L’Iliade et l’Odyssée

L’Odyssée – Scène 12 : Nausicaa

Au palais du roi des Phéaciens, la charmanteprincesse Nausicaa s’éveilla d’un doux rêve. Son esprit étaitencore tout plein du rêve de l’arrivée d’un époux, et de tous lesbeaux habits dont elle et sa famille auraient besoin pour cetheureux jour.

Aussi elle quitta sa chambre tout de suite etparcourut le palais à la recherche de son père et de sa mère.

« Père chéri, dit-elle timidement, quandelle les eut trouvés, pourrais-tu me laisser prendre un grandchariot aux roues robustes, pour que j’emporte nos plus beauxhabits à la rivière pour les laver ? » Car c’était cequ’Athéna lui avait suggéré.

Son père sourit et donna des ordres à sesserviteurs. Quand les mules furent attelées au chariot de boispoli, Nausicaa sortit les beaux habits et les y entassa. Sa mèreajouta un panier de nourriture délicate et une outre de vin. Ellelui donna aussi de l’huile d’olive, pour s’en frotter après lebain. Alors Nausicaa prit le fouet et les rênes et toucha lesmules. Elles partirent dans un grand bruit de sabots, et les jeunesfilles suivirent par derrière.

Elles atteignirent la rivière dont les creuxtourbillonnants suffisaient à laver même le linge le plus sale. Lesjeunes filles foulèrent les habits dans ces creux, jusqu’à cequ’ils fussent propres et brillants. Elles les étendirent enrangées sur le rivage pierreux, juste hors d’atteinte desvagues.

Quand elles se furent baignées et frottéesd’huile, elles prirent leur repas au soleil, attendant que lesvêtements sèchent. Ce fut après leur repas, quand elles jouaient àla balle en poussant des cris joyeux, qu’Athéna éveilla Ulysse.

Il sortit en rampant du buisson quil’abritait, tenant devant lui une branche feuillue, car il n’avaitpas d’habits. Le corps meurtri et souillé par l’écume de mer, iloffrait un spectacle terrible. Épouvantées, toutes les suivantess’enfuirent. Mais la fille du roi resta là, car Athéna avait mis dela hardiesse dans son coeur.

« Es-tu une déesse ou une mortelle ?dit le subtil Ulysse. Si tu es une déesse, tu es sûrement Artémis.Mais si tu es mortelle, heureux ton père et ta mère, heureux tesfrères ; et le plus fortuné sera ton époux, car je n’ai jamaisvu beauté comme la tienne. »

« J’espère que tu auras pitié de moi, quiai été jeté sur ce rivage après dix-huit jours de mer. Je te priede me donner quelques vêtements et de me dire le chemin de laville, car je ne sais pas même où je suis. »

Alors Nausicaa aux bras blancs luirépondit : « Je vois, étranger, que tu n’es pas unméchant. Tu ne manqueras de rien ici. Car c’est le pays desPhéaciens, et je suis la fille du roi Alcinoos. »

Alors elle appela ses suivantes pour qu’ellesapportent des vêtements à l’étranger. Après qu’il se fut baignédans un endroit abrité et qu’il se fut revêtu des habits propres,Athéna lui versa sa grâce sur la tête, si bien qu’il resplendissaitde beauté.

« Oh ! pensa Nausicaa en lerevoyant, comme je voudrais qu’il reste avec nous et s’établissedans notre pays ! Car c’est un tel homme que j’aimerais avoirpour époux. »

Elle ordonna à ses suivantes de lui donner àboire et à manger. Quand il eut fini, on empila dans le chariot lesvêtements lavés et bien pliés pour le retour. Nausicaa dit à Ulyssequ’il pouvait marcher derrière avec les suivantes.

« Mais quand nous arriverons à la ville,dit Nausicaa, près de la grande place, il te faudra t’arrêter ett’asseoir dans le bois de peupliers que tu trouveras là. Car je neveux pas qu’on nous voie ensemble et qu’on croie que c’est monfutur époux que j’amène chez mes parents. »

« Puis, quand tu jugeras que nous avonseu le temps d’arriver au palais, entre dans la ville. Demande lamaison du roi, traverse la cour et entre directement dans lagrand-salle. Tu trouveras ma mère devant l’âtre, tordant la laineteinte de la pourpre de la mer, à la lumière du feu. Tombe à sesgenoux. Si elle est bien disposée envers toi, elle aura bientôtfait de persuader mon père de te renvoyer chez toi sain etsauf. »

Elle toucha les mules du fouet, et elleseurent vite quitté la rivière. Avant le coucher du soleil ilsatteignirent le bois de peupliers où Ulysse s’assit pourattendre.

Quand Ulysse jugea qu’assez de temps s’étaitécoulé, il alla au palais d’Alcinoos. Et Athéna l’enveloppa d’unbrouillard, si bien que personne ne le vit.

Quand il fut devant le palais, il s’arrêta uninstant pour regarder autour de lui avant de mettre le pied sur leseuil de bronze. Car le palais brillait comme le soleil ou lalune.

Dans la grand-salle une rangée de siègess’étendait de chaque côté, avec des housses de fin tissu. Et lalumière pour éclairer les festins venait de torches flamboyantestenues par des statues d’or.

Ulysse entra dans la grand-salle. Toujoursprotégé par le brouillard d’Athéna, il s’avança jusqu’au trône duroi et de la reine. Et ce fut seulement quand il embrassa lesgenoux de la reine Arété que le brouillard se dissipa. Alors on levit et le silence se fit.

« Reine Arété, dit Ulysse, c’est aprèsavoir souffert bien des maux que je me jette à tes genoux et tedemande asile, à toi et à ton roi. Puissent les dieux vous donnerle bonheur, à vous et aux vôtres, si vous m’aidez à regagner monpays, pour que je puisse enfin revoir les miens ! »

Puis il s’assit sur les cendres du foyer. Etle silence emplissait la pièce. Mais le roi Alcinoos prit Ulyssepar la main et le conduisit à un siège que lui céda son filsfavori. Une servante entra avec de l’eau dans une aiguière d’or etla versa dans un bassin d’argent, pour qu’il se lave les mains. Onentassa de bonnes choses sur la table à côté de lui, et Ulysse butet mangea autant qu’il le désirait.

Cependant le roi fit verser du vin pour quetous puissent faire une libation à Zeus, le dieu des suppliants. Etseulement après, Arété posa les questions qu’elle avait dansl’esprit depuis qu’elle avait reconnu les habits qu’il portait, carc’était elle qui les avait faits.

« Qui es-tu, étranger ? D’oùviens-tu ? Et puis-je demander d’où viennent ceshabits ? »

Ulysse commença aussitôt son récit,disant : « Je suis Ulysse, fils de Laerte, de lamontagneuse Ithaque. » Et aux Phéaciens, immobiles sous lecharme, il fit un récit complet de ses aventures.

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