Pardaillan et Fausta

Chapitre 23EL CHICO ET JUANA

Demeuré seul dans la cuisine de l’auberge, Chico grimpa sur unescabeau, préalablement traîné auprès de l’âtre mourant.

Il était triste, le nain, car il l’avait vue,« elle », bien triste et agitée.

La tête dans ses mains, il se mit à songer à des choses de sonpassé si court encore. Et ce passé, comme son présent, comme sansdoute son avenir aussi, se résumait en un seul mot :Juana.

Aussi loin que remontaient ses souvenirs, Juana avait toujoursvu le nain placé entre ses petites mains, comme un jouet. Le petitn’avait pas de famille, et si quelqu’un s’occupait parfois de lui,c’était pour le corriger à grand renfort de taloches. Sollicitudedont il se fût fort bien passé. Malgré son espièglerie, Juana avaitle cœur bon. Sans comprendre, sans savoir, elle avait été touchéede cet abandon. Et toute jeune, guidée par cet instinct dematernité qui sommeille dans le cœur de chaque fillette, elle avaitpris l’habitude de veiller elle-même à ce qu’il fût convenablementnourri et logé. Petit à petit, elle s’était accoutumée à jouerainsi à la petite maman. Et comme son père donnait l’exemple de lasoumission à ses caprices, comme elle était très câline, ellesavait se faire obéir sans peine. De là venaient les petits airsprotecteurs qu’elle avait gardés avec le Chico.

Lui, de son côté, s’était habitué à la voir commander et commetous, à la maison, lui obéissaient sans discuter, il avait faitcomme tout le monde. D’ailleurs, au cas où il eût eu des velléitésde révolte – ce à quoi il ne pensait guère, car son servage luiétait trop doux – la morale, représentée en l’espèce par les leçonset objurgations du propre père de son petit tyran, le digne Manuel,la morale donc lui avait appris que celui qui donne est de beaucoupsupérieur à celui qui reçoit. En conséquence, celui-ci ne sauraittrop s’humilier et se courber devant celui-là. S’humilier, engénéral, ne rentrait pas très aisément dans l’entendement du Chico,qui avait des idées à lui, des idées qui, à ce que prétendait lamême sainte morale, le conduiraient, un jour ou l’autre, droit aubûcher, seule fin promise à un petit garçon qui, bien que baptisé,ne savait bien concevoir que des idées à faire frémir le dernierdes hérétiques. Néanmoins, vis-à-vis de Juana, il voulait bienbaisser la tête. Et il avait pris ce pli. Il l’avait même si bienpris qu’il devait le garder toute sa vie et que discuter un ordre,un désir de Juana lui apparaissait comme une chose monstrueuse,impossible. Ce même petit garçon, diabolique peut-être, enragéassurément, qui avait la prétention de ne reconnaître ni maître niautorité, après avoir facilement accepté l’autorité de Juana,l’avait si bien reconnue pour son unique maître, que parvenu àl’âge d’homme il l’appelait encore fréquemment : « Petitemaîtresse », ce dont la jeune fille se montrait même trèsfière.

Les enfants avaient grandi. Juana était devenue une jolie jeunefille.

Chico était devenu un homme… mais il était resté enfant par lataille.

Juana avait d’abord été prodigieusement surprise de voir que peuà peu elle était aussi grande, puis plus grande que son compagnon,qui avait quatre ans bien sonnés de plus qu’elle. Elle en avait étéravie. Sa poupée restait toujours une petite poupée. Ce seraitcharmant pour elle. Avec la raison, ce sentiment égoïste avait faitplace à la pitié. D’autant que le Chico se montrait très mortifiéet très chagrin de rester toujours tout petit, alors que tousgrandissaient autour de lui. Et Juana s’était bien promis de nejamais abandonner ce petit. Que deviendrait-il sans elle ?

Ce qui n’avait été d’abord que l’effet de l’habitude d’une part,de l’exemple et des leçons de morale récitées à perte de vued’autre part – la soumission et l’obéissance passive de Chicos’accrurent encore, s’il était possible, par suite d’un sentimentnouveau que lui-même n’arrivait pas sans doute à biendémêler : l’amour. Mais l’amour dans ce qu’il a de pluspur ; l’amour absolu, surhumain ; l’amour fait desacrifice et d’abnégation. Et il ne pouvait en être autrement.Durant des années et des années, Juana avait été pour lui une sortede petit Dieu devant lequel il était en adoration perpétuelle. Pourelle, rien n’était trop beau, ni trop fin, ni trop riche. Il seserait couché dans le ruisseau et lui aurait fait avec joie untapis de son corps à seule fin d’éviter à ses petits pieds lasouillure du pavé. Toutes ses pensées convergeaient vers un butunique : faire plaisir à Juana, satisfaire les caprices deJuana, dût-il en souffrir lui-même, dût son cœur en saigner. Quandelle était là, il n’avait plus ni volonté, ni raisonnement, nisensations. C’était elle qui pensait, parlait, éprouvait pour euxdeux. Lui ne vivait que par elle et ne savait qu’admirer etapprouver aveuglément ce qu’elle avait décidé.

