La Louve – Tome I

Chapitre 3LE CIERGE DE LA SAINT-JEAN

On disait en manière de proverbe, aux États deBretagne : « Hardi comme Cheffontaines, fier comme Rieux,beau comme Rohan. »

Gui III, comte de Rohan-Polduc, avaitalors plus de soixante ans ; bien des malheurs avaienttraversé sa longue vie ; mais il portait merveilleusement savieillesse, et, sans la barbe blanche qui bouclait sur sa poitrine,vous l’eussiez pris pour un homme dans la force de l’âge.

Il était de haute taille et sa figure avaitcette régularité parfaite qui était comme un privilége de sarace ; le costume de chasse qu’il avait revêtu ce matinfaisait ressortir le mâle dessin de ses membres. À Rennes, ni àNantes, pas un tueur de loups n’eût porté mieux que lui la jaquettetailladée, la culotte de cuir et les bottes fortes armées d’éperonsd’acier.

Encore, pour l’admirer à son avantage,fallait-il le voir à cheval. À Nantes, à Rennes, voire à la Cour deParis, cette huitième merveille du monde, vous eussiez cherché envain un cavalier de sa valeur.

Il descendit les degrés lentement et d’un airpensif. Il avait, au lieu d’épée, un coutelas dans sa gaine ettenait son fouet à la main ; son visage semblait pâli entreles boucles de ses longs cheveux blancs et les touffes neigeuses desa barbe ; il n’avait point encore levé les yeux. Dans lasalle, on n’entendait plus que le bruit des respirationscontenues.

Sur l’avant-dernière marche, Rohan s’arrêta etson regard parcourut la foule, respectueusement inclinée.

– Bonjour, bonnes gens, dit-il ;j’ai entendu que vous m’appeliez, et me voilà ; que mevoulez-vous ?

La foule s’agita au lieu de répondre ;personne n’osait plus.

– Eh bien ! reprit Rohan avec unsourire triste, est-ce que je vous fais peur ?

– Ils savent bien qu’ils sont dans leurtort, dit de loin Alain Polduc, qui était debout et découvertau-devant de sa table.

Yaumy, le joli sabotier, avait réussi à seglisser derrière lui, et lui parlait depuis un instant déjà.

– Grâce ! grâce ! firentquelques voix timides.

Les fillettes agitèrent leurs bouquets, dontl’amer et doux parfum emplissait la salle ; les ménagèresétendirent leurs mains suppliantes et répétèrent :« Grâce ! grâce ! » tandis que les hommesrestaient immobiles et tête baissée au second plan.

– Comme notre monsieur est pâle !murmura le vieux Jouachin à l’oreille de dame Michon, sa commère.Je ne lui ai jamais vu cette flamme sombre dans le regard.

– Cet homme-là était auprès de son lit àson réveil, répliqua la bonne femme en tournant la tête à demi versmaître Alain Polduc.

Elle sortit des rangs et vint mettre le piedsur la première marche, se tenant ainsi debout, et la tête haute,en face du vieux seigneur.

– Grâce ! répéta-t-elle avec dédain.Pourquoi grâce ? demandez justice, et Rohan vous écoutera. Iln’y a que moi pour savoir parler à mon maître… Rohan ! veux-tuque tes vassaux aillent demander l’aumône de porte en porte ?le veux-tu ?

Le comte fronça le sourcil.

– Cette femme est folle ! s’écriamaître Alain.

– Veux-tu qu’on dise partout, continuadame Michon, que Rohan a pris le dernier morceau de pain à sesserviteurs ?

– Non, répliqua le comte, je ne veux pascela, bonne femme ; mais de quoi se plaignent-ils ?

– Parbleu ! grommela maître Alain enhaussant les épaules, pour peu qu’on les écoute, ils se plaindronttoujours !

– Ils se plaignent de vous, Rohan, moncher seigneur, répliqua la femme de charge, qui prit la main ducomte pour la baiser. Ils sont pauvres ; leurs loges tombenten ruines, leur foyer froid ne fume plus… Ils sont si pauvresqu’ils n’ont plus de quoi allumer le cierge bénit de laSaint-Jean !

