AGATHA CHRISTIE L’AFFAIRE PROTHERO

— Il faut voir ça de plus près, dit l’inspecteur. Je vais à Old Hall sur-le-champ. Je commence à comprendre pourquoi le Pr Stone a pris la poudre d’escampette ; il avait peur que ce meurtre nous amène à fourrer notre nez dans ses affaires, et il a envoyé sa secrétaire les cacher dans les bois avec des vêtements de rechange. Il projetait sans doute de revenir par un chemin détourné et de filer avec le butin, une nuit, tandis qu’elle serait restée dans le coin pour détourner les soupçons. À part ça, il n’est pas dans le coup pour le meurtre ; il n’a rien à y voir ; ce sont deux affaires différentes.

L’inspecteur remit le tout dans la valise et s’en fut, après avoir refusé le petit verre de cherry que lui proposait miss Marple.

— Voilà au moins une énigme tirée au clair, soupirai-je. Comme dit l’inspecteur Flem, il n’y a aucune raison de soupçonner Stone de meurtre.

— Peut-être, dit miss Marple. Mais il ne faut jurer de rien.

— Il avait commis son larcin et n’avait plus qu’à s’éclipser. Où serait son mobile ?

— Ouiii…, commença miss Marple avec réticence. (Elle s’empressa de répondre à mon regard interrogatif et s’excusa 🙂 Sans doute ai-je tort car je ne connais rien à cette sorte d’objets, mais je me demandais… Ce sont des pièces rares, n’est-ce pas ?

— Une coupe semblable a été mise en vente, il y a peu, pour plus de mille livres, d’après ce que j’ai entendu dire.

— Je ne parlais pas de la valeur marchande.

— Bien sûr, ce sont des objets d’art.

— C’est cela ! Ces pièces-là se vendent sans tapage, voire en secret. Si l’on découvrait que ce sont des objets volés, ils deviendraient aussitôt invendables.

— Je ne vous suis pas.

— C’est que… comment dirai-je… (Elle s’énervait et s’excusait à tout bout de champ 🙂 Si j’ai bien compris, on ne pouvait pas voler ces objets, pour ainsi dire ; on ne pouvait que les escamoter et les remplacer par des copies. Ainsi, le propriétaire ne risquait pas de découvrir le vol avant longtemps.

— C’est très ingénieux.

— Je ne vois pas d’autre solution. Et une fois la substitution opérée, le voleur n’avait en effet aucune raison de tuer le colonel, au contraire ; vous avez raison.

— C’est bien ce qu’il me semble.

— Oui, mais je me demandais… ce n’est pas sûr, mais… le colonel Protheroe avait la fâcheuse habitude d’annoncer à l’avance le moindre de ses projets, même si ensuite il ne les réalisait pas…

— Oui ?

— C’est ainsi qu’il avait prévu de faire expertiser ses pièces d’argenterie… Par quelqu’un de Londres, pour faire homologuer son testament… non, car il faut être mort pour cela… ce devait être pour l’assurance. C’est ce qu’on lui avait conseillé de faire. Il en avait beaucoup parlé et y attachait une énorme importance. J’ignore s’il avait demandé un expert, mais si c’était le cas…

— Je vois, fis-je, pensif.

— L’expert aurait identifié les faux en un clin d’œil, et le colonel Protheroe se serait souvenu qu’il avait montré son argenterie au Pr Stone. D’ailleurs le tour de passe-passe a peut-être eu lieu à ce moment-là. Quelle habileté… et ensuite… gare à la bombe ! comme on disait autrefois…

— Je vois, répétai-je. Nous devons en avoir le cœur net.

Je retournai au téléphone et demandai Anne Protheroe, à Old Hall.

— Pardonnez-moi, mais l’inspecteur est-il déjà arrivé ? Ah ! Il est en route. Puis-je vous demander si les biens du colonel Protheroe ont fait l’objet d’une expertise… Je vous demande pardon ?

Sa réponse fut claire et immédiate. Je la remerciai, raccrochai et retournai auprès de miss Marple.

— C’est bien simple, le colonel avait demandé un expert de Londres pour lundi, c’est-à-dire demain. Étant donné les circonstances, le rendez-vous a été ajourné.

— Et voilà le mobile, souffla miss Marple.

— Mais le mobile n’est pas tout. Vous oubliez qu’au moment du coup de feu, le Pr Stone était en train d’enjamber la barrière pour rejoindre les deux autres.

— En effet, dit miss Marple, ce qui le met hors de cause.

24

Je rentrai au presbytère et trouvai Hawes dans mon bureau. Il marchait nerveusement de long en large et sursauta lorsque je poussai la porte.

— Veuillez m’excuser, dit-il en s’épongeant le front. Je suis à bout de nerfs depuis quelque temps.

— Écoutez, mon ami, vous devriez changer d’air sinon vous allez tomber malade pour de bon, et que ferez-vous ?