Cet amour était resté pur de toute pensée charnelle. Il avaitbeau dire qu’il était un homme, il savait bien, tiens ! que cen’était pas. Cette pensée d’un mariage possible entre une femme,une vraie femme, et lui, bout d’homme, ne l’avait même paseffleuré. Est-ce que c’était possible, voyons ? Il avait falluque cette grande dame lui en parlât pour éveiller en lui de tellesidées. Encore, sûrement la belle dame s’était moquée de lui !Certainement elle avait voulu rire, voir ce qu’il dirait et cequ’il ferait, lui, Chico. Heureusement, il n’avait rien dit. Ilavait compris. S’il était petit, il était malin aussi,tiens !

Juana était arrivée sur ses treize ans. Un beau jour, paréecomme une dame, elle était descendue dans la salle. Non pour mettrela main à la besogne, fi donc ! mais pour suppléer lamaîtresse de maison, morte depuis longtemps et remplacée – sitoutefois une mère peut être remplacée – par l’excellente matroneque nous avons vu précisément bougonner la jeune fille, laquellematrone répondait au nom de Barbara, autrement dit, en français,Barbe.

Donc Juana s’était mise à surveiller le personnel, peu nombreuxd’abord, à faire marcher la maison avec une maîtrise telle que nulne se fût avisé de lui résister. En même temps elle savait siadroitement contenter le client, pas toujours facile pourtant, ellesavait si bien se retourner avec tant de tact, distribuer sourireset louanges avec tant d’adresse, que ç’avait été une vraiebénédiction et qu’en peu de temps l’auberge de la Tour étaitdevenue une des mieux achalandées de tout Séville, où pourtant lesbonnes auberges ne manquaient pas.

Alors la morale était de nouveau intervenue, toujoursreprésentée par le digne Manuel, lequel avait fait remarquer qu’ilserait scandaleux que Juana, son unique héritière, se meurtrît à labesogne alors que ce paresseux de Chico, qui allait bien sur sesdix-sept ans, se gobergerait tranquillement, n’ayant d’autre soucique de bayer aux corneilles du matin au soir, sous le fallacieuxprétexte qu’il était trop petit.

La même morale avait ajouté que lorsqu’on est pauvre et qu’onn’a pas de famille, il faut travailler pour gagner sa vie. Chicos’était demandé, non sans terreur, ce qu’il pourrait bien fairepour gagner sa vie, vu qu’on avait totalement négligé de luiapprendre quoi que ce fût dans ce sens et que, d’ailleurs, lepauvre n’avait guère plus de force qu’un petit oiselet fraîchementtombé du nid.

Mais comme, par extraordinaire, Juana avait paru approuver cettemorale, Chico, plein d’ardeur et de bonne volonté, avait consenti àce travail qui devait faire de lui un homme libre. Manuel en avaitaussitôt profité pour lui attribuer les besognes les plus basses etles plus dures aussi, en échange de quoi il lui octroyaitlibéralement le gîte et la pâtée.

La besogne assignée était au-dessus des forces du nain.Peut-être l’eût-il accomplie, vaille que vaille, si on avait suménager sa susceptibilité grande. Mais la susceptibilité de Chicoétait une chose qui ne comptait pas. Dans ses nouvelles fonctions,le nain devint tout de suite le souffre-douleur de tous. Depuis lepatron jusqu’au dernier garçon d’écurie, chacun se crut en droit delui donner des ordres. Et lorsque ces ordres étaient mal exécutés,les taloches ne lui étaient pas ménagées.

Le plus terrible est que ses occupations le tenaient tout lejour loin de la présence de Juana, ce qui en soi était déjà uncruel tourment et ce qui avait en outre le grave inconvénient de lelivrer à la merci d’une valetaille et d’une clientèle souventavinée, qui ne lui ménageaient ni les humiliations ni lescoups.

Jamais il n’avait été aussi malheureux.

Aussi ce ne fut pas long. Au bout de quelques jours d’unsupplice sans nom, Chico planta là tablier, balais, clients etpatron et disparut.

Comment vécut-il ? De maraude tout simplement. Il ne luifallait pas gros pour le sustenter. Les fruits savoureux abondaientdans ce vaste jardin qu’était l’Andalousie. Il n’avait qu’àprendre. Quand le temps ne permettait pas cette maraude, il serendait aux porches des églises et tendait la main. Ceci était dansles mœurs de l’époque et le fin moraliste Manuel lui-même nepouvait y trouver à redire.

