Histoire d’un paysan – 1794 à 1795 – Le Citoyen Bonaparte

Chapitre 3

 

Je me souviens qu’alors il n’était plusquestion que de la campagne du Nord, des batailles de Courtrai, dePont-à-Chin, de Fleuras ; Jourdan et Pichegru se trouvaient enpremière ligne au dehors, sur nos frontières. À l’intérieur,Robespierre s’élevait de plus en plus. Il avait fait décréter lareconnaissance de l’Être suprême et la croyance du peuple àl’immortalité de l’âme. Le bruit courait que bientôt tout serait enordre, que les guillotinades cesseraient après la punition desgrands coupables, et que nous aurions enfin le règne de la vertu.La principale affaire c’était de ressembler aux anciensRomains ; on disait que les Jacobins en approchaient, maisqu’ils ne montaient pourtant pas encore à leur hauteur. Beaucoup decitoyens, qui s’appelaient dans le temps Joseph, Jean, Claude ouNicolas, avaient changé de nom ; le nouveau calendrier nereconnaissait plus que Brutus, Cincinnatus, Gracchus ; et ceuxqui n’avaient pas une grande instruction ne savaient pas ce quecela voulait dire. Aux fêtes patriotiques, les déesses allaientpresques nues ; voilà des choses malhonnêtes et véritablementdégoûtantes.

C’était même contraire au bon sens, de vouloirressembler à des gens que les trois quarts de la nation neconnaissaient pas, et de nous réformer sur le modèle des ancienspaïens, à demi-sauvages ; mais on se gardait bien des’indigner contre ces bêtises, parce que les dénonciationspleuvaient, et qu’on était empoigné, jugé et guillotiné dans lesquarante-huit heures. Chaque fois que Robespierre parlait à laConvention, on votait l’impression de ce qu’il avait dit ;tous les clubs, toutes les municipalités recevaient ses discours,qu’on affichait partout, comme aujourd’hui les mandements desévêques. On aurait cru que le bon Dieu venait de parler.

Et tout à coup, en juin et juillet, cet hommese tut ; il n’alla plus dans les Comités de surveillance et desalut public. Moi, je crois en mon âme et conscience qu’il sefigurait qu’on ne pouvait plus se passer de lui ; qu’ilfaudrait absolument le supplier à genoux de revenir, et qu’alors ilferait ses conditions au pays. J’ai toujours eu cette idée,d’autant plus que son ami Saint-Just, qui rentrait d’une mission àl’armée, voyant que rien ne bougeait, que tout marchait très biensans eux, déclara qu’il fallait un dictateur, et que ce dictateurne pouvait être que le vertueux Robespierre. Il fit cettedéclaration au Comité de salut public ; mais les autresmembres du Comité virent où ces êtres vertueux voulaient nousmener : ils refusèrent ! et l’homme incorruptible,indigné contre ceux qui se permettaient de lui résister, résolut des’en débarrasser. Tout ce que j’ai lu depuis me porte à croire ceque je vous dis. Robespierre était un dénonciateur ; avec sesdénonciations il avait épouvanté le monde ; il voulut dénoncerles membres du Comité eux-mêmes, et les envoyer rejoindreDanton.

En ce temps, vers la fin de juillet, les chefsde notre club, qui recevaient les ordres des Jacobins, Élof Collinen tête, se rendirent à Paris pour la fête de thermidor, et lesgens eurent peur ; on pensa qu’il se préparait un grand coup.C’étaient tous des robespierristes, principalement Élof ;depuis leur départ on n’osait plus se parler.

Cela dura huit ou dix jours ; et voilàqu’un beau matin des courriers apportèrent la nouvelle queRobespierre, Couthon, Saint-Just, avec tous leurs amis, avaient étéramassés d’un coup de filet et guillotinés du jour au lendemain. Cefut quelque chose de terrible en ville ; les femmes, lesenfants de nos patriotes crurent que leur père, leurs frères, leurmari se trouvaient dans le nombre. Qu’on se représente la positionde ces gens, qui n’osaient crier ni se désoler, car Saint-Justlui-même avait fait décréter que ceux qui plaignaient les coupablesétaient suspects, et que s’ils recevaient chez eux, quand ce seraitleur propre mère, ils méritaient la mort ; qu’on s’imagine unserrement de cœur pareil.