— Il n’est pas question que j’abandonne mon poste, ça, jamais !

— Comme vous y allez ! Je ne vous parle pas d’abandonner votre poste, mais vous êtes malade, Haydock vous le dirait…

— Haydock, Haydock… Et alors ? Un médecin de campagne qui n’y connaît rien.

— Qu’avez-vous à lui reprocher ? Il a toujours été considéré comme un homme très capable dans sa profession.

— Oh ! c’est bien possible, mais moi, je ne l’aime pas. Et puis ce n’est pas pour vous parler de lui que je suis venu vous voir ; je suis venu vous demander si vous voudriez bien faire le sermon à ma place, ce soir. Je ne m’en sens pas la force…

— Dans ce cas… Je puis même dire l’office.

— Il n’en est pas question ! Je dirai l’office. Ça ira. Mais c’est l’idée de monter en chaire et de tous ces yeux rivés sur moi…

Il ferma les paupières et déglutit avec peine.

Je devinais que quelque chose ne tournait pas rond chez lui et il dut lire dans mes pensées, car il rouvrit les yeux :

— Je n’ai rien de grave, à part ces horribles migraines qui me tourmentent. Puis-je vous demander un verre d’eau, s’il vous plaît ?

— Bien sûr.

J’allai moi-même lui remplir un verre au robinet. Chez nous, il est parfaitement inutile de sonner Mary pour ce genre de service.

Je lui tendis le verre et il me remercia, puis il sortit de sa poche une petite boîte en carton dans laquelle il préleva une capsule enveloppée de papier de riz ; il en avala le contenu avec une gorgée d’eau.

— C’est une poudre contre la migraine, m’expliqua-t-il.

L’idée qu’il s’adonnait à quelque drogue me traversa l’esprit. Là se cachait peut-être l’explication des bizarreries de son caractère.

— J’espère que vous en usez avec modération…, lui dis-je.

— Rassurez-vous, le Dr Haydock m’a prévenu, mais c’est un médicament extraordinaire et qui vous procure un soulagement immédiat.

Il me parut en effet aussitôt se calmer et se ressaisir.

— Vous vous occuperez donc du sermon, ce soir ? me redemanda-t-il en se levant. C’est très aimable à vous.

— Ne vous inquiétez pas, et j’insiste pour célébrer l’office. Restez chez vous et reposez-vous. Allons, allons, pas de discussion !

Il me remercia encore et ajouta en regardant par la fenêtre :

— Il paraît que vous étiez à Old Hall aujourd’hui…

— En effet.

— Puis-je savoir si… si on vous avait fait appeler ? (Comme je le regardais, surpris, il rougit 🙂 Excusez-moi d’insister mais… mais j’ai cru qu’il y avait du nouveau et que Mrs Protheroe vous avait réclamé.

— Nous devions prendre les dispositions pour l’enterrement et évoquer divers points de détail, dis-je, délibérément évasif.

— Ah ! c’était donc pour cela ?… (Je n’ajoutai rien et il se remit à s’agiter 🙂 Mr Redding est venu me voir, hier soir, ajouta-t-il, et je me demande bien pourquoi.

— Il ne vous a rien dit ?

— Il avait pensé à me faire une petite visite car, m’a-t-il expliqué, il arrive qu’on se sente seul, le soir, mais c’était la première fois qu’il venait…

— Il passe pour être de bonne compagnie, fis-je avec un sourire.

— Que me voulait-il ? Je n’aime pas cela. (Sa voix monta soudain dans les aigus.) Il m’a dit qu’il reviendrait mais qu’est-ce que cela signifie ? Cela cache quelque chose !

— Qu’allez-vous imaginer ?

— Je n’aime pas cela, répéta Hawes, têtu. Je n’ai jamais cherché à lui nuire, pas plus que je n’ai mis en doute son innocence, et j’ai pris son parti quand il s’est dénoncé. J’admets avoir soupçonné Archer, mais jamais Redding. Archer n’est qu’un ivrogne sans foi ni loi, une canaille.

— Vous êtes dur, dis-je. Après tout, que savons-nous de lui ?

— C’est un braconnier qui ne sort de prison que pour y retourner. C’est un être sans aucun scrupule.

— Croyez-vous vraiment qu’il ait assassiné le colonel Protheroe ?

Ce n’était pas la première fois que je notais que Hawes est incapable de répondre par oui ou par non ; il me renvoya ma question :

— Voyez-vous une autre solution ?

— Aucune preuve n’a été retenue contre lui, que je sache.

— Vous oubliez ses menaces ! cria Hawes.

— En voilà assez avec les menaces d’Archer ! Quelles preuves avez-vous qu’il en ait proféré ?

— Il attendait son heure pour se venger du colonel. Il s’est soûlé et il l’a assassiné.

— Pure supposition !

— Vous êtes bien obligé d’admettre que c’est tout à fait probable ?

— Absolument pas !

— Sinon probable, du moins possible ?