Le Chico mangeait peu, gîtait dans on ne savait quel trou, étaitcouvert de loques, mais il était libre. Libre de dormir au bonsoleil, vautré dans l’herbe sèche ; libre de rêver auxétoiles. Il était fier et content. Il se redressait plus quejamais, et il fallait voir de quel air il tournait le dos àquiconque lui parlait sur un ton qui ne lui convenait pas.

Devant la fuite du nain, la morale de Manuel s’était répandue enplaintes amères, en reproches sanglants, en prédictionsterrifiantes. Le Chico était un misérable ingrat, un paresseux, unêtre sans foi ni loi, sans cœur, sans aucun sentiment humain, quifinirait inévitablement sur quelque bûcher.

Cependant Chico n’était pas un ingrat, comme le prétendait ledigne Manuel. Seulement sa gratitude allait – et c’était asseznaturel – au seul être qui lui eût témoigné de la bonté et del’affection : Juana.

Chaque jour il trouvait le moyen de se faufiler dans l’auberge –il était si petit – et là, tapi dans un coin, il se remplissait lesyeux de la vue de celle qui était tout pour lui. Il regardaitJuana, vive et alerte, toujours mise comme une petite reine, quiallait et venait, surveillant le service, l’œil à tout, en aviséeménagère qu’elle était, d’instinct, malgré sa jeunesse. Et quand ilavait bien rempli ses yeux et son cœur il s’en allait content… pourrevenir le lendemain.

Quelquefois, lorsqu’elle passait à sa portée, il osait allongerla main, saisissait un coin de sa basquine et la baisaitdévotement. Tiens ! il avait bien baisé la trace de ses pas,restée visible sur le sable répandu dans le patio ! Maisc’étaient là bonheurs qui ne pouvaient lui échoir souvent.

Un jour qu’il avait mal calculé son mouvement, au lieu de labasquine il avait effleuré le mollet. Il en était resté tout saisi.D’autant que Juana, croyant à la grossière plaisanterie de quelqueclient, s’était arrêtée, pâle d’indignation, en jetant un grandcri, qui avait fait accourir Manuel et les serviteurs.

Le pauvre Chico avait immédiatement entrevu le résultat de samaladresse ; l’auberge bouleversée, sa découverte à lui,Chico, effaré, et qu’il allait être ignominieusement chassé devantelle, sans préjudice de la raclée qui ne lui serait pasménagée.

Piteusement, il était sorti de sa cachette, et à genoux devantelle, les mains jointes, il avait murmuré :

– C’est moi, Juana. N’aie pas peur.

Malgré qu’il fût dans un état pitoyable, à ne pas prendre avecdes pincettes, elle l’avait reconnu tout de suite. Elle n’avait paseu peur. Elle avait même paru très contente et elle avait répondu àson père qui s’informait :

– Ce n’est rien. Je me suis heurtée contre cette table etje n’ai pu me retenir de crier comme une sotte.

Le père Manuel, ne voyant rien de suspect, s’était retiré,satisfait de l’explication ; les serviteurs avaient reprisleurs occupations interrompues, et elle, elle lui avait fait unsigne imperceptible auquel il avait obéi. N’était-ce pas dans seshabitudes de lui obéir en tout ?

Elle l’avait conduit dans un endroit écarté où on ne pouvait lasurprendre. Tout de suite elle l’avait pris de très haut aveclui :

– Que faisais-tu dans ce coin ? Sacripant !paresseux ! hérétique ! Comment oses-tu reparaître dansla maison que tu as abandonnée, sans un adieu, sans regret ?…Ingrat ! sans cœur !

Elle avait beau gronder et faire sa grosse voix, il voyait bienà ses yeux qu’elle était contente de le revoir, joliment contente,tiens ! Alors, très ému, il avait réponduhumblement :

– Je voulais te voir, Juana.

– Oui-dà ! Et d’où te vient ce tardif désir, après desjours et des jours d’oubli ?

Très triste, il répondit :

– Je ne t’ai pas oubliée, Juana, je ne le pourrais pasd’ailleurs. Je suis venu ainsi tous les jours.

– Tous les jours ! Tu veux m’en faire accroire.Pourquoi ne t’es-tu jamais montré ?

– Je pensais qu’on m’aurait chassé.

Elle l’avait regardé avec un air de commisération étonné.

Et haussant les épaules :

– Tu l’aurais, ma foi, bien mérité… Tu devrais savoirpourtant que je n’aurais pas fait cela, moi.

– Toi, Juana, oui. Mais ton père ? Mais lesautres ?

L’argument lui parut avoir sa valeur. Elle ne répondit pas toutde suite. Elle ne doutait pas de ce qu’il disait d’ailleurs et – cequ’elle se gardait bien d’avouer – peut-être l’avait-elle découvertplus d’une fois dans les coins où il se croyait si bien caché. Pourdissimuler son embarras elle reprit, grondeuse :

– Dans quel état te voilà ! On te prendrait pour unmalandrin. Comment n’as-tu pas honte de te présenter ainsi devantmoi ? Ne pourrais-tu être propre, au moins ?