Nous en frémissions tous lorsque, le1er août au soir, étant seul avec Marguerite dans notrepetite chambre donnant sur la place de la Halle, au moment de nouscoucher, nous entendîmes deux coups au volet. Je pensais qu’uncitoyen avait oublié quelque chose, de l’huile, une chandelle,n’importe quoi ; j’ouvris donc : Élof Collin étaitlà !

– C’est moi, dit-il, ouvre.

Aussitôt je sortis ouvrir la porte de l’allée,tout inquiet ; ce n’était pas une petite affaire de recevoiralors des robespierristes qui revenaient de Paris, mais pour unvieux camarade de Chauvel j’aurais risqué ma tête.

Collin entra ; je poussai le verrou del’allée et je le suivis. Dans notre chambre, la chandelle sur latable, Élof un instant regarda de tous côtés, en écoutant. Je levois encore, avec son grand chapeau à cornes, son habit de drapgris bleu ; sa grosse perruque nouée sur le dos, les jouestirées et son gros nez camard tout blanc.

– Vous êtes seuls ? dit-il ens’asseyant.

Je m’assis en face de lui sans répondre.Marguerite resta debout.

– Tout est perdu ! fit-il au boutd’une minute, les fricoteurs, les voleurs, les filous ont ledessus, la république est à bas. C’est un grand hasard que nous ensoyons réchappés.

Il jeta son chapeau sur la table, continuantde nous regarder, pour savoir ce que nous pensions.

– Quel malheur ! dit Marguerite,depuis votre départ nous étions tous en méfiance.

Et lui, baissant encore la voix dans ce grandsilence de la nuit, nous raconta que les principaux jacobins de laprovince, les chefs de clubs avaient reçu l’avis d’être à Parispour la fête de thermidor, parce qu’il se préparait une épurationgénérale. Mais qu’en arrivant là-bas, sauf les jacobins, quirestaient toujours fermes dans leurs bonnes idées, ils avaienttrouvé tout gangrené : la Convention et les Comités ;qu’alors Robespierre avait risqué son rapport contre les Comités,et que la Convention, bien à contre-cœur, par habitude et parcrainte, avait voté l’impression du rapport ; mais que lesfricoteurs, qui se sentaient menacés, avaient fait retirer ledécret d’impression et renvoyer le rapport à l’examen des Comitéseux-mêmes ; chose abominable, puisque c’étaient des Comités desalut public et de sûreté générale que Robespierre venait dedénoncer et qu’il voulait purifier : ces gens ne pouvaient sejuger eux-mêmes ! Qu’ensuite Robespierre avait lu son rapportle même soir au club des Jacobins, et que tous les patriotess’étaient déclarés pour lui ; qu’on pensait même à souleverles sections contre la Convention ; que Payan,Fleuriot-Lescot, le maire de Paris, Henriot, le commandant de lagarde nationale, enfin tous les bons sans-culottes ne demandaientqu’à mettre la main sur les Comités, dans la nuit, et bousculertout de suite la faction des corrompus.

Mais que Robespierre, trop vertueux,s’opposait à l’insurrection contre la Convention, qui pouvaitvous mettre hors la loi ; qu’il aimait mieux renverser laMontagne et les Comités, en appelant la droite et le centre del’assemblée à son secours, les hommes vertueux du centre, qu’onappelait autrefois les crapauds du marais ; que ces êtres sanscaractère, ne sachant pas lesquels d’entre eux étaient sur la listed’épuration, et qui se sentaient tous véreux plus ou moins,s’étaient laissé gagner par les fricoteurs dans cette même nuit, desorte que le lendemain dimanche, 9 thermidor, Saint-Just ayantvoulu parler à l’ouverture de la Convention, Tallien, le plus grandscélérat de l’ancienne Montagne, avait coupé la parole à cet hommevertueux ; que les autres s’en étaient mêlés, et queRobespierre lui-même n’avait pu dire un mot, parce que tous lesmembres de l’Assemblée, à gauche, à droite, en haut, en bas,ensemble et l’un après l’autre le forçaient de se taire, enl’appelant Cromwell, tyran, despote, triumvir, et finalement en ledécrétant d’accusation, lui Robespierre, Auguste-Bon-Joseph sonfrère, Couthon, Saint-Just, Lebas, en les faisant empoigner etconduire dans les prisons de Paris.

