Scène V
Éraste,Cliton
Éraste,lui donnant une lettre.
Va-t’en chercher Philandre, et dis-lui queMélite
A dedans ce billet sa passiondécrite ;
Dis-lui que sa pudeur ne saurait pluscacher
Un feu qui la consume et qu’elle tient sicher :
Mais prends garde surtout à bien jouer tonrôle ;
Remarque sa couleur, son maintien, saparole ;
Vois si dans la lecture un peu d’émotion
Ne te montrera rien de son intention.
Cliton
Cela vaut fait, monsieur.
Éraste
Mais, après ce message,
Sache avec tant d’adresse ébranler soncourage,
Que tu viennes à bout de sa fidélité.
Cliton
Monsieur, reposez-vous sur masubtilité ;
Il faudra malgré lui qu’il donne dans lepiège ;
Ma tête sur ce point vous servira depleige ;
Mais aussi vous savez…
Éraste
Oui, va, sois diligent.
Ces âmes du commun n’ont pour but quel’argent ;
Et je n’ai que trop vu par mon expérience…
Mais tu reviens bientôt ?
Cliton
Donnez-vous patience,
Monsieur ; il ne nous faut qu’un momentde loisir,
Et vous pourrez vous-même en avoir leplaisir.
Éraste
Comment ?
Cliton
De ce carfour j’ai vu venir Philandre.
Cachez-vous en ce coin, et de là sachezprendre
L’occasion commode à seconder mes coups.
Par là nous le tenons. Le voici ;sauvez-vous.