Il baissa la tête, honteux. Une larme pointa à ses cils. Lereproche le cinglait ; et il est de fait que sans cemalencontreux incident jamais il ne se serait montré à elle danscet état.

Elle vit qu’elle lui avait fait de la peine en l’humiliant. Elledit d’un ton radouci, en le regardant finement :

– N’est-ce point toi aussi qui as apporté ces fleurs quej’ai trouvée parfois sur ma fenêtre ?

Il rougit et fit signe que oui de la tête.

– Pourquoi as-tu fait cela ? insista-t-elle en lefixant toujours.

Très naturellement, sincèrement peut-être, ilrépondit :

– Je ne voulais pas que tu me crusses ingrat. Les autres,ça m’est égal ; mais toi, je ne veux pas, tiens !… Alorsj’ai pensé que tu devinerais et que tu me pardonnerais.

Elle le regarda une seconde sans répondre, puis avec un sourireénigmatique :

– C’est du joli ! Comment as-tu pu parvenir jusqu’à mafenêtre ? Malheureux ! n’as-tu pas réfléchi que tupouvais te tuer et que je ne me serais jamais pardonné tamort ?

Il se sentit le cœur ensoleillé. Allons, elle n’était plusfâchée. Elle l’aimait toujours, puisqu’elle tremblait pour lui. Etriant d’un bon rire clair :

– Il n’y a pas de danger, dit-il. Je suis petit, mais jesuis adroit, tiens !

– C’est vrai que tu es adroit comme un singe, dit-elle enriant de bon cœur, elle aussi. N’importe, ne recommence plus… tu meremettras tes fleurs toi-même, je serai plus tranquille.

– Tu veux bien que je vienne te voir ? fit-iltremblant d’espoir.

Elle eut sa petite moue de pitié dédaigneuse :

– À présent que te voilà revenu, tu ne vas pas t’enretourner, je pense ? dit-elle.

– Mais ton père ? Manuel ?

Elle eut un geste autoritaire pour signifier que ce n’était pascela qui l’embarrassait et trancha :

– Veux-tu me voir, sans te cacher comme un voleur, oui ounon ?

Il joignit les mains avec un air extasié.

– En ce cas, dit-elle avec son sourire déluré, net’inquiète pas du reste. Tu prendras tes repas avec nous, tucoucheras ici, je vais te faire habiller décemment, et pour ce quiest du travail, tu ne feras que ce que tu voudras bien faire de tonchef, et dans la mesure de tes forces. Allons, viens.

Il secoua la tête et ne bougea pas.

Elle pâlit et, fixant sur lui un regard de douloureux reproche,elle dit avec des larmes dans la voix :

– Tu ne veux pas ?

Et tout aussitôt, avec son petit air autoritaire et décidé, elleajouta :

– Je ne suis donc plus ta petite maîtresse ? Je necommande plus ? Tu te révoltes ?

Très doucement, mais avec un air obstiné, il dit :

– Tu es et tu seras toujours toute ma joie. Je passerais àtravers le feu pour te voir… Mais je ne veux plus que tu menourrisses, je ne veux plus que tu me loges et que tum’habilles.

Malgré elle, elle eut un regard sur ses loques et, encore uncoup, il baissa la tête en rougissant. Elle lui prit le menton dubout de ses petits doigts, l’obligea à relever la tête et plongeaavec une grande tendresse son regard innocent dans le sien. Et ellecomprit ce qui se passait dans son esprit. Et elle eut cettedélicatesse vraiment féminine de ne pas insister.

– Soit, dit-elle après un silence. Tu viendras quand tuvoudras. Quand au reste, tu feras comme tu voudras. Seulementn’oublie pas, si tu avais besoin, que tu me ferais une grosse peinede ne pas te souvenir que je suis et resterai toujours pour toi unesœur tendre et dévouée. Me promets-tu de ne pas oublier ?

Elle dit ceci avec une grande douceur et une émotion surlaquelle il n’y avait pas à se méprendre.

Alors, ainsi qu’il leur arrivait parfois quand elle faisait lareine et qu’il lui rendait humble hommage, il s’agenouilla et posadoucement ses lèvres sur la pointe de son petit soulier desatin.

Il n’y avait pas à se méprendre sur la signification de cegeste. Inconsciemment certes, mais clairement, le pauvre Chico,dans son humble et combien timide baiser, mit tout son amour faitde soumission, de dévouement et d’abnégation. Et l’humilité dugeste était d’autant plus touchante que le pauvre diable étaithabituellement très fier. Si innocente que fût Juana, elle ne seméprit pas et une expression de joie et d’orgueil irradia son jolivisage.

