La maison du péril Agatha Christie

— Insinuez-vous qu’elle… m’écriai-je, haletant.

— C’est la meilleure solution pour elle, si elle ne veut pas connaître l’infamie de la pendaison. Mais… chut ! ne parlons pas ainsi devant Mr Vyse, digne défenseur de la loi et de l’ordre. Officiellement, j’ignore tout et cette allusion au contenu des boîtiers de montres n’est qu’une simple conjecture de ma part.

— Vos présomptions s’avèrent toujours justes, Monsieur Poirot, dit Frederica.

— Il faut que je vous quitte, déclara Charles Vyse, d’un ton froid et réprobateur.

Poirot observa Frederica et Lazarus, puis d’un air innocent leur demanda :

— Ne comptez-vous pas vous marier bientôt ?

— Si, dès qu’il sera possible, répondit Lazarus.

— En toute franchise, Monsieur Poirot, je ne suis pas la cocaïnomane que vous me supposez, repartit Frederica. Je suis parvenue à me rationner, et, avec la perspective du bonheur, j’ai tout lieu de croire que je n’aurai plus besoin de montre-bracelet.

— Je vous souhaite d’être heureuse, Madame, lui répondit Poirot ; malgré vos souffrances et ces pénibles épreuves, j’ai la certitude que l’indulgence demeure entière en votre cœur…

— Je saurai prendre soin d’elle, dit Lazarus. Bien que mes affaires ne soient pas florissantes, j’espère m’en tirer et, au cas contraire, j’ai le sentiment que Frederica acceptera de partager ma pauvreté.

Souriante, Frederica acquiesça de la tête.

— Il se fait tard, déclara Poirot en consultant sa montre, et chacun se prépara à partir. Nous venons de vivre une nuit étrange dans cette sinistre maison. Je suis tenté de dire, comme Ellen : « Un mauvais esprit l’habite », conclut Poirot.

Après avoir levé les yeux sur le portrait de sir Nicolas, mon ami entraîna Lazarus à l’écart.

— Je m’excuse de vous importuner encore, mais une de mes nombreuses questions est demeurée sans réponse : pour quelle raison avez-nous offert cinquante livres sterling de ce tableau ? Répondez-moi. Ainsi toutes les données du problème seront résolues.

— Vous savez bien que je suis antiquaire ?

— Justement.

— Ce tableau ne vaut pas plus de vingt livres. Je savais qu’en lui proposant cinquante livres, Nick s’empresserait de le faire estimer. Elle se rendrait compte de ma méprise et, lors d’une nouvelle offre de ma part pour une autre toile, ne chercherait pas à soumettre celle-ci à une contre-expertise.

— Et alors ?

— Et alors ? Cette peinture que vous apercevez là-bas, sur l’autre mur, vaut au moins cinq mille livres sterling, déclara Lazarus d’un ton sec.

— Ah ! soupira Poirot. Et maintenant je sais tout ! s’exclama-t-il, au comble du bonheur.

FIN

* * *

[1] Ville du Sussex où Guillaume le Conquérant battit Harold.

[2] Nik, en anglais, signifie, en effet, diable, démon, Satan, etc.

[3] Le Train bleu, roman d’Agatha Christie, traduit par Louis Postif et publié aux Éditions du Masque.

[4] Marque d’avion de tourisme.

[5] Quartier de prédilection des célébrités londoniennes de la médecine.

[6] Rappelons que le mariage des membres du corps ecclésiastique est admis dans la religion protestante.

[7] Restaurant historique dans les parages de Fleet Street, à Londres, et où se réunissaient jadis les gloires littéraires anglaises : Charles Dickens, Thackeray, Ben Johnson, etc.

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