Un habitant de la planète Mars

LETTRE XIV

Défiez-vous des journaux. – Grande rumeur àPaxton-House. – Qui préside la nuit à la place de M. Newbold.– Salamec à la tribune. – Les infusoires de Mars. – Ou nousressuscitons sur terre les animaux des autres mondes. –M. Wintow doit rêver. – Sensation. – M. G. Mitchell, deFrancfort. – La clef de la plaque. – On retrouve la montagne deM. Owergth. – Ce que c’est que l’habitant de Mars. – Un tourde scrutin. – Générosité des Américains. – Bonne nouvelle. –L’habitant de Mars arrive en France. –Conclusion.

Les débats devaient se clore par unedécouverte nouvelle et une confirmation éclatante des vuesthéoriques émises dans cette enceinte.

Il ne s’agit pas, bien entendu, des bruitsabsurdes qui arriveront peut-être jusqu’à vous avant malettre ; et qui ont pris leur source dans une aventure assezplaisante.

Il y a cinq ou six jours, au moment où toutPaxton-House sommeillait du plus profond sommeil ; oùM. Newbold ronflait aussi fort que le vent d’ouest dans lesplanches des habitations, – je suis son voisin de chambre ; –on entendit tout à coup un grand bruit en bas ; les vitresvolèrent en éclats ; tous les chiens aboyèrent et une flammerouge illumina les bâtiments récemment construits.

On crut à une attaque et chacun fut vite surpied.

Je descendis l’un des premiers, et je ne visabsolument rien d’insolite, à mon grand étonnement, sauf un grandfeu qui flambait à la porte de la salle des séances, et quienvoyait une réverbération sinistre sur les arbres et leshabitations.

« Qu’est-ce donc ? » fis-je àM. Paxton.

Les chiens jappaient de plus en plus fort, ense jetant avec fureur sur la porte d’entrée de la salle desséances.

« Voici sans doute un indice qui nousaidera, » me répondit-il, et, en même temps, il pénétra dansla salle, distribuant des coups de pied à droite et à gauche pourécarter les chiens.

Nous le suivîmes. Tout paraissait en ordre, etle silence le plus complet régnait dans la pièce. Nous allionssortir, quand un cri rauque se fit entendre dernière nous.

En même temps, M. Paxton tirait sonrevolver de la ceinture et faisait volte-face.

Nous n’avions pas été assez loin la premièrefois. Nous revînmes comme lui sur nos pas.

Près du bureau, là où se mettaitM. Newbold, siégeait majestueusement un être noir, petit, toutcourbé, qui, à la lueur des torches, grimaçait affreusement ;il s’escrimait de toutes manières, allongeait ses grands bras,tordait son torse, secouait sa tête avec une vivacité inconcevable.Ce personnage fantastique imitait évidemment le présidentNewbold.

Nous étions stupéfaits.

En face du bureau, la momie avait disparu. Lecercueil placé presque verticalement dans la journée était jeté àterre sens dessus dessous.

C’était à n’y plus rien concevoir !quoi ! la momie s’était-elle réveillée ? Avions-nous làdevant les yeux l’habitant de Mars ressuscité ? Qu’allaientdire les académies ; tombé de Mars, ressuscité surterre !

Le personnage n’en continuait pas moins degesticuler avec fureur et de nous toiser avec dédain. Les torchesne l’étonnaient que médiocrement, et c’est tout au plus s’iladressait de préférence, de notre côté, sa singulière mimique.

Je le vois toujours dans lademi-obscurité ; ses yeux brillaient comme des escarboucles.Nous étions bien loin des cavités sombres de la momie !

Notre erreur ne devait pas être de longuedurée. Le prétendu habitant de Mars en nous voyant toujoursavancer, fit tout à coup un bond de plusieurs mètres, en poussantun nouveau cri plus strident que le premier, et il sauta sans façonsur la table des secrétaires en bousculant la sonnette deM. Newbold, qui se mit à carillonner sans pudeur, malgrél’heure avancée.