— Peut-être.

— Pourquoi refusez-vous d’envisager que c’est probable, me demanda-t-il, l’œil torve.

— Parce que Archer n’est pas de ceux qui tueraient un homme avec un revolver. Il n’a que faire des revolvers.

Ma réponse le prit de court et il parut un instant suffoqué :

— Croyez-vous vraiment que ce soit une objection valable ?

— Pour moi, c’est la preuve évidente qu’Archer n’est pas l’assassin.

Hawes resta coi devant ma certitude inébranlable. Il me remercia encore une fois avant de partir.

Je le raccompagnai jusqu’à la porte et aperçus dans l’entrée quatre missives qui n’étaient pas sans ressemblance. L’écriture en était indubitablement féminine, et elles portaient toutes la mention « par porteur, urgent ». Une seule différence me sauta aux yeux : l’une des quatre était notablement plus sale que les autres. J’éprouvai la curieuse impression que je voyais non pas double mais quadruple.

Mary apparut à la porte de la cuisine et me trouva occupé à les contempler d’un air hébété.

— Elles ont été apportées après le déjeuner, dit-elle. Toutes, sauf une, qui était dans la boîte aux lettres.

Je la remerciai d’un signe de tête, ramassai les lettres et me dirigeai vers mon bureau.

La première disait ceci :

Cher Mr Clement, j’ai appris quelque chose sur la mort de ce pauvre colonel Protheroe et je pense que vous devez en être informé. J’aimerais connaître votre avis sur un point : dois-je ou non prévenir la police ? Depuis la mort de mon cher époux, j’ai toujours répugné à toute forme de publicité. Peut-être pourriez-vous passer chez moi un moment dans l’après-midi. Bien à vous, Martha Price Ridley.

J’ouvris la deuxième :

Cher Mr Clement, je suis si troublée… si tourmentée, dirai-je, que je ne sais que faire. J’ai entendu rapporter quelque chose qui a peut-être son importance mais l’idée d’avoir affaire à la police me fait horreur. Je suis bouleversée et en plein désarroi. Puis-je me permettre de vous demander, cher pasteur, de me faire une petite visite pour dissiper mes doutes et résoudre mes problèmes, comme vous avez toujours si merveilleusement su le faire jusqu’ici ? Pardonnez-moi de vous déranger. Bien à vous, Caroline Wetherby.

J’aurais pu réciter par cœur la troisième lettre avant de l’ouvrir :

Cher Mr Clement, j’ai entendu parler d’un fait digne d’attention et je pense que vous devez en être le premier informé. Aurez-vous le temps de faire un saut chez moi cet après-midi ? Je vous attendrai.

Amanda Hartnell était l’auteur de cette épître militante et sans fioriture.

J’ouvris la quatrième lettre. J’avais eu la chance, jusque-là, de n’être importuné que très rarement par des lettres anonymes. À mes yeux, la lettre anonyme est l’arme la plus vile et la plus odieuse qui soit, et celle-ci ne faisait pas exception à la règle. Son auteur voulait passer pour un illettré, mais on pouvait deviner à plus d’un signe qu’il était loin d’en être un.

Cher pasteur, y a pas de raison que vous soyez pas mis au courant de ce qui se passe vu qu’on a vu votre dame sortir en catimini de chez Mr Redding. Y a pas besoin de vous faire un dessin. On dirait que ça marche pour eux. Je me suis dit comme ça qu’il fallait que vous soyez mis au parfum. Un ami.

J’étouffai une exclamation de dégoût et jetai le feuillet chiffonné dans l’âtre vide.

— De quoi vous débarrassez-vous avec ce mépris ? me demanda Griselda qui entrait tout juste dans la pièce.

— D’une ordure.

Sortant une boîte d’allumettes de ma poche, je me penchai pour mettre le feu à la boule de papier mais Griselda fut plus prompte que moi. Elle se baissa, saisit la lettre froissée et la déplia avant que je n’aie pu l’en empêcher.

Elle la lut et me la rendit, se détournant avec un frisson de dégoût. Je frottai l’allumette et regardai brûler la lettre.

Griselda était allée se planter devant la fenêtre et contemplait le jardin au-dehors.

— Len, fit-elle sans se retourner.

— Oui, ma chérie ?

— J’ai quelque chose à vous dire, Len. Laissez-moi parler, s’il vous plaît. Quand Lawrence Redding est venu s’installer au village, j’ai prétendu que je le connaissais à peine et vous l’avez cru, mais c’était faux : je le connaissais très bien. En fait, j’étais… plutôt amoureuse de lui avant de vous rencontrer. Je n’étais pas la seule dans ce cas, je crois. J’ai été toquée de lui pendant une période de ma vie, mais je ne lui ai jamais écrit de lettres compromettantes, et je n’ai jamais fait de bêtises comme cela arrive dans-les romans, simplement j’avais… j’avais un gros, très gros béguin.