D’ailleurs elle reçut l’hommage avec sans-gêne, sans faussemodestie et sans fausse pudibonderie, comme un tribut dû à sabeauté et à sa bonté. Elle le reçut en souveraine sûre de planerbien au-dessus du mortel prosterné à ses pieds d’enfant. Lasimplicité et le naturel parfait de l’attitude, l’expression desuprême dignité répandue sur ses traits délicats etaristocratiques, chez une jeune fille de son âge et de sacondition, eussent arraché une approbation admirative à Faustaelle-même, ce prestigieux modèle de poses superbes.

Et cependant qu’elle recevait, sans en paraître écrasée, cethommage, elle laissait tomber sur l’être pantelant, qui était biensa chose à elle, un regard d’une douceur attendrie, où perçait unepointe de malice nuancée de pitié.

Lui cependant se redressait et disait dans un grand élan de toutson être :

– Tu es et tu seras toujours ma petite maîtresse.

Elle frappa joyeusement dans ses petites mains et s’écria,orgueilleusement triomphante :

– Je le sais bien !

Et tout aussitôt, en gamine qu’elle était, elle le prit par lamain :

– Viens, dit-elle, rose de plaisir, viens voir monpère !

– Non ! dit-il encore doucement.

Elle frappa du pied d’un air mutin, et moitié boudeuse, moitiécurieuse :

– Qu’y a-t-il encore ? dit-elle.

Il jeta un coup d’œil sur ses hardes et dit :

– Je ne veux pas que ton père me voie dans cet état. Jereviendrai demain et tu verras que je ne te ferai pas honte.

Comment s’arrangea-t-il ? Par quel tour de forced’ingéniosité ? Par quelle mystérieuse besogne accomplie fortà propos ? C’est ce que nous ne saurions dire. Tant il y a quelorsqu’il revint le lendemain il était superbe dans son costumepresque neuf, qui, sans avoir rien de fastueux, comme de juste,était d’une propreté méticuleuse et d’une élégance qui faisaitadmirablement valoir la gracilité de la jolie miniature qu’ilétait.

Aussi le Chico triompha sur toute la ligne.

D’abord il vit les yeux de la coquette Juana briller de plaisirà le voir si propre et si élégamment attifé. Ensuite il put liresur les physionomies ébahies de Manuel et des serviteurs accourus,la stupeur admirative que leur causait la vue de Chico en fringantcavalier.

Depuis ce jour, il eut soin de réserver un costume coquet qu’iln’endossait que pour aller voir sa petite maîtresse, et qu’ilrangeait soigneusement ensuite dans quelqu’une de ces cachettesconnues de lui seul. Le reste du temps, ses haillons habituels nelui faisaient pas peur. Seulement la leçon de Juana avait profité,et si à courir les routes et les bois ses vêtements étaient quelquepeu malmenés, du moins se maintenait-il toujours dans une propretéméticuleuse qui, jointe à son air digne et fier, attirait sur luila bienveillance et la sympathie.

Juana n’avait eu qu’à jeter ses bras au cou de son père pourobtenir le pardon de Chico. Et comme le bonhomme n’était pasméchant au fond, il avait accueilli assez convenablement le retourde l’ingrat, comme il disait. Même il n’avait pu se retenir d’unecertaine considération en apprenant que le petit abandonné avaiténergiquement refusé de se laisser héberger comme par le passé.

À la fête de Juana, et à de certaines fêtes carillonnées, leChico s’arrangeait toujours – comment ? mystère ! – defaçon à apporter quelques menus cadeaux que « petitemaîtresse » acceptait avec une joie bruyante, car ilsconsistaient généralement en objets de toilette, et nous savons quela coquetterie était son péché mignon.

Ces jours-là, El Chico daignait accepter l’invitation à dîner deManuel, et prenait place à la table familiale, à côté de samaîtresse, aussi heureuse que lui.

Au coin de son âtre mourant, le Chico se remémorait tristementtoutes ces choses, pendant que Juana, là-haut, s’occupait de seshôtes.

Soit que la force de caractère du petit homme fût réellementsurprenante ; soit que sa timidité, jointe au sentiment de soninfériorité physique, l’eût porté à croire que les joies du commundes mortels lui étaient interdites ; soit enfin qu’il fûtdésigné d’avance aux plus douloureux sacrifices, jamais jusqu’à cejour un aveu n’était venu effleurer ses lèvres. C’est avec un soinjaloux qu’il s’était toujours efforcé de dissimuler ses sentimentsintimes et qu’il y était parvenu… croyait-il.

La vérité est que Juana, si ignorante qu’elle fût des choses del’amour, était bien trop fine et délurée pour ne pas avoir devinédepuis longtemps ce que le Chico se donnait tant de peine à luicacher. Et de fait il n’était pas besoin d’être fort experte pourcomprendre que le nain était entièrement dans sa petite main àelle.

