VIII
Comptons ce qui me reste.
Trois jours de délai après l’arrêt prononcépour le pourvoi en cassation.
Huit jours d’oubli au parquet de la courd’assises, après quoi les pièces, comme ils disent, sont envoyéesau ministre.
Quinze jours d’attente chez le ministre, quine sait seulement pas qu’elles existent, et qui, cependant, estsupposé les transmettre, après examen, à la cour de cassation.
Là, classement, numérotage,enregistrement ; car la guillotine est encombrée, et chacun nedoit passer qu’à son tour.
Quinze jours pour veiller à ce qu’il ne voussoit pas fait de passe-droit.
Enfin la cour s’assemble, d’ordinaire unjeudi, rejette vingt pourvois en masse, et renvoie le tout auministre, qui renvoie au procureur général, qui renvoie aubourreau. Trois jours.
Le matin du quatrième jour, le substitut duprocureur général se dit, en mettant sa cravate : – Il fautpourtant que cette affaire finisse. – Alors, si le substitut dugreffier n’a pas quelque déjeuner d’amis qui l’en empêche, l’ordred’exécution est minuté, rédigé, mis au net, expédié, et lelendemain dès l’aube on entend dans la place de Grève clouer unecharpente, et dans les carrefours hurler à pleine voix des crieursenroués.
En tout six semaines. La petite fille avaitraison.
Or, voilà cinq semaines au moins, sixpeut-être, je n’ose compter, que je suis dans ce cabanon deBicêtre, et il me semble qu’il y a trois jours, c’était jeudi.