— Pourquoi ne me l’aviez-vous jamais dit ?

— Oh ! Parce que… Je ne sais pas… vous êtes si idiot, parfois… Sous prétexte de notre différence d’âge, vous croyez que je pourrais tomber amoureuse d’un autre homme. J’avais peur de vous voir devenir assommant à cause de mon amitié pour Lawrence…

— Vous êtes très douée pour jouer les cachottières.

Je pensais à ce qu’elle m’avait dit une semaine plus tôt, dans cette même pièce, et au ton naturel et innocent qu’elle avait pris pour me le dire.

— Vous avez raison. J’ai toujours fait des cachotteries et je reconnais que j’y prends plaisir, expliqua-t-elle avec dans la voix une nuance de plaisir puéril. Mais je vous ai dit la vérité : j’ignorais tout de sa liaison avec Anne et je ne comprenais pas la raison de son indifférence vis-à-vis de moi… C’est à peine s’il paraissait remarquer ma présence ! Je n’y étais pas habituée… Vous me comprenez, Len, n’est-ce pas ? ajouta-t-elle d’une voix angoissée après un bref silence.

— Oui, Griselda dis-je. Je vous comprends.

Mais qu’avais-je compris au juste ?

25

Je me libérai à grand-peine de l’impression pénible que m’avait laissée la lettre anonyme – la boue vous atteint toujours –, puis je pris les trois lettres de ces dames, jetai un coup d’œil à ma montre et sortis.

J’étais curieux de savoir ce qu’elles avaient bien pu apprendre simultanément, car il y avait fort à parier qu’il s’agissait d’une seule et même nouvelle. Or, je n’allais pas tarder à déchanter sur la solidité de mes connaissances en matière de psychologie.

Je mentirais si je vous disais que mon chemin passait devant le poste de police, mais c’est là que me conduisirent mes pas. Je voulais vérifier que l’inspecteur Flem avait quitté Old Hall.

Non seulement il en était revenu mais encore miss Cram l’avait accompagné. Je trouvai notre blonde Gladys assise dans son bureau et semblant prendre les choses du bon côté. Elle niait farouchement avoir jamais transporté la fameuse valise dans les bois.

— Tout ça parce qu’une de ces vieilles chipies n’a rien d’autre à faire que de regarder par sa fenêtre toute la nuit… D’ailleurs, elle n’en est pas à sa première bourde, rappelez-vous qu’elle a cru me voir au bout du chemin, le jour du meurtre ; et si elle a pu se tromper en plein jour, je ne vois pas comment elle aurait pu me reconnaître en pleine nuit.

« Sont-elles méchantes, ces vieilles toupies, de vous traiter comme ça ! Tout leur est bon… Quand je pense que je dormais dans mon lit comme un ange. Vous devriez avoir honte, tous autant que vous êtes.

— Et si la propriétaire du Sanglier Bleu identifie la valise comme étant la vôtre, miss Cram ?

— Eh bien, elle aura tort ! Cette valise n’a pas d’étiquette et tout le monde a la même. Le Pr Stone, un vulgaire voleur ! on aura tout vu… avec tous les diplômes qu’il a…

— Vous refusez de nous donner d’autre explication ?

— Pas du tout ! mais je dis que vous vous êtes trompés, vous et votre fouineuse de miss Marple, un point c’est tout. Je n’ai rien à ajouter et je ne parlerai qu’en présence de mon avocat. Sur ce, je vous quitte… Sauf si vous comptez m’arrêter.

Sans mot dire, l’inspecteur se leva pour lui ouvrir la porte, et miss Cram sortit, très digne.

— Elle ne veut pas en démordre, me dit Flem en se rasseyant à son bureau. Miss Marple a peut-être mal vu, certes. Pas un jury ne voudra gober que l’on peut reconnaître quelqu’un à cette distance en pleine nuit, même par clair de lune. La vieille chouette a certainement mal vu.

— Peut-être, mais j’en doute. Elle a presque toujours raison, et c’est pourquoi tout le monde s’en méfie.

— C’est aussi l’avis de Hurst, grimaça l’inspecteur. Mon Dieu ! ces villages !

— Et les objets en argent, inspecteur ?

— Ça va, ça va. L’un des lots est faux, bien sûr, mais l’expert de Much Benham fait autorité sur les objets anciens en argent. Je lui ai téléphoné et lui ai envoyé une voiture. Nous saurons bientôt à quoi nous en tenir : ou le vol a eu lieu ou il allait avoir lieu ; ça ne fait pas grande différence… du moins pour la police. Mais le vol n’est rien en comparaison d’un meurtre. Stone et sa secrétaire n’ont rien à voir là-dedans. Avec un peu de chance, elle nous apprendra quelque chose sur ce type… c’est pourquoi je la laisse filer sans faire d’histoire.

— Peut-être…, commençai-je.

— Dommage que ça ait capoté, avec Redding ; ce n’est pas si souvent que vous tombez sur un type qui se constitue prisonnier.