Si elle était amoureuse ou non de Chico, c’est ce que nousverrons par la suite. Ce que nous pouvons dire, c’est qu’elle étaithabituée à le considérer comme une chose bien à elle etexclusivement à elle. L’adulation du nain l’avait inconsciemmentconduite à l’égoïsme. Elle était naïvement et sincèrement pénétréede sa supériorité, bien pénétrée de cette pensée que si elle était,elle, parfaitement libre de ses sentiments, libre de le tourner etde le retourner à sa guise, libre de le choyer où de le fairesouffrir selon son caprice, il n’en pouvait être de même de lui,qui ne devait avoir aucune affection en dehors d’elle.

Sur ce point, si elle n’était pas amoureuse, elle était du moinsfort exclusive, et pour mieux dire, jalouse, au point qu’elle eûtsouffert à la seule pensée d’une infidélité, voire d’unepréférence, même momentanée.

Dès l’instant où il lui paraissait que le nain ne saurait jamaistrop l’adorer, elle ne pouvait être froissée de son amour. Était-cesimple coquetterie ? Nous ne saurions dire. Mais il estévident qu’elle trouvait une jouissance réelle à exercer un empireabsolu sur cet esclave soumis, et une atteinte portée à cet empire,si légère qu’elle fût, lui eût été très douloureuse.

Mais tout ceci le nain l’ignorait. Car s’il était discret, ellene l’était pas moins. Et c’était à ce moment qu’une parole deFausta, lancée au hasard, pour sonder le terrain, était venue jeterle trouble dans son âme jusque-là peut-être résignée.

Et le Chico ressassait dans son esprit un certain nombre dequestions, toujours les mêmes.

Était-il possible, à présent qu’il était riche, qu’il pût semarier comme tous les autres hommes ? Oserait-il jamais parleret comment serait accueillie sa demande ? Ne soulèverait-ilpas un éclat de rire général et son pauvre amour, si pur, sidésintéressé, connu de tous, bafoué et ridiculisé, ne ferait-il pasun objet de dérision universelle ?

Et Juana ? L’aimait-elle ? Il se disait :non ! Juana l’aimait comme un jouet, comme un frère faible etdébile peut-être. C’était tout.

Juana aimait d’amour ailleurs, et le rival préféré il ne leconnaissait que trop.

La voix aigre et grondeuse de la duègne Barbara le tira de sarêverie.

– Sainte Vierge ! clamait la matrone, vous voulez doncvous tuer ? Mais que se passe-t-il donc, pour l’amour deDieu ?

– Il ne se passe rien, ma bonne Barbara, j’ai affaire enbas et n’irai me coucher que lorsque j’aurai fini.

– Ne suis-je plus bonne à vous aider ? fit aigrementla voix de Barbara.

– J’ai besoin d’être seule. Va te coucher. Dans un instantj’irai aussi.

Et comme la duègne insistait encore :

– Va, dit fermement Juana, je le veux !

Chico entendit encore de vagues imprécations, le bruit sourd desavate traînant sur le carreau, puis le bruit d’une porte pousséerageusement, puis plus rien.

Un moment de silence se fit. Juana, évidemment, s’assurait quela duègne obéissait, puis Chico perçut le bruit de petits talonsclaquant sur les marches de chêne sculpté de l’escalier intérieur.Il se laissa glisser de son escabeau et il attendit debout.

La jeune fille pénétra dans la cuisine. Sans dire un mot, ellese laissa tomber dans un large fauteuil de bois que la vieilleBarbara avait eu la précaution de traîner là pour elle, et posantle coude sur la table, elle laissa tomber sa tête dans sa main etresta ainsi, sans un mouvement, les yeux fixes, dilatés, sans unelarme.

Silencieusement, Chico s’assit devant elle, sur les dallespropres et luisantes de la cuisine, et comme s’il eût craint pourelle le froid des dalles, il prit doucement ses petits pieds dansses mains et les posa sur lui en les tapotant doucement.

Soit que Juana fût habituée à ce manège, soit qu’elle fût troppréoccupée, elle ne parut prêter aucune attention aux soins tendreset délicats dont il l’entourait. Elle restait toujours immobile ettrès pâle, les yeux perdus dans le vague, secouée parfois d’un longfrisson.

Lui, sans dire un mot, la contemplait tristement de ses yeux debon chien, et quand il la sentait frissonner, il pressait doucementses pieds, comme pour lui dire :

– Je suis là ! Je compatis à tes douleurs.

Longtemps ils restèrent ainsi silencieux. Elle, ayant peut-êtreoublié sa présence, lui, ne sachant comment s’y prendre pourl’arracher à sa douloureuse méditation.

Enfin il murmura d’une voix apitoyée :

– Tu souffres, petite maîtresse ?

Elle ne répondit pas. Mais sans doute la chaude tendresse quisemblait émaner de lui fit se dilater son pauvre cœur meurtri, carelle laissa tomber sa jolie tête dans ses mains et se mit à pleurerdoucement, silencieusement, à tout petits sanglots convulsifs,comme en ont les enfants à qui l’on a fait une grosse peine.