Voilà ce que nous raconta Collin ; nousl’écoutions bien étonnés, comme on pense.

Il nous dit ensuite que pendant cette séancele peuple attendait ; que vers le soir, ayant appris ce quis’était passé, il s’était soulevé pour la délivrance de ces grandspatriotes ; que la brave Commune avait fait sonner le tocsin,et que les officiers municipaux avaient été délivrer lesprisonniers, en les emmenant à l’hôtel de ville ; mais queHenriot, un peu gris, selon son habitude, s’était fait arrêter encourant les rues à cheval pour soulever le peuple, et que lescorrompus l’avaient emmené prisonnier au Comité de sûretégénérale.

Ces choses se passaient entre cinq et septheures du soir. À sept heures, la Convention devait se réunirencore une fois ; on le savait ; Coffinhal courut auxTuileries délivrer Henriot avec une centaine de canonnierspatriotes, qui braquèrent aussitôt leurs canons sur la porte de laConvention, pour empêcher les représentants d’entrer.Malheureusement, dit Collin, Henriot, au lieu de rester làtranquillement, eut la bêtise d’aller demander des ordres à l’hôtelde ville ; pendant ce temps, les représentants arrivèrent, lescanonniers se dispersèrent, et la Convention, malgré le tocsin,malgré les cris du dehors et le danger de l’insurrection, mitHenriot, les deux Robespierre, Couthon, Saint-Just, Lebas, tous lesconspirateurs de la Commune et les principaux Jacobins hors la loi.Elle envoya des commissaires lire ce décret dans toutes lessections, et nomma Barras commandant de la force armée contre lesrebelles.

– Tout cela, nous dit Collin avecindignation, retombe sur Henriot : le malheureux s’était grisédès le matin, il criait, il levait son sabre et ne donnait pasd’ordres.

Moi je pensai tout de suite à Santerre, àLéchelle, à Rossignol : ces braillards se ressemblaienttous ; ceux qui les suivaient allaient à la déroute ou bien àla guillotine.

Le grand Élof, désolé, nous dit qu’alors lessans-culottes en masse avaient eu peur d’être compris dans ledécret de mise hors la loi, et qu’au lieu d’aller soutenirRobespierre et les hommes purs à l’hôtel de ville, le plus grandnombre étaient allés rejoindre Barras aux Tuileries encriant : « Vive la Convention ! » et qu’entreune et deux heures du matin, avant le jour, toute la gardenationale était descendue des deux côtés de la Seine, malgré lafusillade d’une poignée de patriotes qui voulaient résister le longde la rivière ; qu’elle avait envahi la maison commune, où setrouvaient les vrais représentants du peuple ; que Henriotavait été jeté par les fenêtres ; que Robespierre avait reçuun coup de pistolet à la figure ; qu’on avait traîné Couthondans un égoût ; que Lebas s’était tué ; que Saint-Just,Robespierre jeune, enfin tous les soutiens de la république, àtravers les coups de pied, les coups de crosse, les soufflets etles crachats, avaient été ramenés en prison, et Robespierretransporté sur une planche à la Convention, où l’on n’avait pasmême voulu le voir, soi-disant parce que sa vue aurait souillé lesregards des fricoteurs ; – et que finalement ces martyrs, avecune quantité d’autres jacobins, officiers municipaux, etc., toushors la loi, avaient été traînés à la guillotine, place de laRévolution, au milieu des cris, des tas de boue et des affronts detoute sorte, tellement humiliés et maltraités qu’ils ne pouvaientplus se tenir debout, et que le pauvre Couthon, aux trois quartsmort, roulait sous les pieds des autres, dans la charrette,demandant pour seule grâce d’être achevé ; qu’en face del’échafaud on avait gardé Maximilien Robespierre le dernier, pourvoir guillotiner ses amis ; que le bourreau, un royaliste, luiavait arraché son bandeau et l’avait exposé tout vivant, la figuremâchurée, aux yeux du peuple furieux, et puis qu’il l’avait tuécomme les autres.