M. Paxton avait remis son revolver à laceinture et riait aux éclats.

L’habitant de Mars, c’était un grand singequ’il affectionnait tout particulièrement, et qu’il avait lamauvaise habitude d’emmener toujours avec lui.

Salamec avait vu M. Newbold et sescollègues s’agiter depuis le commencement des débats à travers lesvitres de la salle, et il s’était bien promis à son tour deprésider l’assemblée.

Il cassa un ou deux carreaux, renversaplusieurs banquettes, fit rouler par terre la plaque de l’aérolitheet la tombe fossilifiée, et s’installa, au milieu de ce tintamarre,à la place du président, réclamant, sans doute, le plus profondsilence.

Quant au feu, il est probable que, parimitation, il voulut que la fête fût complète et fit un grandbrasier au milieu de la cour. Le matin, en effet, les ouvriersavaient brûlé de place en place de vieilles herbes sèches, quiencombraient les abords de l’habitation.

Comment Salamec alluma-t-il les herbes, c’estla seule chose que nous n’ayons pu savoir et qui ne fut pas sanspréoccuper beaucoup son propriétaire. Il est, en effet, à craindreque, à ce compte, il ne prenne quelque jour fantaisie à Salamecd’incendier tout simplement Paxton-House et ses dépendances.

L’aventure a circulé. Comme toujours, elle aété amplifiée ; le merveilleux s’en est mêlé, et le journald’Indianopolis affirmait naïvement à ses lecteurs, qu’au beaumilieu des débats, la momie s’était subitement réveillée à lagrande stupeur de l’assemblée. Tous les cancans de la ville furentdéfrayés par cette nouvelle inattendue. On assurait que, à sontour, elle s’était dressée devant le président et qu’elle avaitréclamé la parole. La moitié des membres de la commission auraientgagné la porte.

On vous écrira quelque jour que la momieelle-même vient de partir par le dernier Steam-packet et qu’elledébarquera à Saint-Nazaire. Ici, comme chez vous, le public a sesfaiblesses et les faiblesses ont leur public.

Trêve de plaisanterie. La dernière séance a eulieu aujourd’hui et, je le répète, elle a levé tous les doutesqu’il eût été possible d’avoir encore sur l’origine de l’habitantinterplanétaire.

MM. Paxton et Davis ont fait arrêter lestravaux, l’aérolithe est presque entièrement percé et on n’y a rientrouvé d’intéressant. Cependant M. Wintow a signalé un faittrès-curieux.

M. WINTOW. Messieurs, dit il, nous avonsextrait, M. Rink et moi, de quelques fragments de l’aérolithe,des organismes inférieurs parfaitement caractérisés. Il y a mieux,ces petits êtres, extrêmement ténus et conservés dans lesinterstices de la roche, là où la chaleur n’a pas dû êtreextrêmement élevée, se rapprochent beaucoup de nos infusoires. Lesvoici, messieurs, chacun pourra les observer à loisir.

Je répéterai même une expérience saisissante,que nous avons faite hier avec plein succès et qui assurémentintéressera bien vivement M. Ziegler. – J’humecte avec un peud’eau tiède ces organismes évidemment inertes et immobiles. –Voyez, messieurs : les voici qui, peu à peu, remuent,s’agitent et reviennent à la vie, absolument comme ces petitsinfusoires, les tardigrades et les rotifères, qui habitent lesgouttières de nos toits, meurent et ressuscitent, suivant que lesoleil les dessèche ou que la pluie les mouille. Ici, je suis bienforcé de penser avec M. Ziegler, que c’est bien réellement unecertaine quantité le mouvement qui manquait à ces organismes pourrevenir en vie. L’eau la leur a rendue dans les conditions voulues,et l’organisme a repris ses fonctions.

Ceci tend encore à mettre en évidence que lavie dans les planètes a bien les mêmes causes partout, et quepartout les évolutions de la matière restent les mêmes.