– Pauvre Juana ! dit-il encore en pétrissantmachinalement ses petits pieds.

Et c’était admirable qu’il eût la force de la plaindre, elle,d’abord. Car il savait bien ce qu’elle avait et pourquoi ellepleurait ainsi, la petite Juana ! Et ses larmes retombaientsur son cœur à lui, comme des gouttes de plomb fondu. Et il sentaitconfusément que l’irréparable allait s’accomplir, qu’elle allaitparler et qu’il verrait son cœur déchiré en lambeaux par l’aveuque, cruellement inconsciente, elle allait lui faire. Et poussantl’oubli de soi jusqu’à la plus complète abnégation, il prit lesdevants et bravement, les larmes dans les yeux, mais un sourirestoïque aux lèvres, il dit :

– Tu l’aimes donc bien ?

– Qui ?

Il savait bien qu’il n’avait pas besoin de le nommer etqu’elle comprendrait quand même.

Et en effet, elle comprit tout de suite, et elle ne fut pasétonnée du tout qu’il sût, lui.

Seulement la question en soi la laissa toute désemparée.Évidemment elle ne s’était jamais interrogée elle-même, car elleécarta ses mains et, le regardant de ses yeux baignés de larmes,elle dit avec une naïveté touchante :

– Je ne sais pas !

Il eut une seconde d’espoir. Si elle ne savait pas elle-même, lemal n’était peut-être pas irréparable. À la longue, peut-êtrearriverait-il à la guérir et à la conquérir…

Espoir très fugitif. Tout de suite l’aveu détourné jaillitspontanément, douloureux dans sa cruauté involontaire :

– Je ne sais pas si je l’aime ! Mais ceux qui lepoursuivent avec tant d’acharnement et qui pour le vaincre, lui sicourageux et si fort, ont dû l’attirer dans quelque odieuxguet-apens et l’assassiner lâchement, ceux-là, je les déteste. Jeles déteste et ce sont des assassins… des assassins maudits… oui,maudits.

Et en répétant ces mots avec colère, elle trépignait à coups detalons furieux, oubliant que c’était sur lui, Chico, qu’elletrépignait ainsi, ou, peut-être, s’en souciant fort peu puisqu’illui appartenait et qu’elle pouvait le maltraiter à son gré.

Lui ne broncha pas. Il n’avait même pas senti les coups detalons pourtant violents. Elle aurait pu le fouler et l’écraserlittéralement, il ne s’en serait pas aperçu davantage. Il étaitdevenu livide. Une seule pensée subsistait en lui, qui le rendaitinsensible à la douleur physique :

« Elle déteste et maudit ceux qui l’ont attiré dans unguet-apens ! Mais j’en suis, moi, de ceux-là !… Alorselle va me détester et me maudire aussi ? Et si ellesavait ! Elle me cracherait au visage ce mot :« Assassin ! » Elle me chasserait de sa présence… ceserait fini, il ne me resterait plus qu’à mourir.Mourir !… »

Et comme si ce mot avait un écho dans son esprit à elle, ellereprit en pleurant doucement :

– Je ne sais pas si je l’aime ? Mais il me semble queje mourrai si je ne le vois plus.

Alors de la voir pleurer, de l’entendre dire qu’elle mourrait,comme un enfant, il se mit à pleurer tout doucement, lui aussi. Eten pleurant, sans savoir ce qu’il faisait, il baisait les petitspieds et les arrosait de ses larmes, et il répétait dans dessanglots convulsifs :

– Je ne veux pas que tu meures ! Je ne veuxpas !

Tout à coup, une idée lui traversa l’esprit. Il se mit debout,et :

– Écoute, petite maîtresse, dit-il avec tendresse, va tecoucher et dors bien tranquillement. Moi je vais le chercher, etdemain je te le ramènerai.

La femme qui aime ailleurs est toujours injuste et cruelleenvers qui l’aime et qu’elle dédaigne. Tout lui est sujet àsoupçons injurieux.

Au même instant, Juana fut debout aussi, et le saisissant aucollet, l’œil étincelant, d’une voix dure qu’il ne lui connaissaitpas :

– Tu sais quelque chose ! cria-t-elle en le secouantrudement. C’est toi qui es venu le chercher, au fait. C’est toi quil’as poussé à suivre don César. Qu’en a-t-on fait ?Parle ! mais parle donc, misérable !

Il gémit, sans essayer de se dégager :

– Tu me fais mal !

Honteuse, elle le lâcha.

– Je ne sais rien, Juana, je te le jure ! dit-il trèsdoucement. Si je suis venu le chercher, c’est pour l’amour detoi.