C’est ce que nous dit Élof Collin enfrémissant ; et je me rappelai Danton, Camille Desmoulins,Westermann ; je vis que les mouchards avaient fait pourceux-ci comme pour les premiers. J’écoutais cette histoire avecdégoût. Collin, tout pâle, ayant fini par se taire, je luidis :

– Écoute, citoyen Élof, ce que tu viensde nous raconter ne m’étonne pas ; ce qui m’étonne, c’est quela chose ait duré si longtemps. Dans un temps, lorsque nous avionstoute l’Europe et la Vendée sur les bras, il a fallu suspendrel’application de la constitution de 93 ; il a fallu établir leComité de salut public, le Comité de surveillance générale et letribunal révolutionnaire ; il a fallu la terreur contre lesaristocrates, contre les égoïstes, contre les conspirateurs et lestraîtres qui livraient nos places et montraient le chemin du pays àl’étranger ; mais voilà plusieurs mois que la guillotinemarche contre les meilleurs patriotes ! N’est-ce pas unevéritable abomination que des hommes comme Danton, commeDesmoulins, Hérault-Séchelles, Lacroix, Bazire, Philippeaux,Westermann, etc., qu’on avait vus à la tête de toutes les grandesjournées de la révolution, aient été guillotinés sans jugement, pardes êtres qui tremblaient dans leur peau et se cachaient les joursde bataille ; par des êtres qui se tenaient en embuscade dansleur bureau de police, comme les araignées au milieu de leurtoile ? N’est-ce pas une honte pour la France et larépublique ? Est-ce que cela pouvait nous faire du bien deguillotiner Danton ? Est-ce que les despotes n’ont pas dû rirece jour-là ? Est-ce que nos plus grands ennemis auraient punous faire un pareil tort ? Est-ce que tous les citoyens decœur et de bon sens n’ont pas frémi d’indignation ?

Collin me regardait, le poing sur la table etles lèvres serrées.

– Tu ne crois donc pas à la vertu deRobespierre, toi ? fit-il.

– À la vertu de Robespierre et deSaint-Just ! lui dis-je en levant les épaules. Est-ce qu’onpeut croire à la vertu des scélérats qui ont assassiné Danton parcequ’il était plus grand, plus fort, plus généreux qu’eux tousensemble ; parce qu’il voulait mettre la liberté et lamiséricorde à la place de la guillotine, et que, lui vivant, lesdictateurs n’étaient pas possibles ?… Où donc était leur vertuextraordinaire ? Qu’est-ce qu’ils ont donc fait qui les élèvetant au-dessus des autres ? Quels dangers ont-ils donc courusde plus que sept ou huit cent mille citoyens partis en sabots à lafrontière ? Est-ce qu’ils ont manqué de pain, de feu et dechaussures en hiver, comme nous autres en Vendée ? Non, ilsont fait de longs discours, prononcé des sentences, donné desordres, proscrit ceux qui gênaient leur ambition, et finalementessayé de se faire nommer dictateurs. Eh bien ! moi je ne veuxpas de dictateurs, et j’aime mieux la liberté que laguillotine ; c’est trop commode de tuer ceux qui ne pensentpas comme vous, le dernier brigand peut faire la même chose. C’estpour la liberté que je me suis battu ; pour avoir le droit dedire et d’écrire ce que je pense ; pour avoir des biens à moi,des champs, des prés, des maisons, sans dîmes, sans champart, sansprivilèges, quand je les aurai gagnés honnêtement par montravail ; c’est pour manger mon bien ou pour l’entasser, sicela me convient, sans que des êtres purs, des êtresincorruptibles, tirés à quatre épingles comme des femmes, puissentmettre le nez dedans et me dire : « Tes habits sont tropbeaux, tes dîners sont trop bons, tu ne ressembles pas aux Romains,il faut te couper le cou. » Quels abominables despotes !…C’était l’égoïsme et l’orgueil incarnés !… Des gens quin’avaient jamais vécu que devant leur écritoire, et qui sefiguraient qu’on change les hommes avec des sentences et desdécrets d’accusation, la guillotine en permanence pour se faireobéir !… Ah ! pouah ! quand j’y pense, ça me tournele cœur.