– On s’est mis en chasse aux fonds de laSangle, disait en ce moment le cousin Yaumy, qui parlait bastoujours à l’oreille d’Alain Polduc. Le comte de Toulouse déjeûnechez Feydeau, l’intendant royal, et il y a des tentes dressées à lacroix de Mi-Forêt pour la dînée.

– Tout beau, Miraut ! criaient lespiqueurs dans la cour. Bellement, Géraut, mon fillot !

Rohan était du prêche, pour le malheur de sonâme, mais il n’en savait pas long en fait de dogme, et il aimaitles vieilles coutumes de Bretagne. Il passa le revers de sa mainsur son front. Tous les yeux s’étaient relevés sur lui avecanxiété, et chacun pouvait voir qu’il y avait en effet dans saprunelle un rayonnement étrange ; la fièvre sans doute, carRohan n’était pas de ceux qui s’animent au coup de l’étrier.

– Es-tu là, Josselin Guitan ?demanda-t-il tout à coup.

– Je suis là, notre monsieur, répondit lejeune homme.

Rohan étendit son fouet vers la table etmontra les sacs d’argent amoncelés.

– Fais deux parts de cela,ordonna-t-il ; deux parts égales.

Alain Polduc n’avait pas entendu, tant ilécoutait de bon cœur les paroles du cousin Yaumy. Celui-cipoursuivait disant :

– Il n’y a plus besoin de chercher, j’aitrouvé. J’ai vu Morvan de Saint-Maugon comme je vous vois. Il étaitentre minuit et une heure du matin ; la porte qui donne là-bassur les douves s’est ouverte et le cheval de Morvan est resté dansl’oseraie.

– Saint-Maugon est gentilhomme du comtede Toulouse, murmura Polduc : on ne peut savoir s’il venaitpour lui ou pour son maître.

– Cette nuit, j’ai rencontré JosselinGuitan qui courait au grand galop sur la route de Rennes. Le comtede Toulouse était à Rennes hier, et Josselin Guitan obéit à lademoiselle comme un esclave.

– Et tu es sûr qu’elle est sortie cematin par la poterne de l’Ouest ?

– Sûr ! comme je suis sûr que lemême Josselin Guitan m’a mis son couteau sous la gorge enm’ordonnant d’être muet… Mais je brave tout pour vous servir, monbon maître.

– Veille toujours et compte sur moi.

En se retournant, maître Alain vit JosselinGuitan qui séparait en deux portions l’argent des fermages. Ilregarda autour de lui ; l’espoir brillait sur tous lesvisages ; il devina.

– Mon noble cousin, dit-il en serapprochant de Rohan, Dieu sait où nous trouverons, la saison quivient, ce qu’il faut pour payer nos dettes.

– Je sais que je suis à présent un bienpetit gentilhomme, répondit le vieux comte qui semblait dominé parune préoccupation profonde. Il y a plus d’un jour d’ici la saisonprochaine. Qui vivra verra.

– Vos revenus sont tellementdiminués…

– Nous vendrons un moulin, une ferme, unclos… Je n’ai pas d’héritier.

Un sourire glissa sur la grosse lèvred’Alain-Polduc, qui pensait à part lui :

– Je vous en tiens un tout prêt, monnoble cousin !

Rohan continuait.

– Valentine, ma fille, épousera ungentilhomme paysan qui ne lui demandera rien outre sa sagesse et sabeauté.

– Et le nom de Rohan-Polduc s’éteindrasans éclat… commença maître Alain qui cherchait l’endroit sensiblepour enfoncer le dard dans ce cœur engourdi.

Rohan lui saisit le bras et baissa les yeux,comme s’il eût voulu cacher l’éclair qu’il sentait jaillir de saprunelle.

– Aimes-tu entendre le tonnerre ?demanda-t-il brusquement.

Puis il ajouta, en tâchant desourire :

– Le ciel de Bretagne doit bien un coupde foudre à notre dernière heure, mon cousin. J’ai fait un rêve oùj’ai vu le roi Louis pâlir sur son trône en écoutant le derniersoupir de Rohan !