— Je vous crois volontiers, dis-je avec un petit sourire.

— Ce sont toujours les femmes qui font des histoires, énonça l’inspecteur d’un ton sentencieux. (Il soupira et je fus surpris de l’entendre ajouter après un silence 🙂 Et puis, il y a Archer.

— Vous l’avez donc soupçonné ?

— Et le premier, encore ! Et sans avoir besoin de lettres anonymes.

— Des lettres anonymes ! Vous en avez donc reçu ?

— Rien de très original ; nous en recevons des dizaines par jour, et on nous a craché le morceau, pour Archer. Comme si la police était aveugle ! Archer était le suspect numéro un mais le problème, c’est qu’il a un alibi. Ça ne veut rien dire, je sais, mais on ne peut tout de même pas faire comme s’il n’en avait pas.

— Comment : « ça ne veut rien dire » ?

— Eh bien, il aurait passé l’après-midi avec deux acolytes, mais leur témoignage ne vaut pas grand-chose. Des types de leur acabit seraient prêts à jurer n’importe quoi. On ne peut pas leur faire confiance et on est bien placé pour le savoir ; mais les gens ne le savent pas, eux, et le jury est composé de gens, et c’est bien dommage ! Les jurés ne savent rien et, neuf fois sur dix, ils sont prêts à gober tout ce qui se dit à la barre des témoins, quel que soit le témoin. Archer jurera sur ses grands dieux qu’il n’a pas tué Protheroe.

— Ce n’est pas comme Mr Redding, dis-je avec un sourire.

— Malheureusement non, soupira l’inspecteur dépité.

— N’est-il pas naturel de tenir à la vie ? fis-je d’un ton rêveur.

— Vous seriez épaté par le nombre de meurtriers qui s’en sont tirés grâce à la sensiblerie des jurés, ajouta Flem d’un air sombre.

— Mais vous croyez à la culpabilité d’Archer ?

J’avais remarqué depuis le début que l’inspecteur Flem affectait de n’avoir aucune opinion personnelle sur le meurtre. Tout ce qui l’intéressait, c’était la difficulté ou la facilité à obtenir une condamnation.

— Ce qu’il me faudrait, c’est une certitude, reconnut-il. Des empreintes digitales, des traces de pas, le témoignage de quelqu’un qui l’aurait vu dans le coin à l’heure du crime… Je ne peux pas prendre le risque de l’arrêter sans preuve solide. On l’a vu rôder une ou deux fois autour de chez Mr Redding, mais il prétend que c’était pour voir sa mère. Elle est bonne pomme, allez !

« Non, tout compte fait, je continue à penser à qui vous savez… Une petite preuve du chantage me suffirait… mais dans cette histoire, allez mettre la main sur une preuve quelconque ! Rien que de la théorie, toujours de la théorie ! Si une autre de ces dames avait habité juste en face de chez vous, Mr Clement, elle aurait vu tout ce qu’il y avait à voir.

Cette pointe me rappela mes visites et je pris congé. Je n’avais jamais vu l’inspecteur de si bonne humeur.

Je commençai par miss Hartnell. Il faut croire qu’elle me guettait derrière ses rideaux, car j’eus à peine le temps de sonner qu’elle m’ouvrit la porte et me tira à l’intérieur.

— C’est si gentil à vous… Venez, nous serons plus à l’aise.

Nous entrâmes dans une pièce à peine plus grande qu’un clapier et miss Hartnell en referma la porte sur nous. Elle me fit asseoir d’un air mystérieux sur l’un des trois sièges qui meublaient son salon, et je pus voir qu’elle prenait plaisir à cette situation.

— Je ne vais pas tourner autour du pot, dit-elle pleine d’entrain. (Puis elle reprit d’un ton de circonstance 🙂 Ce n’est pas moi qui vous apprendrai que tout se sait, ici.

— Pour mon malheur, dis-je.

— Hélas ! Moi aussi, j’ai horreur des ragots, mais c’est la vie. J’ai cru de mon devoir d’aller informer la police que j’avais rendu visite à Mrs Lestrange, l’après-midi du meurtre, et que j’avais trouvé porte close. Je fais mon devoir sans attendre de remerciements, mais les gens sont bien ingrats… Pas plus tard qu’hier, cette Mrs Baker…

— Oui, oui, dis-je pour abréger, c’est bien triste. Mais où en étiez-vous ?

— Les pauvres ne savent pas reconnaître leurs amis. J’ai toujours un mot gentil quand je vais les voir mais n’en suis guère remerciée.

— Ainsi vous avez parlé de votre visite chez Mrs Lestrange à l’inspecteur ?

— Oui… et si vous croyez qu’il m’a dit merci… Quand il voudra des renseignements, il viendra me les demander, voilà ce qu’il m’a dit. Ce ne sont pas ses termes exacts mais c’est du pareil au même. De nos jours, les policiers ne sont plus comme autrefois.

