Ubu Roi

Scène VIII

Le camp sous Varsovie.

SOLDATS ET PALOTINS

Vive la Pologne ! Vive le PèreUbu !

PÈRE UBU

Ah ! Mère Ubu, donne-moi ma cuirasse etmon petit bout de bois. Je vais être bientôt tellement chargé queje ne saurais marcher si j’étais poursuivi.

MÈRE UBU

Fi, le lâche.

PÈRE UBU

Ah ! voilà le sabre à merdre qui se sauveet le croc à finances qui ne tient pas ! ! ! Je n’enfinirai jamais, et les Russes avancent et vont me tuer.

UN SOLDAT

Seigneur Ubu, voilà le ciseau à oneilles quitombe.

PÈRE UBU

Ji tou tue au moyen du croc à merdre et ducouteau à figure.

MÈRE UBU

Comme il est beau avec son casque et sacuirasse, on dirait une citrouille armée.

PÈRE UBU

Ah ! maintenant je vais monter à cheval.Amenez, messieurs, le cheval à phynances.

MÈRE UBU

Père Ubu, ton cheval ne saurait plus teporter, il n’a rien mangé depuis cinq jours et est presquemort.

PÈRE UBU

Elle est bonne celle-là ! On me faitpayer 12 sous par jour pour cette rosse et elle ne me peut porter.Vous vous fichez, corne d’Ubu, ou bien si vous me volez ?(La Mère Ubu rougit et baisse les yeux.) Alors,que l’on m’apporte une autre bête, mais je n’irai pas à pied,cornegidouille !

On amène un énorme cheval.

PÈRE UBU

Je vais monter dessus. Oh ! assisplutôt ! car je vais tomber. (Le cheval part.)Ah ! arrêtez ma bête. Grand Dieu, je vais tomber et êtremort ! ! !

MÈRE UBU

Il est vraiment imbécile. Ah ! le voilàrelevé. Mais il est tombé par terre.

PÈRE UBU

Corne physique, je suis à moitié mort !Mais c’est égal, je pars en guerre et je tuerai tout le monde. Gareà qui ne marchera pas droit. Ji lon mets dans ma poche avec torsiondu nez et des dents et extraction de la langue.

MÈRE UBU

Bonne chance, monsieur Ubu.

PÈRE UBU

J’oubliais de te dire que je te confie larégence.

Mais j’ai sur moi le livre des finances,tant pis pour toi si tu me voles. Je te laisse pour t’aider lePalotin Giron. Adieu, Mère Ubu.

MÈRE UBU

Adieu, Père Ubu. Tue bien le czar.

PÈRE UBU

Pour sûr. Torsion du nez et des dents,extraction de la langue et enfoncement du petit bout de bois dansles oneilles.

L’armée s’éloigne au bruit des fanfares.

MÈRE UBU, seule.

Maintenant, que ce gros pantin est parti,tâchons de faire nos affaires, tuer Bougrelas et nous emparer dutrésor.

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