En terminant, messieurs, ai-je besoin de faireobserver que voici là, devant vos yeux, des êtres qui sont endormisdepuis des milliers d’années, qui nous arrivent d’une autre planèteque la nôtre et que nous voyons encore ressusciter et vivreabsolument, comme si nous-mêmes nous avions pu aller les examinersur place et explorer leurs demeures primitives. Qui aurait oséavancer que nous posséderions jamais sur terre des êtres empruntésà une planète voisine ?

M. STEK. Nous les enverrons à notresociété d’acclimatation.

M. NEWBOLD. Je vais clore, messieurs, ladiscussion ; mais je dois donner avant la parole à M. G.Mitchell qui a des détails extrêmement importants à nouscommuniquer.

(Bruit ! conversationsparticulières.)

La sonnette s’agite, le silence serétablit.

M. G. MITCHELL, anatomiste distingué deFrancfort, bon orateur, mais voix de fausset. – Messieurs, je megarderais bien de vous retenir plus longtemps ici, si je n’avaisété assez heureux, avec l’aide de mon excellent confrère et ami,M. Sieman, pour découvrir des preuves irrécusables del’origine ultra planétaire de la momie, et si je ne pouvais ainsicouronner l’édifice que vous avez si sagement et si habilementélevé.

Messieurs, l’aérolithe est bien réellementtombé de Mars, et nous avons sous les yeux un véritable homme decette planète. Pas un de vous ne sortira de cette enceinte, jel’espère, sans en être intimement convaincu.

Ce que les théories si claires et siremarquables de mes illustres collègues permettaient de préjuger,je viens, messieurs, vous en apporter une preuve matérielle,indélébile.

(Sensation ! mouvement ! grandsilence !) Déjà, plusieurs d’entre nous avaient examinésoigneusement la plaque d’argent qui recouvrait le tombeau. Ilsemblait que l’on dût y trouver le secret de cet envoyé des autresmondes. On ne s’était pas trompé, messieurs.

M. Sieman a bien voulu, hier, étudieravec moi les lignes bizarres qui sillonnent la surface métallique.De prime abord, les astres dessinés avec leurs distancesrespectives, le Soleil, Mercure, etc., fixent en effet l’attention.Puis, en haut, ces sortes de palmiers et de rhinocéros nepermettent pas de ne pas songer à tout un monde, et à un monde quin’est pas le nôtre.

Un des premiers arguments que l’on a faitvaloir en faveur de Mars, vous le savez, c’est le gros volume quecette planète a sur le dessin de la plaque. On a invoqué l’orgueildu clocher. Qui, malgré soi, ne voit pas d’un œil complaisant sapatrie ?

Et pour toute intelligence inférieure, est-ceque la grosseur, l’étendue, ne sont pas un caractère desupériorité ?

Il est certain que le raisonnement n’est passans valeur, mais il n’est qu’hypothétique. J’ai deux remarques àfaire qui vont, je crois, le confirmer assez pour trancher laquestion.

Au-dessous et plus à gauche des globesplanétaires, que vous distinguez sans doute d’ici, examinezattentivement ces deux groupes. Voici quatre ronds noirs. En facevoici deux ronds noirs.

Or, au milieu de l’espace réservé entre lesdeux groupes, s’aperçoit très-nettement un cercle au moins dix foisplus gros relativement ; à l’intérieur se déchiffre une sériede lignes contournées d’une manière assez régulière.

Le premier groupe représente, sans aucundoute, le Soleil, puis Mercure, Vénus, la Terre, toutes planètesdécrivant leurs trajectoires autour du Soleil, en deçà de Mars. Lesecond groupe représente Jupiter et Saturne, planètes tournantautour du soleil au delà de Mars. – Enfin, au centre et tout à faità part, la planète Mars elle-même ! – Pourquoi, cette fois,cette double désignation ? Pourquoi aussi bien classer ce que,sur terre, nous appelons les planètes inférieures et les planètessupérieures ?

