raccroché, Carelli s’en fut mettre son chapeau, empoigna sa valise et obliqua vers la porte-fenêtre.

De retour du jardin, Hercule Poirot se présenta à ce moment précis sur le seuil. Et les deux hommes se télescopèrent.

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