 

– Voilà bien des jours, disait cependantdame Michon à son compère Jouachin, que notre monsieur n’est plusle même. Son œil est fixe, sa prunelle brûle. Il y a quelqueterrible pensée dans l’esprit de Rohan !

– Que Dieu le garde surtout, murmura levieux métayer, de s’attaquer aux gens de France !

L’attention du gros des tenanciers était toutentière à Josselin Guitan, qui achevait de séparer en deux partségales l’argent des fermages. Maître Alain comprenait que touteobjection était désormais impossible, mais il pensait :« Les actes d’un fou sont nuls et de nul effet devant laloi. »

– Voyez ! reprit il en changeant deton et de batteries, j’allais oublier une chose qui a bien sonimportance aujourd’hui. N’ai-je point entendu dire que mon noblecousin avait fait faire le bois pour sa chasse, jusqu’à la croix deMi-Forêt ?

– Les brisées font le tour de la croix,suivant rapport de mon veneur, répliqua le vieillard.

– Il y a de ce côté-là d’autres brisées,dit maître Alain, sur lesquelles il ne faut plus marcher. Vouspourriez rencontrer à la Mi-Forêt des gens avec qui vous ne frayezpoint : notre voisin Feydeau, l’intendant royal, votre beauneveu, Morvan de Saint-Maugon et monseigneur le gouverneurlui-même.

– Toulouse sur mon domaine !s’écria, Rohan, dont la figure pâle se couvrit de rougeur.

– À la date d’hier, 22 juin 1705,répartit maître Alain doucereusement, la futaie de Mi-Forêt, monnoble cousin, ne fait plus partie de votre domaine.

– Vendue ! murmura Rohan dont lalèvre trembla ; c’est vrai ! chaque jour le cercle serétrécit autour de ma maison qui chancelle ! Des fenêtres demon manoir je verrai bientôt passer leur meute sous le couvert…Pourquoi Rohan vivrait-il quand la Bretagne est décédée ? Dieufait bien ce qu’il fait ; Rohan n’a pas d’héritier !

– Voici deux parts de dix-sept mille cinqcents livres chacune, dit Josselin Guitan, qui avait achevé sabesogne.

Maître Alain détourna la tête pour ne pointvoir. Le front du vieux comte se redressa.

– Il y a moitié pour moi, dit-il, moitiépour mes tenanciers dans le malheur. Je veux que vous vouspartagiez ceci, bonnes gens, et qu’il ne vous soit plus parlé durestant de votre dette.

– Béni soyez-vous, Rohan, notreseigneur ! s’écria-t-on de toutes parts ; que Dieu et laVierge protègent la maison de Rohan !

– Dieu, c’est bien, dit Rohan, ne parlezpas de madame la Vierge.

– Ah ! ah ! fit Michon, quiavait les larmes aux yeux, je parle à la Vierge malgré toi et pourtoi ! tu es bon comme ton père, monseigneur ! puisse tafille être heureuse, maintenant que tu n’as plus de fils !

Le vieux comte sembla un instant ranimé parces acclamations cordiales.

– Voilà que vous avez de quoi acheter deschandelles de cire, mes enfants, dit-il. Voyons ! ferons-nousune belle Saint-Jean cette année ? Où donc estValentine ? N’a-t-elle point préparé le cierge de Rohan, lecierge gros comme un arbre ? Il y avait du bon dans la vieillechose.

– Le cierge est là, répondit dame Guitan,qui s’approcha d’une haute armoire située entre l’escalier et lacheminée, et tout est bon, mon maître, dans la Sainte-Église queservaient vos aïeux.

– Quant à notre demoiselle Valentine,glissa maître Alain, elle est sortie au point du jour, àcheval.

– À cheval ! répéta Rohan, au pointdu jour !…

– Voici le cierge, interrompit dameMichon, qui avait ouvert les deux battants de l’armoire.

Le cierge de Rohan avait seize pieds de haut,et le vieux comte n’avait point exagéré en disant qu’il était groscomme un arbre. Cette masse de cire parfumée était couverte dedécoupures, de rubans et de fleurs. C’est à peine si le vieux comtelui accorda un regard distrait.