— Sans doute, mais que vouliez-vous me dire ?

— On ne m’y prendra pas deux fois et je ne suis pas près de retourner voir cet inspecteur. Après tout, un pasteur est un homme du monde, du moins, je l’espère.

J’espérais, quant à moi, que cette remarque acide ne m’était pas destinée.

— Si je puis vous aider en quoi que ce soit…

— Je n’ai fait que mon devoir, répéta-t-elle d’un air pincé. Cela ne me plaît guère mais le devoir, c’est le devoir. (J’attendis la suite.) Mrs Lestrange aurait déclaré qu’elle était restée chez elle tout l’après-midi, poursuivit miss Hartnell en rougissant, et ne m’aurait pas répondu car elle n’en avait pas envie. Est-ce que ce sont des façons ? Faire son devoir pour être traitée de la sorte…

— Elle a été malade, soufflai-je.

— Malade ? Ce sont des sornettes. Vous ne comprenez pas, Mr Clement. Malade ? Elle ? Trop malade pour se rendre à l’audience, ça oui ! Et avec un certificat médical du Dr Haydock, encore ! Elle le mène par le bout du nez, tout le monde le sait. Mais qu’est-ce que je disais… ?

Je ne le savais plus moi-même. Bien malin qui pouvait discerner où s’arrêtait le récit et où commençaient les imprécations.

— J’y suis ! Je vous parlais de ma visite chez elle, cet après-midi-là. Elle prétend qu’elle était là mais ce sont des balivernes ; elle n’y était pas. Je le sais !

— Vous semblez très sûre de vous…

Miss Hartnell devint écarlate. N’était son sans-gêne, on eût pu croire à de la timidité.

— J’ai frappé et sonné deux ou trois fois. J’ai même pensé que la sonnette était cassée.

Elle n’osait pas me regarder en face en disant cela, et j’en éprouvais un secret plaisir. C’est la même entreprise qui a bâti toutes les maisons de St. Mary Mead, et les sonnettes ont toujours très bien fonctionné ; miss Hartnell le savait aussi bien que moi mais elle cherchait à sauver les apparences.

— Je ne tenais pas à déposer ma carte dans sa boîte aux lettres, c’eût été grossier. J’ai mes petits défauts mais pas celui-là… (Elle m’assena cette stupéfiante affirmation sans sourciller et continua, imperturbable 🙂 J’ai donc fait le tour de la maison pour frapper aux carreaux. J’ai même regardé par les fenêtres, mais je n’ai pas vu un chat.

La scène s’imposa à mon esprit. Miss Hartnell avait profité de ce que la maison était vide pour lâcher la bride à sa curiosité ; elle en avait fait tout le tour en épiant par les fenêtres et c’est sur moi qu’elle avait jeté son dévolu pour raconter sa fable, voyant dans le pasteur un auditeur plus indulgent que l’inspecteur Flem. Ne sommes-nous pas, nous, hommes d’Église, censés accorder le bénéfice du doute à nos ouailles ?

Je ne fis aucun commentaire et me contentai de lui demander à quelle heure elle était allée chez Mrs Lestrange.

— Il n’était pas loin de 6 heures, je crois. J’étais chez moi à 6 h 10. Mrs Protheroe est passée vers 6 heures et demie, après avoir quitté le Pr Stone et Mr Redding. Et dire que pendant que nous parlions d’oignons de fleurs, ce pauvre colonel gisait, mort. Pauvre de nous !

— Hélas ! dis-je, en me levant. La vie n’est pas rose. C’est tout ce que vous aviez à me dire ?

— Ce n’est peut-être pas sans importance.

— Peut-être, en effet.

Et je pris congé de mon hôtesse dépitée. Je ne voulais pas en entendre davantage.

Je me rendis ensuite chez miss Wetherby qui me reçut, toute en émoi.

— Cher pasteur, c’est trop aimable ! Avez-vous pris votre thé ? Vous n’en voulez pas une tasse ? Vraiment ? Un coussin pour votre dos, peut-être ? Et vous êtes venu si vite ! Toujours prêt à vous mettre en quatre pour les autres.

Je dus subir encore plusieurs banalités du même genre et mille circonlocutions avant qu’elle n’en vînt au fait.

— Je dois d’abord vous dire que je tiens ceci de source sûre.

À St. Mary Mead, la source sûre est toujours la bonne de la voisine.

— Et vous ne pouvez la dévoiler, sans doute ?

— J’ai fait une promesse, cher Mr Clement. Et pour moi, c’est sacré, ajouta-t-elle d’un ton solennel. Disons que c’est mon petit doigt qui me l’a dit.

C’est complètement idiot ! songeai-je. Je rêvai un instant de dire tout haut ma pensée pour voir comment miss Wetherby prendrait la chose.

— Eh bien, mon petit doigt m’a dit qu’il avait vu une certaine dame dont nous tairons le nom.

