Une Française captive chez les Peaux Rouges – Chez les Sioux – Voyages, explorations, aventures -16

Chapitre 13LA CÉRÉMONIE DE LA PRISE DU BOUCLIER

 

Le lendemain, après conseil des guerriers,tenu sous la présidence du sachem, il fut décidé qu’il y auraitprises de boucliers.

Un certain nombre d’adolescents s’étantmontrés forts et hardis dans les fléchades de la veille, avaientdemandé à être reçus au nombre des braves.

Les guerriers désignèrent ceux qu’ilsjugeaient capables de l’être.

Aussitôt ils se préparèrent à prendre lebouclier.

Depuis longtemps chacun de ces aspirants apréparé la carcasse de son bouclier et mis en réserve les peaux debisons et les sabots nécessaires à cette fabrication de grandeimportance.

Les peaux sont prises sur le cou de l’animal,là où le cuir est le plus épais.

Une peau recouvre le bouclier toutentier ; une autre est taillée moins grande et quinze peaux sesuperposent ainsi.

La dernière n’est pas plus large qu’une piècede cent sous.

Sur la première peau, on étend une couchechaude de colle forte de sabot et par dessus la seconde peau, ainside suite jusqu’à la quinzième avec un glacis superficiel de colleforte bien égalisée, bien lisse, qui amalgame le tout.

On conçoit que ce bouclier, étant très bombé,les balles glissent sur lui.

Les Indiens ornent leurs boucliers de plumesd’aigle et ils y suspendent des ornements très coquets, trèsoriginaux et des sacs-médecine, amulettes que leur vendent leurssorciers.

C’est encore une ressemblance avec les sémitesde toute race.

En réalité, la cérémonie s’appelle :Le fumage du bouclier.

Comme une chasse aux bisons est pour lespostulants une occasion de se signaler, les villages voisins saventquel jour cette cérémonie aura lieu, et ils accourent.

La foule est nombreuse.

Elle est rassemblée autour d’un cercle tracé àterre avec un fer de lance.

Chez nous, cette démarcation serait bien viteviolée.

Rien de pareil chez les Indiens.

Point de bousculades. Point de poussées.

Tout le monde est calme.

On parle sans disputer jamais.

Toute querelle entraînerait sur-le-champ unduel mortel.

Une violence serait immédiatement punie demort par la foule.

Celle-ci attendait patiemment que les jeunesbraves eussent fait leur toilette de guerre.

Grosse affaire !

Les Indiens passent à se peindre le temps quis’écoule du lever du soleil à midi ; le postulant brave qui alongtemps médité sur les dessins et la peinture qu’il adoptera, lesdessine et les peint.

Toute sa vie il se peindra de même.

C’est à se peinture qu’on le reconnaîtra dansle sentier de la guerre.

C’est à sa peinture que le grand esprit lereconnaîtra après sa mort.

C’est à sa peinture, qu’admis dans lescélestes territoires de chasses, il sera reconnu par ses amis etses parents morts avant lui.

Aussi l’Indien est-il désolé s’il se sentmourir sans avoir eu le temps de se peindre.

Cependant, chaque aspirant, dans la nuit,avait creusé profondément en terre un foyer.

Au fond, du bois sec recouvert de bois vert etde mousses un peu humides.

Au-dessus, la première peau de bison tendue aumoyen de chevilles enfoncées dans le sol, autour du foyer trèscreux.

Sur la peau, au centre, un gros tas de colleforte de sabots fondus.

À midi, les jeunes gens sortirent des wigwamsen chantant.

Guerriers et braves les saluèrent enbrandissant lances et boucliers.

Tous étaient peints et armés en guerre, avecle manteau de cérémonie.

Les jeunes gens allumèrent les feux.

Alors, braves et guerriers formèrent uncercle, les boucliers se touchant et les lances couchées formantcomme une voûte d’armes.

Cela rappelle la voûte d’acier des cérémoniesfranc-maçonniques.

Or, Monteil, arrivant chez les sémitesmusulmans du lac Tchad, dut passer sous la voûte d’acierformée par les armes couchées au-dessus de sa tête ; encoreune preuve que les Indiens sont Sémites.

Aussitôt, commença une danse de guerre quiconsistait à tourner en cercle, les boucliers se touchant toujourset les pieds exécutant le pas du sentier de guerre.

Les danseurs chantent une évocation à l’espritdu feu.

Ils l’abjurent de rendre les boucliers trèsdurs et sans défauts.

Quand les boucliers sont terminés, lesguerriers et les braves défilent devant leurs nouveaux camarades etles saluent du tomahawk et des boucliers, salut rendu aussitôt.

C’est la fin de la cérémonie militaire, il nereste plus qu’à banqueter.

J’ai parlé de combats singuliers terminant lesquerelles ; ils ne sont pas très fréquents, mais dès qu’uneinjure a été prononcée, ils sont inévitables.

Les Sioux ont le point d’honneur trèssusceptible et il faut prendre garde de les irriter, car alors ilsvous provoquent.

Et il faut se battre.

Cette susceptibilité leur vient d’unepointilleuse vanité.

Ils sont en admiration devant leur proprepersonne.

À la vérité, leur corps est bien proportionné,les galbes ont d’harmonieux contours et les formes sontadmirables.

Tout Indien pourrait passer pour l’Apollon duBelvédère.

Peut-être doivent-ils cette rectitude à leurberceau.

La mère le porte droit derrière son dos, danscette position verticale, l’enfant tomberait ; on le suspendpar les bras, les reins et les genoux et de l’avis de Cattellincela influe en bien sur la formation du corps.

Pour mon compte, je ne le crois pas etj’attribue la beauté corporelle des Indiens à leur vie en plein airet à leurs sports.

Toujours est-il que l’Indien se trouvetellement beau, qu’il s’estime demi-dieu et qu’il entend qu’onrespecte cette demi-divinité.

Pourtant il reconnaît la supériorité du blanc,mais pas corporellement, les trappeurs excepté.

Mais les blancs lui semblent tous médecins,c’est-à-dire sorciers.

Il craint leur science.

Les papiers écrits lui semblent, par exemple,choses mystérieuses.

Un Indien tourmentera un blanc pour avoir untalisman contre la maladie, et si le blanc lui donne une vieillelettre ou écrit quelque chose sur une feuille blanche, l’Indien larecevra avec respect et la gardera toute sa vie.

Mlle de Pelhouër, souspeine de désobliger ses amis, dut tailler un roseau, s’en faire uneplume et écrire, avec l’encre fournie par une baie noire, destalismans sur des peaux d’agneau.

Mais que d’heureux elle fit.

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