L’indignation me possédait. Collin, netrouvant rien à me répondre, se leva tout à coup, prit son chapeauet sortit en allongeant le pas. Marguerite, derrière lui, poussa leverrou de l’allée et revint. Je croyais qu’elle allait me faire desreproches, mais au contraire en rentrant elle me dit :

– Tu as raison, Michel, c’étaient desmalheureux remplis d’orgueil. J’ai vu Saint-Just ici ; c’est àpeine s’il répondait à ceux qui lui parlaient, tant il se faisaitune haute idée de lui-même. Ah ! que le pauvre Danton etCamille Desmoulins valaient bien mieux ! On n’aurait jamaiscru que ces patriotes étaient les premiers hommes de larépublique ; la bonté et le courage se voyaient peints surleur figure. Les autres ; secs, raides, vous regardaient duhaut de leur grandeur ; ils se croyaient, bien sûr, d’un autresang que nous. Mais c’est égal, la république vient de recevoir uncoup terrible ; les filous qui restent maîtres nousvendront.

– Bah ! bah ! Marguerite, luidis-je, ne te figure donc pas que cinq ou six hommes sont laFrance. Le peuple c’est tout ; le peuple qui travaille, lepeuple qui se bat, qui se défend, et qui fait des économies pourlui et non pour les autres. Ce qu’il a gagné, sois tranquille,quand tous les despotes et les esclaves s’entendraient ensemble, ilne leur en lâchera plus rien ; il faudrait nous hacher tousjusqu’au dernier, pour nous ôter seulement un brin d’herbe. Lereste viendra tout seul ; nos enfants seront instruits, ilssauront ce que chaque pouce de terre nous a coûté ; je nepense pas qu’ils seront plus bêtes ou plus lâches que nous, etqu’ils se laisseront dépouiller.

Ainsi se passa ce jour. Le lendemain, cequ’Élof Collin nous avait raconté se répandit dans la ville. Toutesles figures furent changées ; les unes semblaient sortir dedessous terre et les autres y rentrer. Il ne faut pourtant pascroire que la terreur finit alors ; sans doute des quantitésde prisonniers revinrent de Nancy, de Metz, des ponts couverts deStrasbourg : des gens à demi-morts d’épouvante, qui s’étaientattendus chaque jour à s’entendre appeler devant le tribunalrévolutionnaire et puis à monter sur la charrette ! J’en aiconnu plus de cinquante de notre pays, et tous ont répété jusqu’àla fin que le 9 thermidor les avait sauvés. Mais ces gens, au lieud’être contents, auraient voulu se venger et faire guillotiner lesautres, et c’est dans ce temps que la haine contre les jacobinscommença. On appelait jacobins, non seulement les partisans deRobespierre, mais encore les dantonistes, les hébertistes, tous lesrépublicains ensemble. Les vrais patriotes comprirent d’où celavenait ; ils se réunirent !… C’est pourquoi tous encoreaujourd’hui ne sont pas fâchés de s’entendre appeler jacobins,quoique Robespierre ne soit plus leur patron. S’ils avaient lebonheur d’avoir des Danton, des Camille Desmoulins, des Westermann,l’idée ne leur viendrait plus de les faire guillotiner.

La mort de Robespierre fondit donc tous lespatriotes ensemble ; et les Tallien, les Fouché, les Barras,les Fréron, ceux qu’on appelait thermidoriens, parce qu’ils avaientrenversé Robespierre en thermidor, ayant montré que ce n’était pasdans l’intérêt de la république, mais dans leur intérêt particulierqu’ils avaient fait le coup, furent méprisés. Leur véritable nométait « le parti des fricoteurs », ce que vousreconnaîtrez par la suite, car, en vous racontant mon histoire,j’aurai toujours soin de dire aussi ce qui regarde le pays. On nevit pas pour soi seulement, on vit pour tous les honnêtes gens, etceux qui ne s’intéressent qu’à leurs propres affaires ne méritentpas de faire partie d’une nation civilisée.

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