Acte IV
Scène I
TITUS, ARONS, MESSALA.
TITUS.
Oui, j’y suis résolu, partez; c’est trop attendre;
Honteux, désespéré, je ne veux rien entendre;
Laissez-moi ma vertu, laissez-moi mes malheurs.
Fort contre vos raisons, faible contre ses pleurs,
Je ne la verrai plus. Ma fermeté trahie
Craint moins tous vos tyrans qu’un regard de Tullie.
Je ne la verrai plus! oui, qu’elle parte… Ah, dieux!
ARONS.
Pour vos intérêts seuls arrêté dans ces lieux,
J’ai bientôt passé l’heure avec peine accordée
Que vous-même, seigneur, vous m’aviez demandée.
TITUS.
Moi, je l’ai demandée!
ARONS.
Hélas! que pour vous deux
J’attendais en secret un destin plus heureux!
J’espérais couronner des ardeurs si parfaites;
Il n’y faut plus penser.
TITUS.
Ah! cruel que vous êtes;
Vous avez vu ma honte et mon abaissement;
Vous avez vu Titus balancer un moment.
Allez adroit témoin de mes lâches tendresses,
Allez à vos deux rois annoncer mes faiblesses;
Contez à ces tyrans terrassés par mes coups
Que le fils de Brutus a pleuré devant vous.
Mais ajoutez au moins que, parmi tant de larmes,
Malgré vous et Tullie, et ses pleurs et ses charmes,
Vainqueur encor de moi, libre, et toujours Romain,
Je ne suis point soumis par le sang de Tarquin;
Que rien ne me surmonte, et que je jure encore
Une guerre éternelle à ce sang que j’adore.
ARONS.
J’excuse la douleur où vos sens sont plongés;
Je respecte en partant vos tristes préjugés.
Loin de vous accabler, avec vous je soupire:
Elle en mourra, c’est tout ce que je peux vous dire.
Adieu, seigneur.
MESSALA.
O ciel!