– C’est vrai, dit-elle, comment pourrais-tu savoir !Pour l’amour de moi, tu n’aurais pas voulu aider à le meurtrir. Jesuis folle… pardonne-moi.

Et elle lui tendit sa main, comme une reine. Et lui, le bonchien fidèle, il saisit la main blanche qui venait de le rudoyer etla baisa tendrement.

Mais il avait déchaîné l’espoir en elle, et frémissante,impatiente :

– Que comptes-tu faire ? dit-elle.

– Je ne sais pas. Mais si quelqu’un peut le sauver, jecrois que c’est moi… Je suis si petit, je passe partout et on ne seméfie pas de moi. Je ne sais rien, ne me demande rien… Attendsjusqu’à demain seulement. Tu peux bien faire cela pour moi.

Brusquement elle le prit dans ses bras, et le pressant sur sonsein :

– Ah ! mon Chico ! mon cher Chico ! si tu mele ramènes sauf, comme je t’aimerai ! gémit-elle retournantsans le savoir le fer dans la plaie.

Il se dégagea doucement.

Qu’il baisât le bout de ses doigts, le bas de sa basquine ou lapointe de son soulier, Juana le laissait faire avec la complaisanced’une divinité se prêtant à l’adoration d’un fidèle. Quant elleétait contente, elle lui tapotait les joues ou lui tirait doucementl’oreille. Parfois elle allait jusqu’à poser ses lèvres sur sonfront. C’était tout. Jamais elle ne l’avait serré dans ses brascomme elle venait de le faire.

Et ce baiser qui s’adressait à un autre, il le sentait bien, luifaisait mal.

– Je ferai ce que je pourrai, dit-il simplement. Espère. Mepromets-tu d’aller te reposer ?

– Je ne pourrai pas, dit-elle douloureusement. Je ne visplus.

– Il le faut pourtant… Sans quoi demain, quand je leramènerai, tu seras fatiguée et il te trouvera laide.

Et il souriait en disant cela, le malheureux !

Et elle eut la cruauté de dire :

– Tu as raison. Je vais me reposer. Je ne veux pas qu’il metrouve laide.

– Et quand il sera de retour, que feras-tu ?Qu’espères-tu, Juana ?

Elle tressaillit et pâlit affreusement.

Qu’espérait-elle, au fait ?

Elle ne s’était pas posé cette question, la petite Juana. Elleavait vu le seigneur français si beau, si brave, si étincelant etsi bon aussi. Son petit cœur vierge avait battu la chamade et ellel’avait laissé faire sans se rendre compte du danger qu’il luifaisait courir.

Mais devant la question si nette et si franche du Chico, ellevoyait trop tard, l’énormité à quoi aboutissait son inconséquence.Son cœur se serra. Évidemment il ne pouvait être question d’unionentre la fille d’un hôtelier comme elle et ce seigneur français,envoyé d’un roi – et quel roi ! le roi de France – à un autreroi ! C’eût été folie insigne que de s’arrêter un instant àpareille pensée.

Alors que pouvait-elle espérer ?

Le Français avait-il seulement fait attention à elle ?C’était un seigneur qui paraissait avoir à régler des entreprisesautrement sérieuses et importantes. Évidemment elle n’existait paspour lui, et s’il avait eu pour elle quelques paroles de banalegalanterie, c’était par pure habileté sans doute, car il n’étaitpas fier et il était si bon. Mais de là à concevoir un espoirquelconque, quelle folie ! Elle comprit que son amour nepourrait jamais être qu’un amour humble et dédaigné… comme celui deChico pour elle.

Son désespoir devant l’étendue de son malheur lui fit comprendrequelle devait être la douleur de Chico, placé vis-à-vis d’elle dansla même situation où elle était vis-à-vis de Pardaillan, et combienelle avait été cruelle, sans le savoir, envers lui. Et par uneffort de volonté puissant, qui dénotait la bonté de son cœur, elleeut la force de sourire et de dire sur un tonmi-plaisant :

– Ramène-le vivant, c’est tout ce que je demande. Pour lereste, je sais bien, que je n’ai rien à espérer. Le sire dePardaillan retournera dans son pays, et moi Je me consolerai etl’oublierai petit à petit.

Après s’être efforcée de réparer en partie le mal qu’elle avaitfait, elle voulut faire plus encore, et avec cette hypocrisieparticulière à la femme, peut-être sincère en réalité tant sa pitiépour le Chico était grande, elle ajouta :

– Tu me resteras, toi, mon Chico, et je t’aimerai bien, va…Nul ne le mérite plus que toi.

Cette espérance qu’elle lui donnait, sans y croire elle-mêmepeut-être, lui mit la joie dans l’âme, et, pour achever del’affoler, elle se pencha sur lui, posa chastement ses lèvres surson front et dit en le poussant doucement dehors :

– Va, Chico. Fais ce que tu pourras. Moi, je vais tâcher dereposer un peu en t’attendant.

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