Il est incontestable que ce groupement en deuxséries n’a pu être fait que par un habitant de Mars. Si l’êtreintelligent qui a dessiné ces figures eût habité Vénus, parexemple, il eût classé les astres ainsi : le Soleil, Mercure,puis la Terre, Mars, Jupiter, Saturne. Je ne crois pas que qui quece soit puisse refuser de voir la lumière jaillir de cette simpledistribution des planètes suivant leurs distances à Marslui-même.

L’astronome de Mars aura rapporté le centre dusystème du monde à la planète qu’il habitait, absolument comme àl’origine les astronomes terrestres le rapportaient à la terre.Ceci justifie d’ailleurs le volume excessif du dessin de Mars.

Enfin, les caractères tracés au centre dugrand cercle, figurant la planète Mars, la désignent sans doutecomme le pivot du système.

Du reste, il y a mieux, messieurs, je disaisque le doute n’était pas possible ! voyez vous-mêmes.M. Sieman a distingué tout autour du disque central, quisépare les deux groupes, un grand cercle effacé en majeure partie,puis un second, puis un troisième très-net, et enfin un quatrièmerecouvert à moitié par des lignes bizarres et dont la significationnous échappe. Ne faut-il pas voir dans ces cercles les orbites desplanètes ? Très-certainement, l’astronome de Mars croyait quele soleil et tous les autres astres tournaient autour de lui.

J’ai dit que j’étais en mesure de montrerl’étonnante précision des déductions de la théorie. Écoutez doncencore.

Il y a mieux que tout ce qui précède.M. Owerght prétend que la momie a été arrachée au sommet d’unemontagne par un bolide dévié de sa route. M. Owerght araison.

M. Sieman, en lavant la plaque avec del’acide azotique, a fait apparaître, à notre grand étonnement, deslignes très-peu accentuées que l’on peut suivre cependant aumicroscope. Elles ont un grand développement et occupent la plusgrande partie de la plaque. Nous en avons fait une reproduction surgrande échelle que nous plaçons sous vos yeux.

Il est impossible, en suivant cette ligne, dene pas reconnaître les contours très-vagues d’une véritablemontagne. Deux aiguilles assez nettes la surmontent encore vers ladroite et lui donnent une grande hauteur. La ligne se perd enserpentant vers la gauche, où elle est d’ailleurs cachée par unpalmier. N’est-ce pas là, messieurs, le massif montagneux prévu parle raisonnement scientifique ?

Il y a mieux encore ; suivez lesescarpements de cette ligne tourmentée, puis redescendezbrusquement suivant la verticale, qui n’admirera l’étonnanteconcordance des faits et des conclusions déjà posées ?

Au bas de la plaque et vers son milieu sontgravés, et cette fois profondément, quatre traits formantrectangle, fixez-y votre attention.

M. Oupeau, le premier, a eu l’honneur derapprocher les lignes qui s’entre-croisent dans cette sorte degrimoire. Après deux lavages à l’eau acidulée, il nous a très-bienmontré l’image très-fine de la plaque elle-même, de cette plaqueque nous avons maintenant entre les mains.

Il y a mieux, mieux encore, messieurs, au bas,un peu au-dessous, on peut assez bien pressentir une forme qui doitêtre celle de la momie étendue dans son cercueil. Plus bas encoreet, cette fois, en dehors du rectangle, se distinguent parfaitementune série de traits rapprochés, incompréhensibles pour nous, maisqui sont certainement des lettres et doivent former des mots.

Enfin, au-dessous, mais à moitié effacés, onpeut, avec de la bonne volonté, reconnaître plusieurs momiesanalogues au spécimen qui est tombé sur terre, et qui semblentcontempler le sommet de la montagne.

Que l’on ne croie pas que je me laisseentraîner par l’imagination ; chacun de vous, messieurs,pourra vérifier.

Je ne puis pas ne pas voir dans ces dessinsune représentation fidèle de la montagne. À la base, on auraencastré sans doute une grande plaque dans la roche représentant lecercueil et l’image du mort ; les caractères ne sont qu’uneinscription dont le sens malheureusement nous échappe complètement,et qui aura été placée là sans doute pour rappeler, aux générationsfutures, un nom désormais immortel.

