Les Mille et une nuits

XC NUIT.

Le lendemain avant le jour, Dinarzade réveillasa sœur, qui reprit ainsi son discours : « BedreddinHassan, continua le vizir Giafar, courut donc après Agib etl’eunuque, et les joignit avant qu’ils fussent arrivés à la portede la ville. L’eunuque, s’étant aperçu qu’il les suivait, en futextrêmement surpris : « Importun que vous êtes, luidit-il en colère, que demandez-vous ? – Mon bon ami, luirépondit Bedreddin, ne vous fâchez pas : j’ai hors de la villeune petite affaire dont je me suis souvenu, et à laquelle il fautque j’aille donner ordre. » Cette réponse n’apaisa pointl’eunuque, qui, se tournant vers Agib, lui dit : « Voilàce que vous m’avez attiré ; je l’avais bien prévu que je merepentirais de ma complaisance ; vous avez voulu entrer dansla boutique de cet homme ; je ne suis pas sage de vous l’avoirpermis. – Peut-être, dit Agib, a-t-il effectivement affaire hors dela ville, et les chemins sont libres pour tout le monde. » Endisant cela, ils continuèrent de marcher l’un et l’autre sansregarder derrière eux, jusqu’à ce qu’étant arrivés près des tentesdu vizir, ils se retournèrent pour voir si Bedreddin les suivaittoujours. Alors Agib, remarquant qu’il était à deux pas de lui,rougit et pâlit successivement selon les divers mouvements quil’agitaient. Il craignait que le vizir son aïeul ne vînt à savoirqu’il était entré dans la boutique d’un pâtissier et qu’il y avaitmangé. Dans cette crainte, ramassant une assez grosse pierre qui setrouva à ses pieds, il la lui jeta, le frappa au milieu du front etlui couvrit le visage de sang : après quoi, se mettant àcourir de toute sa force, il se sauva sous les tentes avecl’eunuque, qui dit à Bedreddin Hassan qu’il ne devait pas seplaindre de ce malheur qu’il avait mérité, et qu’il s’était attirélui-même.

« Bedreddin reprit le chemin de la villeen étanchant le sang de sa plaie avec son tablier, qu’il n’avaitpas ôté. « J’ai tort, disait-il en lui-même, d’avoir abandonnéma maison pour faire tant de peine à cet enfant, car il ne m’atraité de cette manière que parce qu’il a cru sans doute que jeméditais quelque dessein funeste contre lui. » Étant arrivéchez lui, il se fit panser, et se consola de cet accident enfaisant réflexion qu’il y avait sur la terre des gens encore plusmalheureux que lui. »

Le jour, qui paraissait, imposa silence à lasultane des Indes. Schahriar se leva en plaignant Bedreddin, etfort impatient de savoir la suite de cette histoire.

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