V
La femme s’abattit comme un ressort quicasse ;
Lui, resta sans comprendre et l’attendit,debout,
Inquiet, la croyant seulement un peulasse,
Car sa robe tremblait toujours. Puis tout àcoup
L’épouvante lui vint ainsi qu’unebourrasque.
Il se pencha, lui prit les bras, et d’uneffort
Terrible, il la leva, quoiqu’il fût très peufort.
Mais tout son pauvre corps pendait, sinistreet flasque
Il vit qu’elle étouffait et qu’elle allaitmourir,
Et pour chercher de l’aide il se mit àcourir
Avec de petits bonds effrayants etgrotesques,
Décrivant, sans la main qui lui servaitd’appui,
Au galop saccadé par son bâton conduit,
Des chemins compliqués comme desarabesques.
Son souffle était rapide et dur comme unetoux.
Mais il sentit fléchir sa jambevacillante,
Si molle qu’il semblait danser sur sesgenoux.
Il heurtait aux troncs noirs sa coursesautillante,
Et les arbres jouaient avec lui, lepoussant,
Le rejetant de l’un à l’autre etparaissant
S’amuser lâchement avec cette agonie.
Il comprit que la lutte horrible étaitfinie,
Et, comme un naufragé qui se noie, il jeta
Un petit cri plaintif en tombant sur laface.
Faible gémissement qu’aucun ventn’emporta !
Il entendit encor, quelque part dansl’espace,
Les longs croassements lugubres d’uncorbeau
Mêlés aux sons lointains d’une clochecassée.
Et puis tout bruit cessa. L’ombre épaisse etglacée
S’appesantit sur eux, lourde comme untombeau.