SCÈNE III
Célimène, Acaste, Clitandre, Basque
Basque
Arsinoé, madame,
Monte ici pour vous voir.
Célimène
Que me veut cette femme ?
Basque
Éliante là-bas est à l’entretenir.
Célimène
De quoi s’avise-t-elle, et qui la fait venir ?
Acaste
Pour prude consommée en tous lieux elle passe,
Et l’ardeur de son zèle…
Célimène
Oui, oui, franche grimace.
Dans l’âme elle est du monde ; et ses soins tentent tout
Pour accrocher quelqu’un, sans en venir à bout.
Elle ne saurait voir qu’avec un œil d’envie
Les amants déclarés dont une autre est suivie ;
Et son triste mérite, abandonné de tous,
Contre le siècle aveugle est toujours en courroux.
Elle tâche à couvrir d’un faux voile de prude
Ce que chez elle on voit d’affreuse solitude ;
Et, pour sauver l’honneur de ses faibles appas,
Elle attache du crime au pouvoir qu’ils n’ont pas.
Cependant un amant plairait fort à la dame,
Et même pour Alceste elle a tendresse d’âme5.
Ce qu’il me rend de soins outrage ses attraits ;
Elle veut que ce soit un vol que je lui fais ;
Et son jaloux dépit, qu’avec peine elle cache,
En tous endroits sous main contre moi se détache6
Enfin je n’ai rien vu de si sot à mon gré ;
Elle est impertinente au suprême degré,
Et…
5On dirait aujourd’hui elle a de la tendresse d’âme. AUGER.
6Le dépit peut se déchaîner contre quelqu’un, s’attacher à le décrier, éclater, etc. On détache un ennemi, un parti ; on se détache de quelqu’un. VOLT.