Chapitre 13LA PISTE
Paddy et Petit-Jaguar, grands marcheurs devantl’Éternel, avaient coutume chaque jour de s’éloigner de la caravaneen prenant à droite avant la grande halte et à gauche après, dansle but de chasser, croyait-on.
Ils chassaient.
Ils rapportaient du gibier.
Mais ils avaient une arrière-pensée.
Paddy, aussitôt après le marché passé avec lesCorbeaux, avait dit à Petit-Jaguar :
– Les Corbeaux ne doutent pas que nos maîtresne soient riches.
» Ils nous attaqueront.
– Ils ont peur de nos fusils.
Paddy, judicieusement :
– En plaine, oui.
» Mais embusqués, non.
Et Petit-Jaguar secouant la tête,dit :
– Cinquante fusils au moins !
» Master Paddy, ils attaqueront.
– Nous saurons bien, s’ils en ont l’envie.
– Comment ?
– Ils gagneront, par un détour soit à droite,soit à gauche, les Roches-Roses.
– Oui ! oui !
» C’est là qu’ils s’embusqueront.
– Nous pousserons chaque jour desreconnaissances pour trouver leur piste.
– Et nous la trouverons.
– Ne parle de rien.
» Inutile d’inquiéter les dames.
Petit-Jaguar se mit un doigt sur les lèvrespour montrer qu’il se tairait.
Et voilà pourquoi les deux chasseurss’éloignaient systématiquement de la caravane.
Or, le quatrième jour, ils trouvèrent la pisteet la suivirent.
C’était un jeu pour eux.
Mais arrivés au pied des Roches-Roses, ilsn’avancèrent plus qu’avec une extrême prudence.
Un trappeur et un sauvage, en pareil cas,déploient des trésors de souplesse et de sagacité, il faut voirsans être vu.
Deux heures après, ayant fait à peine unelieue, ils arrivèrent au sommet des collines et ils virent unfeu.
Autour, des chevaux et des sauvages, ceux-cien train de manger.
Ils en savaient assez.