— Ah, ah ! votre petit doigt ? fis-je.

Stupéfait, je vis miss Wetherby éclater de rire et me donner une petite tape sur le bras :

— Hé là ! cher pasteur, vous êtes un polisson… (Elle reprit son sérieux et poursuivit 🙂 Une certaine dame, donc… Et où allait cette dame, à votre avis ? Elle a pris le chemin du presbytère mais, avant de s’y engager, elle a scruté les alentours, comme pour s’assurer que personne de sa connaissance ne la voyait.

— Et la mystérieuse personne qui s’est confessée à votre petit doigt ? demandai-je.

— Elle était en visite chez le poissonnier, à l’étage.

Je savais déjà que les bonnes ne sortaient jamais se promener au grand air si elles pouvaient l’éviter… Et je savais désormais où elles passaient leurs loisirs.

— C’était juste avant 6 heures, me souffla énigmatiquement miss Wetherby.

— De quel jour ?

— Mais le jour du meurtre, bien sûr ! sursauta-t-elle. Ne vous l’avais-je pas dit ?

— C’est ce que j’avais cru comprendre. Et quel est le nom de cette dame ?

— Il commence par un L, répondit-elle d’un air entendu.

M’avisant que je n’en saurais pas davantage, je me levai et miss Wetherby m’étreignit les mains :

— Vous ne laisserez pas la police m’interroger, n’est-ce pas ? dit-elle d’une voix pathétique. Je déteste la publicité, et je ne veux pas me retrouver debout à la barre.

— Il arrive qu’on permette aux témoins de s’asseoir, dis-je avant de me retirer.

Il me restait encore à voir Mrs Price Ridley.

— J’espère que vous comprenez qu’il est hors de question pour moi d’être mêlée à un procès, m’annonça-t-elle sans tergiverser après m’avoir tendu une main sèche. Par ailleurs, ayant été le témoin d’une situation nécessitant quelque éclaircissement, j’ai cru bon d’en informer les autorités.

— Est-ce au sujet de Mrs Lestrange ?

— Et pourquoi, s’il vous plaît ? fit Mrs Price Ridley d’un ton cassant. (J’encaissai le coup sans rien dire.) Les faits sont clairs, continua-t-elle. Ma petite bonne, Clara, était sortie prendre l’air, au portail, pendant un instant. Je n’ignore pas qu’en réalité c’est pour aguicher le commis du poissonnier. Ce godelureau s’imagine qu’il est en âge de flirter avec toutes les filles, à dix-sept ans ! Clara était donc au portail quand elle a entendu quelqu’un éternuer.

— Oui, dis-je en attendant la suite.

— C’est tout. Elle a entendu quelqu’un éternuer, et ne venez pas me dire que c’est l’âge qui me joue des tours, car c’est Clara qui l’a entendu de ses oreilles, et elle n’a que dix-neuf ans.

— Je ne vois pas ce qu’il y a d’étrange à entendre quelqu’un éternuer…

— Elle a entendu un éternuement le jour du meurtre, alors qu’il n’y avait personne au presbytère, condescendit à m’expliquer Mrs Price Ridley. Le meurtrier était probablement caché derrière la haie et attendait son heure. La seule chose à faire, c’est de mettre la main sur un homme qui souffre d’un rhume de cerveau.

— Ou d’un rhume des foins, suggérai-je. Et je crains que cette énigme n’ait déjà sa solution, chère madame. Mary se remet à peine d’un gros rhume de cerveau et ses reniflements nous mettaient les nerfs en pelote. C’est elle que votre bonne aura entendue éternuer.

— C’était un éternuement d’homme, coupa Mrs Price Ridley d’un ton sans réplique. Et d’ailleurs, comment pourrait-on entendre votre bonne éternuer dans sa cuisine depuis mon portail ?

— Vous ne l’auriez pas entendu davantage si elle avait été dans le bureau, ou du moins, permettez-moi d’en douter.

— L’homme a pu rester caché derrière la haie, et quand Clara est rentrée, il en a profité pour emprunter la porte de devant.

— Peut-être, dis-je.

J’essayais de ne pas me montrer trop cassant – en vain, car Mrs Price Ridley me jeta un coup d’œil furibond.

— Je sais qu’on ne m’écoute pas, j’en ai l’habitude, mais je vous précise tout de même qu’une raquette de tennis abandonnée dans l’herbe sans sa presse risque d’être parfaitement et définitivement inutilisable, or, ce sont des objets qui valent cher, de nos jours. (Je fus désarçonné par cette attaque sournoise.) Peut-être n’est-ce pas votre avis, dit Mrs Price Ridley.

— Oh ! mais si, mais si !

— Tant mieux ! C’est tout ce que j’avais à vous dire. Après tout, cette affaire ne me regarde pas.

Elle s’abandonna contre son dossier et ferma les yeux comme si elle était lasse de cette vie. Je la remerciai et pris congé.