Peut-être avons-nous maintenant à Paxton-Houseun grand roi dont la puissance aura étonné les populations de Mars.Peut-être, et nous inclinons à le croire, possédons-nous un desinitiateurs de l’astronomie de ce monde si ignoré pour nous. Dusommet de la montagne que vous voyez, le grand savant auradécouvert ce que l’on croyait être alors les véritables lois del’univers.

En tout cas, il est indubitable que la momieavait dans son pays une renommée éclatante et une influenceimmense ; peut-être même était-elle vénérée presque à l’égald’un demi-dieu, comme le feraient supposer les créatures quis’inclinent encore devant ses restes. On peut vraisemblablementmesurer l’importance du personnage à l’importance de sasépulture.

On l’aura enseveli bien loin des autresmortels de Mars, au sommet de la montagne, de façon à ce qu’ildomine ses semblables après sa mort de toute la hauteur dont il lesavait dominés pendant sa vie.

Messieurs, qui sait qui nous possédons là,devant nous et quelle gloire d’une autre époque et d’un autre mondenous contemplons depuis la découverte de M. Paxton ?

Qui sait si, en ce moment même, et pendant quenous sommes tous réunis dans cette enceinte, là-bas, les savants deMars, de leur côté, ne discutent pas sur l’étrange disparition dela plus grande illustration des temps anciens ? – Car la basede la montagne doit subsister, et avec elle la plaquecommémorative. – Et à moins qu’une tradition ait révélé l’événementdont le pays a été le théâtre, on doit se perdre en conjectures surl’existence problématique d’un sépulcre dont on ne rencontre plusaucune trace. Les archéologues de Mars ont dû passer plus d’unenuit blanche sur ces vestiges incomplets d’un autre âge, sur cessinguliers restes des premiers hommes de la planète.

N’est-il pas singulier qu’il soit précisémentdonné aux habitants de la Terre de trouver avant ceux de Mars,peut-être, la clef de l’énigme, et de posséder en tout cas lapreuve irrécusable d’un fait historique qui leur échappera à toutjamais ?

Il reste aux savants de Mars la base de lamontagne : mais il nous reste à nous, la reproduction fidèlede la montagne entière, le sépulcre et le mort. Nous savons, mieuxqu’eux, ce qui s’est passé chez eux, et nous possédons désormais untype extrêmement bien conservé de leurs premiers hommes ! Ilest bien vrai le dicton : on n’est pas toujours prophète enson pays.

Messieurs, il était donné à notre siècle et aunouveau monde de devenir le berceau de la plus grande découvertescientifique des temps passés et présents.

Je m’incline devant la destinée, et jeremercie Dieu de nous avoir choisis, nous ses humbles créatures,pour apprendre au monde terrestre, que nous ne sommes pas isolésdans l’espace et que chaque astre qui brille au ciel est unenouvelle oasis de vie et d’éternelle création.

(Bruyants applaudissements. – On se presseautour de M. G. Mitchell.)

M. NEWBOLD agitant la sonnette.Messieurs, personne n’a rien à ajouter à l’intéressantecommunication que vous venez d’entendre ? (Silence.)

Je vais donc en deux mots résumer le débat etpasser au vote de l’assemblée.

Il résulte des considérations géologiquesdéveloppées par nos illustres confrères, que l’aérolithe découvertpar MM. Paxton et Davis ne peut avoir une origineterrestre.

Il résulte des arguments invoqués parM. Greenwight, qu’un être de la nature de celui qui nous estparvenu sur terre, n’a pu provenir que d’une seule planète,Mars.

M. Ziegler par son bel examen desconditions de l’existence dans chaque astre ; M. Owerghtpar son argumentation sur le transport de la matière dans l’espace,nous permettent de ne pas considérer comme impossible la chute d’unêtre d’un monde dans un autre.

Enfin, l’interprétation, si inattendue et siremarquable, que M. G. Mitchell vient de tirer de l’examen dela plaque avec MM. Sieman et Oupeau donne une confirmationcomplète des vues théoriques émises dans cette enceinte.