– Pourquoi Valentine de Rohan nesortirait-elle pas au point du jour, à cheval ? en se parlantà lui-même. Dieu merci ! je ne soupçonne pas ma fille, qui estmon dernier amour sur la terre.

– Retournez chez vous, bonnes gens,ajouta-t-il en prenant le bras de maître Alain Polduc,réjouissez-vous, si vous avez le cœur à la joie, et dites enpassant qu’on rentre nos équipages de chasse. Nous voici revenus dubois.

 

La foule des vassaux s’éloigna lentement, nonsans prodiguer encore au généreux seigneur un trésor d’actions degrâces et de bénédictions. Rohan ne les écoutait plus et disait àmaître Alain en remontant, les marches du grand escalier :

– Dans le bois, à la croix de laMi-Forêt, il y a une image de sainte Anne, qui est la patronne desBretons ; la pelouse est unie et vaste…

– Unie comme un velours, interrompitmaître Alain ; si bien que le comte de Toulouse y pourra menerle bal après la collation.

Le vieux comte s’arrêta au seuil du salond’honneur.

– Que diraient-ils, mon cousin,demanda-t-il d’une voix sourde, si Rohan s’invitait à leurfête ?

Alain Polduc voulut répliquer ; le comtelui ferma la bouche d’un geste souverain.

– Et si Rohan paraissait au milieu d’eux,poursuivit-il, avec l’épée de Pierre de Bretagne sonaïeul ?

Il poussa la porte du salon d’honneur.Derrière lui, la figure de maître Alain s’éclaira tout à coupvivement.

– Est-ce que je touche au but déjà ?pensait-il ayant peine à contenir sa joie, et, vais-je dater ma vienouvelle, ma vie noble, riche heureuse, de ce bon jour de laSaint-Jean ?…

 

Dans la salle basse, Josselin Guitan et samère restaient seuls auprès du berceau où l’enfant dormait. Lesbruits du chenil et, de l’écurie se taisaient ; la dernièrecharrette avait quitté le pâtis. Josselin se pencha au-dessus duberceau et déposa un baiser sur le front de l’enfant. Quand il sereleva, il tendit sa main à la bonne femme, qui la serra dans lessiennes en silence. Ils restèrent un instant à se regarder.

– Je me souviens de la figure que tuavais l’an passé à pareille époque, Josselin, mon fils, murmuradame Michon ; tu es devenu maigre et bien pâle depuis cetemps-là. Il faut du sommeil aux jeunes gens. Qu’as-tu fait, lanuit dernière ?

– J’ai cherché, répondit Josselin, jen’ai pas trouvé. Puisse notre demoiselle être plus heureuse quemoi !

– Où donc est-elle allée ce matin ?demanda curieusement la bonne femme.

– C’est son secret, ma mère. Il y a dansla maison de Rohan un bon ange et un mauvais ange. La lutte estengagée entre eux. Moi, je fais ce que je peux pour le bonange.

Il se dirigea vers l’armoire au cierge etrépéta en baissant la voix :

– Je fais ce que je peux, mais je n’aiplus guère d’espoir !

– À quoi penses-tu donc, Josselin, monpauvre Josselin ? demanda la femme de charge, qui le vitdebout devant l’armoire dont il tenait les deux battantsouverts.

– Je pense, répliqua le jeune gars, queRohan est toujours Rohan ! Il faudra quatre hommes pour porterle cierge jusqu’à l’église.

– À la Saint-Jean dernière, soupira dameMichon, notre jeune monsieur César le porta bien tout seul.

Josselin repoussa violemment les deux battantsde l’armoire, qui se referma.

– Notre jeune maître César était plusfort que quatre hommes ! dit-il. Et meilleur !

La vieille Michon essuya une larme à ladérobée. Josselin vint s’asseoir au coin du foyer. Machinalement,il toucha du bout de son soulier ferré les deux tisons noircis quisemblaient étouffés sous la cendre et qui ne fumaient plus. Lacendre tomba ; le courant d’air se fit et la flamme caressagaiement le chaudron pendu à la crémaillère.

– Tu vois bien, fillot, dit la bonnefemme qui regardait cela en souriant à travers ses larmes, tantqu’il reste une étincelle, on peut ranimer le feu.

Josselin secoua la tête.