Avant de partir, je me risquai à demander des éclaircissements à la bonne.

— J’ai entendu quelqu’un éternuer, monsieur, me répéta-t-elle, et ce n’était pas un éternuement ordinaire, je vous jure.

Rien de ce qui touche un crime ne saurait être ordinaire. La détonation n’était pas une détonation ordinaire, l’éternuement n’était pas un éternuement ordinaire… L’inconnu avait sans doute éternué comme seuls les assassins savent le faire. Je demandai à Clara l’heure qu’il était quand elle était sortie prendre l’air, mais elle ne put le préciser ; c’était entre le quart et la demie de 6 heures, pensait-elle. « Avant que sa maîtresse ne reçoive cet horrible coup de téléphone », en tout cas. Je voulus encore savoir si elle avait entendu un coup de feu, par hasard. Oui, elle avait entendu « une énorme explosion » dit-elle, ce qui ruina d’un coup la confiance que je lui accordais.

J’étais presque à ma porte quand je décidai d’aller rendre visite à un ami.

Un coup d’œil à ma montre m’apprit que j’avais tout juste le temps avant l’office du soir. Je descendis jusque chez Haydock qui vint à ma rencontre sur le seuil.

Il n’avait pas quitté son air hagard et contrarié ; à croire que cette affaire lui avait fait prendre dix ans en quelques jours.

— Vous avez bien fait de venir, me dit-il. Vous avez d’autres nouvelles ?

Je lui racontai l’épisode concernant Stone.

— Un bandit de haute volée ! fit-il. Voilà qui éclaircit bien des choses. Il avait pioché son sujet mais il a dérapé de temps en temps, je le sais ; et Protheroe l’avait démasqué, lui aussi. Vous vous souvenez de leur dispute ? Et la fille ? Elle est mouillée, elle aussi ?

— Rien n’est encore prouvé. Je jurerais qu’elle n’y est pour rien. C’est une sotte, ajoutai-je.

— Je ne dirai pas ça ; je la crois même plutôt futée, et c’est un beau brin de fille qui respire la santé. Si nous n’avions que des patientes comme elle, nous ne serions pas près de faire fortune !

Je lui fis part de mes inquiétudes au sujet de Hawes et lui confiai que j’eusse souhaité le voir changer d’air et se reposer. Il prit l’air évasif et sa réponse sonna faux.

— Oui, me répondit-il. Cela vaudrait mieux, en effet. Ah ! pauvre Hawes…

— J’avais cru que vous n’aviez aucune sympathie pour lui.

— Et vous avez raison, mais ce ne serait pas le premier dans ce cas pour lequel j’éprouverais de la peine. (Il ajouta après un bref silence 🙂 J’en ai même ressenti pour ce pauvre diable de Protheroe… il n’avait que des ennemis… Sûr de lui et rigide comme il était… Il faut reconnaître que ce n’est pas le genre de cocktail que l’on préfère, mais il avait toujours été comme ça, même lorsqu’il était jeune homme.

— J’ignorais que vous le connaissiez.

— J’avais un cabinet tout près de chez lui quand je vivais dans le comté de Westmoreland, il y a presque vingt ans.

Je soupirai. Vingt ans plus tôt, Griselda avait cinq ans. Le temps est une bien étrange chose.

— C’est pour cela que vous êtes venu me voir, Clement ?

Je tressaillis et croisai son regard franc qui me scrutait.

Je ne savais pas, en venant, si je lui parlerais ou non, mais Haydock était pour moi un véritable et un merveilleux ami, et ce que j’avais à lui dire pourrait peut-être lui être utile. C’est pourquoi je décidai brusquement de lui répéter en substance ce que m’avaient dit miss Hartnell et miss Wetherby.

Il resta un long moment silencieux.

— Je reconnais que j’ai tout fait pour protéger Mrs Lestrange, Clement. C’est une amie de longue date, mais ce n’est pas la seule raison. Ce certificat médical n’était pas de complaisance comme vous l’avez cru. (Il s’interrompit un instant avant de reprendre d’un ton grave 🙂 Je vous le dis entre nous, Clement. Mrs Lestrange est condamnée.

— Comment ?

— Elle va mourir, je lui donne encore un mois. Vous comprenez pourquoi je tiens à lui éviter d’être importunée par la police ? Lorsqu’on l’a vue dans la rue, ce soir-là, c’est à mon cabinet qu’elle venait.

— Mais rien ne permettait de penser que…

— Je n’ai rien dit car je ne voulais pas qu’on jase. Mon cabinet est fermé entre 6 et 7 heures, tout le monde le sait, mais je vous l’affirme, elle était ici.

— Pourtant elle n’y était plus lorsqu’on est venu vous chercher, après la découverte du corps dans mon bureau.

— Non, elle était partie… à un rendez-vous, dit-il, troublé.

— Mais où ? Chez elle ?

— Je vous jure que je ne le sais pas, Clement.

Je le croyais, mais…

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