Telles sont les conséquences auxquelles nousconduit pas à pas la logique des faits.

Il me reste à soumettre à l’assemblée cetteconclusion :

Oui, la créature découverte par M. Paxtonvient bien de la planète Mars.

On fait passer l’urne et la conclusion estadoptée. – Il y a un billet blanc.

M. NEWBOLD. Vous venez d’entendre,messieurs, la décision de l’assemblée ; notre œuvre est doncterminée. Les doutes ont disparu et nous n’avons plus qu’à espérerla confirmation de nos recherches par le monde savant tout entier.Les procès-verbaux de nos séances seront distribués aux académiesdu nouveau et de l’ancien monde.

Il me reste, pour ma part, à remercier mesillustres collègues de la constante attention qu’ils ont bien voulunous prêter, de leur concours assidu, qui m’a rendu ma tâche sifacile. J’emporterai d’ici un souvenir qui ne s’effacerajamais.

MM. Paxton m’ont prié de vous exprimertoute leur gratitude et de faire agréer à chacun de vous, avantnotre séparation, cette médaille commémorative. Elle porte d’uncôté la reproduction fidèle de l’habitant de Mars, de l’autre ladate de nos réunions. Chacune d’elles restera pour la postéritécomme un témoignage irrécusable des débats et du jugement de laCommission américaine.

Enfin, messieurs, la sanction des grands corpssavants européens est pour nous d’une haute valeur.

Il faut que les petites rivalités de parti,les mesquines préoccupations d’amour-propre et de nationalité,tombent devant le respect de la vérité et l’amour de lascience.

Aussi, MM. Paxton sont résolus à faire lesacrifice de leur découverte et à envoyer en Europe les restes del’habitant de Mars.

Il importe que les doutes ne puissent surgirnulle part et que les centres les plus éclairés de l’ancien mondeaient des preuves matérielles qui leur permettent de contrôler nosassertions.

L’Amérique conservera l’aérolithe, lesamphores et les bâtons métalliques. L’Europe possédera la momie etla plaque.

C’est avec fierté, nous l’avouons, que surl’envoi de la Commission nous pourrons inscrire ce témoignage denotre libéralité et de notre dévouement à la science :

LE NOUVEAU MONDE À L’ANCIEN MONDE.

Bruyants applaudissements. – On féliciteM. Paxton.

M. NEWBOLD. Messieurs, l’Institut deFrance et la Société Royale de Londres nous ont paru dignes à touségards, par le haut crédit dont ils jouissent, par leurincontestable autorité, de devenir les dépositaires des restes simiraculeusement découverts dans le sol américain.

À l’Angleterre, donc, la plaque et les dessinssi probants ! à la France, le berceau du goût, des arts et desbelles lettres, l’habitant de Mars ! (Tonnerred’applaudissements.) – (Hourras prolongés.)

Cette adhésion unanime, messieurs et cherscollègues, sera pour MM. Paxton la plus belle récompense deleur générosité ; elle deviendra pour nous-mêmes une nouvelleet glorieuse page à ajouter à nos annales scientifiques.

Nous avons fait notre devoir, et nous pouvonsattendre avec confiance le jugement de la postérité !…

Postscriptum. – Presque tous lesmembres de la Commission partent demain matin. On prépare lestransports, – je les suivrai de près.

Il m’était réservé une bien agréable surpriseque je tiens à vous apprendre avant de clore cette lettre. C’est àmoi que revient l’honneur d’aller en Europe offrir à votre Académiedes sciences l’homme interplanétaire. J’ai déjà en mains lespouvoirs et les instructions de MM. Newbold et Paxton.

Je pourrai donc très-prochainement vousremercier moi-même de la publicité que vous avez bien vouluaccorder à nos débats. Je vous réserve la primeur de notredécouverte. Le premier, vous verrez l’habitant de Mars.

J’arriverai, j’espère, au plus tard vers lesderniers jours de décembre. À bientôt donc, avec mon précieuxbagage.

Paxton-House, 27 septembre.

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