– Il n’y a qu’une fille dans ceberceau ! murmura-t-il avec accablement.

– Tu renonces donc à découvrir le fils denotre jeune maître ? demanda Michon Guitan.

Au lieu de répondre, Josselindemanda :

– Ma mère, savez, vous ce qu’on dit à laville ?

Dame Michon rapprocha vivement sonescabelle.

– À la ville, reprit Josselin, on dit quele roi a cassé l’édit qui protégeait les gens de la religion,l’édit de Nantes, comme ils l’appellent. Le roi confisque les biensdes protestants et les exile hors de France.

Dame Michon joignit ses mains sur sa poitrineet murmura :

– Ah ! si Rohan n’était pasHuguenot !…

– On dit, poursuivit Josselin, que Rohana été dénoncé comme protestant par un serviteur de sa propremaison.

– Alain Polduc ! interrompit lafemme de charge, pâle de honte et de colère.

– On dit enfin que, sans le comte deToulouse, les soldats du roi seraient déjà au château de Rohan.

– Sans le comte de Toulouse ! répétala femme de charge qui ouvrit de grands yeux, Rohan protégé par lecomte de Toulouse !… j’y suis ! Morvan de Saint-Maugonaura intercédé pour nous…

– L’enfant s’éveille et sourit au nom deson père, dit Josselin, qui prit dans le berceau une adorablepetite fille blanche et rose pour l’élever jusqu’à ses lèvres.

La petite fille, éveillée, souriait, en effet,et ses mains mignonnes se cramponnaient aux boucles brunes descheveux de Josselin.

– J’ai bercé sa mère il y a dix-huit ans,murmurait dame Michon ; mais le berceau de sa mère étaitentouré de dentelles et de fleurs…

– Sais-tu, se reprit-elle, tandis qu’unnuage d’inquiétude passait sur son front, ils ont encore demandéaujourd’hui où tu as pris cette enfant-là ?

– Laissez-les dire, ma mère.

– Mais si quelque jour Rohan lui-même tele demandait ?

Le visage de Josselin devint plus grave. Iltenait l’enfant contre son cœur. Malgré lui, son regard se levavers le ciel.

– Notre Valentine est une sainte,prononça-t-il tout bas ; un prêtre a béni son mariage, mais jementirais à Rohan pour la première fois de ma vie, si Rohan medemandait cela.

– Va, s’écria dame Michon qui lui tenditles bras, j’ai de l’orgueil quand je t’écoute, Josselin, mon fils,et je remercie Dieu d’être ta mère !

Il y eut silence pendant lequel on putentendre le galop lointain d’un cheval battant la mousse de laforêt. Josselin se dégagea des bras de sa mère et prêtal’oreille.

– C’est elle ! murmura-t-il.

– Ma mère, reprit-il tout haut, maîtreAlain Polduc a-t-il fait comme les autres : a-t-il demandéd’où me vient cet enfant ?

Dame Michon sembla interroger sessouvenirs ; puis elle répondit :

– Jamais :

– Alors, c’est qu’il a peut-être deviné,pensa Josselin. S’il a deviné, malheur à lui !

– La voilà ! s’écria dame Michon,qui s’était rapprochée de la fenêtre.

Un cheval, lancé à pleine course, sortit ducouvert et traversa la pelouse comme un tourbillon. Une jeunefille, admirablement belle, dont les cheveux en désordre flottaientau vent, sauta sur l’herbe ou plutôt tomba dans les bras deJosselin Guitan, qui s’était précipité dehors pour la recevoir. Lasueur perlait à ses tempes ; elle était pâle de fatigue ou defrayeur.

– Ouvre la porte du bord de l’eau,Josselin, dit-elle rapidement, et d’une voix altérée ; monmari me suit.

– En plein jour, notre demoiselle !se récria le jeune gars ; Saint-Maugon ! un gentilhommedu comte de Toulouse dans la maison de Rohan !

– Plût à Dieu que ce fût le comte deToulouse lui-même ! murmura Valentine dont les yeuxtrahissaient un véritable égarement ; ouvre la porte ethâte-toi, Josselin Guitan, si tu aimes ton maître !

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer