Scène VI
Clitandre, leGeôlier
Clitandre, enprison.
Dans ces funestes lieux, où la seuleinclémence
D’un rigoureux destin réduit moninnocence,
Je n’attends désormais du reste deshumains
Ni faveur, ni secours, si ce n’est par tesmains.
Le Geôlier
Je ne connais que trop où tend cepréambule.
Vous n’avez pas affaire à quelque hommecrédule :
Tous, dans cette prison, dont je porte lesclés,
Se disent comme vous du malheur accablés,
Et la justice à tous est injuste ; desorte
Que la pitié me doit leur faire ouvrir laporte ;
Mais je me tiens toujours ferme dans mondevoir :
Soyez coupable ou non, je n’en veux riensavoir ;
Le roi, quoi qu’il en soit, vous a mis en magarde.
Il me suffit ; le reste en rien ne meregarde.
Clitandre
Tu juges mes desseins autres qu’ils ne sontpas.
Je tiens l’éloignement pire que le trépas,
Et la terre n’a point de si douce province
Où le jour m’agréât loin des yeux de monprince.
Hélas ! si tu voulais l’envoyeravertir
Du péril dont sans lui je ne sauraissortir,
Ou qu’il lui fût porté de ma part unelettre,
De la sienne en ce cas je t’ose bienpromettre
Que son retour soudain des plus riches terend :
Que cet anneau t’en serve et d’arrhe et degarant :
Tends la main et l’esprit vers un bonheur siproche.
Le Geôlier
Monsieur, jusqu’à présent j’ai vécu sansreproche,
Et pour me suborner promesses ni présents
N’ont et n’auront jamais de charmessuffisants.
C’est de quoi je vous donne une entièreassurance :
Perdez-en le dessein avecquel’espérance ;
Et puisque vous dressez des pièges à mafoi,
Adieu, ce lieu devient trop dangereux pourmoi.