Le Dernier Jour d’un condamné

XXXIV

Une heure vient de sonner. Je ne saislaquelle : j’entends mal le marteau de l’horloge. Il me sembleque j’ai un bruit d’orgue dans les oreilles ; ce sont mesdernières pensées qui bourdonnent.

À ce moment suprême où je me recueille dansmes souvenirs, j’y retrouve mon crime avec horreur ; mais jevoudrais me repentir davantage encore. J’avais plus de remordsavant ma condamnation ; depuis, il semble qu’il n’y ait plusde place que pour les pensées de mort. Pourtant, je voudrais bienme repentir beaucoup.

Quand j’ai rêvé une minute à ce qu’il y a depassé dans ma vie, et que j’en reviens au coup de hache qui doit laterminer tout à l’heure, je frissonne comme d’une chose nouvelle.Ma belle enfance ! ma belle jeunesse ! étoffe dorée dontl’extrémité est sanglante. Entre alors et à présent il y a unerivière de sang ; le sang de l’autre et le mien.

Si on lit un jour mon histoire, après tantd’années d’innocence et de bonheur, on ne voudra pas croire à cetteannée exécrable, qui s’ouvre par un crime et se clôt par unsupplice ; elle aura l’air dépareillée.

Et pourtant, misérables lois et misérableshommes, je n’étais pas un méchant !

Oh ! mourir dans quelques heures, etpenser qu’il y a un an, à pareil jour, j’étais libre et pur, que jefaisais mes promenades d’automne, que j’errais sous les arbres, etque je marchais dans les feuilles !

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